N° 110 - Avril 2023 - Transitions énergétique et numérique
La blockchain est-elle bonne pour le climat ?
Par Paul JOLIE
Ingénieur général des Mines, Conseil général de l’Économie
La blockchain publique est une technologie récente qui permet de créer de la confiance. Dépourvue d’une instance centralisée, la blockchain repose sur un réseau de pair-à-pair. L’endommagement ou la perte d’un noeud n’affectera pas le fonctionnement de l’ensemble du système. Avec ses propriétés d’inviolabilité, de traçabilité et de transparence, la blockchain permet de créer des services de notarisation dans le monde numérique, entre des acteurs qui ne se font pas a priori confiance.
Comme applications récentes utilisant la technologie blockchain, on recense les cryptomonnaies, avec le succès que l’on connaît pour deux d’entre elles, le Bitcoin et Ethereum. Or, entre 2018 et 2022, la quantité annuelle d’électricité consommée provenant des crypto-actifs mondiaux a augmenté de façon importante. En août 2022, les estimations publiées de la consommation mondiale totale d’électricité liée aux actifs cryptographiques situaient celle-ci entre 120 et 240 milliards de kilowattheures par an, des volumes qui dépassent la consommation annuelle totale d’électricité de pays comme l’Argentine ou l’Australie. Cela représente de 0,4 à 0,9 % de la consommation d’électricité mondiale annuelle et est comparable à la consommation d’électricité annuelle de tous les data centers dans le monde. Cette consommation est principalement due aux activités de minage (qui servent à établir un consensus entre les acteurs) recourant à la méthode dit de « Preuve de travail » (PoW), celle utilisée en particulier pour le Bitcoin.
En ce sens, la blockchain, technologie coeur du Bitcoin, est très contributrice aux émissions de gaz à effet de serre. Heureusement, il existe d’autres mécanismes de consensus bien moins consommateurs d’énergie, comme le mécanisme de « Preuve de participation » (PoS), qui est utilisé par Ethereum.
D’un autre côté, les nouveaux services qu’offre la blockchain sont particulièrement attractifs pour combattre le réchauffement climatique.
Ainsi, la blockchain peut faciliter les échanges entre les producteurs des énergies qui sont difficiles à stocker. Elle est également très adaptée pour aider à la création d’infrastructures décentralisées et distribuées, tout en garantissant l’origine de l’énergie grâce à ses propriétés de traçabilité, et renforçant ainsi la confiance des consommateurs dans la provenance réelle de l’énergie qu’ils consomment.
Ainsi, grâce à la blockchain, un processus de collaboration entre les États devrait devenir possible pour élaborer des normes de performance environnementale efficaces et fondées sur des preuves.
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