N° 110 - Avril 2023 - Transitions énergétique et numérique
Quid après les lois de Moore et de Koomey ?
Par Vincent MAZAURIC
Principal Scientist, Schneider Electric
Alexia AUFFÈVES
Directrice de recherche au CNRS, directrice du laboratoire international MajuLab du CNRS et cofondatrice de la Quantum Energy Initiative
Olivier EZRATTY
Consultant, auteur et cofondateur de la Quantum Energy Initiative
Et
Sergio CILIBERTO
Directeur de recherche au CNRS, École normale supérieure de Lyon
Pendant près de cinquante ans, les lois de Moore et de Koomey ont caractérisé les progrès continus des performances computationnelles des microprocesseurs, et accompagné – voire fondé – l’exceptionnelle croissance de l’industrie du semi-conducteur. Ainsi, les ordinateurs sont devenus de plus en plus petits et de moins en moins coûteux, tout en étant de plus en plus rapides et puissants, alimentant ainsi un perpétuel « effet rebond » du secteur des technologies de l’information et de la communication (TIC) qui n’est toujours pas arrivé à « satiété » ! Néanmoins, les fabricants de microprocesseurs se heurtent, depuis quelques années, aux limites physiques des hypothèses qui avaient permis de conjecturer la loi de Koomey. Si bien que l’avenir de l’industrie des semiconducteurs, et plus généralement du secteur des TIC, doit désormais se construire au-delà de la loi de Moore.
Dans le même temps, la massification actuelle a conduit à identifier le secteur des TIC comme étant largement intensif en énergie électrique, et donc fortement émissif en CO2, mais aussi extractif en matériaux critiques, alors qu’il était perçu comme « immatériel » il y a encore quelques années de cela. Pour envisager le rôle que peuvent jouer les technologies de l’information et de la communication en tant que réponse aux enjeux du développement durable, il faut donc relativiser le concept de performance computationnelle et revenir au lien entre information et énergie, qui a été énoncé, y compris dans le contexte digital, bien avant la loi de Moore. Les lois de Moore et de Koomey n’apparaissent alors que comme des « sentiers » conjoncturels menant à la maturité thermodynamique, qui est mesurée par une tendance vers la réversibilité. Afin que le « data deluge » ne se transforme pas en « mur de l’énergie », d’autres paradigmes devront être envisagés pour accompagner les futurs défis à relever par un secteur des technologies de l’information et de la communication engagé sur la voie de la soutenabilité.
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