Fils de Antoine Jacques Eugène ZEILLER (1810-1861 ; X 1828, ingénieur des ponts et chaussées) ; celui-ci était le fils de Jacques Nicolas ZEILLER, tailleur d'habits puis négociant, et de Barbe BAZAINE dont le frère, Pierre Dominique dit Adolphe BAZAINE (1786-1838 ; X 1803 ponts et chaussées), fut mis à disposition du Tsar par Napoléon, colonel employé aux fortifications d'Odessa, fut emprisonné en 1817 avant de devenir professeur d'analyse et de mécanique à Saint-Petersbourg puis lieutenant général du Tsar et directeur en chef des voies et communications (1824) avant de revenir en France en 1832 et d'être nommé inspecteur général des Ponts. Coté maternel, René Charles ZEILLER est le petit-fils de Charles GUIBAL.
René Charles ZEILLER se maria en 1877 à Mlle OLLÉ-LAPRUNE (décédée en 1920).
Son fils Jacques Marie Joseph Charles Zeiller (1878-1962), spécialiste de l'archéologie chrétienne, fut élu en 1940 à l'Académie des inscriptions et belles lettres, après avoir enseigné l'épigraphie latine ; il fut conseiller municipal de Saint-Michel sur Orge et Président général de la Société de Saint-Vincent de Paul.
Une fille de René Charles Zeiller a épousé en 1902 Charles Antoine Marie Roch de RUFFI de PONTEVES-GEVAUDAN.
René Zeiller a plusieurs petits-fils ou arrière-petits-fils polytechniciens, parmi lesquels Jean-René ZEILLER (1909-1982 ; X 1929), fils de Jacques. Sa petite-fille Jacqueline meurt en 1929. Une autre petite-fille, Marguerite-Marie ZEILLER, épouse André JOUVIN le 17/4/1937.
Parmi les gendres de René Zeiller, on compte aussi deux disparus de la 1re guerre mondiale : Maurice Masson, proclamé docteur ès-lettres après sa mort, et Francis Pellanne, ingénieur civil des Mines, époux de Jeanne Zeiller. Sa nièce Lucie ZEILLER meurt en 1916.
Résumé de la carrière professionnelle :
On lui doit des études sur la faune spéciale des bassins houillers de l'hémisphère austral. Il a développé des idées révolutionnaires sur l'origine des charbons.
René Charles ZEILLER a été un auteur scientifique à succès. Ses articles sont des modèles du genre, et les preuves scientifiques qu'il apporte sont indubitables.
A la fin de sa vie, il était atteint d'une maladie incurable, mais il est resté lucide et agréable avec son entourage jusqu'au bout.
Publié en 1928 dans le Bulletin de la Société Botanique de France
Parmi les savants continuateurs de l'œuvre d'Adolphe Brongniart, René Zeiller s'est placé au tout premier rang par l'importance de ses découvertes et par les nombreuses contributions qu'il apporta, pendant trente-cinq années, à l'histoire des végétaux fossiles.
La Société botanique de France a bien montré l'estime particulière qu'elle avait pour le savant et pour ses travaux, en l'appelant à deux reprises à l'honneur de la présidence. Même témoignage de haute considération lui vint de la part de la Société géologique de France, qu'il présida en 1893.
Son autorité et sa réputation étaient universellement reconnues : il fut membre de l'Académie des Sciences, commandeur de la Légion d'honneur, inspecteur général, puis président du Conseil général des Mines, professeur de paléontologie végétale à l'Ecole nationale des Mines, membre étranger de la Société linnéenne et de la Société géologique de Londres, et docteur honoraire de l'Université de Cambridge, etc.
René Zeiller naquit en 1847 à Nancy, d'une ancienne famille lorraine. A l'âge de 14 ans il perdit son père ; deux influences contribuèrent surtout à sa formation intellectuelle et morale et à son orientation dans la vie. Son grand-père maternel, Charles-François Guibal, magistrat, qui cultivait les diverses sciences, voire même la poésie à ses heures, lui inspira le goût de la géologie et de la botanique. Les jours de congé, le jeune lycéen suivait les excursions du botaniste Godron, souvent accompagné de son grand-père et d'Emile Gallé, le futur artiste. A sa mère, René Zeiller dut cette délicatesse de sentiment, cette aménité de caractère et cette parfaite courtoisie qui faisaient le charme de ses relations (Charles Guyot, "René Zeiller, ses origines et ses amitiés lorraines" (Bull. Académie de Stanislas, 4/11/1921)).
A l'âge de dix-huit ans, il est reçu à l'Ecole polytechnique, en sort le premier en 1867 et trois ans plus tard, quitte l'Ecole des Mines avec le titre d'ingénieur et toujours avec le n° 1. Dès 1878 il est attaché à la Commission des Annales des Mines comme secrétaire et remplit cette fonction pendant trente-deux ans. Des voix autorisées ont retracé les étapes de sa brillante et féconde carrière administrative et ont rendu hommage à son activité et à son dévouement à l'Administration des Travaux publics. En 1911, Zeiller devient vice-président du Conseil général des Mines (Cf. Douvillé (H.), René Zeiller, Notice nécrologique (Bull. Soc. géol. de France, 4e sér., XVII, p. 302, 1917)). (Walckenaer (Ch.), René Zeiller. Le fonctionnaire (Bull, mensuel de l'Assoc. amic. des Elèves de l'Ecole nationale supérieure des Mines, p. 25-30, janvier 1916).
Il avait épousé en 1877 la sœur cadette du philosophe Léon Ollé-Laprune, dont il partageait les convictions religieuses et les idées philosophiques et sociales. Son fils, M. Jacques Zeiller, est aujourd'hui professeur à l'Ecole des Hautes-Etudes ; deux de ses gendres, Maurice Masson, proclamé docteur ès-lettres après sa mort, et Francis Pellanne, ingénieur civil des Mines, sont tombés victimes du devoir pendant la grande guerre. Sous le coup de ces épreuves et après une longue et pénible maladie, chrétiennement supportée, René Zeiller est mort à Paris en novembre 1915.
L'ŒUVRE PALÉOBOTANIQUE (voir : G. Bonnier, Notice sur la vie et les travaux de René Zeiller, Revue génér. de Bot, XXVIII, p. 353-367, 1916, et XXIX, p. 5-13, 33-55, 73-88, 1917 et Travaux et Notices publiés par l'Académie d'Agriculture de France, I, 55 pages, 1917, Perrier (Ed.), in Comptes Rendus, CLXI, 2e semestre, p. 657, 29 nov. 1915.)
Tandis que Bernard Renault et C. Eg. Bertrand étudiaient la structure même des plantes houillères et que Cyrille Grand'Eury recueillait ses documents sur le terrain même et observait les plantes fossiles in situ, René Zeiller, dont le temps était en partie absorbé par des fonctions administratives, a surtout étudié les empreintes végétales dans le laboratoire de l'Ecole des Mines. Il ne s'est occupé que rarement, mais en maître, de recherches microscopiques, sur les Psaronius et sur le Lepidosirobus Browni, par exemple.
L'œuvre scientifique de Zeiller est considérable. D'après la liste bibliographique dressée par les soins de M. Jacques Zeiller, elle compte plus de 120 articles, notes ou mémoires originaux.
Parmi ces travaux, les uns ont contribué pour une large part à faire mieux connaître les plantes fossiles et leur place dans la classification ; les autres ont permis de préciser l'ordre de succession des flores et par voie de conséquence l'âge des divers terrains, d'établir des points de repère et des niveaux précieux pour le géologue stratigraphie ou l'ingénieur exploitant.
I. — Contributions à l'étude des plantes fossiles.
1. Muscinées. — Leur présence dans les schistes houillers a passé longtemps inaperçue ; peut-être à cause de leur délicatesse même, ou de leur habitat spécial, ont-elles été plus difficilement conservées ? c'est le mérite de Renault et Zeiller d'avoir signalé pour la première fois dans le terrain houiller une mousse apparentée aux Polytrichacées actuelles ; cette découverte a d'ailleurs été confirmée depuis par les recherches de M. Walton qui a observé des empreintes de mousses, voire même d'hépatiques, dans le houiller d'Angleterre.
2. Lycopodinées. — Les empreintes délicates des Lycopodinées herbacées, de même que celles des mousses, ont passé longtemps inaperçues dans les schistes houillers. L'observation de Zeiller a prouvé l'existence dans le stéphanien de végétaux herbacés, à feuilles dimorphes et hétérosporés, très voisins des Sélaginelles actuelles et qu'il a placés dans un genre nouveau Selaginellites.
3. Genre Sigillaria. — On a longtemps discuté la place des Sigillaires dans la classification. Dès 1839, A. Brongniart publiait une étude remarquable sur un Sigillaria d'Autun et concluait en plaçant ce genre parmi les Phanérogames, «les Dicotylédones gymnospermes », parce qu'il considérait comme caractéristique de ces dernières la présence de bois secondaire, dû à l'activité d'une assise cambiale. Il convient d'observer avec M. Scott qu'au moment où Brongniart émettait cette idée, on ne connaissait guère d'exemples de Cryptogames vasculaires actuelles munies de telles formations secondaires. Les paléobotanistes français (B. Renault, Grand'Eury), adoptèrent cette idée du maître ; d'autant que les recherches de Renault l'amenaient à constater la présence d'un double bois (centripète et centrifuge) dans les faisceaux foliaires des Sigillaires et à souligner ce caractère cycadéen chez ces dernières. Cependant, les savants de l'Ecole anglaise (Binney, Carruthers, Williamson) arrivaient, par des études très perspicaces, à une conclusion opposée : le genre Sigillaria est étroitement allié aux Lepidodendron.
René Zeiller se rallia d'abord à l'opinion de Brongniart et de Renault, en insistant cependant sur l'intérêt scientifique qui s'attachait à la recherche des organes reproducteurs des Sigillaires.
Dès 1884, il avait la bonne fortune de découvrir, dans un lot d'empreintes provenant des mines de l'Escarpelle (Nord), un strobile de Sigillaire (le Sigillariostrobus Tieghemi), dont le pédicelle muni de feuilles offrait les cicatrices caractéristiques du Sigillaria scutellata. R. Zeiller soulignait la nature cryptogamique de ces fructifications, leur attribution aux Lycopodinées et concluait à l'étroite parenté du genre Sigillaria et du g. Lepidodendron, en notant toutefois les différences de constitution des strobiles : les spores des Sigillariostrobus sont groupées dans la base même des bractées, tandis que chaque sporange de Lepidostrobus se distingue nettement de la bractée ou du sporophylle qui le porte.
Dans sa flore du bassin de Valenciennes, R. Zeiller a décrit plusieurs empreintes de ces Lepidostrobus. L'un des derniers mémoires qu'il a fait paraître a pour objet l'étude d'un Lepidostrobus, le L. Brownii Brongniart sp., recueilli par l'abbé Théron dans le Dinantien de la région de Cabrières. Ce strobile est silicifié et merveilleusement conservé. Zeiller a trouvé la ligule intacte sur les écailles supérieures incomplètement développées et il a remarqué tout particulièrement l'aspect original de certaines cellules des bractées, dont les parois paraissent ornées de petites papilles.
4. Sphénophyllées. — C'est un paléobotaniste français, Bernard Renault, qui fit connaître le premier la structure très spéciale des tiges de Sphenophyllum. De son côté, le savant anglais Williamson avait signalé et décrit, sous le nom de Bowmanites Dawsoni, un épi à structure conservée, dont l'axe ligneux ressemblait beaucoup à celui des tiges de Sphenophyllum.
René Zeiller a prouvé l'identité de ce Bowmanites Dawsoni (du moins de sa forme major) et des épis du Sphenophyllum cuneifolium Sternb. sp., provenant du westphalien du nord de la France. De plus, il a pu préciser des détails de structure en examinant les épis de plusieurs Sphenophyllum conservés à l'état d'empreintes. Comme le fait observer M. Scott, des découvertes récentes sont venues prouver le bien fondé de l'interprétation que R. Zeiller a donnée des sporangiophores des Sphénophyllées, considérés par lui comme des lobes ventraux des bractées. Quant à la place à donner aux Sphénophyllées dans la classification, R. Zeiller les a toujours considérées comme devant constituer une classe spéciale de Cryptogames vasculaires ; en 1893, il inclinait plutôt à les rapprocher de certaines Filicinées que des Equisétinées, avec lesquelles elles paraissent bien avoir des affinités marquées par l'intermédiaire du genre Cheirostrobus.
5. Filicinées. — R. Zeiller s'est toujours intéressé à l'étude des Fougères. Dès ses premières herborisations aux environs de Nancy et plus tard, quand le hasard des vacances le ramenait dans les Vosges, en Suisse, dans les Pyrénées, il aimait à rechercher les Fougères. En 1885, il fit paraître dans le bulletin de la Société une étude très documentée sur les Fougères recueillies par de Morgan dans la péninsule malaise ; il avait pour cette étude examiné dans le détail les Fougères des herbiers du Muséum. En tête de sa Description de la flore fossile du bassin houiller de Valenciennes et de la Flore fossile du bassin houiller et permien d'Autun, on trouve un excellent résumé des caractères des grandes familles de Fougères actuelles.
Matoniacées. — Zeiller souligne, dès 1885, les affinités du genre fossile Laccopteris avec les Matoniacées actuelles.
Diptéridacées. — Dans sa Flore fossile des gites de charbon du Tonkin (1903), il décrit et figure de splendides spécimens de frondes du genre Dictyophyllum, dont son élève, Fernand Pelourde, trop tôt enlevé à la science, a depuis lors fait connaître de nouvelles formes.
Dès 1897, dans sa Revue des travaux de paléontologie végétale, il faisait remarquer l'étroite parenté que présentent avec le genre Dipteris actuel le Protorhipis Buchii Andrae et divers Protorhipis des flores rhétienne ou liasique, dans lesquels de Saporta avait cru voir des Dicotylédones.
Schizéacées et Osmondacées. — Faut-il faire remonter l'origine de ces familles à l'époque carbonifère ? Les sporanges du genre Senftenbergia reconnus dès cette époque lointaine montrent bien la disposition, la forme, le mode de déhiscence des sporanges du genre actuel Schizaea, mais chez ce dernier l'anneau ne compte qu'une seule rangée de cellules à parois épaissies. Mais Zeiller a remarqué que certaines espèces du genre moderne Lygodium possèdent un anneau comportant une double rangée de cellules.
D'après ses observations et celles de M. Bower, le genre Kidstonia découvert dans le westphalien d'Héraclée (Asie-Mineure) se placerait à l'extrême limite des Osmondacées, aux confins de cette famille et des Schizéacées.
Marattiacées. — Des Fougères voisines des genres Danaea, Marattia, ont apparu dès le trias et se sont développées durant le rhétien. R. Zeiller en a signalé des représentants dans le trias de Madagascar et le rhétien du Tonkin.
Mais quand il s'agit des Marattiacées de l'époque carbonifère, il est évident que le nombre en a été singulièrement exagéré. Le savant paléobotaniste Kidston écrivait à ce sujet en 1923 : « Parmi les sporanges exannelés du carbonifère supérieur, autres que ceux du genre Asterotheca Presl. et peut-être du genre Ptychocarpus Weiss, qui peuvent appartenir aux Marattiacées, le genre Crossotheca Zeiller et le genre Zeilleria Kidston sont des Ptéridospermées. Les genres Renaultia Zeiller, Cyclotheca Kidston, Myriotheca Zeiller sont plus probablement des fructifications de Ptéridospermées que de Marattiacées, bien que leur véritable position reste à définir ».
R. Zeiller a précisé l'attribution au genre Asterotheca de plusieurs Pecopteris du stéphanien.
Psaroniées. — Dans sa Flore fossile du bassin houiller et permien d'Autun et d'Epinac (1890) il a donné l'analyse très approfondie et très détaillée des tiges et racines du genre Psaronius, qui sont si fréquents par places aux environs d'Autun. Il a proposé de classer les Psaronius d'après la disposition des feuilles et distingué les espèces polystiques ou à plusieurs séries de feuilles, les espèces à quatre séries ou tétrastiques, les Psaronius à deux séries ou distiques ; à ces derniers correspondent les empreintes de genre Megaphyton. R. Zeiller et Renault ont d'ailleurs établi que le genre Ptychopteris et le genre Caulopteris représentent les empreintes du cylindre ligneux central et de l'écorce externe du tronc de certains Psaronius polystiques.
6. Ptéridospermées. — L'une des découvertes les plus intéressantes de ces vingt-cinq dernières années, ce fut celle des « Fougères à graines », des Ptéridospermées.
Dès 1880, René Zeiller écrivait : « On trouve assez fréquemment dans le terrain houiller des graines de forme et de dimension très variables, qu'on ne peut rapporter avec certitude aux végétaux qui les ont portées. »
De plus, ces graines, d'après les études de Brongniart, sont bien des graines de Gymnospermes. « Celles-ci semblent même encore plus développées que ne l'indiquent les empreintes, à en juger par le nombre et la diversité considérable des graines qu'on doit leur rapporter ».
En 1888, dans sa Description de la Flore fossile du bassin houiller de Valenciennes, il note que « ni chez les Diplothmema, ni chez les Mariopteris, on n'a rencontré d'échantillons fertiles assez bien conservés pour être étudiés avec profit et qu'on ne saurait donc faire avec les Fougères actuelles aucun rapprochement sérieux ». Il ajoute : « Les Neuroptéridées n'ont avec les formes vivantes, même au point de vue de l'aspect extérieur, que des analogies très éloignées ».
« Rien ne serait moins surprenant que d'avoir à assigner un jour à ce groupe des Aléthoptéridées, des Odontoptéridées et Neuroptéridées, une place tout à fait à part dans cette grande classe des Fougères... ».
Après avoir rappelé les observations de Renault, il écrit en 1900, dans ses Eléments de paléobotanique : « Il n'est pas douteux que les Medullosa aient porté des frondes d'Alethopteris, de Neuropteris, d'Odontopteris, de Callipteris et la question se pose de savoir s'il faut les considérer réellement comme des Fougères ou bien comme des Cycadées aux frondes filicoïdes... Peut-être faudrait-il voir dans les Medullosa ou d'une façon générale dans les Cycadofilicinées l'un des chaînons dont on est porté à soupçonner l'existence entre les Fougères et les Cycadinées. »
Comme on le voit, Zeiller était admirablement préparé à admettre et appuyer de son autorité les belles découvertes qui ont été faites par Oliver et Scott, Kidston, Grand'Eury, David White, découvertes qu'il a fait connaître par des articles synthétiques, soit à l'Académie des Sciences (1904), soit dans la Revue générale des Sciences (1905). Il serait trop long de rappeler ici les fructifications diverses (g. Crossolheca, g. Potoniea, g. Plinthiotheea, etc..) qu'il a été le premier à décrire et qui sont aujourd'hui reconnues comme des organes mâles de Ptéridospermées.
7. Origine des Ptéridospermées. Idées sur l'évolution des plantes. — « Il semble bien que les Ptéridospermées aient été d'abord largement prépondérantes et que les Fougères qui, vraisemblablement, n'étaient pas totalement absentes, aient occupé un rang tout à fait subordonné, de telle sorte que l'idée d'une filiation directe, par laquelle les Ptéridospermées seraient issues des Fougères, paraît difficile à admettre. Sans doute ne faut-il pas songer à renverser le sens de l'évolution et faire descendre les Fougères des Ptéridospermées ; mais, ici comme dans d'autres cas, le lien semble manquer au moment où on croyait le saisir, et, si les affinités mutuelles de ces deux groupes de plantes sont indéniables, du moins ne donnent-elles le droit, en présence des données actuellement acquises, de conclure qu'à une probable communauté d'origine ». C'est en ces termes qu'il formule l'hypothèse qui paraît actuellement la plus plausible sur l'origine des Ptéridospermées.
Relativement à la question de l'origine des espèces il écrit en 1880 : « Je ne veux pas discuter ce problème dont la solution me paraît devoir échapper toujours à l'intelligence humaine, j'insiste seulement sur ce point que, si les diverses espèces d'un même genre et les divers genres d'un même groupe ont entre eux des affinités réelles, ils demeurent cependant nettement distincts et ne s'enchaînent point par une série graduelle de transformations... ».
Le paléobotaniste « se trouve tout à coup en présence de formes nouvelles, de types génériques non encore observés qui se différencient et se multiplient ensuite rapidement. Nous n'avons, en somme, aucune donnée positive sur la manière dont se sont constituées ces formes nouvelles, sur les conditions qui ont précédé leur élaboration. Ont-elles apparu brusquement ? Se sont-elles au contraire développées lentement par une série de transformations graduelles... ? Ce sont là des questions dont il est permis de douter que nous ayons jamais la solution, pour lesquelles tout au moins nous resterons longtemps encore dans le domaine de l'hypothèse ».
En 1907, dans un article sur les végétaux fossiles et leurs enchaînements, après avoir cité à l'appui de sa thèse les observations de Grand'Eury sur la flore carbonifère, il conclut : « toutes les observations concordent ainsi à nous montrer les espèces demeurées semblables à elles-mêmes pendant de longues périodes de temps et les formes voisines qui les remplacent à un moment donné apparaissant en quelque sorte tout à coup et sans transitions appréciables, tout en offrant entre elles des affinités assez évidentes pour que l'idée de relation de parenté s'impose à l'esprit ».
Pour Cyrille Grand'Eury « la permanence des espèces et les transitions rapides qui néanmoins les relient entre elles suggèrent l'idée que leurs mutations se sont opérées à la manière des métamorphoses ou peut-être même, en opposition à l'axiome que l'on sait, par sauts... ». Zeiller applique cette idée de mutation, ou plutôt de saltation, à des groupes d'ordre plus élevé que l'espèce, à des séries discontinues.
Quel que soit le jugement porté sur cette hypothèse, il est remarquable que deux de nos plus savants investigateurs des plantes fossiles l'aient adoptée.
II. — Etudes sur les flores successives.
L'étude comparée des flores doit avoir pour base la connaissance approfondie de ces flores et une solide érudition, conditions que nous trouvons réalisées chez le savant professeur de l'Ecole des Mines. Non content de contribuer lui-même pour une large part aux progrès de la palêobotanique, il se tenait au courant de tous les travaux qui paraissaient sur ce sujet et en donnait des comptes-rendus dans le Bulletin de la Société botanique, dans la Revue générale de Botanique ou dans le Botanisches Centralblatt.
Voici quelques-uns des principes qui l'ont guidé dans la détermination de l'âge des flores : « Il n'y a de vraiment caractéristiques que les associations d'espèces et il faut connaître l'ensemble de la flore pour arriver à fixer sûrement l'époque de formation d'une couche... Plus on veut descendre dans le détail pour la détermination des âges, plus il faut examiner de près la flore, comme la faune, des couches qu'on étudie, chercher à reconnaître la proportion quantitative et même le mode d'association des espèces ».
— Terrains primaires. — Quoique R. Zeiller se soit occupé incidemment des flores dévoniennes, il a surtout porté son attention sur les flores des terrains carbonifères et permien.
Dans les Végétaux fossiles du terrain houiller de la France, il décrit et figure les espèces les plus caractéristiques des étages d'ores et déjà reconnus par C. Grand'Eury.
En 1888 paraît l'importante Description de la Flore fossile du bassin houiller de Valenciennes, travail fondamental pour quiconque veut étudier les flores westphaliennes. Les lignes maîtresses en demeurent exactes, bien que le bassin houiller ait été reconnu de structure plus complexe qu'on ne l'admettait par M. Ch. Barrois et ses collaborateurs MM. P. Pruvost et P. Bertrand, qui ont mené de front l'analyse des faunes et l'étude des schistes à plantes.
Ajoutons de suite que, dès 1892, l'examen des empreintes du sondage de Douvres lui permettait de conclure à la présence en ce point de couches appartenant à la partie supérieure du houiller moyen.
L'Etude sur la flore fossile du bassin houiller d'Héraclée (Asie-Mineure) (1899) comprend la description d'une flore plus ancienne que celle du westphalien du nord de la France : la flore de l'étage d'Aladja-Agzi, homotaxique des couches d'Ostrau-Waldenburg du Culm supérieur ; on y trouve aussi la description de deux flores correspondant, d'une part, à la zone inférieure et à une partie de la zone moyenne du bassin de Valenciennes (Etages de Kilits et de Coslou), et, d'autre part, au wesphalien supérieur (étage de Caradons).
Sur les flores stéphano-permiennes, Zeiller a fait paraître d'importants mémoires : la première partie (Mousses et Fougères) de la Flore fossile des Etudes sur le terrain houiller de Commentry (1888) ; la première partie (Fougères) de la Flore fossile du bassin houiller et permien d'Autun et d'Epinac (1890) ; des Etudes sur la flore fossile des dépôts houillers et permiens des environs de Brive (1892) ; l'Etude sur la flore fossile du bassin houiller et permien de Blanzy et du Creusot (1906). On ne peut songer à analyser ici en détail ces beaux volumes. Zeiller y donne la description des nombreuses espèces stéphaniennes et permiennes de Pecopteris, Odontopteris, Neuropteris, Callipteris et Callipteridium, etc.. ; il constate que la flore permienne n'est que la continuation, très légèrement appauvrie, de la flore du houiller supérieur, à laquelle viennent s'ajouter quelques formes spécifiques ou quelques types génériques nouveaux (g. Callipteris).
— Flore à Glossopteris. — « Zeiller a considérablement étendu nos connaissances sur la flore à Glossopteris dans le sud du Brésil et de l'Afrique et a décrit quelques nouvelles formes du Lower Gondwana de l'Inde. Son article les Provinces botaniques à la fin des temps primaires, paru dans la Revue générale des Sciences (1897), est un modèle par la clarté de l'exposé et la façon très suggestive de présenter l'un des problèmes les plus captivants de géographie botanique et des migrations des plantes ». On ne pouvait mieux faire que de citer l'appréciation de M. Seward, le savant spécialiste dans l'étude des flores à Glossopteris.
— Flores permiennes de l'Angaride. — Si l'on désigne, à la suite du paléobotaniste russe M. Zalessky, sous ce nom d'Angaride, le continent qui s'étendait durant les temps primaires et secondaires au nord de la Thetys ou Méditerranée de Suess ; ici encore, dans l'étude des flores des couches à charbon des bassins de Kousnetzk, de la Toungouska, de la Petchora, que Schmalhausen considérait à tort comme jurassiques, R. Zeiller a émis des idées lumineuses, tant sur l'âge permien de ces flores que sur leurs affinités à la fois européennes et gondwaniennes ; idées qui ont été confirmées par les recherches de M. Zaîessky, qui a dédié à la mémoire du grand paléontologiste français son superbe atlas de la Flore paléozoïque de la série d'Angara.
— Flores secondaires. — Bien que Zeiller se soit surtout spécialisé dans l'étude des flores houillères et permiennes, la connaissance des flores secondaires lui était également familière, comme le prouvent sa remarquable synthèse sur Les progrès de la paléobotanique de l'ère des Gymnospermes et les considérations générales sur les flores triasiques, qui terminent le beau volume que son ami Fliche a consacré à l'étude de la Flore fossile du trias en Lorraine et en Franche-Comté (1910). Il s'est d'ailleurs particulièrement intéressé à la flore rhétienne et son mémoire sur la Flore fossile des gîtes de charbon du Tonkin (1903) fait autorité en la matière, tant par le nombre et la beauté des spécimens décrits que par les comparaisons que fait l'auteur avec les flores rhétiennes d'Europe ou les flores triasiques ou liasiques de l'Inde, de Perse et de Chine. Signalons aussi sa note, écrite en collaboration avec Fliche, sur Une florule portlandienne du Boulonnais (1904), comme particulièrement intéressante pour l'histoire des Séquoïnées.
Telle est dans ses grandes lignes l'œuvre de René Zeiller. Si nous essayons d'en saisir les traits caractéristiques, nous y trouvons, développées à un rare degré, les qualités qui font les œuvres scientifiques durables : une observation pénétrante, une grande sûreté de jugement, une profonde érudition, une parfaite tenue littéraire.
Son œuvre, comme sa vie d'une haute dignité morale, fut supérieurement ordonnée. R. Zeiller laisse à ses disciples, trop peu nombreux, l'exemple et le souvenir d'un Maître dévoué, toujours prêt à les faire bénéficier de sa longue expérience et à leur ouvrir les trésors de sa bibliothèque et de ses collections. On peut redire de lui ce qu'il écrivait à la mort du Marquis de Saporta : « Il laisse à tous le souvenir d'un Maître aussi aimé que respecté, en même temps que d'un des esprits les plus éminents dont ait à s'enorgueillir la paléontologie végétale » (Le Marquis G. de Saporta, sa vie et ses travaux (Bull. Soc. géol. de France, 3e série, XXIX, p. 220, 1896).
Publié dans le Bulletin de l'Amicale des anciens élèves de l'Ecole des Mines de Paris, janvier 1916.
L'Ecole des Mines a fait une perte irréparable en la personne d'un de ses plus anciens professeurs, René Zeiller, inspecteur général des mines, vice-président du Conseil Général des Mines, membre de l'Institut.
René Zeiller est né le 14 janvier 1847 à Nancy; après de brillantes études, d'abord au lycée Condorcet, puis à Nancy, il est reçu à l'École Polytechnique en 1865 et en sort premier. Classé dans le service des Mines, il quitte l'école d'application en 1870, est nommé ingénieur à la fin de cette année et est attaché en 1871 au secrétariat du Conseil Général des Mines. De son premier voyage d'instruction il avait rapporté des mémoires intéressants, jugés dignes d'être insérés dans les Annales des Mines, l'un sur le Siebengebirge et l'Eifel, l'autre sur la métallurgie (en collaboration avec son camarade Henry) ; de la même collaboration résulte un troisième mémoire sur les roches éruptives et les filons de Schemnitz, publié également dans les Annales des Mines à la suite d'un second voyage d'instruction effectué après la guerre en 1871.
En 1873, il était nommé à la résidence de Tours, mais il n'y restait que peu de temps et revenait définitivement à Paris en septembre 1874, comme attaché au contrôle du chemin de fer d'Orléans. Je laisserai de côté la suite de sa carrière administrative, mon camarade Walckenaer ayant bien voulu se charger de rendre compte de cette partie de l'œuvre de Zeiller ; dès ce moment il fit deux parts de sa vie, l'une consacrée à ses travaux administratifs et l'autre à ses recherches scientifiques : dans les deux, il acquit bientôt la même maîtrise.
J'arrivais presqu'en même temps que lui à Paris comme attaché aux collections de l'École, et depuis ce moment nous avons travaillé côte à côte dans le petit laboratoire consacré à la Paléontologie, dans une intimité qui ne s'est jamais démentie, ayant recours l'un à l'autre quand une difficulté se présentait pour la solution de laquelle il n'était pas nécessaire d'être exclusivement ou botaniste ou zoologiste. Pendant son séjour à l'École des Mines, Zeiller avait donné une attention particulière aux collections de plantes fossiles, déjà importantes à ce moment, et d'autant plus qu'il s'était déjà occupé de botanique. « En 1871, nous dit-il, il avait étendu aux plantes fossiles ses affections de jeune homme pour les plantes vivantes. » C'était une vocation qui se développait et prenait conscience d'elle-même. Son retour à Paris lui permet de pousser activement cette étude : MALLARD et FUCHS lui soumettent des empreintes qu'ils avaient recueillies dans le bassin houiller de la Ternera, au nord du Chili. Il les reconnaît comme jurassiques, mais la question était un peu délicate, car beaucoup d'ingénieurs croyaient encore qu'il n'y avait de vraie houille que dans le terrain houiller; aussi, se défiant encore de lui-même, il soumet les échantillons à l'autorité de SCHIMPER, qui du reste confirme entièrement ses déterminations.
Il arrivait assez rapidement à la conviction que les fossiles végétaux étaient tout aussi caractéristiques que les fossiles animaux et qu'il était possible de fixer l'âge d'une couche au moyen des empreintes qu'elle fournissait, mais à la condition de déterminer celles-ci avec précision. Ces déterminations devenaient alors d'une grande importance pour les ingénieurs; pour les faciliter, LAMÉ-FLEURY charge Zeiller d'ajouter au quatrième volume de l'explication de la carte géologique la description des principales espèces du terrain houiller en France (1878) ; elle est accompagnée d'un atlas de 17 planches. Ces travaux avaient attiré l'attention des exploitants : un ingénieur lorrain, THIRION, était à ce moment président du Conseil d'Administration de la Grand'Combe; on exploitait dans cette mine trois systèmes de couches, d'un côté celles de Champclauson et de Trescol, de l'autre celles de Sainte-Barbe. Ces deux groupes étaient séparés par un accident sur l'importance duquel les ingénieurs n'étaient pas d'accord; pour les uns, les couches de Sainte-Barbe devaient être rattachées directement au système de Trescol, pour les autres ces deux groupes étaient d'âge différent.
En 1877, GRAND'EURY, d'après quelques empreintes végétales recueillies à Sainte-Barbe, émettait l'hypothèse que ces couches étaient plus anciennes que les autres. La question méritait d'être étudiée à fond : Thirion avait déjà commencé à faire recueillir des empreintes à Sainte-Barbe ; il les fait envoyer à Zeiller, à l'École des Mines; dès 1881, celui-ci est en mesure d'annoncer que les couches de Sainte-Barbe sont notablement plus anciennes que celles de Trescol, les premières venant se placer tout à fait à la base du terrain houiller supérieur, et les autres au contraire au sommet de la formation. Dès lors il devenait possible de retrouver les couches de Sainte-Barbe au-dessous de Trescol, et sur ses indications un sondage de recherches est entrepris à Ricard ; jusqu'à 400 mètres il ne traverse que des couches stériles et il est arrêté à cette profondeur : la foi était encore un peu hésitante!
GRAND'EURY, déjà bien connu par ses travaux de paléo-botanique, est chargé de faire une étude complète du bassin; on sait comment il confirma les déterminations de Zeiller, et comment il arriva à évaluer à un minimum de 600 mètres l'épaisseur des stériles séparant les deux systèmes de couches. Le sondage est repris et, en 1885, de belles couches de houille sont rencontrées à 731 et à 778 mètres. La preuve était brillamment faite des grands services que l'étude des plantes fossiles était appelée à rendre aux exploitants de mines de houille.
Vingt-cinq ans plus tard, et dans des circonstances mémorables, Zeiller trouvait une nouvelle occasion d'appliquer avec succès ses connaissances si approfondies de la flore houillère. Suivant les prévisions de NICKLÈS, on venait de retrouver en Meurthe-et-Moselle le prolongement des couches houillères de Sarrebruck, mais il était indispensable de se rendre compte de la position exacte des couches rencontrées dans les différents sondages par rapport aux couches exploitées dans ce bassin : les carottes extraites sont soumises à Zeiller qui, après un examen minutieux, arrive à fixer rigoureusement les niveaux atteints, qui appartiennent tantôt au système inférieur des charbons gras, et tantôt à l'étage supérieur des charbons flambants. Il a pu même préciser l'allure des couches, et si malheureusement la richesse n'a pas répondu à ce qu'on était en droit d'attendre, du moins la paléobotanique a permis de tirer des sondages tout ce qu'ils étaient susceptibles de donner.
En 1878, Zeiller avait été chargé d'initier à ces problèmes les élèves de l'Ecole, et il inaugurait une sérié de conférences, qui, en 1882, devenaient un cours public. En 1881, il avait été attaché officiellement aux collections de l'École, qu'il arrivait rapidement à accroître, grâce à ses relations personnelles avec les ingénieurs et avec les exploitants.
En 1882, il avait eu à examiner des empreintes recueillies au Tonkin par FUCHS et SALADIN ; là encore, les explorateurs avaient retrouvé les formations, schistes et grès, qui accompagnent habituellement la houille, et FUCHS était bien persuadé d'avoir découvert le véritable terrain houiller, mais la botanique ne lui donne pas raison et Zeiller n'eut pas de peine à démontrer, par comparaison avec les couches de l'Inde, que le prétendu houiller du Tonkin venait en réalité se placer entre le trias et le lias, au grand désespoir de Fuchs toujours imbu du préjugé que la vraie houille n'existait que dans le terrain houiller; il est vrai que la houille était ici de l'anthracite.
Mettant à profit les matériaux accumulés par ses soins, Zeiller avait entrepris de décrire successivement la flore des divers bassins hnuillers; je citerai seulement, parmi les plus importantes de ces publications magistrales, la description du bassin houiller de Valenciennes (1888, 94 planches), du bassin de Commentry (1888, 42 planches), des bassins d'Autun et d'Epinac (1890, 28 planches), du bassin de Brive (1890, 15 planches), du bassin du Tonkin (1903-1909) etc. Je signalerai également ses études sur les bassins de Tête (région du Zambèze) en 1883, des Asturies (1884), d'Héraclée, des Basses-Pyrénées, du Brésil et du Transvaal (1895), ses observations sur la flore fossile de l'Altaï (1896), sur des plantes fossiles de la Chine (1900). Sa description des plantes fossiles du Lower Gondwana, dans l'Inde, a été publiée en 1902 dans Palaeontologica indica (7 planches). J'ajouterai des notes sur la flore houillère du Shansi (1901), sur celle du Koutsnetz (Sibérie) (1902), sur les plantes rhétiennes recueillies en Perse par M. de MORGAN (1905), sur le terrain houiller du Sud-Oranais (1908), sur une flore liasique à Madagascar (1911), etc.
De la comparaison de tous ces matériaux accumulés, quelques conséquences sont à signaler comme particulièrement importantes : ainsi, pour le Nord de la France, il a pu établir une classification rationnelle des couches exploitées d'après les caractères de la flore et montrer la correspondance de ces couches avec celles de l'Angleterre et de la Westphalie : il distingue une zone inférieure correspondant au faisceau maigre du Nord, une zone moyenne comprenant dans le Nord les faisceaux demi-gras d'Anzin et d'Aniche, le faisceau gras de Douai et celui du Sud du cran de retour, et dans le Pas-de-Calais le faisceau maigre d'Ostricourt, le charbon gras d'Auchy-aux-Bois et de Fléchinelle, les demi-gras ou quart gras de Courrières, Bully-Grenay, etc., et une partie des veines grasses de Ferfay, enfin une zone supérieure, zone des charbons gras ou flénus du Pas-de-Calais, s'étendant depuis Courcelles-lès-Lens et Dourges jusqu'à Marles et Ferfay et reparaissant dans le bassin de Valenciennes à Crespin-lès-Anzin.
Dans le bassin du Pas-de-Calais, le système inférieur manque sur le bord Sud, ce qui indique une transgression des couches supérieures; cette disposition avait été étendue au bassin du Nord, mais des matériaux plus complets réunis par les paléobotanistes de Lille ont démontré plus tard que cette lacune n'existait pas dans cette région, comme Zeiller n'a pas hésité à le reconnaître.
Un deuxième point très intéressant à signaler est relatif à la distribution régionale des plantes pendant ces anciennes périodes. La flore dévonienne et celle du culm semblaient être les mêmes partout, mais il n'en était plus de même à l'époque permo-carbonifére : sur tout l'hémisphère Nord, aux États-Unis et au Canada, comme en Europe et en Asie Mineure, jusqu'en Chine, l'ensemble de la flore est très uniforme ; on la retrouve avec les mêmes caractères dans l'Afrique australe et sur les bords du Zambèze. Au contraire, en Australie et dans le Sud de l'Asie, la flore est toute différente, c'est la flore à Glossopteris ; elle existe également à Bornéo, dans l'Inde, dans l'Amérique du Sud et en Afrique. Il y avait ainsi deux provinces botaniques différentes ; mais en étudiant des gisements placés sur leur limite séparative, Zeiller a pu établir la correspondance des deux flores ; il a reconnu qu'il y avait eu en réalité échange mutuel de formes végétales entre les deux provinces ; vers la fin du permien il y a eu immigration en Europe de quelques formes de la flore à Glossopteris ; mais l'extension rapide des types propres à la faune secondaire européenne a bientôt fait disparaître toute différence entre les deux régions et dès l'époque triasique l'uniformité est de nouveau presqu'entièrement rétablie.
Dans le domaine de la science pure, Zeiller a fait preuve des mêmes qualités de sagacité et d'originalité que dans les applications. On sait que les végétaux fossiles se rencontrent toujours à l'état fragmentaire et le paléobotaniste a à résoudre ce difficile problème de reconstituer le végétal complet avec son tronc et ses feuilles. Zeiller a particulièrement insisté sur l'importance des organes de fructification qui, seuls, permettent d'établir les véritables affinités des végétaux. On sait, en effet, que ceux-ci se divisent d'après ces caractères en Cryptogames et Phanérogames : les premiers portent des spores contenus dans des sortes de sacs appelés Sporanges ; mis en liberté, ils donnent naissance à une production éphémère, le prothalle, dans lequel se développent les organes mâle (anthérozoïde) et femelle (oogone). Dans les Phanérogames au contraire, la fécondation se fait sur la plante elle-même, qui porte alors des graines. Dans la nature actuelle, ces derniers se distinguent également parce que, seuls, ils présentent du bois proprement dit, ce que les botanistes appellent du bois secondaire centrifuge. Ce dernier caractère avait été d'abord étendu aux formes fossiles et BRONGNIART avait pour cette raison classé dans les Phanérogames certaines formes fossiles comme les Sigillaria. On avait cependant reconnu que cette règle présentait des exceptions; mais les déterminations faites sur des échantillons de conservation incomplète étaient contestées et la question donnait lieu aux discussions les plus vives : après de longues recherches, Zeiller put trouver des épis déterminables de Sigillaires : ils étaient garnis de spores et il était ainsi démontré définitivement que ces végétaux étaient des Cryptogames. Le bois secondaire n'était qu'un organe de soutien.
Une autre question dans laquelle intervenait également le bois secondaire aboutit à une solution toute différente : Zeiller avait étudié des troncs connus sous le nom de Medullosa et montré qu'ils étaient constitués comme les troncs de Fougères ; mais ils présentaient du bois secondaire bien développé et par ce caractère se rapprochaient des Cycadinés. D'autre part, GRAND'EURY avait fait voir que ces troncs correspondaient à des feuilles classées jusqu'alors parmi les fougères, Alethopteris, Nevropteris, Odontopteris, etc. ; on n'observait que des indices incomplets de fructification. Zeiller avait cependant figuré une pinnule d'Alethopteris ressemblant tout à fait à une feuille fertile de Fougère, et il se demandait s'il fallait voir dans ce groupe des Cycadinés à feuilles de Fougère ou des Fougères à bois de Cycadiné, de là le nom de Cycadofilicinés donné par POLONIÉ à ce groupe.
Une découverte inattendue fut faite quelques années plus tard par des botanistes anglais et renouvelée ensuite en France par GRAND'-EURY : les pseudo-fougères dont il vient d'être question portaient des graines (de là le nom de Ptéridospermées) et il fallait les classer dans les Phanérogames. En même temps on reconnaissait qu'il existait des formes mâles ayant les plus grandes analogies avec les feuilles fertiles des Fougères: c'était précisément le cas de l'Alethopteris figuré par Zeillisr. Celui-ci, dans une magistrale conférence faite à Fribourg en 1906 sur les « Enchaînements des végétaux fossiles », mit bien en évidence toute l'importance de cette découverte et montra comment avait dû se faire la transformation des Fougères Cryptogames en Phanérogames : d'abord séparation des sexes et distinction des spores en microspores mâles et microspores femelles, comme on l'observe dans un certain nombre de végétaux aussi bien vivants que fossiles ; puis réduction du nombre des macrospores dont une seule se développe dans la macrosporange et se fixe à ses parois, constituant ainsi un ovule. La fécondation se faisait ensuite sur place par des anthérozoïdes, comme on l'observe encore dans les Gincko. Il semble bien résulter de là que les Phanérogames ont eu des origines multiples et qu'ils constituent en réalité un groupe hétérogène.
Quelles étaient les idées de Zeiller sur l'évolution? La connaissance si approfondie qu'il avait des végétaux fossiles donne à cette question une importance particulière. On peut la résumer en quelques mots, en reproduisant les termes mêmes qu'il a employés :
Les liens de filiation entre les différentes formes sont, dit-il, assez accentués pour qu'on n'en puisse méconnaître la signification; mais les séries de formes sont discontinues et les formes de passage font défaut aussi bien entre les espèces qu'entre les groupes d'un ordre plus élevé. Les espèces demeurent semblables à elles-mêmes pendant de longues périodes de temps et les formes voisines qui les remplacent à un moment donné apparaissent en quelque sorte tout à coup et sans transitions appréciables, tout en offrant avec elles des affinités assez évidentes pour que l'idée de relation de parenté s'impose à notre esprit. C'est, en somme, comme Zeiller l'a dit lui-même, conforme à la théorie des mutations (il vaudrait mieux dire saltations) ou variations brusques de DE VRIES.
On voit quelle riche moisson de faits nouveaux et du plus haut intérêt, Zeiller a pu accumuler dans sa longue carrière scientifique, si malheureusemeut interrompue ; il restera de lui toute une série de travaux d'une importance capitale, travaux dont nous n'avons pu donner qu'une faible idée, et aussi la précieuse collection de végétaux fossile qu'il a pu réunir à l'École des Mines.
L'Académie des Sciences lui avait ouvert ses portes dès 1901, la section de botanique ayant tenu à honneur de reconnaître les progrès considérables dus à ses recherches persévérantes dans le domaine de la science pure ; il avait été choisi par ses collègues pour les représenter dans la commission administrative de l'Institut.
Je me suis borné dans cette courte notice à résumer le côté scientifique de la vie de notre camarade. Je n'ai pas besoin de rappeler les hautes qualités de l'homme privé, la droiture de son caractère, sa grande courtoisie et le charme de ses relations. Partout il a laissé d'unanimes regrets, mais ceux qui l'ont plus particulièrement connu savent seuls toute l'étendue du vide que sa disparition a laissé parmi nous.
René Zeiller. Le fonctionnaire.
Publié dans le Bulletin de l'Amicale des anciens élèves de l'Ecole des Mines de Paris, janvier 1916.
La haute figure intellectuelle et morale de René Zeiller n'est pas seulement celle d'un savant.
Ce maître de la Paléobotanique, tout en poursuivant son labeur scientifique si fécond pour la pratique minière et si efficace pour l'avancement de la philosophie naturelle, n'a cessé de se dévouer activement à l'Administration des Travaux publics, durant les quarante-cinq années d'une carrière qu'a couronnée, pour trop peu de temps, la dignité de vice-président, du Conseil général des Mines.
La tradition du corps des Mines, comme la nature des emplois qui lui sont dévolus, se prêtent à la réunion, dans le même homme, du savant et de l'ingénieur. Pour devenir de plus en plus difficile, comme contraire à la division du travail et à la complexité croissante des mécanismes administratifs, cette dualité n'en demeure pas moins l'un des titres d'honneur du Corps, une raison certaine des services qu'il a rendus au pays et le plus puissant peut-être des attraits qui lui amènent presque invariablement, chaque année, les premiers sortants de l'École Polytechnique.
La carrière administrative de Zeiller offre une remarquable continuité d'orientation. Soucieux d'accomplir dans la perfection toute tâche qu'il assume, il voit nettement où le portent ses talents, s'y attache par devoir et s'y fixe avec un rare succès.
C'est au milieu des tristesses de la guerre de 1870-71 que cette carrière s'inaugure. A l'issue de sa troisième année d'études d'application à l'École des Mines, d'où il sortait premier comme il y était entré, il avait entrepris un voyage d'instruction dont le programme comprenait la Styrie, la Carinthie, la Toscane, l'île d'Elbe et la Sicile, quand éclatent les événements. Il revient et court aux armes. Lieutenant des mineurs auxiliaires du génie, il prend part aux travaux de la défense de Paris, en particulier pour l'établissement de communications souterraines entre la place et les forts du Sud.
La paix revenue — cette paix qui laissait une si douloureuse blessure au cœur de la France, — Zeiller est attaché temporairement au secrétariat du Conseil général des Mines, comme ce fut longtemps l'usage pour les jeunes ingénieurs sortis de l'École des Mines avec le n° 1. Cette mission, si propre à inspirer le goût des grandes questions administratives, est pour Zeiller une première et féconde initiation aux travaux du Conseil.
Puis, suivant le développement normal de sa carrière, il est chargé d'un sous-arrondissement minéralogique, celui de Tours, et attaché en outre au contrôle de l'exploitation du chemin de fer d'Orléans. Dès ses débuts dans ce double service, ses chefs discernent en lui un ingénieur de grand avenir.
Lorsque, en 1874, des raisons de dévouement familial l'obligent à demander la résidence de Paris, c'est comme ingénieur du Contrôle du réseau d'Orléans qu'il y est nommé et, pendant dix ans, jusqu'à sa promotion au grade d'ingénieur en chef, il conservera cette fonction.
Mais, en même temps, il revenait aux travaux de l'Administration centrale et s'y consacrait de plus en plus.
Dès 1874, il était attaché à la Commission des Annales des Mines comme secrétaire suppléant, puis en 1877 comme secrétaire adjoint. L'année suivante, il en devenait secrétaire : il le fut pendant trente-deux ans. Tous les auteurs qui ont, durant cette longue période, donné des mémoires aux Annales, savent avec, quel zèle et quelle sagacité il suscitait les collaborations, quel discernement il apportait à l'examen des manuscrits, avec quelle fermeté toujours aimable il veillait à l'exactitude de la publication.
L'établissement des statistiques est une tâche des plus ingrates, mais non des moins utiles. C'est sur les colonnes des chiffres officiels que se bâtissent les théories économiques et que devraient s'appuyer toujours les lois qui régissent l'industrie. L'esprit de méthode et de dévouement de Zeiller faisait de lui un collaborateur précieux pour ce genre de travaux. A partir de 1887. il est membre de la Commission chargée de la statistique de l'industrie minérale et des appareils à vapeur.
C'est presque aussitôt après, en 1888, qu'il prend la plume de secrétaire au Conseil général des Mines. Là, il apportait, avec une parfaite connaissance des principes et des textes du droit minier, avec une fidélité de mémoire qui environnait chaque affaire de tout le cortège des précédents, un incomparable talent de rédaction prompte, élégante et nuancée. Les membres de l'assemblée étaient sûrs de trouver, dans les procès-verbaux des séances, leur pensée non seulement traduite avec fidélité, mais clarifiée et mise en lumière et ils n'appréciaient pas moins la merveilleuse facilité avec laquelle le secrétaire libellait les conclusions en séance aussitôt après la discussion de chaque affaire, leur permettant ainsi de passer à la suivante en tout repos d'esprit.
Pendant les vingt-deux ans que Zeiller resta secrétaire du Conseil, les vice-présidents furent successivement : MM. Linder (jusqu'en 1899), Vicaire (1899-1900), Haton de la Goupillière (1901-1903), Aguillon (officiellement à partir de 1909). Outre la longue suite des procès-verbaux de séances et des avis motivés, qui sont souvent l'aboutissement de tout un travail préparatoire, l'œuvre de Zeiller comprend des rapports particuliers sur une foule de sujets : examen d'une proposition de loi relative à l'organisation du Service des Mines (1890), revision du cahier des charges des concessions (1891), conditions du travail des enfants dans les mines, minières et carrières (1893), conditions de la mise en adjudication des mines inexploitées (1893), application aux délégués mineurs de la loi sur les caisses de secours et de retraites (1895), amélioration des retraites des ouvriers mineurs (1904), application aux exploitations minérales de la loi du 13 juillet 1906 sur le repos hebdomadaire, etc. Il fait partie, soit comme simple membre, soit comme rapporteur, de nombreuses commissions instituées au sein du Conseil général des Mines pour l'étude de questions d'ordre général : règlement sur les caisses de secours et de retraites des ouvriers mineurs (1894), régime des exploitations de phosphates en Algérie (1895), régime des mines en Nouvelle-Calédonie (1895), décret relatif aux congés renouvelables des ingénieurs (1896), application de la loi sur les retraites des ouvriers mineurs (1901), cahier des charges et instruction pour l'établissement des chemins de fer miniers (1902), ankylostomiase (1903). La grosse question de la concession des mines de fer et métaux connexes du Djebel Ouenza est rapportée par lui devant le Conseil en 1901 ; trois ans plus tard, il est rapporteur d'une commission chargée d'étudier une demande en réunion de la minière à la mine et diverses autres questions touchant l'exploitation des gisements de l'Ouenza.
De 1908 à 1910, des rapports particulièrement importants, présentés au nom du Conseil général des Mines, portent, en même temps que la signature de M. le vice-président AGUILLON, le contreseing du secrétaire, comme pour marquer leur intime collaboration. Ainsi en est-il pour les rapports sur le projet de loi minière de 1908, sur le projet de statut des fonctionnaires (1909), sur la procédure des réunions de concessions (1909), etc.
On devine quelle admirable richesse d'érudition et de doctrine Zeiller avait amassée, lorsque, après un court passage dans les fonctions d'inspecteur général de la division du Sud-Est, il fut appelé à son tour, en 1911, à la vice-présidence du Conseil.
Les circonstances rendaient cette haute mission particulièrement délicate.
Quand, en 1908 et en 1910, le Conseil avait envisagé une refonte de la loi minière, le projet comportait une innovation fiscale, très justement destinée à imposer une contribution plus large à ceux des exploitants qui réaliseraient de gros bénéfices. Le texte proposé superposait aux anciennes redevances, l'une fixe, l'autre proportionnelle au revenu net de l'exploitation, un impôt complémentaire sur l'extra-benéfice, c'est-à-dire sur la partie du revenu net dépassant un certain taux du capital d'établissement. Le Gouvernement avait promis de ne plus instituer de concessions avant que cette réforme fût réalisée. Mais, la discussion du projet de loi se faisant attendre, les demandes de concessions s'accumulaient en une lamentable pile et il y avait urgence à sortir de cette expectative, notamment au point de vue du développement des mines de fer. La question était de savoir sous quelle forme, en l'état présent de la loi, l'on pouvait admettre que fussent assurées, en cas d'extra-bénéfice, des contributions à un fonds destiné tant aux études de l'Administration des Mines qu'aux institutions de prévoyance en faveur des ouvriers.
Cette question épineuse souleva des débats que le président sut diriger avec un scrupuleux souci d'impartialité, une parfaite déférence envers les opinions, une attention constante à rappeler les principes de l'équité et du droit.
En même temps que vice-président du Conseil général des Mines, Zeiller était devenu président de la Commission centrale des machines à vapeur : réunion de spécialistes dont la mission, toute technique, est de rechercher dans l'étude des accidents de chaudières et de récipients à vapeur les moyens d'augmenter la sécurité de l'emploi de ces appareils. Pour cette œuvre, les membres et en particulier les rapporteurs de la Commission trouvaient dans leur président un guide sûr, dont la critique scientifique n'était jamais en défaut et dont la vue claire dégageait de chaque discussion sa conclusion directe et pratique.
Là ne se bornaient pas les devoirs auxquels faisait face Zeiller, devenu le chef du Corps des Mines. Non seulement il avait à donner les soins de sa bienveillante équité aux propositions concernant le personnel, mais il présidait à peu près toutes les Commissions greffées sur l'organisation centrale du Service : Commission des Annales, Commission centrale de l'hygiène dans les mines, Commission de statistique.
Dans ce résumé des services de cette longue et belle carrière, je laisse bien des lacunes. Je ne parle pas de la collaboration de Zeiller à l'Administration des Colonies comme membre du Comité des Travaux publics. Je laisse de côté tout ce qui est relatif à sa vocation de naturaliste et de géologue. Et cependant c'étaient aussi des missions administratives, ces nombreuses études de topographies souterraines (bassins houillers du Nord et du Pas-de-Calais, d'Epinac et d'Autun, de Blanzy et du Creusot, de la Corrèze, du Tonkin), et cet enseignement de la paléontologie végétale, magistralement donné à l'École supérieure des Mines pendant plus d'un quart de siècle.
C'est au milieu de tous ces travaux qu'une souffrance physique, progressivement dégénérée en une maladie grave puis implacable, vint ajouter à l'honneur d'une vie si utilement remplie l'héroïsme d'un dévouement professionnel qui parvenait à faire taire la douleur. Quel magnifique exemple d'énergie a donné Zeiller à ses collègues du Conseil, dans ces séances où une crispation du visage, de temps en temps mal réprimée, révélait seule la torture du corps, tandis que l'âme restait maîtresse d'elle-même et que la pensée se poursuivait sans un instant de défaillance.
Tout concourait à rendre émouvante la fin de cette carrière commencée en 1871 et qui se terminait parmi les vicissitudes sanglantes de la nouvelle guerre. Fils de la terre lorraine, René Zeiller quittait ce monde avant d'avoir vu se lever le jour de la victoire définitive. Si son espérance patriotique demeura inébranlable, la résistance physique qui restait au malade subissait l'assaut des inquiétudes du père de famille. Mais Zeiller était de ceux qui regardent en haut et y trouvent le secret de la vaillance du cœur. Il savait laisser les siens noblement soutenus pari la profonde foi dont il était animé lui-même et rien n'a égalé la sérénité chrétienne de ses derniers moments.