Polytechnique (promotion 1856, entré et sorti major), Ecole des Mines de Paris (promotion 1858). Corps des mines.
Fils de Joseph Marie Antoine VICAIRE, notaire, et de Gabrielle Francoise Clémentine COZON.
Epouse Marie Thérèse Joséphine Marguerite ROGER en 1867 (morte le 27/1/1940). Père de 9 enfants dont 3 polytechniciens :
Citation de Louis Aguillon (1927) : Vicaire enseigna, avec un soin également appliqué, la métallurgie à l'École des mines de Saint-Étienne, les chemins de fer à celle de Paris, et fit une suppléance de mécanique céleste au Collège de France.
Publié dans Annales des Mines, 9 e série tome 20, 1901.
M. l'Inspecteur général Eugène Vicaire s'était vu forcé par une maladie cruelle de résigner, quelques mois avant sa mort, les fonctions de Vice-Président du Conseil général des Mines qu'il occupait avec une si haute distinction.
La belle carrière qui s'achevait ainsi, dont les lignes qui suivent essaieront de donner une idée d'ensemble, répondait aux promesses d'un début exceptionnellement brillant. Né le 28 avril l931, à Ambérieu-en-Bugey, Eugène Vicaire, après de solides études poursuivies d'abord au Lycée de Lyon, puis au Collège Sainte-Barbe, à Paris, entra à l'Ecole Polytechnique en 1856, c'est-à-dire âgé seulement de dix-sept ans, le premier de sa promotion, pour en sortir deux ans après, également le premier, dans le Corps des Mines.
L'universalité des aptitudes qui, dès cette époque, se manifestait chez le jeune étudiant devait se continuer dans tout le reste de sa carrière ; et nul, à ce point de vue. n'a mieux mérité de se parer du titre de "polytechnicien". Egalement versé dans les sciences physiques et mathématiques, non moins soucieux du perfectionnement de la théorie que du progrès des applications, Vicaire est, on peut le dire, resté constamment fidèle à son origine, et c'est très légitimement que la grande Ecole où il s'est formé peut tout particulièrement le revendiquer comme sien.
A sa sortie de l'Ecole des Mines, Eugène Vicaire fut chargé, le 1er mars 1862, du sous-arrondissement minéralogique de Saint-Étienne, et, dès le 10 octobre de la même année, il se voyait attribuer la chaire de Chimie et de Métallurgie à l'Ecole des Mines de Saint-Étienne.
Il conserva cette situation jusqu'au 1er octobre 1875, date à laquelle il vint à Paris en qualité d'ingénieur chargé du contrôle de l'exploitation du premier arrondissement du réseau du Nord. Secrétaire adjoint du Comité de l'exploitation technique des chemins de fer au Ministère des Travaux Publics, le 25 juillet 1879, il en devint membre et secrétaire titulaire le 16 novembre 1883. A partir du jour où il vint y siéger, c'est dans les travaux fort importants de ce Comité que Vicaire puisa le principal aliment de son activité, sans toutefois jamais se détourner des éludes de pure théorie.
Pourvu d'ailleurs, depuis le 31 octobre 1879, du cours de chemins de fer à l'Ecole des mines, il mit à profit la compétence spéciale qu'il avait acquise en ces matières, par ses fonctions mêmes, pour donner à cette branche de l'enseignement de la grande Ecole un développement en rapport avec l'importance qu'a prise dans le monde l'industrie des transports par voies ferrées.
Ce précieux enseignement ne sera d'ailleurs pas perdu pour le public très nombreux qu'il est en mesure d'intéresser, grâce à la rédaction qu'en a faite l'auteur lui-même avec la collaboration d'un jeune camarade, M. l'ingénieur des Mines Maison, et qui, publiée en autographie par l'Ecole des Mines, prendra quelque jour, il faut le souhaiter, la forme d'un livre.
Nommé ingénieur en chef le 10 juillet 1881, il fut attaché en cette qualité, le 18 mars 1888, an contrôle de l'exploitation technique du réseau d'Orléans où il resta jusqu'au 1er août 1894, date de sa promotion au grade d'Inspecteur général.
Entre temps, il avait professé la Mécanique à l'Institut catholique, de Paris, et suppléé Serret dans la chaire de Mécanique céleste du Collège de France (1883-85), preuve nouvelle de la diversité d'aptitudes qui lui permettait de mener de front le travail absorbant exigé par d'importantes fonctions administratives avec la recherche purement scientifique.
Eugène Vicaire se dépensait encore dans de nombreuses commissions chargées d'études spéciales et où, presque toujours, sa vaste compétence lui faisait attribuer les fonctions de rapporteur.
Elevé, comme Inspecteur général, à la première classe de son grade le 1er novembre 1898. il était, peu de temps après, appelé à la présidence du Conseil général des Mines, à laquelle il joignait celle de la Commission centrale des machines à vapeur.
Officier de la Légion d'honneur depuis le 13 juillet 1898, il fut successivement investi des fonctions présidentielles dans diverses sociétés savantes auxquelles il appartenait : en 1892, à la Société mathématique de France ; en 1895-96, à la Société scientifique de Bruxelles; l'année dernière encore, à la Société philomathique de Paris. Et, si la mort n'était venue l'enlever prématurément à l'estime de ses collègues, il aurait eu le rare honneur, préparé par les intentions du Conseil, de s'asseoir pour la seconde fois dans le fauteuil présidentiel de la Société mathématique de France.
Les dons élevés de l'esprit, les facultés puissantes d'assimilation et de travail s'alliaient chez Vicaire en une heureuse harmonie aux plus solides qualités morales. Fermement attaché à la foi catholique, il donna aux siens, dans les douloureuses épreuves qui ont attristé ses dernières années et jusque dans les horribles souffrances qui ont précédé sa fin, le haut exemple d'une résignation vraiment chrétienne.
Du mariage qui l'avait uni, en novembre, 1867, à Mlle Roger, neuf enfants étaient nés : cinq garçons et quatre filles. Trois de ses fils, suivant la voie qu'il leur avait tracée, ont passé par l'Ecole Polytechnique, où ils ont soutenu la brillante réputation qui s'était attachée au nom de leur père: l'un d'eux est sorti comme lui dans les Mines ; les deux autres, dans les Ponts et Chaussées. Mais l'un de ceux-ci, son fils Paul, de même que son fils Henri, qui était entré au Séminaire d'Issy, lui ont été ravis à la fleur de l'âge, plongeant son âme dans une tristesse qui ne devait plus le quitter et n'a pas peu contribué à l'altération profonde de sa santé. Une de ses filles avait dit adieu au monde pour entrer au Carmel.
C'est à l'automne de 1899, quelques mois après la mort de son fils Paul, qu'Eugène Vicaire ressentit les premières atteintes du mal qui devait l'emporter. Une atrophie progressive des nerfs le priva d'abord de la parole, puis de l'usage de ses mains. Devenu incapable, vers février 1900, de parler dans un amphithéâtre, il eut encore l'énergie de faire passer les examens qui, au printemps, terminent l'année scolaire à l'Ecole des Mines. En dépit de la difficulté qu'il éprouvait à se faire comprendre et de l'impossibilité où il était d'écrire autrement qu'à l'aide d'une machine, il continua de remplir ses fonctions de président du Conseil général des Mines et à la Commission centrale des machines à vapeur jusqu'aux vacances de 1900, et d'assurer régulièrement l'expédition des affaires courantes jusqu'au mois d'octobre de la même année. A ce moment, terrassé par le mal terrible dont les soins les plus dévoués et les plus attentifs ne parvenaient pas à enrayer les progrès, il dut définitivement renoncer à tout travail et attendre, en pleine possession de son intelligence et soutenu seulement par l'espérance qu'il puisait dans sa foi de chrétien, l'heure suprême qui sonna pour lui le 18 janvier 1901.
Les sujets de recherche scientifique qui ont successivement fixé son attention ont été d'essence très diverse.
A plusieurs reprises, c'est vers la Mécanique rationnelle que ses regards se sont tournés. Un mémoire étendu Sur les propriétés communes à toutes les courbes qui remplissent une certaine condition de minimum ou de maximum, présenté en 1888 à l'Académie des Sciences, et inséré en 1892, sur le rapport de M. Camille Jordan, dans le Recueil des savants étrangers, contient une étude approfondie des propriétés communes aux courbes pour lesquelles, le long d'un arc quelconque, l'intégrale SOMME f (x,y,z) ds a sa variation nulle.
A cette condition très générale se ramènent diverses déterminations d'ordre assez divers : dans le domaine de la Géométrie, la courbe méridienne de la surface de révolution minimum, les courbes dont le moment d'inertie par rapport à un point, à une droite, ou à un plan, est minimum ; dans le domaine de la Statique, la figure d'équilibre d'un fil soumis à une fonction de forces ; dans le domaine de la Dynamique, le mouvement, sous l'action d'une fonction de forces, d'un point libre ou assujetti à se mouvoir sur une courbe sans frottement. Pour tous ces problèmes, et pour d'autres encore, la méthode de Vicaire fournit des solutions d'une remarquable élégance.
Alors que la théorie des petites oscillations n'avait été, avant lui, envisagée que dans le cas où, aux forces constitutives qui se détruisent dans la position d'équilibre, ne viennent s'ajouter que de petites forces constantes, Vicaire a abordé l'étude du cas où l'on applique de petites forces quelconques, et est parvenu à des résultats intéressants qui, dans le cas particulier où ces forces sont périodiques, peuvent se résumer ainsi : Chaque force perturbatrice introduit une oscillation simple dont la période est celle de la force et dont l'amplitude est déterminée pour chaque point, indépendamment des données initiales du mouvement.
Il tire de là, relativement à la concomitance des oscillations, d'importantes conséquences qui donnent la clef de certaines particularités du mouvement des locomotives, ainsi que l'ont confirmé depuis lors les études de M. l'ingénieur des Mines Nadal sur la stabilité de ces machines. Cette théorie a d'ailleurs été introduite par M. Appell dans son magistral Traité de Mécanique rationnelle (t. II, p. 368).
La Mécanique céleste a aussi, à diverses reprises, captivé l'attention de Vicaire, qui s'est tout d'abord portée sur le fondement même de cette branche de la science, la loi de l'attraction newtonienne. Ayant remarqué que la proportionnalité de l'attraction aux masses n'a jamais été constatée que dans des conditions très particulières, alors que la masse sur laquelle a porté l'observation est à peu près négligeable par rapport à la masse attirante, il en était venu à ne regarder cette loi que comme approchée et avait étudié la modification qui s'introduisait dans les équations de la Mécanique céleste lorsqu'on supposait qu'elle ne se réduisait approximativement à la proportionnalité que dans le cas où l'une des deux masses en présence devenait extrêmement petite par rapport à l'autre. Il espérait déduire de sa théorie l'explication de certaines anomalies rencontrées par Le Verrier dans la détermination des masses planétaires suivant la perturbation considérée. Mais la nécessité de se consacrer à des travaux plus urgents ne lui a pas permis de mener à bonne fin cette recherche, à laquelle il se proposait de revenir s'il lui avait été donné de jouir des loisirs de la retraite.
A un point de vue plus pratique, il a introduit un utile perfectionnement dans le calcul de l'influence des perturbations dans la détermination des orbites en obtenant directement l'altération des éléments en fonction de la force perturbatrice prise à l'époque donnée. Les formules qu'il a établies se prêtent très commodément au calcul de l'orbite rectifiée lorsqu'on applique la méthode de Laplace, développée et recommandée par Yvon Villarceau.
Une équation rencontrée au cours de l'étude précédente l'a, en outre, conduit à une démonstration très simple d'un théorème important de Lambert sur le sens de la concavité par rapport au Soleil de la trajectoire apparente d'un astre.
L'Astronomie physique ne lui a pas non plus été étrangère, particulièrement dans la partie où elle traite du Soleil. Sur la température de la surface de cet astre, sur sa constitution physique, sur l'explication de ses taches, il a, dans une série de note, émis nombre d'idées originales qui ont été pour lui l'occasion de diverses polémiques, toujours soutenues avec la plus parfaite courtoisie. En ce qui concerne la température de la surface solaire, il s'est trouvé en désaccord avec le P. Secchi. En substituant à la loi proportionnelle de rayonnement posée par Newton, la loi exponentielle de Dulong et Petit, il arrive à conclure que cette température, bien loin d'atteindre le chiffre énorme que lui assignait le savant astronome romain, serait comparable à celle de nos flammes. Cotte conclusion, qui réunissait de prime abord les adhésions d'Henri Sainte-Claire Deville, d'Edmond Becquerel et de Fizeau, s'est trouvée depuis lors confirmée par les travaux de Violle, de Rossetti et de Le Chatelier.
Pour ce qui est de la constitution physique du Soleil, Vicaire a cru devoir revenir à la théorie du noyau intérieur relativement froid et obscur, qu'avaient adoptée Wilson, Herschel et Arago, et s'est efforcé, dans cette hypothèse, non seulement de donner l'explication de toutes les apparences observées dans le Soleil, mais encore de faire ressortir les vérifications offertes par l'histoire de la Terre d'après les vues géogéniques de H. de la Bèche, d'Elie de Beaumont et de Daubrée. Ajoutons que, sur ce terrain, Vicaire a rencontré plusieurs contradicteurs, parmi lesquels on doit surtout citer M. Paye.
Sur les sujets où ses méditations l'avaient amené à des idées personnelles. Vicaire ne fuyait d'ailleurs pas la polémique. Il l'a prouvé par ses incursions dans le domaine de la Philosophie des sciences, domaine particulièrement propice à la controverse. On n'a pas oublié notamment les lances qu'il a rompues en faveur de la thèse de la réalité de l'espace et de la nécessité du mouvement absolu. Il se refusait, eu outre, à suivre le courant, de plus en plus accentué il faut le dire, qui porte les hommes de science a ne voir dans les hypothèses physiques qu'une présentation symbolique des faits observés, ainsi que le fait ressortir de façon si frappante M. Duhem dans une suite de remarquables articles publiés par la Revue des questions scientifiques, et s'en tenait pour sa part à l'ancienne manière de voir qui leur attribuait une valeur objective.
En dehors des travaux qui viennent d'être rappelés et qui peuvent être considérés comme purement spéculatifs, Vicaire en a poursuivi d'autres, également de nature scientifique, mais qui se rattachaient directement aux observations d'ordre technique qu'il était amené à faire au cours de sa carrière d'ingénieur. Telles sont ses recherches sur la température des flammes et la dissociation, ainsi que sur la distribution de la chaleur dans les fours à cuve, et spécialement dans les hauts-fourneaux à fer. Dans la première de ces études, il a déterminé la température produite par une combinaison de gaz en tenant compte de la dissociation, méritant, pour l'élégance des résultats qu'il a obtenus et qui intéressent la métallurgie, d'être mentionné avec éloge par Henri Sainte-Claire Deville lui-même. Dans la seconde, il a complètement éclairci la question très complexe des échanges de chaleur à l'intérieur des hauts-fourneaux, sur laquelle, avant lui, on n'avait que de très vagues idées. Les formules qu'il a établies et rapprochées des résultats obtenus par divers observateurs donnent la solution de problèmes que l'on n'avait auparavant même pas songé à poser. Elles tracent la voie à suivre pour parvenir à créer une métallurgie vraiment rationnelle, dans laquelle ou calculerait un fourneau en vue d'un résultat déterminé comme on calcule une machine.
A un point de vue plus technique, on lui est encore redevable, dans le domaine de la Métallurgie, de plusieurs publications d'une haute utilité, notamment d'une description détaillée du procédé Bessemer pour l'affinage de la fonte, donnée à une époque où ce procédé était encore peu répandu en France ; d'une notice sur le lavage méthodique des cendres de houille, dont les indications ont été fréquemment mises en pratique; enfin d'un mémoire dans lequel, après avoir exposé les principes de la gazéification des combustibles, il trace une méthode générale d'emploi des combustibles inférieurs et développe les conséquences industrielles et économiques que l'application de cette méthode à la métallurgie du fer pourrait avoir en France. Au cours de cette étude, il trouve l'occasion d'exposer, ce qui n'avait pas encore été fait au point de vue pratique, le rôle de la dissociation dans les foyers à haute température.
Dans l'ordre de l'exploitation des mines, on lui doit d'importantes expériences sur l'aérage des chantiers à grisou; mais c'est plutôt dans la technique de l'art des chemins de fer qu'il a trouvé l'occasion de mettre les méthodes scientifiques dont il s'était toujours pénétré au service de ses études d'ingénieur.
Ses profondes connaissances en mécanique l'ont mis à même notamment d'entreprendre des études d'un haut intérêt sur l'emploi des freins continus dès qu'ils ont fait leur apparition dans l'exploitation technique des chemins de fer français, études qu'il n'a jamais abandonnées depuis lors. Le frein à embrayage électrique d'Achard, le frein pneumatique de Smith, le frein à air comprimé de Wenger, le frein Lipkowski ont été successivement l'objet de ses recherches. Non seulement il a étudié les questions les plus essentielles relatives à leur fonctionnement, trouvant même l'explication théorique de faits qui avaient surpris l'inventeur lui-même, mais il a été amené, chemin faisant, à examiner théoriquement et pratiquement un grand nombre de questions relatives aux freins en général.
En ce qui concerne l'exploitation proprement dite des chemins de fer, Vicaire a produit divers travaux d'une haute importance. L'un d'eux, entrepris sur un programme fixé par M. de Freycinet, alors ministre des Travaux Publics, traite de la limitation de la vitesse des trains eu égard au tracé de la voie. Habitué à envisager les questions d'un point de vue rationnel, Vicaire fut amené à proposer un maximum de vitesse avec loi de décroissement fondée sur la condition que le mécanicien puisse toujours, quelle que soit la pente, obtenir une réduction de vitesse déterminée dans un même parcours. La règle à laquelle il aboutit ainsi consiste à faire diminuer la vitesse de 15 kilomètres par heure, lorsque la pente augmente de 5 millimètres par mètre, résultat assez conforme aux indications de la pratique pour des trains non munis de freins continus.
Connue rapporteur de la Commission chargée d'étudier les moyens de prévenir les collisions de trains occasionnées par la rencontre de plusieurs voies, il se livra à mie étude méthodique, poursuivie dans un esprit vraiment scientifique, des combinaisons très variées que peuvent offrir les rencontres de voies, ainsi que des conditions de circulation des trains. Cette étude fit progresser la question toute nouvelle des enclenchements qui établissent la solidarité mécanique entre les appareils placés sur les diverses voies. Ses conclusions ont servi de base à la circulaire ministérielle du 6 août 1883, qui règle encore actuellement la matière.
Il faut enfin citer un rapport étendu sur la comparaison du rail Vignole et du rail à double champignon, et des expériences poursuivies sur le réseau d'Orléans pour déterminer la consommation d'eau des locomotives. Ces expériences ont amené Vicaire à l'établissement d'une formule empirique, cadrant de façon remarquable avec les faits de la pratique, et qui a été adoptée par le ministère de la Guerre pour le calcul des approvisionnements d'eau nécessaires au service des trains de mobilisation sur le réseau d'Orléans. Vicaire se proposait de rédiger l'exposé des détails de sa méthode pour que l'application pût en être faite à d'autres réseaux; il ne lui a pas été donné de réaliser ce projet. On peut, du moins, espérer que quelqu'un de ses collaborateurs saura y suppléer.
Puisse le résumé qui précède avoir fait naître chez le lecteur quelque idée de la variété des directions dans lesquelles s'est utilement dépensée l'activité scientifique d'Eugène Vicaire, entretenue par un esprit toujours en quête d'un progrès nouveau et trouvant d'inépuisables ressources dans une érudition d'une étendue peu commune ! Dans le corps d'élite qu'il a si hautement honoré par sa science et son caractère et où il comptait de si solides amitiés, l'éminent ingénieur laissera un souvenir qui ne périra point.
Aux travaux de Vicaire cités dans l'excellente notice de M. d'Ocagne, on peut ajouter les suivants :
Notice sur la soupape de sûreté de M. Th. Adams, qui décrit le fonctionnement de cet important accessoire des chaudières. Avec l'élévation des pressions, les soupapes Adams, ainsi que d'autres soupapes à grande levée, ont reçu des applications très nombreuses sur les chaudières de locomotives et de bateaux ;
Rapport sur l'application du block system en exécution de la circulaire ministérielle du 12 janvier 1882 ;
Rapport sur la mise en communication des voyageurs avec les agents dans les trains de chemins de fer, qui forme l'Annexe n° 9 au " Rapport du président de la commission chargée d'étudier les mesures à prendre pour assurer aux voyageurs en chemin de fer de nouvelles garanties de protection et de sécurité " (28 mai 1886).
L'oeuvre la plus complète de Vicaire est son enseignement à l'Ecole des Mines, justement apprécié par M. d'Ocagne. Heureusement, cette oeuvre capitale n'est pas perdue pour ceux qui n'ont pas suivi ses leçons. En 1899, le Cours de chemins de fer a été autographié pour les élèves de l'école ; la rédaction, revue par Vicaire, a été faite par M. Maison, ingénieur des Mines, qui, à cet effet, a suivi pendant une année les leçons du professeur.
Le Cours de chemins de fer de Vicaire comprend, après quelques généralités, l'étude du matériel de transport du matériel de traction, de la résistance des trains, des freins, de la voie, avec ses points spéciaux et ses accessoires, des signaux et de l'exploitation technique.
On doit signaler, d'une façon toute spéciale, dans ce travail, l'examen détaillé des réactions intérieures et extérieures de la locomotive, de la variation et de la répartition du poids entre les roues, au repos et pendant la marche, l'effet de l'inertie des pièces en mouvement relatif et des oscillations.