Charles Axel GUILLAUMOT (1730-1807)


Collection privée Suzanne de Jenlis. Charles-Axel mesurait 1,79 m

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Charles-Axel GUILLAUMOT est né le 27 février 1730 à Stockholm. Ses parents, français de religion protestante, avaient dû émigrer hors de France. Par sa naissance, Charles-Axel a acquis la nationalité suédoise. Vers 1736, la famille part à Hambourg où le père fait du commerce. En 1741, la famille revient à Paris. En 1745 on trouve Charles-Axel comme élève de l'Académie d'architecture. En 1749 il entreprend une série de voyages, en Italie, puis en Allemagne, puis à Rome en 1750. Il remporte le premier prix d'architecture de l'Academia di San Luca (dirigée par Jean-François de TROY). Par hasard, le prix lui est remis en présence de Abel Poisson, frère de la marquise de Pompadour, qui sera titré par Louis XV en 1754 marquis de Marigny et qui sera directeur général des bâtiments de France de 1751 à 1773.

Guillaumot parcourt ensuite, toujours pour sa formation, le royaume de Naples, l'Angleterre, l'Espagne. Il devient brièvement officier dans les Gardes wallonnes, mais ne s'y plaît pas et abandonne la carrière militaire. Il arrive à Paris en 1754. C'est là qu'il attire l'attention de Louis Jean Berthier de Sauvigny (intendant de la généralité de Paris de 1744 à 1776), qui le charge de différents travaux importants.

Il s'agit d'abord de construire 3 casernes pour des Gardes-suisses, à Rueil, Courbevoie et Saint-Denis, et de loger ainsi une partie importante des 2400 hommes du régiment. Une partie des travaux est achevée en 1757, mais des extensions seront bâties dans les années suivantes.

Le jeune homme est nommé "inspecteur des casernes" et "architecte de la généralité" (1760). Il épouse le 27 janvier 1761 Catherine LE BLANC, fille du Premier architecte de la Généralité de Paris. Son beau-père décède peu après, et Charles-Axel récupère le poste de Premier architecte. Il l'occupera jusqu'en 1779 (tout en devenant architecte du roi en 1773).


Catherine Le Blanc, épouse de Charles-Axel Guillaumot

D'après l'analyse par Guillaume Comparato du journal de Faujas de Saint-Fond, le célèbre géologue de la fin du XVIIIème siècle fréquentait assidument les dîners de Catherine Le Blanc, qu'il qualifie de Femme de beaucoup d'esprit. Grâce à Catherine, il a rencontré en 1782 des célébrités de l'époque comme l'inspecteur général des pépinières, Moreau de la Rochette, Louise de Mirabeau, marquise de Cabris, Pierre Louis de la Cretelle (1751-1824), le maître de ballet Jean-Georges Noverre (1727-1810).
Charles-Axel Guillaumot lui-même passa plusieurs commandes d'études géologiques à Faujas et le présenta au comte d'Angiviller, ce qui fut déterminant pour la carrière de Faujas.

Guillaumot va s'occuper plus particulièrement de la Bourgogne (actuellement l'Yonne). Ses constructions ou extensions les plus importantes sont :

Il est candidat à 2 reprises pour une élection à l'Académie royale d'architecture (1767, 1770). Finalement, le 7 mars 1773, un brevet royal nomme Guillaumot à la 2ème classe de l'Académie d'architecture, ce que le marquis de Marigny, directeur général des bâtiments, notifie immédiatement à l'Académie. Charles-Axel est alors placé en partie sous l'autorité du marquis.

Quelques semaines plus tard, peu avant le décès de Louis XV, le marquis de Marigny est remplacé par l'abbé Terray, par ailleurs contrôleur général des finances. En effet, Marigny comme ses prédécesseurs, n'était pas en mesure de payer les factures des entrepreneurs. Louis XV meurt et l'abbé Terray est remplacé par le le comte d'Angiviller, ami personnel de Louis XVI, qui, nommé directeur général des bâtiment du roi, réorganise son service. A la suite de cette réorganisation, une liste des "officiers de l'Administration", c'est-à-dire des principaux responsables, et de leurs émoluments, est établie en 1777 comme suit :

L'une des qualités de Guillaumot était d'accepter toutes les tâches qui lui étaient confiées, et de montrer chaque fois des premiers résultats très rapidement. Le comte d'Angiviller confie à Guillaumot divers travaux, même après sa nomination comme inspecteur général des carrières. Après le décès de Soufflot en 1780, Guillaumot est nommé intendant général des bâtiments avec un salaire en nette augmentation. Il est aussi désigné le 16 septembre 1780 pour achever à la place de Soufflot la construction de l'Eglise Sainte-Geneviève (actuel Panthéon), ce qui n'a pas dû l'occuper beaucoup puisque la direction effective des travaux était assurée par Jean-Baptiste Rondelet. De 1780 à 1790, Angiviller va demander à Guillaumot de participer à des travaux d'expertise comme la réorganisation de la basilique de Saint-Denis, d'approuver des plans et procès-verbaux d'arpentage, de donner son avis sur des affaires conflictuelles concernant des bâtiments de la haute noblesse. Guillaumot fut occasionnellement en conflit avec ses collègues Mique et Brebion, mais Mique était incontournable car il jouissait de la protection de la reine. Guillaumot a également exercé la fonction de censeur royal pour l'architecture, ayant ainsi le pouvoir d'autoriser (ou d'interdire) toute publication concernant les ouvrages architecturaux de l'Administration.

Guillaumot avait d'autre part de sérieux atouts relationnels qui l'aideront dans sa carrière. D'une part, la franc-maçonnerie : son père avait un long passé de franc-maçon, et avait même créé une loge à Hambourg (alors qu'il parlait très mal l'allemand). Charles-Axel a appartenu lui-même de la loge des Neuf-Soeurs et à d'autres loges.
D'autre part, son épouse tenait un salon où elle invitait des scientifiques, médecins ou artistes de premier plan à dîner. Ainsi, FAUJAS de SAINT-FOND fréquenta assidument le salon de Mme Guillaumot, et fut un ami de Charles-Axel. Les carnets de Faujas, analysés par Guillaume Comparato, montrent notamment que Faujas visita la forêt de Fontainebleau avec Catherine Guillaumot, mais aussi que Charles-Axel l'invita plusieurs fois à visiter les catacombes et l'employa comme expert géologue dans diverses occasions, notamment pour les travaux sur l'aqueduc d'Auteuil. Enfin, c'est Guillaumot qui présenta Faujas au comte d'Angiviller, et qui le recommanda pour le poste de commissaire du roi à la visite des usines, des bouches à feu et des forêts du royaume qui lui fut octroyé en 1785.

La création de l'inspection générale des carrières de Paris

Lorsque la multiplication des carrières souterraines sous Paris provoque massivement l'effondrement de bâtiments et surtout de rues de Paris et de sa banlieue, le Conseil du roi rend un arrêt le 15 septembre 1776 rendant les propriétaires des terrains où il y a des carrières responsables de réaliser les soutènements nécessaires. Par le même arrêt, Antoine DUPONT (professeur de mathématiques) est commissionné pour visiter les carrières et les cartographier, et même créer une école de topographie souterraine. DUPONT est rattaché au bureau des Finances de la Généralité de Paris, qui supervise par ailleurs les ingénieurs des ponts et chaussées.

Nous citons "Les effondrements de carrières de Paris : la grande réforme des années 1770", par Thomas Le Roux, French Historical Studies, Vol 36 n° 2, 2013 :
Cette première phase avait été règlée durant la disgrâce provisoire du lieutenant général de police LENOIR, à la suite de la "guerre des farines", et au plus fort du "moment TURGOT". Mais sitôt TURGOT révoqué et LENOIR revenu à son poste, la régulation des carrières prit une autre direction. Forte personnalité, LENOIR n'entendait pas laisser la gestion de la sécurité publique en dehors des attributions du Châtelet ... Ses préoccupations rencontrèrent celles du comte d'Angiviller, directeur des bâtiments du roi, qui voyait d'un mauvais oeil la présence de DUPONT et des agents du bureau des Finances dans les carrières situées sous les monuments dont il avait la charge, notamment le Val de Grâce et l'aqueduc d'Arcueil. ... Il commanda de sa propre initiative des expertises supplémentaires à Brébion, Guillaumot et Soufflot, qui visitèrent les carrières en janvier et février 1777. A l'issue, Guillaumot remit un rapport à d'Angiviller.

Dès lors, l'affaire fut promptement menée conjointement par d'Angiviller et Lenoir, avec l'aide du ministre MAUREPAS.
Guillaumot (collaborateur d'Angiviller) fut expressément recommandé par Lenoir, tandis que le travail de Dupont était fortement critiqué. Charles-Etienne-Gabriel Cuvillier
[collaborateur d'Angiviller] se chargea de taxer Dupont de personnalité irraisonnée et versatile. ... En fait, si ce dénigrement de Dupont trouvait des points d'appui dans son activité désordonnée, il recouvrait aussi deux autres éléments : la volonté de ne pas donner de publicité aux risques d'effondrement de Paris et le désir ... de drainer des fonds importants.

Certainement, le risque d'effondrement de l'aqueduc d'Arcueil joua un rôle dans les décisions prises d'urgence. Une visite de GUILLAUMOT et de BREBION sur place le 26 février 1777 constata la situation dramatique de l'aqueduc.

À partir de là, la gestion de l'IGC devient un enjeu de pouvoir pour les ingénieurs des ponts et chaussées et 2 autres clans : les architectes du roi et les services de police. Nous verrons ci-dessous que l'alliance entre les architectes et les policiers permettra d'abord aux architectes de gagner la bataille, mais que les ingénieurs des ponts réattaqueront à plusieurs reprises (fin 1777-1778, 1780 avec Peronnet et de Chézy, 1794 avec la nomination de Bralle, ...) et ce n'est qu'en 1809-1810 que la situation sera totalement stabilisée avec la décision de Napoléon de confier l'IGC au corps des ingénieurs des mines nouvellement créé.

L'arrêt du Conseil du roi du 4 avril 1777 révoque l'arrêt du 15 septembre 1776 et crée une nouvelle commission composée de 2 commissaires : le comte d'Angiviller et le lieutenant général de la police de Paris, Jean-Charles-Pierre LE NOIR. Cette commission fait immédiatement nommer un "contrôleur et inspecteur général en chef", Guillaumot (placé sous la tutelle principale de LENOIR), et lui trouve un budget: 83 000 Livres (1777), 200 000 Livres en 1778. Ce budget sera porté à 350 000 Livres à partir de 1779 et même à 400 000 Livres par an à partir de 1785.

Guillaumot prête serment d'allégeance à LE NOIR le 19 avril, et reçoit le 29 avril 1777 l'ampliation du roi lui confiant l'inspection générale des carrières.
Dès le début, il est précisé que GUILLAUMOT touchera 8 000 Livres en qualité d'inspecteur général des bâtiments du roi, et que 4 inspecteurs lui seront subordonnés : DUPONT, VANDERMARCK, BOSSU (ci-devant inspecteur au garde-meuble à Paris) et HUSSET, tous payés 1 200 Livres (auxquels s'ajoutèrent une prime de risque de 400 Livres à partir de 1778) : 2 d'entre eux pour inspecter les carrières, le 3ème pour inspecter les travaux de maçonnerie, le 4ème pour inspecter les fouilles. En outre, 4 aides touchaient chacun 990 Livres. Un entrepreneur était aussi désigné, COEFFIER, déjà sélectionné par DUPONT. COEFFIER conserva l'entreprise de soutènement jusqu'à 1793, et la développa jusqu'à 400 ouvriers, en dehors de la corporation des maçons.

Il faut noter que la querelle entre le bureau des Finances (c'est-à-dire les ingénieurs des ponts et chaussées) et la commission composée de LENOIR et d'ANGIVILLER ne s'arrêta pas en avril 1777. Elle continua pendant l'été par des ordonnances du bureau des Finances qui prétendait encore avoir le pouvoir de règlementer les carrières parisiennes, ordonnances annulées par le Conseil du roi le 26 septembre 1777. Citons encore Thomas Le Roux : Mais il fallut une catastrophe de grande ampleur pour marginaliser définitivement le bureau des Finances. L'accident mortel survenu dans la carrière à plâtre de Cochois le 27 juillet 1778 acheva en effet de la discréditer. C'était en effet précisément à l'endroit où il avait tenté de garder une parcelle de son pouvoir que la carrière s'effondra, entrainant dans sa chute une partie du bord du chemin de Ménilmontant et 7 personnes qui s'y promenaient. Aucune survécut. Dans l'urgence des secours, c'est Lenoir qui intervint. Il se rendit immédiatement sur place, y resta tout l'après-midi, et fit intervenir Vandermarck, Husset et Bossu et des ouvriers de l'administration des carrières. ... Puis, Lenoir revint deux fois par jour sur les lieux. Quant à Guillaumot, vraisemblablement en déplacement, il arriva le 30 juillet et supervisa les opérations de secours, dont il dressa un procès-verbal quotidien jusqu'au 14 août, date à laquelle on retrouva le dernier corps. ... Le ministre de Paris, Amelot, ... félicita Lenoir et son administration pour son action. A vrai dire, ... plusieurs magistrats avaient mobilisé des ouvriers pour commencer les secours : le chevalier Marolles de Lucé ... ; le seigneur de Ménilmontant, Le Peletier de Saint-Fargeau, qui distribua, dit-on, 6 000 Livres aux ouvriers plutôt rétifs à engager un travail de désencombrement dangereux ; Moreau, architecte de la ville qui prit provisoirement le commandement des opérations ; enfin, le duc de Biron, colonel des Gardes françaises, qui ordonna à 200 de ses soldats de prêter main-forte.

Le Parlement de Paris ... commanda une instruction. Enfin, le bureau des Finances ... rendit une ordonnance le 7 août. ... Peu importait que cette ordonnance ait été annulée sur leur demande motivée, les deux commissaires obtinrent une nouvelle fois gain de cause. Le 5 septembre 1778, une ordonnance du roi reconnut l'autorité totale de lieutenant général sur tout fait de carrière jusqu'à une lieue de Paris. Toute exploitation actuelle ou nouvelle, à ciel ouvert ou souterraine, devait dorénavant recevoir l'autorisation écrite de Lenoir, et ses jugements ne seraient pas suspensifs à un appel du Parlement. En dehors des carrières sous les chemins, c'était la première fois que les exploitations étaient soumises à une autorisation administrative. Le même jour, d'Angiviller s'effaça partiellement de l'administration des carrières. Un arrêt du Conseil du 19 septembre 1778 ... donna à Lenoir tout pouvoir pour ... décider des fermetures immédiates. Il interdisait aussi l'exploitation des carrières à plâtre par cavage, et ordonnait de détruire les fours à plâtre jugés responsables du déssèchement de de l'écartement des terres des carrières. ... En 1779, 3 des 8 carriers contrevenant régularisèrent leur situation. ... En 1780, un seul carrier contrevenait systématiquement.

Le 7 septembre 1778, Dupont rend compte au Bureau des finances qu'il s'est présenté pour une inspection au village de Conflans, dûment mandaté par une requête du procureur du roi du 4 septembre. Arrivé au couvent des Carmes, un religieux s'est présenté à qui nous avons demandé la permission de descendre pour faire la visite des carrières de la part du bureau des finances pour la sûreté des chemins. Il nous a répondu qu'il avait reçu l'ordre de M. Lenoir lieutenant de police de refuser l'entrée à quiconque s'annoncerait de la part du bureau des finances. Le Bureau des finances cessa désormais de s'intéresser aux carrières, mais DUPONT se radicalisa dans sa lutte contre GUILLAUMOT comme nous le verrons ci-dessous.

Démarrent alors une grande quantité de travaux souterrains, plus urgents les uns que les autres. On peut citer le renforcement des fondations du Panthéon, ou bien de l'Odéon, ou bien sur l'aqueduc Marie de Médecis qui amène de l'eau de Rungis à Paris. L'aqueduc traversait le territoire attribué à la capitainerie des chasses royales de Montrouge, placé sous l'autorité du duc de LA VALLIÈRE. DUPONT avait déjà remarqué que des carrières délictueuses avaient été creusées sur le territoire de la capitainerie. Par la suite, GUILLAUMOT eut plusieurs contacts directs avec le duc de LA VALLIERE qui lui accorda l'autorisation de réaliser les travaux nécessaires sur le territoire de la capitainerie, mais les subordonnés du duc s'y opposèrent au début !

Les techniques de renforcement des sous-sols adoptées par Guillaumot différaient des méthodes de comblement précédemment utilisées. Guillaumot mit en oeuvre quelques principes de base :

En outre, Guillaumot expérimenta le foudroyage avec des explosifs, qui provoquait l'effondrement vertical d'un terrain très creux, souvent sur une hauteur d'une quinzaine de mètres ou davantage. Cette méthode fut tentée sur d'anciennes carrières de calcaire, sous le nom de "renversement des carrières à plâtre". S'agissant d'opérations très risquées, Lenoir crut bon de les faire autoriser par le roi le 17 mars 1780. Les parisiens étaient invités à assister à l'opération, ce qui mettait l'opinion publique du côté de l'équipe de Guillaumot, et facilitait le déblocage des budgets. Toutefois, on parla ensuite de "procédé de comblement défectueux" car le terrain n'était pas stabilisé, et continuait de bouger par la suite, ce qui dissuada Guillaumot d'utiliser à nouveau ce procédé à grande échelle.

La commission était composée initialement de Lenoir et d'Angiviller, ce dernier contrôlait particulièrement les dépenses. Angiviller se fit remplacer par Cuvillier à partir du 1er janvier 1779, qui était le plus souvent absent. Guillaumot vit mal ce désintérêt de son corps d'origine et écrit à Cuvillier le 22 septembre 1779 : ... J'ai la douleur de voir M., que tout ceci vous éloigne encore de la commission, ... et il ne me reste plus qu'à désirer, si les choses ne changent pas, que les circonstances vous laisseront promptement la possibilité de m'appeler aux fonctions que vous voulez bien me destiner dans votre département. Jusqu'à ce moment ou à celui de votre retour, M., à la commission des carrières, je me regarderais toujours comme relégué dans une terre étrangère, et condamné à des fonctions très désagréables puisqu'elles ne sont pas dirigées par vous.

En 1780, Necker souhaita mieux contrôler le budget et les modes d'action de la commission, en y intégrant les ingénieurs des ponts et chaussées. Une commission proviosire d'inspection est constituée, composée de Perronet, Chezy, et les architectes Moreau et Desmaison.
Dans une lettre de Guillaumot à Peronnet du 1er février, on sent une première catégorie d'inquiétudes : Ce serait me donner la douleur de penser qui le sieur Dupont qui a tout calomnié notre Administration par laquelle son incapacité a été dévoilée vous a donné contre moi des préventions dont je doit vous croire incapable.
Dès le 11 février 1780, Guillaumot exprime clairement ses inquiétudes : la commission d'inspection est présidée par Monsieur de Chézy, aux ordres duquel était le sieur Dupont par les dispositions de l'arrêt du conseil du 15 septembre 1776 .... Il craint donc un désir de revanche du corps des ponts et chaussées.
Les 4 commissaires firent des visites de carrières et remirent un pré-rapport en juin 1780. Après discussion avec le groupe des 4, Guillaumot arriva à un accord presque unanime sur les mesures techniques à prendre, et un désaccord total sur les mesures administratives. Celui-ci est résumé dans une lettre du 29 juin 1780 de Guillaumot à Cuvillier :

Dans une lettre du 29 août à Lenoir, Guillaumot est encore plus précis et n'hésite pas à proposer sa démission: Dans ce conflit de pouvoir, Guillaumot a fini, grâce à l'aide de Lenoir, par écarter ces rivaux potentiels. La bande des 4 a disparu en octobre.

Différents accidents ont lieu, qui causent la mort ou la mutilation d'ouvriers. Guillaumot est à la fois très ferme sur le principe : les accidents sont dûs aux fautes des ouvriers, mais il accorde volontiers des primes de risque au début de son activité en surpayant les ouvriers les plus exposés. Les salaires diminuent graduellement les années suivantes. Les grèves sont réprimées, certains ouvriers un peu trop actifs sont même jetés en prison.

Guillaumot reçoit, outre son salaire d'intendant général des bâtiments (15 000 Livres), celui d'administrateur général de la Manufacture royale des Gobelins (nommé en avril 1789). Il achète diverses propriétés en 1772, 1777, 1781, ainsi qu'une maison à Versailles (14 avril 1789).

Guillaumot voulait depuis longtemps faire de son futur gendre RENARD son adjoint aux Carrières, mais il se heurta d'abord à l'opposition de ses adjoints qui craignaient pour leur propre avancement. Ainsi, Vandermarcq écrit à d'Angiviller le 14 février 1781 :
... Vous êtes trop conséquent et trop sage économe pour charger une administration quelconque d'un chef inutile.
... Mais sera-ce un avantage pour M. Renard d'être chargé de travaux rustiques et ténébreux ?
S'il remplit les devoirs de cette place, il ne lui restera sûrement pas le temps de faire valoir ses talents pour l'architecture. ...
Si je n'ai pas démérité auprès de vous, M. le Comte, je vous supplie de vouloir bien penser que cette occasion est la seule favorable à mon avancement, que si elle m'échappe jamais je ne la retrouverai ...

La création du poste d'adjoint de Guillaumot fut retardée de quelques années. Jean Augustin Renard fut finalement nommé Inspecteur adjoint des Carrières le 26 mai 1785.

Les attaques de DUPONT et la période révolutionnaire

Pendant toute la période de 1777 à la Révolution, Guillaumot eut à affronter l'hostilité de son prédécesseur DUPONT devenu officiellement un de ses collaborateurs.

Le 1er mars 1778, Guillaumot explique aux commissaires des carrières que lors d'une réunion de service, la conférence se passe en grossièretés de la part du Sr Dupont et en invectives contre le Sr Le Bossu qui conserve la plus grande modération. Il est ensuite question d'un tailleur de pierre qui est venu dénoncer des malfaçons à la police et à la justice : l'enquête montre qu'il a été envoyé par Dupont. Par ailleurs, Dupont fait toujours des cours de géométrie souterraine dont il abuse, en déclamant publiquement dans ses leçons contre les travaux des carrières.

Dupont remue ciel et terre afin de prouver l'insuffisance technique de son chef, et sa mauvaise gestion. Par exemple, en février 1779, Guillaumot doit réagir à un document largement diffusé et intitulé Réflexions du sieur Dupont. Voici quelques extraits de l'analyse de Guillaumot :

En mai 1779, Dupont n'hésite pas à écrire aux ministres Necker, Maurepas et Amelot, au duc de Nivernois, et à Perronet. Amelot lui accorde une audience qui tourne au vinaigre. Le 31 mai, Guillaumot demande à Cuvillier : [J'espère] que vous voudrez bien délivrer l'administration des carrières de cette chenille. Le 13 juin, il écrit : Je suis bien certain que cet homme ne restera pas tranquille et tant qu'il n'essuira pas une humiliation publique, telle que l'enlèvement de son inscription d'école protégée par le gouvernement, il ne cessera de cabaler et de trouver des personnes qui s'intéressent à lui.

DUPONT va se venger pendant la Révolution. Le comte d'Angiviller, clairvoyant devant la dégradation de la situation politique et accusé à tort de malversations comptables, part en exil dès juillet 1789. Il est remplacé provisoirement par le comte de SAINT-PRIEST, ministre de la Maison du roi, mais en réalité le service continue à être dirigé par Cuvillier et Guillaumot. A partir de 1789, plusieurs recours en justice ont lieu contre les pratiques de Guillaumot en matière de marchés publics, de salaires et primes. Il y eut aussi des plaintes contre l'autoritarisme de Guillaumot, son mépris du danger que couraient les ouvriers, et sa politique anti-grève. Guillaumot prend peur. Il vend une partie de ses biens immobiliers en 1791 et en 1792. Il est destitué de l'ensemble de ses fonctions en 1790 : inspecteur général des bâtiments du roi, inspecteur général des carrières de Paris, administrateur directeur des Gobelins (il perd son logement de fonction). L'inspection des carrières est scindée en deux : d'une part l'inspection des carrières sous la ville de Paris, d'autre part l'inspection des carrières de l'extérieur (c'est-à-dire de la banlieue de Paris). Concernant l'inspection sous Paris, Guillaumot est remplacé dans la plus grande confusion, à compter de septembre 1791, par Noël Laurent DUCHEMIN (inspecteur général du pavé de Paris), assisté par Pierre Antoine DESMOUSTIERS (ingénieur en chef des ponts et chaussées), DUCHEMIN étant bientôt remplacé par François Jean BRALLE, ingénieur hydraulique en chef (qui signait parfois ses rapports conjointement avec LE BOSSU et HUSSET).

Grâce notamment à Dupont, Guillaumot va passer quelques mois en prison entre fin 1790 et début 1791 [selon une autre source, on lui aurait interdit de quitter sa résidence]. Quand sa peine se termine, DUPONT ne cesse pas ses attaques. Dans une lettre de DUPONT à RONDELET datée de l'an 3, Dupont indique notamment :
Guillaumot est atteint et convaincu pour avoir dilapidé à la Nation 2 127 629 Livres sans en avoir trouvé l'emploi. Les comptes ont été examinés par des vérificateurs connus entièrement. Le citoyen Mauduit que par parenthèses Guillaumot a voulu corrompre, il a connu les crimes d'Angiviller. Le procès avec leurs interrogatoires sont déposés aux archives de la Convention, ou Guillaumot a été entendu comme un homme convaincu sans répondre un mot. Le 21 décembre 1789 au Comité des Finances et toute l'administration du tripot y étant mandée comme coalisée, que l'on met présentement en cause, Guillaumot se cherchant ses détours ordinaires en voyant sa perte inévitable avait écrit au président Gouttes en lui demandant bassement mille pardons à genoux. ...
Guillaumot fut chassé de sa place comme un scélérat d'après les faits constatés ; en mars 1791, il fut remis en place. Capet dont il se flattait de lui faire la cour lui fit établir une place dans l'extérieur de Paris. Je demande au citoyen Rondelet son défenseur si un homme aussi mal noté peut occuper une place dans des moments de crise ou Guillaumot peut nuire à la chose publique. ...
[Guillaumot] avait envoyé le commissionnaire Gillet et toute la police pour faire perquisitionner chez le citoyen Dupont qui n'ont rien trouvé. Le citoyen Dupont fut conduit comme un criminel jusqu'à son école de La Verrerie. Le tout était fait conjointement avec d'Angiviller et conduit par les inspecteurs Le Bossu et Vandermarcq qui annonçaient que le citoyen Dupont avait écrit contre Marie-Antoinette.
Guillaumot ... fit incarcérer des ouvirers en leur offrant de l'argent et leur élargissement pour déposer le citoyen Bayer. Il a mieux aimé rester six mois en prison que déguiser la vérité. ...
Voilà les traits de votre protégé pris en main. ...
Vous avez les pièces du jugement recommandé par Le petit, Duchemin et d'Angiviller. Il a tout fait pour corrompre les juges ... 1500 Livres ont été envoyées au rapporteur qui les a fait voir à 600 personnes témoins, qui ont été envoyées aux pauvres des sections. ...
Guillaumot fut incarcéré à Versailles comme un des plus grands royalistes par ses menées. ...
Concedieu administrateur [de la commune de Paris] fut chargé de la visite de ses papiers à sa maison, il a trouvé qu'il était coalisé avec l'entrepreneur et il lui dictait ce qu'il avait à faire pour voler les ouvriers. Il fut élargi avec défense de retourner à Versailles le temps de cet arrêt.
[En marge et en travers] Je ne parle pas du malheur arrivé à Mesnilmontant où 8 personnes écrasées sur la faute de Guillaumot.

C'est donc avec l'appui de son ami Rondelet (qui avait été son bras droit pour achever la construction du Panthéon) que Guillaumot revient en mars 1791 comme inspecteur général des carrières de l'extérieur, c'est-à-dire en dehors de l'enceinte de la ville de Paris.
Guillaumot aurait été arrêté et/ou destitué en septembre 1793, pendant un an. Nous manquons de sources sûres à ce sujet.
Il demande (lettre du 23 novembre 1794) la réunification de l'inspection des carrières de la ville avec celle de l'extérieur, puisque les budgets sont désormais réunifiés (précédemment l'inspection des carrières de Paris était imputée sur le budget de la Ville de Paris). Ce n'est qu'en 1796 qu'il récupère l'intégralité des fonctions d'inspecteur général des carrières (sous Paris et de l'extérieur) et de directeur des Gobelins (mais pas celles d'inspecteur général des bâtiments).

On peut supposer que Bralle s'était un peu discrédité, comme le montre sa curieuse lettre du 6 février 1796 au Ministre de l'intérieur par laquelle il demande l'autorisation de retirer des pierres des carrières sous Paris pour les travaux du Luxembourg. Cette proposition contrevenait aux règlements qui proscrivaient toute nouvelle exploitation des carrières souterraines de Paris. Elle fut évidemment refusée par le Ministre. Par ailleurs, Rondelet était toujours aux pouvoir au ministère, et évidemment favorable à la réunification.

Au début de la réunification, Guillaumot est très mal rémunéré, ainsi que le montre la lettre suivante qu'il adresse le 3 janvier 1797 au Ministère des travaux publics :
Citoyen, je ne sais à quoi attribuer le silence que vous gardez à mon égard et j'en suis vraiment affligé.
Voici la 3ème lettre dont je vous importune, indépendamment de celle que le ministre a du vous envoyer le 11 du mois dernier par lesquelles je réclame les 6 voyes de bois et les 25 de chandelles qui m'ont toujours été accordées pour mon bureau des carrières et je ne reçois ni bois, ni réponse.
Cependant ma demande n'a rien que de juste.
Le ministre l'a trouvée telle.
Mes collaborateurs subalternes ont reçu leur contingent, l'hiver s'écoule, un rhume violent m'oblige de garder la chambre, et je reste dans l'oubli.
Veuillez, citoyen, me tirer par un mot de réponse, de la juste inquiétude où me met votre silence, que je ne crois pas avoir mérité, et agréez les salutations fraternelles de votre ancien serviteur et concitoyen.

La situation s'améliorera rapidement,mais il ne touchera plus que 6 000 Livres d'appointements, auxquels s'ajoutera à partir de 1802 et jusqu'à sa mort une indemnité secrète de la préfecture de police de 1 200 Livres "pour des raisons de sécurité publique".

Peu après la réunification, Guillaumot dresse un état travaux sur les carrières. Il n'y avait alors plus que 20 ouvriers actifs à l'intérieur de Paris, contre 172 un an auparavant. Guillaumot demande des crédits pour 97 ouvriers des carrières de l'intérieur de Paris et 69 ouvriers de l'extérieur. Il semble que la situation soit redevenue "normale" peu après.

Dans une note datée de août 1963, Georges Poisson, répondant à une question sur des rumeurs concernant l'utilisation des catacombes pour une évasion des Suisses et de la famille royale, écrit :
Je crois intéressant de noter un lien entre Guillaumot et la famille royale ; en 1756, Guillaumot avait construit trois belles casernes de Gardes suisses à Saint-Denis, Rueil et Courbevoie (les deux premières existent encore, la troisième a été démolie, hélas, il y a quelques mois). Au moment de la chute de la monarchie, des bruits coururent sur l'évasion de certains Suisses par des souterrains : à mon avis, ces bruits sans fondements ont trouvé leur source dans le fait que Guillaumot, architecte des casernes, était aussi inspecteur général des carrières. Quand le même Guillaumot sous l'Empire aménagea les catacombes, il y fit installer un monument à la mémoire des Suisses.

Guillaumot et la manufacture des Gobelins

Il est nommé en avril 1789 administrateur de la manufacture des Gobelins, où il prend la succession du peintre Jean-Baptiste PIERRE. Le poste avait été proposé au peintre Joseph Marie VIEN, qui préféra rester directeur artistique (Napoléon le nomma d'ailleurs par la suite sénateur et comte d'Empire, et lui fit des funérailles nationales en 1809). Guillaumot va être révoqué de ses fonctions en 1791, remplacé le 4 septembre 1792 par Michel AUDRAN (révoqué pour mauvaise gestion, Audran passe 10 mois en prison), puis Augustin-Louis BELLE, puis à nouveau Michel AUDRAN, qui décède un mois plus tard le 20 juin 1795. Guillaumot est alors rappelé à la tête de la Manufacture en janvier 1796 et y restera jusqu'à sa mort. Clément-Louis BELLE, le père de Augustin-Louis, était pendant toute cette période présent occasionnellement dans la Manufacture en qualité d'inspecteur (pour les questions artistiques), et son fils Augustin-Louis sera nommé à ce poste par Guillemot à la mort du père, en 1806. Les avatars de changement de direction pendant la Révolution étaient liés au déficit budgétaire chronique de la Manufacture, et à la menace de sa disparition. Guillaumot réussit ensuite à stabiliser la situation financière en démontrant l'intérêt de la Manufacture pour la renommée de l'empereur.

D'après l'ouvrage « Charles Axel Guillaumot 1er inspecteur des carrières de Paris », Guillaumot a dû prêter le serment républicain suivant le 21 janvier 1796 :
    Je soussigné Directeur de la Manufacture nationale des Gobelins et Inspecteur général des carrières de l'extérieur de Paris ; fait le serment d'être sincèrement attaché à la République et de vouer une haine éternelle à la Royauté
    A Paris ce 1° pluviôse de l'an IV de la République une et indivisible
On imagine le déchirement pour Guillaumot qui était resté intimement fidèle à la famille royale !

Signature par Guillaumot de son serment républicain du 21/1/1796

D'après Caroline Girard,
Sous l'Ancien Régime, la manufacture était régie selon le système de l'entreprise, c'est-à-dire que le roi déléguait les responsabilités de production à des entrepreneurs. Ces derniers étant devenus de moins en moins contrôlables à la fin de l'Ancien Régime, Guillaumot conçut un nouveau règlement, prolongeant celui que Pierre avait institué en 1783 : les anciens entrepreneurs devinrent de simples chefs d'atelier et le salaire à la journée remplaça le salaire à la tâche à partir du 1er janvier 1791.
Sa première préoccupation fut d'ordre financier et l'administrateur n'eut de cesse de plaider en faveur d'une augmentation du budget des Gobelins, qui fut finalement accordée sous le Premier Empire.

Après le retour de Guillaumot, la Manufacture fonctionna exclusivement pour les besoins de l'Empereur, cessant de vendre des tapisseries à des tiers.

Guillaumot perfectionna le métier à tapisserie, de sorte qu'il n'abîmât plus les modèles. Il s'intéressa beaucoup à l'installation de tapisseries dans la galerie de Diane aux Tuileries, et aux questions d'éclairage de cette Galerie.

Placé sous la tutelle directe de Dominique Vivant DENON, que Bonaparte avait placé à la tête du Muséum central des arts (futur Musée du Louvre), Guillaumot supporta mal cette tutelle, mais se comporta comme d'habitude en fonctionnaire zélé.

Après la mort de Guillaumot en 1807, la direction de la Manufacture est assurée d'abord à titre transitoire par Prosper-Hector CHANAL, intendant de la Maison de l'empereur, puis à partir de 1810 par le peintre LEMONNIER.


Médaille de premier prix obtenue par Guillaumot à Rome en 1750.
Guillaumot trichait un peu en faisant état d'un premier prix de Rome, alors que c'était un premier prix de l'Académie de San Luca à Rome, donc un peu moins prestigieux ...

Sources

Les principales études consacrées à Guillaumot sont les suivantes:

Oeuvres écrites de Guillaumot

Descendance de Charles-Axel GUILLAUMOT

Nous retraçons ici les générations successives qui vont de Charles-Axel jusqu'à Suzanne BOSQUILLON de JENLIS.


 

Biographie de Charles Axel GUILLAUMOT, par Suzanne de JENLIS

Publiée dans ABC Mines, avril 2004.

L'enfance

Charles Axel Guillaumot est né en février 1730 à Stockholm de parents français installés en Suède pour y commercer, en liaison avec la diplomatie française, aussi eut-il la nationalité suédoise durant son enfance. Les Guillaumot, reçus dans toute l'aristocratie suédoise connurent le comte Axel de Fersen qui accepta d'être le parrain de leur fils, si bien que Axel sera un prénom porté par plusieurs membres de ma famille a chaque génération. Les Guillaumot quittèrent Stockholm pour Hambourg quelques années plus tard, puis rentrèrent en France en 1741, notamment pour l'éducation de leur fils, qui, particulièrement brillant dans les domaines artistiques, ne put néanmoins concourir pour un prix d'architecture, faute de posséder la nationalité française. Charles Axel parfait alors ses connaissances en voyageant : il obtient en 1750 le grand prix de Rome, parcourt les royaumes de Naples, d'Espagne, d'Angleterre et sert quelque temps comme officier dans les gardes wallonnes.

Le jeune architecte

Charles Axel Guillaumot rentre en France vers 1754 et se fixe à Paris où l'Intendant général Berthier de Sauvigny le charge de construire des casernes pour loger des régiments de Gardes Suisses à Courbevoie, Rueil et Saint-Denis. Seule subsiste aujourd'hui, longeant une rue portant son nom, la caserne de Rueil, classée monument historique le 28 août 1974. Il construisit aussi la caserne dite Quartier Saint Florentin à Joigny et deux châteaux dans l'Yonne. En 1757, Charles Axel est nommé Inspecteur des casernes. Il fut envoyé en mission à Vézelay pour y construire, sur les ruines du monastère, un palais abbatial qui sera vendu comme bien national en 1789, puis démoli. Il participa avec Jardin et Mique à la consolidation et à la restructuration de la cathédrale d'Orléans (1782). Marié à Mademoiselle Le Blanc, fille du Premier Architecte de la Généralité de Paris, et dont il aura deux filles, Charles Axel remplace en 1761 son beau-père a ce poste qu'il occupera pendant dix-huit ans.

L'architecte renommé

Vers 1770, Charles Axel Guillaumot est initié à la franc-maçonnerie qui attire alors les membres de la haute société. Architecte réputé, il rédige plusieurs traités d'architecture, ce qui lui permet d'entrer en 1773 a l'Académie Royale d'Architecture fondée par Colbert (qui, supprimée en 1793, sera fondue dans l'Académie des Beaux-Arts). Voltaire le congratule pour ses ouvrages, lui écrivant ainsi, à propos des "Remarques sur les observations sur l'architecture de l'abbé Laugier" qu'il avait publié en 1768:

"Au château de Ferney, 24 auguste 1768.
"Si ma mauvaise santé me l'avait permis, monsieur, il y a longtemps que je vous aurais remercié. J'ai trouvé votre ouvrage aussi instructif qu'agréable. J'en suis devenu un peu moins indigne, depuis que je n'ai eu l'honneur de vous voir. J'ai fort augmenté ma petite chaumière, et j'en ai changé l'architecture; mais j'habite un désert, et je m'intéresse toujours à Paris, comme on aime ses anciens amis avec leurs défauts.
"Je suis toujours fâché de voir le faubourg Saint-Germain sans aucune place publique; des rues si mal alignées; des marchés dans les rues; des maisons sans eau, et même des fontaines qui en manquent, et encore quelles fontaines de villages! Mais, en récompense, les Cordeliers, les Capucins, ont de très grands emplacements. J'espère que dans cinq ou six cents ans tout cela sera corrigé! En attendant, je vous souhaite tous les succès que vos grands talents méritent. "

Et plus tard, a l'occasion de "Lettre sur l'administration des corvées", Voltaire écrit à Charles Axel Guillaumot:

"8 février 1773, à Ferney.
"Les maladies qui m'accablent, monsieur, ne m'ont pas permis de vous remercier plus tôt. Votre ouvrage m'a paru très judicieux. Il est bien plus aisé de se plaindre des corvées que de construire des chemins nécessaires. Vous rendez service à l'état par vos travaux, et vous éclairez les citoyens par vos réflexions."

L'inspecteur général des carrières de Paris

En 1777, Charles Axel Guillaumot est Architecte des Bâtiments du Roi, Inspecteur Général des Casernes et Inspecteur Général des Pépinières. C'est alors qu'un fontis détruit trois cents mètres de route et plusieurs immeubles aux environs de l'actuel Boulevard Saint-Michel de Paris. En effet, il existait des vides considérables dans le sous-sol parisien que les carriers exploitaient depuis le XIIème siècle pour en extraire les pierres destinées à la construction de la ville : remparts, Notre-Dame, Palais du Louvre, églises et immeubles divers. Les conclusions du rapport demandé par Louis XVI (devenu Roi a peine trois ans plus tôt) furent fort inquiétantes : tout le sud de Paris, sous Vaugirard, était susceptible de s'écrouler! Le 4 avril 1777, une commission spéciale est nommée pour résoudre ce problème ; peu après, sur proposition du Comte d'Angivillier et du Lieutenant Général de Police, Louis XVI crée l'Inspection des Carrières, dont, le 24 avril 1777, il confie la charge à Charles Axel Guillaumot, promu Contrôleur Général et Inspecteur des Carrières. Ce même jour, un accident rue d'Enfer justifiait cette nomination ; la tâche s'annonçait rude, car il fallait informer le public des dangers du sous-sol, en cartographier les vides, puis le consolider.
Pendant les deux premières années, Charles Axel Guillaumot et ses ingénieurs parcoururent toutes les carrières, effarés du travail a accomplir : 800 hectares, soit six millions de mètres cubes de vides souterrains! D'énormes sommes sont englouties ; le nombre de collaborateurs passe de quarante à quatre cents! Une équipe creuse a la recherche de galeries et de chantiers oubliés, tandis qu'une autre équipe consolide. Des piliers, des bourrages soutiennent les plafonds des chantiers au droit des immeubles de surface. Les premiers travaux réalisés portent la marque de l'esprit artistique et organisateur de Charles Axel Guillaumot : soin des parements en pierres de taille constituant les piliers de soutènement, ciselures des cadres saillants, marquage historique des travaux de consolidation à l'aide d'inscriptions gravées ou peintes sur les pierres. C'est ainsi que "25G1777" signifie "vingt-cinquième confortation de Guillaumot en 1777" et "1G7R" signifie "première confortation de Guillaumot en l'an 7 de la République".


Signature : Ière confortation par Guillaumot en l'an XI de la République (1803)
Cliché Organisation pour la Connaissance et la Restauration d'Au-dessous-terre

Héricart de Thury et les successeurs de Guillaumot poursuivront ces travaux avec le même soin pendant deux siècles, et ces travaux, encore suivis aujourd'hui, constituent l'un des ensembles architecturaux les plus importants de France.
Les carrières de gypse, dont est extraite la "pierre a plâtre", étaient situées hors des enceintes du Paris du XVIIIème siècle; elles recèlent aussi parfois de véritables cathédrales souterraines, aussi la fermeture de toutes les carrières situées sous Ménilmontant fut-elle ordonnée dès 1779.

L'architecte des "Catacombes de Paris"

Dans le même temps, Charles Axel Guillaumot fut chargé de construire l'aqueduc de Paray, et il retrouve en 1784 l'aqueduc construit au début du XVIIème siècle par les Médicis.
En 1785, l'éboulement d'une fosse commune du cimetière des Innocents (actuelle place de la Fontaine des Innocents) dans la cave d'une maison, provoqua des asphyxies ainsi que l'apparition de tumeurs sur les membres d'ouvriers qui travaillaient parmi des odeurs pestilentielles liées à l'accumulation de cadavres insuffisamment enterrés. Il en résulta une certaine panique qui se répandit dans Paris, et l'inspection des Carrières fut chargée de trouver un endroit suffisamment grand pour y aménager un ossuaire susceptible d'accueillir les deux millions de squelettes accumulés pendant huit siècles dans les cimetières et charniers parisiens destinés à disparaître.
Charles Axel Guillaumot envisage d'utiliser à cette fin des carrières souterraines situées hors les murs de la ville. Il fait exécuter les travaux nécessaires au lieu dit "la Tombe Issoire", au Petit Montrouge : assèchement du sol inondé par l'aqueduc Médicis, consolidation des carrières. Les "catacombes de Paris" sont consacrées en 1786, sur onze mille mètres carrés. Durant quinze mois, a la tombée du jour, des ossements y sont transportés ; un siècle plus tard, ces lieux recèleront six millions de corps...

Les années révolutionnaires

En 1787, Charles Axel Guillaumot se voit confier le projet d'agrandissement des écuries royales de Versailles, projet qui est abandonné en raison de son coût exorbitant. En 1789, Charles Axel Guillaumot est nommé Directeur des Manufactures des Gobelins, mais, trop marqué par ses relations avec la haute noblesse en ces temps révolutionnaires, il est écarté de ces responsabilités en 1791 et arrêté, car suspecté d'avoir aidé la famille royale à s'enfuir: selon des bruits courants alors, la famille royale envisageait de se cacher dans les "carrières" de Paris. Mais la famille royale fut arrêtée à Varennes.
Jean Augustin Renard, architecte des Tuileries, prix de Rome, accompagnait souvent Charles Axel Guillaumot dont il épousa la fille en 1788. Jean Augustin Renard fut nommé Inspecteur adjoint des Carrières en 1785, chargé en 1786 avec Brébion de la restauration de l'Observatoire de Paris dirigé depuis 1784 par Cassini - le quatrième et dernier Cassini à occuper ce poste - et admis à l'Académie Royale d'Architecture en 1791. Son fils Axel Augustin François Renard (1788-1874), futur consul a Palerme, épousera Elisa Adèle Taupin de Magnytot (1797-1874), dont la mère née Elise de Lesseps est mon aïeule, tant du côté paternel que du côté maternel.
Charles Axel Guillaumot et Jean Augustin Renard étaient en relations avec la famille d'Axel de Fersen. Aussi furent-ils accusés de s'être impliqués dans le départ de la famille royale vers Varennes : ils sont arrêtés et ne seront relâchés que trois ans plus tard, faute de preuves : en témoigne la transcription des interrogatoires par Lenôtre, parus dans les ouvrages de la série "Vieilles maisons, vieux papiers".
Le 7 octobre 1791, le Maire et le procureur de la Commune, accompagnés d'un membre du comité de la Sûreté Générale, en l'occurrence le peintre David, interrogent longuement Madame Elisabeth et Madame Royale, respectivement belle-soeur et fille de la Reine Marie-Antoinette. Ils n'en obtiennent rien, aussi tentent-ils de les confronter séparément avec le Dauphin, qui avait déposé la veille en présence d'Hébert. Le Dauphin et Madame Royale furent notamment interrogés sur l'architecte Jean Augustin Renard. Madame Royale soutenait ne pas le connaître, mais, contredite avec autorité par le Dauphin son frère, elle dût en convenir.
Le 12 octobre 1793, la Reine Marie-Antoinette, convoquée au palais de Justice, fut encore interrogée sur la préparation de la fuite vers Varennes : Lafayette, Bailly et Renard n'auraient-ils pas favorisé et conduit cette évasion? Indignée, elle assura que Lafayette et Bailly auraient été les derniers auxquels elle se serait confiée, mais garda le mutisme quant à Renard. Elle admet la fourniture de la voiture par Axel de Fersen, car elle savait ce dernier a l'abri en Suède. Quelques mois après son beau-père, Renard était libéré.
Sur la cheminée du salon de ma grand-mère, se trouvait une boite d'écaillé à fond amovible, ornée d'une jolie miniature signée Sauvage. Sous ce fond, se trouvaient deux mèches de cheveux blond cendré ainsi qu'un billet daté de Vérone le 6 août 1795, signé Louis (futur roi Louis XVIII, frère de Louis XVI), disant :

"J'ai été instruit par le compte que m'en rendit le comte d'Entraigues de l'attachement et des services que le Sieur Guillaumot Intendant de mes Bâtiments a rendus au feu Roi mon frère et je charge M. l'abbé (illisible) de l'apport de mon estime et de ma bienveillance
"Vérone 6 août 1795 Louis "

Médaillon signé Piat-Joseph Sauvage

Mèches de cheveux retrouvées dans le double fond de la boîte

Message de remerciement daté de 1795 du futur Louis XVIII à Guillemot (agrandir)

C'est moi-même qui ai fait authentifier cette boite au musée Galiéra, il y a une quarantaine d'années. Le soir même, le comte de Paris, prétendant au trône de France, me téléphonait pour me l'acheter, mais il n'a jamais été question de la vendre : elle fut tirée au sort lors du décès de ma grand-mère, et attribuée alors a l'un de mes cousins germains, Jean-François Triniac de Parade. Nous sommes convaincus que ces remerciements ont, en cette période troublée, un autre objet que les travaux d'architecture de Charles Axel Guillaumot.

Les dernières années

Après sa libération en 1794, Charles Axel Guillaumot est réintégré dans ses fonctions, mais uniquement comme Inspecteur des Carrières et Directeur de la Manufacture des Gobelins (bientôt Manufacture Impériale des Gobelins). Il est l'auteur de nombreux ouvrages traitant de l'architecture, des carrières et des tapisseries. Il décéda le 7 octobre 1807 et fut inhumé au cimetière sainte Catherine, sous cette épitaphe:

ICI REPOSE
CHARLES AXEL GUILLAUMOT
MEMBRE DE L'ACADEMIE D'ARCHITECTURE
ADMINISTRATEUR DE LA MANUFACTURE IMPERIALE DES GOBELINS
INSPECTEUR GENERAL DES CARRIERES SOUS PARIS
MEMBRE DE LA LEGION D'HONNEUR

Cette épitaphe disparut lors de la suppression du cimetière Sainte Catherine, réalisée en 1883 lors des grandes opérations d'urbanisme visant à éliminer les cimetières du Paris des Fermiers Généraux. Ironie du sort, les restes de Charles Axel Guillaumot ont été transférés dans l'ossuaire de Paris dont il avait mené les travaux à partir de décembre 1785 !

Sources : inédites, documents et témoignages familiaux.


L'inspection générale des carrières à la suite du décès de Guillaumot

A la suite du décès de Guillaumot, en octobre 1807, l'inspection générale des carrières entra dans une période agitée.

Une commission administrative fut constituée par les 3 anciens collaborateurs directs de Guillaumot (Le Bossu, Caly, Husset). Mais ces personnes ne semblent pas avoir eu le niveau voulu pour diriger le service.

Guillaumot lui-même avait souhaité que le corps des ingénieurs des mines reprenne la responsabilité du service, et dès 1807, le Conseil des mines demande à Louis-Etienne-François Héricart de Thury de faire une visite des carrières. Cette proposition est approuvée par le ministre de l'intérieur. A ce stade, la commission administrative garde le pouvoir.

Napoléon souhaitait également que les ingénieurs des mines s'occupent de mettre de l'ordre dans les carrières souterraines de Paris. Le 21 mars 1809, le ministre, sur proposition du Conseil des mines, charge l'ingénieur en chef des mines Hassenfratz d'examiner et de vérifier les projets du service des carrières. L'objectif est évidement d'arriver à nommer un vrai directeur.

Hassenfratz estime en effet que la situation n'est pas claire, et propose au Conseil des mines de confier officiellement la direction du service des carrières à Héricart de Thury.

Le 21 avril 1809, le Préfet de la Seine Nicolas FROCHOT signe un arrêté portant organisation de la direction du travail des carrières. Mais le nom de Héricart de Thury n'apparaît toujours pas officiellement, bien qu'il commence à exercer les fonctions.

Le décret impérial du 18 novembre 1810 rend statutaire que l'inspecteur général des carrières appartienne au corps des mines (article 8) : A l'avenir, le remplacement de ces ingénieurs , ainsi que celui de l'inspecteur général des carrières , actuellement ingénieur en chef des mines, s'opérera par des individus du corps impérial des mines. Il semble bien que le décret fasse allusion à Hassenfratz, alors ingénieur en chef des mines. Héricart de Thury a été nommé ingénieur en chef par décret du 13 décembre 1810, ce qui lui a probablement permis d'accéder à la fonction d'inspecteur général des carrières fin 1810.

Les membres de la commission, François-Benoît Husset (1751-1818), Louis Hubert Caly (1756-1832) et Jean-Baptiste Lebossu (décédé en 1814) restent en poste et sont intégrés au corps des mines en qualité d'ingénieurs.

Ce n'est que le 5 février 1812, lorsque l'ingénieur des mines Jean-Louis Trémery est nommé adjoint de Héricart de Thury, que le Préfet de la Seine mentionne Héricart de Thury comme inspecteur général des carrières. La nomination de Trémery sera approuvée par le ministre le 18 février 1812. Trémery deviendra lui-même inspecteur général des carrières en 1831, après le départ du vicomte Héricart de Thury qui était tombé en disgrâce après la chute de Charles X et le départ à la retraite forcé des plus anciens dirigeants du corps des mines.


Quand carrières de maçon et de Franc-Maçon s'entrecroisent

Le texte qui suit est extrait de l'article "Rites d'intégration à l'ENSMP et rituel en usage dans la franc-maçonnerie", par Gilles Thomas et Pierre Matarèse, ABC Mines, n° 34, février 2012.

Charles-Axel Guillaumot, né en 1730, grand prix de Rome d'architecture en 1750, entra à l'Académie royale d'architecture en 1773 et figure sur la liste des adeptes de la Loges des Neufs Sœurs, laquelle comptait avant 1798 vingt académiciens. Dans cette loge, on retrouve des personnalités dont les noms nous ont été transmis par les livres d'Histoire : Bailly, Condorcet, Danton, Camille Desmoulins, Benjamin Franklin, mais également Jacques Delille moins connu mais dont nous aurons l'occasion de reparler plus loin, ainsi que Voltaire initié la veille de sa mort.

Pendant la Révolution française, ou plus exactement pendant sa période la plus noire que fut la Terreur, Guillaumot fut emprisonné à Versailles. Non seulement il ne fit pas partie des charretées qui en sortaient pour finir sur le fil du rasoir national de la « faiseuse de veuves », mais en sortant de son incarcération il retrouva son poste à la tête de l'Inspection, qui ne cessa jamais ses activités, quelles que soient les périodes sombres de l'Histoire de France : ici la Révolution française et sa dérive la Terreur, mais également la Commune de 1830, celle de 1848, le conflit franco-prussien de 1870, la Commune parisienne de 1871.

« Mais citoyens législateurs, la Révolution d'une part a quelquefois ralenti, souvent suspendu les travaux qui consolidaient le sol que nous habitons. D'une autre part le conflit du despotisme et de la Liberté, les tourments politiques, les canons des hommes libres ont retenti dans ces vastes souterrains et ont ébranlé les piliers naturels qui supportent le théâtre de nos mémorables combats. »

Le Directoire exécutif (Pluviôse AN VI)

En 1791 et 1792, Guillaumot fut donc destitué de toutes ses charges et fonctions et obligé de vendre ses propriétés et « ses effets les plus précieux, pour subsister pendant les orages de la Révolution, lui et sa famille, composée alors de sa femme, de sa fille, de son gendre, de deux petits enfants en bas-âge, et de cinq domestiques » [Note autobiographique de Guillaumot datée du 8 prairial de l'an XI de la République française (31 mai 1803), citée dans le Dictionnaire des Architectes français par Adolphe Lance (1872).]

Les Neuf Sœurs se reconstituent à la fin de 1805, et sur son tableau de 1806 on retrouve à nouveau Guillaumot (qui décédera l'année suivante), ainsi que quatre « rescapés » de 1786 (que l'on ne pouvaient appeler comme cela puisque le mot lui-même date de la catastrophe de Courrières en 1906).

C'est Charles-Axel Guillaumot qui est également à l'origine de la codification trinomiale permettant d'identifier chacun des piliers de consolidation érigés dans les carrières sous Paris, savoir un Numéro d'ordre, une Initiale (celle de l'Inspecteur des carrières alors en titre), et l'Année de réalisation. La plus ancienne que l'on puisse trouver est donc 1 G 1777, puisque Guillaumot en est le créateur ; mais n'est-il point troublant que l'on trouve sur le tablier de maçon une étoile sur laquelle est inscrite la lettre « G » (parfois interprété comme signifiant Géomètre) ?

Parfois, il arrive que l'on trouve sur les graphismes gravés de numérotation de ces piliers maçonnés, des triangles qui viennent s'intercaler entre les trois éléments de ce code : est-ce une simple ornementation par pur esthétisme de la part du graveur (ou juste une forme élémentaire relativement facile à obtenir), ou bien faut-il y voir une marque supplémentaire d'un franc-maçonnisme insufflé par la tête de l'Inspection ?

Quoi qu'il en soit, notons que ce principe des gravures codifiées dura jusqu'en 1907 sous l'inspectorat de Charles Émile Wickersheimer (en poste de 1896 à cette année-là), et que lui-même fut Franc-Maçon. Quant aux autres Inspecteurs, qui se succédèrent depuis Guillaumot, qui tous sont issus du Corps des Mines jusqu'à nos jours, nous n'avons pas trouvé trace de leur appartenance ou non à une loge quelconque.

Voir aussi : Le sauveur de Paris, Gilles Thomas et Charles de Saint-Sauveur, Le Parisien, 26 mai 2013, p. 39

Libres propos de Gilles Thomas (20/2/2014, site www.franceculture.fr) :
En revanche, et malencontreusement, si les cataphiles connaissent et vénèrent Charles-Axel Guillaumot, il n'en est pas de même de la très grande majorité des historiens alors que celui-ci fut entre autres, architecte du roi Louis XVI. Et comme l'avait fait remarquer Graham Robb dans son livre "Parisians" ("Une histoire de Paris par ceux qui l'ont fait"), aucune rue dans Paris ne porte son nom ce qui serait la moindre des choses pour l'honorer. Pourtant tout récemment, au cours de la séance du Conseil municipal des 22 et 23 avril 2013, le Conseil de Paris a émis le voeu : « Que le nom de Charles-Axel Guillaumot soit attribué à une voie en son hommage dans le 14e arrondissement, à proximité de la place Denfert-Rochereau près de l'entrée des catacombes et de l'Inspection générale des carrières où cet hommage prend tout son sens. » Souhaitons que cette délibération aboutisse maintenant à une réalisation sans trop tarder, ce qu'attendent depuis lors les 800 descendants de Guillaumot, à la tête desquels une remarquable et merveilleuse nonagénaire que je salue très affectueusement [allusion évidente à Suzanne de Jenlis].


Suzanne de Jenlis en avril 2013 (92 ans)
Photo R. Mahl

Suzanne de Jenlis (1920-2016), descendante en ligne directe de Guillaumot, est l'auteur de l'article ci-dessus concernant son ancêtre.
Elle est la veuve de l'ingénieur général de l'armement Gonzague Bosquillon de Jenlis (1915-2000 ; X 1936), qui a dirigé l'Ecole nationale supérieure de l'Aéronautique (Sup Aéro) et qui a fondé l'ENSTA en fusionnant 5 écoles d'ingénieurs existantes.
Sur la photo, à côté de Mme de Jenlis, sur le canapé, un exemplaire de La Jaune et la Rouge, revue des anciens élèves de Polytechnique. Mme de Jenlis est restée très proche de la communauté des anciens X, même après la mort de son époux. Elle rencontrait notamment André Giraud et Pierre Guillaumat, ainsi que le professeur Laurent Schwartz, avec lequel elle discuta longuement de l'opportunité de faire entrer des filles à l'Ecole polytechnique (elle raconte que Laurent Schwartz voulait dépister les gènes des mathématiciens et craignait de ne pas les retrouver dans le beau sexe ...).

Suzanne de Jenlis, née Triniac, est par ailleurs l'héritière du château du Chassan. Celui-ci est passé dans la famille Triniac en 1844, dans les circonstances suivantes :

Vers 1325, un château médiéval a été construit par la famille de Ponsonaille, au Chassan. A partir de 1750, Jean-François de Ponsonnailles de Grizoles (1er comte de Chassan) démolit le vieux château et construit à la place le château actuel du Chassan. Un de ses petits-fils, Hippolyte de Ponsonaille, comte de Chassan (1809-1844) hérita du château mais n'eut pas d'enfant. Il fit un testament qui exigeait un mariage entre la fille de l'un de ses cousins, Alexis Loussert, et son autre cousin, Alfred Triniac, les deux étant co-héritiers du château et des terres. Toutefois, le mariage ne se réalisa pas, et finalement la famille Triniac devint seule propriétaire des biens.
 
La salle du cerf du château du Chassan
Le château se visite en été, ou bien le reste de l'année sur rdv

Inauguration de l'esplanade Charles-Axel Guillaumot, le 4 octobre 2017


Divers membres de la famille et personnalités politiques ont participé à l'inauguration de l'esplanade Guillaumot le 4/10/17.
A côté du portrait de Guillaumot, de gauche à droite :
Gilles THOMAS (principal organisateur), Arnaud de JENLIS (descendant de Guillaumot), Annie LAVAL-DUBOUL (descendante de Guillaumot), Célia BLAUEL (adjointe à la maire de Paris, chargée de l'environnement), Danièle POURTAUD (conseillère du 14ème arrondissement), Franck AVICE (directeur à la RATP)

La nouvellement dénommée "esplanade Charles-Axel Guillaumot" se situe devant la gare Denfert-Rochereau, à côté de l'entrée dans les catacombes, et à proximité du siège de l'Inspection générale des carrières de Paris (situé place de la porte de Vanves, Paris 14ème).

Cet endroit est également situé tout près de l'endroit, précédemment dénommé "rue d'Enfer", où une maison s'effondra à cause de la rupture du toit d'une carrière souterraine en 1777 le jour même de la prise de fonction de Guillaumot à l'IGC. Remarquable jeu de mot : la sinistre "rue d'Enfer" fut renommée rue (1879) puis avenue Denfert Rochereau (1946) !

 

A quelques pas de là, l'hôpital Cochin offre une entrée dans les catacombes. On y trouve des traces nombreuses de l'oeuvre de Guillaumot.
Ainsi, l'inscription 44G1781 permet de localiser le 44ème confortement des catacombes effectué sur ordre de Guillaumot en 1781, soit 4 ans après sa prise de fonction.
Ci-contre une autre inscription que l'on trouve sur la paroi calcaire, datant d'il y a plus de 200 ans, et qui permet de se localiser sous l'hôpital Cochin

Quelques habitués des catacombes rencontrés lors de l'inauguration de l'esplanade Charles-Axel Guillaumot :

Gilles THOMAS, fonctionnaire de la Ville de Paris, dont la tenue vestimentaire illustre la création de l'IGC en 1777 Jean-Luc LARGIER, président de l'ASNEP (Association Sources du Nord - Etudes et Préservation), spécialiste d'anciens aqueducs Philippe THEVENON, président de la SEADACC, une association de cataphiles Jean LAURENT, spécialiste de l'histoire des débuts de l'IGC Céline HOURIEZ, enseignant-chercheur à MINES ParisTech,
(en discussion avec G. THOMAS)

Mis sur le web par R. Mahl