Arrivée du Président de la République à l'Ecole des mines de Saint-Etienne
Extraits d'un document commémoratif publié en 1933 ; auteur inconnu.
Saint-Etienne, le 22 octobre 1933
Avant la grande guerre, la croix de la Légion d'honneur n'avait jamais été décernée qu'à des personnes, à des unités militaires ou à des communes.
Si les événements qui ont bouleversé tant de choses et fait éclore tant de marques d'héroïsme ont conduit, en ces derniers temps, à modifier ces règles plus que centenaires, elles ne l'ont été du moins qu'avec une extrême parcimonie.
C'est ainsi que quelques grandes écoles civiles, qui avaient fourni à l'armée française, dans les réserves, de très nombreux officiers préparés par une instruction technique supérieure et leur haute culture générale à devenir des chefs, ont pu être assimilées aux grandes écoles militaires, telles que Polytechnique et Saint-Cyr, et ont reçu à leur tour la croix de guerre et la croix d'honneur.
Ce sont : l'Ecole centrale des arts et manufactures, l'Ecole nationale des eaux et forêts, l'Ecole nationale supérieure des mines de Paris et l'Ecole nationale supérieure des mines de Saint-Etieune.
La croix de guerre avait été remise à l'Ecole nationale supérieure des mines de Saint-Etienne, le 8 juin 1926, par le maréchal Fayolle, avec la citation suivante :
« L'Ecole nationale des mines de Saint-Etienne, grâce à ses nobles traditions et à l'instruction spéciale donnée à ses élèves, a fourni, dans les réserves, principalement dans l'infanterie, une magnifique phalange de cadres, dont les brillantes qualités intellectuelles et morales et la conduite héroïque ont largement contribué à assurer la victoire. »
Avec ses 143 morts sur 468 mobilisés (soit 30 %), l'école de Saint-Etienne détient, parmi les écoles civiles, un douloureux et glorieux record. Ses élèves ou anciens élèves ont réuni sur leurs poitrines : 14 médailles militaires ; 164 croix de chevaliers de la Légion d'honneur, 6 rosettes d'officiers, une cravate de commandeur de la Légion d'honneur et ils ont obtemi 658 citations à l'ordre du jour.
Le 21 octobre 1933, un décret, signé du ministre de la Guerre et du ministre des Travaux publics, donnait une double sanction à la gloire militaire de l'école et au mérite civil de ses élèves en lui conférant la croix de la Légion d'honneur.
Ce décret est ainsi conçu :
Le Président de la République française,
Sur le rapport du président du conseil, ministre de la guerre, et du ministre des travaux publics,
Vu le décret-loi organique de la Légion d'honneur du 16 mai 1852,
Le conseil de l'ordre entendu,
DÉCRÈTE :
ARTICLE PREMIER. La croix de chevalier de la Légion d'honneur est conférée à l'Ecole nationale supérieure des mines de Saint-Etienne.
ART. 2. Le président du conseil, ministre de la guerre, le ministre des travaux publics et le grand chancelier de la Légion d'honneur sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret.
Fait à Rambouillet, le 10 octobre 1933.
Albert LEBRUN.
M. le Président de la République Albert Lebrun, ingénieur au Corps des mines, a tenu, comme il l'avait fait pour les grandes écoles parisiennes, à remettre en personne à l'Ecole de Saint-Etienne cette haute distinction, et c'était là, nous pouvons le dire, l'un des principaux motifs de son voyage dans la Loire, le 22 octobre 1933.
La cérémonie, émouvante et simple, s'est déroulée à trois heures de l'après-midi dans la grande cour d'honneur de l'Ecole, récemment reconstruite cours Fauriel, suivant un plan d'une magnifique ampleur.
Sous un ciel maussade, mais qui avait fort opportunément arrêté ses pluies persistantes des jours précédents, les allées du cours Fauriel étaient noires de monde et l'enceinte même de l'Ecole remplie de près de 2.000 personnes.
Sous le péristyle, face au public, une tribune surélevée est réservée au Président de la République et à sa suite. En face d'elle, et contre la grille d'entrée, deux autres sont réservées aux invités : notabilités, amis de l'Ecole, familles des anciens élèves et des élèves, qui débordent tout autour dans la vaste cour. Cinéastes et photographes sont à leur poste.
Le passage ménagé au cortège présidentiel est maintenu par une double haie formée par les élèves de l'Ecole en grande tenue, l'épée au poing.
A l'heure précise, le commandement Garde à vous ! retentit, puis la sonnerie Aux Champs! et la Marseillaise. Les élèves présentent l'épée. A leur groupe s'est joint un groupe important d'anciens élèves, officiers de réserve, en tenue.
M. Albert Lebrun, suivi des personnalités de sa maison civile et militaire, de M. François Albert, ministre du travail, de M. Serre, ministre du commerce, de M. Miellet, ministre des pensions, de M. Paul Appel, sous-secrétaire d'Etat aux travaux publics, est accueilli à la porte principale par M. l'inspecteur général Caltaux, président du Conseil de l'Ecole, et M. l'ingénieur en chef Descombes, directeur.
La suite du Président de la République comprend encore : M. Magre, secrétaire général de la présidence ; M. le général Braconnier, secrétaire général militaire de la présidence ; etc.
M. le Président de la République passe les élèves en revue et, suivi du cortège qui admire leur élégante et pittoresque tenue, gagne la tribune d'honneur, salué des acclamations de la foule.
Aussitôt que le silence s'est rétabli et, devant les microphones, accessoires modernes assurément peu élégants, mais qui, dans la circonstance, ont permis à tant de nos camarades et de nos amis dispersés dans le vaste monde de partager nos émotions, M. Caltaux, président du Conseil de l'Ecole, sur l'invitation que lui adresse M. Albert Lebrun, prend la parole en ces termes :
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE,
Successeur du regretté M. Gruner à la présidence du Conseil de l'Ecole nationale supérieure des mines de Saint-Etienne, j'ai mission de vous souhaiter la bienvenue au seuil de ses grilles : nous espérons que vous ne les trouverez pas, à la première vue, trop austère; car notre Conseil est fier de présenter au Président de la République, ingénieur des mines, une école des mines toute récente, moderne comme installation, laboratoires et outillage. Sachant l'intérêt que Monsieur le Ministre des Travaux publics porte à ses grandes écoles, le Conseil l'en remercie bien sincèrement, et il sera reconnaissant à Monsieur le sous-secrétaire d'Etat Appel de vouloir bien lui transmettre sa sincère gratitude. Le Conseil est chargé de la gestion financière de l'école; il s'attache, et il s'attachera, dans l'avenir, à la tenir au niveau des progrès réalisés d'une façon à peu près constante dans l'industrie minière.
Fondée sous le premier Empire à Geislautern, l'école des mineurs, comme elle s'appelait à l'époque, se trouva transportée en 1816 au milieu du bassin de la Loire par l'ingénieur en chef des mines Beaunier, qui en fut réellement le premier directeur; elle était alors installée dans la rue de la Préfecture, où elle demeura jusqu'en 1850. Une loi du 23 juillet 1847 autorisa l'achat du château de Chantegrillet en vue du transfert de l'école des mineurs dans un domaine de 12 hectares, dont une partie fut d'ailleurs cédée par l'Etat à la ville de Saint-Etienne : elle y est restée quatre-vingts ans. L'augmentation du nombre des élèves, l'institution d'une troisième année d'études, le développement des laboratoires, firent que nous avons tous connu le château de Chantegrillet, insuffisant, malgré les aménagements essayés et les constructions nouvelles. Quelques années avant la guerre de 1914, on avait mis au point un vaste programme de démolition, reconstruction sur place et transformation complète. Mais, pendant qu'on dressait avec soin ces plans, Chantegrillet, temple de la mine bâti sur la mine, fut victime de l'industrie houillère : affaissements et crevasses mirent à néant le programme si laborieusement établi. C'est pourquoi l'école qu'on avait appelée l'Ecole nationale des mines de Saint-Etienne en 1908, puis Ecole nationale supérieure des mines de Saint-Etienne en 1926 a été reconstruite ici, sur un terrain stable et suffisamment vaste. Elle a coûté plus de 10 millions, dont 1 million 60.000 francs fournis par l'Etat, 1 million par la ville, 300.000 francs par le département, et 7 millions 800.000 francs souscrits par l'industrie française, comités et sociétés.
Depuis que Beaunier l'a ramenée de Geislautern dans la vallée du Furan, l'école a grandement servi au recrutement du personnel dirigeant des houillères françaises : aux dernières statistiques, ses anciens élèves comptaient pour 53 % des directeurs et ingénieurs du fond. Un élève sur deux, à peu près, fait sa carrière dans la mine ; un sur huit va dans la métallurgie, un sur six dans les industries autres que la mine et le métal. D'ailleurs, bien que les élèves d'ici aient toujours mis quelque amour-propre à sortir mineurs, bien que les professeurs aient toujours orienté leur enseignement vers la mine et l'usine, l'école a fourni des savants; elle peut citer parmi ses anciens élèves des théoriciens dont le nom a déjà résisté à l'épreuve du temps : Fourneyron, Boussingault, Murgue, Pinel, Pourcel, de qui l'on citait déjà les travaux scientifiques lorsque nous faisions nos études, plus récemment, Grand'Eury et Fayol. Parmi ses professeurs elle a compté Clapeyron, Combes, Gruner, Mallard, Rateau, Termier enfin, de qui l'école tient à conserver le buste en place d'honneur. De pareils professeurs, de tels élèves, devaient forcément s'apprécier les uns les autres : la bonne harmonie, une entière communauté d'idées, ont toujours existé ici entre les élèves et leur corps enseignant.
29 ingénieurs anciens élèves de Saint-Etienne sont morts victimes du devoir professionnel : grisou, éboulements, feux, catastrophes diverses. Au devoir militaire, l'Ecole a sacrifié 143 de ses anciens élèves, tombés au champ d'honneur, sur 468 mobilisés. Elle a obtenu la citation suivante, lue ici par le maréchal Fayolle le 7 juin 1926 :
« L'Ecole nationale supérieure des mines de Saint-Etienne, grâce à ses nobles traditions et à l'instruction spéciale donnée à ses élèves, a fourni dans les réserves, principalement dans l'infanterie, une magnifique phalange de cadres dont les brillantes qualités intellectuelles et morales et la conduite héroïque ont largement contribué à assurer la victoire. »
Monsieur le Président de la République, le Conseil, fier de son Ecole, vous est respectueusement et profondément reconnaissant, ainsi qu'à Monsieur le Ministre des Travaux publics et à Monsieur le Sous-Secrétaire d'Etat, d'avoir bien voulu lui accorder et lui remettre vous-même la Légion d'honneur. L'Ecole des mines de Saint-Etienne - j'entends par là ses élèves, ses anciens élèves, son corps enseignant son Conseil aussi - se rappelait avec émotion la visite du maréchal Fayolle venu lui conférer la croix de guerre en 1926. Honorée aujourd'hui de la visite du président Albert Lebrun, elle fait, toute entière j'en suis sûr, la promesse de demeurer fidèle à ses traditions de labeur minier et de gloire militaire ; cette promesse. Monsieur le Président de la République, l'Ecole est tout particulièrement heureuse de l'exprimer devant vous.
M. Descombes, directeur de l'Ecole, s'exprime ensuite ainsi :
MONSIEUR LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE,
L'Ecole nationale supérieure des mines de Saint-Etienne a été fondée sous le nom d'Ecole des mineurs, par une ordonnance du 2 août 1816, en vue de remplacer les écoles des mines établies à Pesey et Geislautern et pour donner à l'exploitation des mines du pays tout le développement et perfectionnement dont cette industrie minérale était susceptible.
Cette conception du rôle d'une école n'a rien qui doive surprendre si l'on imagine qu'à cette époque, la grande industrie, déjà très développée en Angleterre, naissait en France, et du même coup s'imposait le sentiment des progrès nécessaires dans la création de l'énergie indispensable à une oeuvre industrielle féconde, et l'importance de l'exploitation rationnelle des mines de houille.
Nous devons à cette conception, si française par sa logique, la situation privilégiée qu'occupé l'école au centre d'un bassin houillier important, au contact de travaux souterrains réputés difficiles et d'usines métallurgiques en incessantes transformations, véritable laboratoire industriel mis à la disposition de nos élèves qui, au cours de fréquentes visites, y trouvent le complément indispensable de leur formation théorique et y prennent le goût de leur futur métier.
Cette solidarité entre l'école et l'industrie minérale, voulue dés l'origine par l'ingénieur en chef des mines Beaunier, ne s'est pas démentie un seul instant. Mais le principe de la pénétration mutuelle de la théorie et de la pratique ne devait pas seulement être réalisé dans des visites directement profitables aux élèves, il fallait aussi qu'il intervint pour guider le choix du corps professoral. C'est une vérité actuellement admise que les professeurs de l'enseignement technique supérieur doivent être choisis parmi les personnes effectivement, réellement mêlées au métier correspondant à la spécialité qu'ils enseignent.
Ainsi nous voyons Beaunier et ses professeurs directeurs ou ingénieurs d'entreprises industrielles de la région stéphanoise ; Beaunier aurait même voulu voir doter l'école d une exploitation qu'elle aurait administrée elle-même. Depuis, cette coopération de la science et de l'industrie s'est maintenue sous d'autres formes, et elle a donné les plus brillants résultats. La collaboration des élèves et des maîtres, voulue par Beaunier, a permis de réaliser un enseignement dont le succès continu est la meilleure preuve de l'excellence de la méthode adoptée.
C'est la même préoccupation, de rendre plus solidaires encore l'école et l'industr'e minérale, qui a conduit à remplacer, en 1919, le comité de perfectionnement par un conseil possédant des représentants plus nombreux de la mine et de la métallurgie. Ainsi sont directement associés à la vie de l'école et lui apportent le précieux concours de leur grande expérience ceux qui sont normalement conduits à utiliser les services des ingénieurs qu'elle forme.
L'évolution de l'enseignement a suivi sans retard le progrès industriel; faire rapidement l'histoire des modifications profondes apportées aux cours professés, c'est vouloir rappeler en quelques mots les étapes importantes du développement scientifique et industriel caractéristique des cent dix-sept années qui nous séparent de la fondation de l'école.
A l'heure actuelle, trois années d'études, au cours desquelles les élèves reçoivent d'abord la formation théorique complémentaire, indispensable à un ingénieur, puis abordent, sans oublier les sciences sociales, les cours intéressant directement leur futur métier ; les leçons sont complétées par des travaux pratiques importants et par les visites de mines ou d'usines métallurgiques de la région stéphanoise. Ces visites ne sont pas superficielles et hâtives ; les élèves restent affectés, par petits groupes, deux mois de suite à la même fosse et y trouvent normalement les éléments qu'ils utiliseront pour la rédaction des travaux personnels qui leur sont demandés ; de même chaque visite d'usine a un objet nettement défini : l'étude de l'un des services de l'établissement.
Enfin les élèves exécutent, au cours de leur seconde et troisième années, des voyages et stages dont ils tirent le meilleur profit en raison même de la première initiation qu'ils ont reçue dans le bassin de Saint-Etienne. Les voyages d'études datent à l'école de plus de cent ans ; dès la première année d'ouverture des cours l'on s'y est préoccupé de rendre les travaux souterrains familiers aux élèves. Dès le début sont apparues également les courses géologiques, actuellement au nombre de deux, exécutées sous la conduite du professeur de géologie et durant chacune une semaine.
Un programme de cette grandeur, qui montre avec quel souci l'école tient à maintenir le contact avec la réalité industrielle, nécessite des installations importantes.
Tout ce qui est indispensable à la formation d'un jeune ingénieur se trouve rassemblé dans les bâtiments magnifiques qui s'élèvent devant vous, renfermant des salles d'études, amphithéâtres, salles de collections, laboratoires clairs et bien aérés, une vaste bibliothèque où les élèves peuvent consulter les ouvrages et publications techniques les plus variés.
Cet ensemble n'est pas immuable et grâce aux subventions accordées par les collectivités et par les comités industriels, l'école poursuit sans discontinuer le développement et l'aménagement de ses collections, l'amélioration du matériel de ses laboratoires par le perfectionnement des appareils existants et l'achat d'appareils nouveaux, sans oublier le bureau d'essais, actuellement, plus que jamais, capable de rendre les plus grands services aux industriels.
Mais l'école n'a pas toujours eu à sa disposition des installations aussi grandioses que celles qu'elle occupe aujourd'hui. L'histoire de la série des agrandissements et transformations mobilières qu'elle a subis, démontre que, pendant plus d'un siècle, l'école ne put offrir à ses élèves, à ses professeurs qu'un espace restreint, insuffisant ; ce qui entraîna parfois de cruels embarras.
Malgré les difficultés rencontrées, l'Ecole des mines de Saint-Etienne a rempli fidèlement le rôle qui lui a été confié par l'ordonnance du 2 août 1816 ; elle a été et elle est demeurée vraiment l'Ecole des mineurs. Aujourd'hui, dotée d'installations largement conçues, certaine de pouvoir, dans les bâtiments et sur les terrains qu'elle occupe, se développer autant qu'il sera jugé nécessaire de le faire, assurée de l'appui des pouvoirs publics, l'école voit sa tâche rendue plus agréable et plus facile. Elle n'a d'autre ambition que de bien servir.
Monsieur le Président de la République,
L'école a su former des ingénieurs éminents, artisans dévoués de la prospérité nationale, ayant la plus haute compréhension de leur devoir de conducteurs d'hommes: elle a su préparer également des chefs qui, aux heures graves d'août 1914, sont partis avec le plus magnifique courage et ont donné sans compter leur sang, leur vie.
Les jeunes comprendront le devoir qui s'impose à eux : héritiers et gardiens d'un passé de gloire et d'honneur, fruit du labeur et des sacrifices de leurs anciens, ils travailleront de toute leur âme à augmenter ce patrimoine et, comme d'autres si nombreux l'ont vaillamment prouvé, ayant beaucoup reçu, ils sauront tout donner.
Il n'est pour eux d'autre moyen de vous prouver leur profonde et respectueuse reconnaissance pour l'éclatant témoignage que vous avez bien voulu apporter à leur chère école de la grandeur de ses destinées, en un jour dont le souvenir vivra éternellement dans leur coeur.
L'école fait le serment de rester fidèle aux traditions magnifiques dont elle est justement fière. Elle est heureuse, Monsieur le Ministre, de prendre cet engagement d'honneur en votre présence et nous vous prions de bien vouloir transmettre à Monsieur le Ministre des Travaux publics l'expression respectueuse de nos sentiments de fidèle attachement et de sincère gratitude pour l'intérêt bienveillant qu'il nous porte, pour l'accueil qu'il réserva à la délégation venue lui exposer les titres de l'école à la distinction qui lui sera remise aujourd'hui, et pour la générosité avec laquelle il fit sienne une cause qui nous était particulièrement chère.
Puis, M. Deflassieux, président de la Société amicale des anciens élèves de l'Ecole, prend la parole à son tour :
Vous voudrez bien permettre au représentant de l'association des anciens élèves de vous adresser très respectueusement la parole à son tour et de vous exprimer, au nom de tous ses camarades, la fierté qu'ils éprouvent aujourd'hui.
Nous sommes fiers de voir au milieu de nous le chef de l'Etat, en la personne de qui nous avons salué avec une joie profonde, dès son arrivée au pouvoir, l'ingénieur éminent issu de ce même Corps qui a fourni à notre école tant de maîtres illustres.
Nous sommes fiers du témoignage que vous avez bien voulu apporter - nous savons avec quelle particulière sympathie - au passé plus que centenaire de l'Ecole des mines, marqué de tant de progrès réalisés dans l'industrie par les inspirations de ses élèves.
Nous sommes fiers surtout que vous affirmiez solennellement aujourd'hui la part de gloire qu'à faite à la France la phalange de nos camarades tombés au champ d'honneur :
Victimes de la mine, qui ont donné leur vie. dans des circonstances parfois atroces, simplement parce que c'était leur devoir.
Victimes héroïques de la guerre, dont la proportion a singulièrement dépassé les moyennes que l'on peut établir dans la plupart des groupements civils.
Soyez bien assuré, Monsieur le Président, qu'aucun de ceux qui sont ici présents n'oubliera jamais cette journée et que le souvenir du geste que vous allez accomplir restera profondément gravé dans nos coeurs à tous.
M. Paul Appel, sous-secrétaire d'Etat, remplaçant M. Paganon, ministre des travatix publics, empêché au dernier moment de se rendre à Saint-Etienne, lit alors un discours [non reproduit ici]. Ensuite le Président prononce son discours d'une voix claire qui impressionne vivement l'assistance [non reproduit ici].
Le silence se fait dans la foule lorsqu'au commandement d'un officier de la maison militaire du président, éclate la sonnerie Ouvrez le ban.
Un élève de troisième année, M. Pointurier, portant le coussin sur lequel, le 8 juin 1926, le maréchal Favolle a épingle la croix de guerre, monte sur l'estrade. Il est accompagné de deux anciens combattants, nos camarades Doligez, officier de la Légion d'honneur, capitaine de chasseurs, et Olagnon, chevalier de la Légion d'honneur, capitaine du génie, tous deux sabre au clair.
La minute pendant laquelle le Président épingle la croix d'honneur sur le coussin est profondément émotionnante.
Les clairons sonnent Fermez le ban.
Les croix sont présentées à l'assistance, dont les applaudissements éclatent.
Pendant que l'Harmonie des mines de la Chazotte exécute un excellent pas redoublé, M. le Président de la République et sa suite, sous la conduite de M. Caltaux, de M. Descombes, de M. Deflassieux et des professeurs, parcourt rapidement les salles de l'Ecole : laboratoires, collections, amphithéâtres, etc..., etc...
Au cours de cette visite, il est remis à M. Albert Lebrun, comme souvenir de la journée, au nom de la Société amicale, un exemplaire des Mémoires de Boussingault, l'illustre "ancien" de l'Ecole de Saint-Etienne. Ce bel ouvrage, en cinq volumes, avait été tiré, sur la fin de la vie de Boussingault, à 300 exemplaires seulement ; il est devenu aujourd'hui assez rare. Celui qui est offert au Président a reçu une belle reliure classique en plein maroquin bleu et porte la dédicace imprimée au fer de la Société amicale.
La cérémonie est terminée, le Président quitte l'Ecole avec le même cérémonial qu'à l'arrivée.
A la nuit déjà tombante, sur la façade de l'Ecole ressort mieux encore une grande croix de la Légion d'honneur, illuminée ; depuis le début de la cérémonie qu'elle symbolise, les portes sont alors ouvertes et de nombreuses personnes la visitent à leur tour et en admirent la belle ordonnance, la richesse des collections et l'heureux aménagement des salles d'études et des laboratoires.