Décédé le 7 novembre 2016 à Perpignan.
Ancien élève de l'Ecole des Mines de Paris (promotion 1958). Master of Science, Berkeley (physics of solid). CPA Paris (renommé executive MBA de HEC).
Publié dans MINES Revue des Ingénieurs, #488, Novembre/décembre 2016 :
Perdre un ami c'est douloureux, perdre un ami d'enfance c'est abandonner une partie de sa mémoire.
François et moi nous nous connaissions depuis 1947. Nous étions ensemble en 6e au lycée de Montmorency. 69 ans plus tard, nous nous émerveillions encore de la qualité de l'enseignement et de la situation exceptionnelle de cet établissement. Des années riches, aussi bien du point de vue académique que ludique... Le petit train de Montmorency, du nom de "Refoulons", avec sa veille locomotive à vapeur et ses voitures à impériales uniques au monde, nous offrait matin et soir une distraction sans égale. Récemment, François et moi souriions encore à la lecture du décret impérial du 10 septembre 1864 annonçant sa création. Ces années passèrent trop vite.
François intègre l'école des Mines de Paris en 1958. Avec un sens de l'humour qui ne l'a jamais quitté, sa première impression fut de tomber nez à nez avec François Vinçotte, gravé sur le mur de l'École, en hommage à son oncle mort pour la France. François se passionne pour la physique du solide. Grâce au professeur Lacombe, il obtient une bourse d'assistant de recherche à Berkeley en 1961, pour étudier les boucles de dislocation dans l'aluminium écroui.
Sa situation familiale et la naissance de son premier fils le conduisent à rentrer en France, avec un certain regret. En France, l'aluminium c'est Pechiney. Dès la fin de ses obligations militaires, François entre donc au laboratoire de l'usine d'Issoire pour mettre au point les alliages aéronautiques. Sa carrière évolue entre les branches aluminium et cuivre. En 1977, il rejoint le groupe CGE en tant que DG adjoint de la branche isolateurs en verre. En 1981, le groupe CGE est nationalisé et l'activité isolateurs est vendue aux Italiens.
François décide alors de poursuivre son chemin professionnel tout seul, dans le monde moins conventionnel et plus risqué des entrepreneurs et des échanges commerciaux. La fonction de conseil lui laisse plus de liberté. Il peut alors s'adonner à ce qu'il préfère : écrire. En plus des conseils en commerce international et en stratégie d'entreprise qu'il rédige pour ses clients, il se passionne pour les analyses économiques et culturelles de l'actualité mondiale.
Infatigable, François mène de pair la publication des Gym'notes®, des Bulletins d'humeur, et la rédaction de plusieurs livres dont "Midi à Quatorze Heures" et "La Génétique du Crime". Les Gym'notes sont décrites comme des pamphlets pour une gymnastique de l'esprit destinée a retarder la maladie d'Alzheimer. Elles ont, comme il l'écrit, pour objet de faire voir les faits sous des angles moins journalistiques et de les placer dans leur contexte socio-économique. Il ajoute que Gym'note® est une marque déposée qui promeut la gymnastique de l'esprit, avec un brin de contestation". Les Bulletins d'humeur sont souvent pleins de finesse, comme l'histoire des huîtres creuses.
De 2006 à 2009, François devient rédacteur en chef de la Revue. Il est cofondateur de X-MINES Auteurs. On pourrait multiplier les exemples de son activité incessante dans les domaines de l'écriture et de la communication. Au moment de nous quitter, il avait entrepris l'écriture d'un nouveau roman, et il songeait à assembler ses meilleures Gym'notes' pour une éventuelle publication.
Nos dernières pensées sont pour Madeleine Vinçotte, et ses enfants qu'il avait tant aimés.
Philippe Thaure (N57)
Travailler encore jusqu'à 77 ans, c'est croire qu'on a l'expérience et qu'on pense tout comprendre. Quel plaisir !
Ejecté des grands groupes en 1985, je vole, depuis lors, de mes propres ailes.
Et en près de trente ans, j'ai su, pour vivre, faire payer suffisamment mes services par la SARL que j'ai fondée avec mes enfants pour actionnaires.
Au premier regard, mon parcours est soit chaotique, soit erratique. En l'examinant de plus près, soit il est le fruit des études que j'ai suivies à l'Ecole des Mines de Paris (Promo 58) soit il trouve son succès dans les réflexes que j'y ai acquis.
Donc, grâce aux relations du professeur Lacombe, je suis allé à Berkeley en 1961 avec une bourse d'assistant de recherche et ai obtenu un Master of Science en « Physics of Solids ». Thème de l'étude : Les boucles de dislocations dans l'aluminium raffiné écroui.
Je revenais dans le cours de Jacques Friedel ! Et j'ai su saisir ces fameux mouvements d'atomes au microscope électronique probablement parce que les cours de Paléontologie et de Géologie m'avaient appris à observer, de près, cailloux et trilobites.
Dans le groupe Pechiney, j'ai contribué à mettre au point les alliages aéronautiques (Concorde F 111) et à construire un savoir-faire qui a permis ultérieurement de faire les tôles épaisses de l'Airbus (n'en déplaise à Jean-Jacques Servan Schreiber)
Passé ensuite en 1970 dans la branche cuivre, les mêmes approches des problèmes m'ont fait voir que les traitements thermiques employés dans l'usine ne fournissaient pas les qualités exigées par la frappe à froid (fermeture à glissière, valve de chambre à air). Pourtant je croyais que tout avait été découvert depuis plus de quatre mille ans.
C'est probablement là que j'ai appris à me méfier des grandes idées qui conduisaient à des investissements massifs. Songez-y ! Un laminoir de fil cuivre quand la coulée continue était déjà en fonctionnement chez le concurrent. Une ligne de fabrication de tubes en cupro-alu pour échangeurs alors que EDF avait déjà décidé de passer au titane pour ses centrales nucléaires en bord de mer.
En 1977, nouveau changement, je suis nommé DG adjoint de la branche isolateurs en verre du groupe CGE, (Câbles de Lyon, Alsthom, etc. avant éclatement),
Il s'agissait de la fabrication des pièces en fonte malléable et des isolateurs en verre trempé. Outre les usines de Bayonne et de St Yorre, je supervisais d'une part des licenciés en Norvège et au Mexique et d'autre part deux filiales, l'une au Brésil à San Gonzalao et l'autre dans l'Etat de New Jersey à Carlstadt où j'ai lancé la fabrication industrielle des isolateurs en matériau composite.
Mais dans la même société vivait la branche céramique qui fabriquait des tubes en alumine poreux entrant dans le procédé d'enrichissement de l' UF6 par diffusion gazeuse.
Le problème est que le procédé était déjà jugé obsolète au départ par EDF qui lui aurait préféré la centrifugation. Et que, pour couronner le tout, il n'y eut jamais Coredif pour rentabiliser l'opération. Résultat en 1981 : 1200 personnes licenciées. La société considérée comme le canard boîteux du groupe CGE récemment nationalisé. Et ma branche « isolateurs » vendue à mes concurrents italiens qui n'avaient pas besoin de moi.
J'ai choisi alors de faire ma trace tout seul et de ne pas me replacer sur le marché.
Aidé par quelques anciens clients (dont un industriel Mexicain) qui m'ont passé des contrats j'ai monté une SARL dans l'espoir d'en faire une holding [Ansetolor, créé en décembre 1985].
Et pendant vingt ans, seul ou associé quelques années avec des professionnels du conseil, j'ai mené une vie passionnante à la manière de l'acteur qui attend le coup de téléphone qui va lui donner un rôle.
Un moment expert en diagnostic industriel près la Cour d'Appel de Paris, j'ai réalisé que la négociation primait sur la sécheresse du rapport. Ce qui m'a servi dans les Directions Générales par Intérim que j'ai assurées pendant ce temps.
Là où il faut gérer le court terme sans laisser de côté l'avenir.
Je me souviens de l'une d'entre elles, filiale d'un groupe allemand qui était occupée depuis 3 mois par une CGT emmenée par un ancien prêtre portugais défroqué et dont j'ai rouvert les portes tout en répondant aux micros des Télévisions Régionales. J'aurais bien aimé prendre la présidence de celle qui fabriquait des mélangeurs et des malaxeurs pour la cosmétique et la pharmacie. Je l'ai dit trop tard au président de la holding qui avait trouvé entre temps son candidat. « Vinçotte, pourquoi ne m'en avez vous pas fait part ? »
Il était désolé et moi aussi. On ne peut pas tout réussir.
Une niche commerciale que j'ai conservée 30 ans.
Déjà représentant de sociétés espagnoles, et touchant des commissions (que je touche encore en 2014), j'ai pu ainsi me payer jusqu'au moment où j'ai touché ma retraite. Non sans avoir essayé une fois de plus de m'associer avec des ingénieurs civils des Mines. Pour m'apercevoir assez vite que certains d'entre eux s'arrangeaient pour que le prospect confie le travail à leur société. Les footballeurs vous apprennent qu'il faut jouer « collectif ». Et les Ecoles d'Ingénieurs de maintenant ?
J'ai consigné cette masse d'expériences dans mon premier livre : Midi à Quatorze heures.
Un roman plus ou moins biographique qui était découpé en autant d'études de cas. Comme ceux que j'ai étudiés au CPA, dont j'ai été diplômé en 1976. Une formule enrichissante qui consiste à formuler un problème à partir de données a priori sans liens entre elles ou redondantes. Je pense toujours que la lecture commentée de ce livre aiderait les étudiants en gestion.
Dans le même registre, j'ai proposé à l'Ecole des Mines de faire un cours sur la PME (Gestion et Evaluation de sociétés). Mais, c'était trop tôt et les esprits n'étaient pas encore conscients de l'importance de la petite entreprise.
Avoir raison trop tôt flatte donc votre ego, mais n'est pas suffisant. Entre temps, j'ai conçu, il y une quinzaine d'années un montage pour inciter les particuliers à participer aux augmentations de capital de PME ou de Start-ups. Ceci avec l'intermédiaire des notaires qui plaçaient l'argent sous séquestre tant que l'opération n'était pas dénouée. Le gendarme de la bourse n'a pas donné son accord. Il ne l'a pas donné non plus au « crowd-funding » qui marche très bien sur internet et sans les mêmes garanties.
J'ai aussi essayé de démontrer en déclarant l'association « Profil 21 » que les ingénieurs en sortant de l'Ecole devraient se doter personnellement d'une société, genre EURL, qu'ils garderaient toute leur vie. Elle leur servirait à facturer leurs services et à gérer leur formation, leurs cotisations diverses, les rendant ainsi moins dépendants des aléas de carrière.
Souffler ? Non !
Je pense à cesser mes activités de représentation commerciale, à reprendre l'écriture sous toutes ses formes, (romans, encore, diffusion de mes idées, appartenance aux réseaux sociaux) et à aider de mon mieux l'Association et ceux qui en ont besoin.
Et quel conseil donner ?
S'informer ? Jamais assez. Et par tous les moyens (réseaux, anciens, internet etc.)
Réfléchir avant d'agir. Plick et Plock le comprirent à la fin de leurs aventures pleines de déboires. (Christophe, Armand Colin)
Insister, forcer le passage ? Non. Persévérer ? Oui. Garder le cap.
Accorder sa confiance (du bout des doigts) en gardant les yeux et les oreilles ouverts.
Exprimer sa pensée ? Toujours. Et la reformuler sans cesse comme si l'on n'était pas concerné.
Ecouter. Laisser parler. Il vous en sera gré.
Aider sans rien attendre. Remercier. Féliciter.
Aux plus jeunes, je le dis tout haut :
Expatriez-vous. Baroudez. Forgez-vous d'abord une carte de visite. Il y a du travail dans le monde. Trouvez-le.
François Vinçotte
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