Né le 28 avril 1825 à Nîmes (Gard). Fils de Pierre Louis ROGER, Négociant, et de Eglée BOISSON.
Ancien élève de l'Ecole polytechnique (promotion 1843 ; entré 35ème, sorti en 1845 classé 5ème sur 158 ; avait bénéficié d'une demi-bourse pendant ses études) et de l'Ecole des mines de Paris. Corps des mines (titularisé le 1er mars 1849).
Il a soutenu une thèse de mathématiques à la Sorbonne en 1848, "Sur les brachystochrones" qui a été publiée au Journal de Liouville tome 13 (1848) pp. 41-71.
Emile, Louis Roger (X 1843, 1825-1898) est né le 29 avril à 1825 à Nîmes. Son père est négociant. Emile sera élève au collège Saint-Louis à Paris et à l'institution de M. de Reusse, comme le précise la note de présentation de sa première publication, une note sur l' "Exposition de la théorie des racines égales et de la méthode qu'on en tire pour mener les tangentes aux courbes algébriques", parue en 1844 aux Nouvelles Annales (Cf. [Roger, 1844]). Il intègre l'école polytechnique en 1843 (35 ème au concours passé à Paris). Il sortira 5 ème en 1845 sur 158 élèves pour intégrer le corps des Mines dont il sera major (sur cinq élèves). Son dossier d'élève à l'école polytechnique donne cette description physique : "Cheveux châtains - Front haut - Nez moyen - Yeux roux - Bouche petite - Menton à fossette - Visage ovale - Taille 166". Il a obtenu son doctorat en 1848 (il est cette année là le seul à valider un doctorat de sciences en France 1). Son travail est constitué de deux parties : une partie "Sur les brachystochrones" et une autre "Sur un cas particulier du problème des trois corps". La première partie sera publiée dans le journal de Liouville. (Cf. [Roger, 1848) ]. Une note le présente comme "Elève-ingénieur des mines" alors qu'Emile Roger est ingénieur depuis déjà "longtemps". En cette même année, Emile Roger obtient sa première affectation professionnelle.
Voici un bref descriptif de sa carrière professionnelle 2 :
Date Fonction 22 mars 1848 Attaché au service des départements de l'Isère, des Hautes Alpes et de la Drôme. 1 mars 1849 Ingénieur ordinaire de 3ème classe 12 avril 1851 Ingénieur ordinaire de 2ème classe 24 août 1860 Attaché au service de surveillance des machines à vapeur dans le département de la Seine. 18 novembre 1860 Ingénieur ordinaire de 1ère classe 17 mai 1861 Attaché au service de l'arrondissement minéralogique de Paris 12 avril 1864 Chargé du service du sous-arrondissement minéralogique de Paris et du Service des carrières du département de la Seine. 8 août 1866 Chargé du service de l'arrondissement minéralogique de Périgueux, avec les fonctions d'Ingénieur en chef. 14 août 1866 Chevalier de la Légion d'honneur. 5 janvier 1867 Ingénieur en chef de seconde classe. 18 mars 1869 Chargé de l'arrondissement minéralogique de Rouen. 14 septembre 1875 Ingénieur en chef de première classe 14 mai 1879 Chargé de l'arrondissement minéralogique de Paris et du Service des carrières du département de la Seine. 2 mai 1885 Inspecteur général de seconde classe 24 juin 1885 Chargé de la division minéralogique du Sud-Ouest 18 février 1888 Chargé de la division minéralogique du Nord-Est 29 avril 1890 Retraite. Il décède en 1898.
L'expression de Brassinne, sous-titre de ce paragraphe, est initialement extraite d'une éloge à Delpech de Saint-Guilhem 3; elle s'applique particulièrement bien à Emile Roger. Il fait partie de ce milieu d'ingénieurs, qui au XIX ème siècle, parallèlement à leur carrière, ne renonce pas à publier des articles scientifiques. Ils sont des auteurs "potentiels" et de possibles lecteurs pour toutes les revues scientifiques, car ils ont la formation (essentiellement acquise à Polytechnique) pour comprendre et rédiger des articles à tonalité scientifique. Roger poursuit sa quête scientifique parallèlement à sa carrière professionnelle. Certaines publications sont directement issues de sa pratique d'ingénieur, de ses "travaux utiles" pour paraphraser encore Brassinne, comme cet article consacré "aux mines d'anthracite du bassin du Drac (Isère) 4; d'autres sont plus personnelles comme ce court article "solution d'un problème de probabilité en 1852 (Cf. [Roger, 1852]), dans lequel il généralise un résultat de probabilité obtenue par Poisson dans le tome II du même journal. Ainsi, il publiera plusieurs articles initialement publiés dans les Annales des Mines puis, ensuite, pour deux d'entre eux, résumés dans les Comptes rendus de l'Académie des sciences. Notons en particulier ses nombreuses recherches autour des propriétés générales des surfaces courbes.
En 1850, sont publiées, chez Mallet-Bachelier, sous les auspices de Liouville (au centre de la vie mathématique française et même européenne), les Applications de l'analyse à la géométrie de Gaspard Monge. C'est la cinquième édition revue et corrigée. Elle contient un article de Gauss, en latin, publié initialement dans les Nouveaux Mémoires de la Société Royale des Sciences de Göttingue 5. Deux ans plus tard dans les Nouvelles Annales, est publiée une traduction du texte de Gauss (Cf. [Gauss, 1852]). "On a traduit sur cette réimpression" termine l'auteur anonyme de cette traduction. On peut faire l'hypothèse que le traducteur est Abel Transon. Il connaît la géométrie, le latin et il est un auteur régulier des Nouvelles Annales. De l'article est extrait un tiré à part. On peut penser que cette traduction ne paraîtra pas satisfaisante à Emile Roger. Lui aussi est un lecteur averti de Gauss. Un amateur éclairé de géométrie aussi. En 1855, il travaille d'arrache-pied autour d' "une certaine classe de courbes". Il sollicite Liouville qui lui répond dans une lettre datée du 16 mai 1855 6 :
Mon cher monsieur Roger, Je viens de m’assurer qu’il est impossible d’insérer votre mémoire au journal de mathématiques dans le délai que vous fixez. Je regrette de ne pouvoir vous rendre ce petit service. Je tiens le manuscrit à votre disposition : ayez la bonté de me dire ce que je dois faire. Agréer, je vous prie, la nouvelle assurance de ma considération distinguée.
JL.
A m.Roger, ingénieur des mines, à Grenoble, 4, rue du Quai.
Quelques jours plus tard, dans la séance du 28 mai 1855, aux Comptes Rendus de l'Académie des Sciences, est annoncé son Mémoire sur une certaine classe de courbes (Cf. [Roger, 1855]) . Les commissaires sont MM.Liouville, Lamé et Chasles. Le jeune "ingénieur ordinaire de deuxième classe attaché au service des départments de l'Isère, des Hautes Alpes et de la Drôme" est pressé. Liouville ne peut pas le publier rapidement. Qu'à cela ne tienne! Il se fera publier à Grenoble, chez un imprimeur-libraire dont la spécialité n'est pas les mathématiques, l'imprimeur Prud'homme 7 (Cf. [Gauss, 1855]). Sa traduction des Recherches générales sur les surfaces courbes de C.F. Gauss paraît en 1855. Le texte du géomètre allemand est suivi de notes et d'études sur divers points de la théorie des surfaces et sur certaines classes de courbes. Celles qu'il prévoyait de publier chez Liouville. En 1868, Roger revient sur le sujet. Il fait paraître dans les Annales de Mines sa "Note sur la courbure des surfaces" (Cf. [Roger, 1868]). Elle sera résumée et reprise dans les Comptes Rendus en 1869 (Cf. [Roger, 1869]. La stratégie éditoriale d'Emile Roger va un peu à l'encontre de ce qui se produit usuellement : on annonce au CRAS puis on développe dans une revue spécialisée. Ici, c'est le contraire qui se produit. Emile Roger a-t-il-eu peur d'essuyer un nouveau (poli) refus de Liouville ? Les éléments manquent pour répondre. En cette période, il est beaucoup plus difficile pour un ingénieur en exercice de publier. Les auteurs sont de plus en plus des "universitaires" , de moins en en moins des ingénieurs férus de sciences. L'année suivante, Roger présente une dernière note à l'Académie : "Sur divers points de la théorie des surfaces et sur certaines classes de courbes" (Cf. [Roger, 1870]). En fait, il s'agit d'une note faisant référence à la seconde édition de sa traduction de Gauss. (Cf. [Gauss, 1870]). Comme pour la première édition, Emile Roger a rajouté deux mémoires de sa main avec des nouveautés par rapport à la version de 1855 : "La présente édition du premier de ces Mémoires renferme plusieurs théorèmes ayant trait, pour la plupart, à la courbure des surfaces. L'Académie a déjà accueilli [Cf. [Roger, 1861]] l'énoncé de quelques-uns de ces théorèmes. J'ai fait usage, dans presque toutes mes démonstrations, d'un système particulier de coordonnées curvilignes dont l'emploi permet d'aborder et de résoudre très simplement diverses questions de physique mathématique et de géométrie pure qui présentent, quand on a recours à d'autres méthodes, des difficultés presque insurmontables. Parmi ces questions, je citerai ici seulement celle qui consiste à déterminer la surface qui contient le volume le plus grand possible, sous une étendue superficielle donnée." (pp.351). A 45 ans, il semble que Emile Roger ait définitivement renoncé aux publications scientifiques pour se focaliser sur sa carrière d'ingénieur des Mines. Il nous reste sa traduction de Gauss avec ses commentaires. Elle a été réimprimée en 1967. [Cf. [Gauss, 1967].
1 Bulletin des sciences mathématiques, 2 ème série, t. XXVI, 1902, pp.201-216, 232-248 et 272-280. (Extrait des catalogues des thèses de Maire et Estanave).
2 Ce tableau est extrait des tables des Annales de Mines. On peut ainsi suivre l'évolution professionnelle d'Emile Roger.
3 Eloge de Monsieur Delpech de Saint-Guilhem, Mémoires de l'Académie des Sciences de Toulouse, 7 ème série, tome II, pp. 473-484.
4 Annales des Mines, t.VII, 1855, pp. 525-564.
5 Tome VI, 1828, pp.99
6 Dossier Liouville, Bibliothèque de l'Institut de France, MS 36 22 (4).
7 Cet éditeur a publié assez peu d'ouvrages. Un seul de mathématiques, celui de Roger. En revanche, il a publié plusieurs ouvrages consacrés à l'histoire du dauphiné, il semblait être également l'éditeur de sociétés savantes grenobloises. On peut raisonnablement penser que Emile Roger soit d'ailleurs entré en contact avec l'éditeur par le biais d'une telle société savante. En cette période, en Province, les ingénieurs attirés par les sciences étaient souvent, pour ne pas dire presque toujours, membres d'une société savante, une de ces académies réunissant les notables de la ville.
- [Gauss, 1852], Nouvelles Annales, Tome XI, 1852, pp. 195-251. (Un tiré à part a été publié la même année).
- [Gauss, 1855], Recherches générales sur les surfaces courbes de C.F. Gauss, Imprimerie de Prud'homme, Grenoble.
- [Gauss, 1870], Recherches générales sur les surfaces courbes de C.F. Gauss, deuxième édition, Imprimerie de Prud'homme, Grenoble.
- [Gauss, 1967] Réimpression de Recherches générales sur les surfaces courbes de C.F. Gauss, deuxième édition, Imprimerie de Prud'homme, Grenoble, Albert Blanchard, 1967.
- [Roger, 1844] "Exposition de la théorie des racines égales et de la méthode qu'on en tire pour mener les tangentes aux courbes algébriques", 1844, Nouvelles Annales, t. III pp. 51.
- [Roger, 1848] "Thèse sur les brachystochrones", Journal de Mathématiques Pures et Appliquées, Série I, tome XIII, 1848, pp. 41-71.
- [Roger, 1852] "Solution d'un problème de probabilité en 1852 , Journal de Mathématiques Pures et Appliquées, Série I, T. XVIL, pp. 202-208.
- [Roger, 1855], "Mémoire sur une certaine classe de courbes" , CRAS, tome XL, 1855, pp.1176-1177.
- [Roger, 1861] Emile Roger, "Recherches sur le système du monde", CRAS, t.LIII, 1861, pp. 465-468.
- [Roger, 1868], "Note sur la courbure des surfaces", Annales de Mines, t.XIV, 1868, pp. 47-56.
- [Roger, 1869] "Note sur la courbure des surfaces", CRAS, t.LXVIII, 1869, pp.365-366 & CRAS, t.LXIX, 1869, pp.1071-1072.
- [Roger, 1870] "Sur divers points de la théorie des surfaces et sur certaines classes de courbes", CRAS, t.LXXI, 1870, pp. 351-353.
- Bulletin des sciences mathématiques, 2 ème série, t. XXVI, 1902, pp.201-216, 232-248 et 272-280. (Extrait des catalogues des thèses de Maire et Estanave).
- Dossier Emile Roger (Légion d'Honneur), Archives Nationales
- Dossier Emile Roger, Ecole des Mines (Journaux et mémoires de voyage rédigés durant sa scolarité).
- Dossier Emile Roger, Ecole Polytechnique.