Génie Civil, 1899.
M. Charles Friedel, membre de l'Institut, professeur à la Faculté des Sciences de l'Université de Paris, vient de mourir à l'âge de 67 ans.
Reçu docteur es sciences en 1869, M. Friedel avait été d'abord conservateur des collections minéralogiques de l'Ecole supérieure des Mines et maître de conférences à l'École Normale; puis, il fut nommé professeur du cours de minéralogie en Sorbonne.
A la mort de Regnault (1878), il entra à l'Académie des Sciences; enfin, en 1884, il succéda à son maître et ami Wurtz, dans la chaire de chimie organique de la Sorbonne.
Les travaux de Friedel portèrent sur des recherches de l'ordre le plus élevé ; nous citerons les principales :
Les synthèses du feldspath orthose et de l'albite ; la synthèse de l'acide lactique en partant de l'acide propionique chloré (ou chloro-2-propanoïque) que l'on traite par la potasse; la synthèse de la glycérine, en collaboration avec Sylva, obtenue en prenant comme point de départ l'acétone et en préparant la trichlorhydrine que l'on saponifie : ses recherches sur les acétones, dans lesquelles il a démontré que leur hydrogénation donne naissance aux alcools secondaires ; ses travaux relatifs à l'action du chlorure d'aluminium sur certains composés organiques (en collaboration avec Crafts) et, en particulier, à la réaction des dérivés halogènes des carbures saturés sur les carbures benzéniques en présence de chlorure d'aluminium; divers mémoires sur la constitution des acides camphoriques et sur les composés organiques du silicium, siliciiodoforme, éthers méthylsiliciques, etc.
M. Friedel a été l'un des grands promoteurs de la théorie atomique. Élève de Wurtz, il eut à supporter toutes les attaques dirigées contre cette école qui devait, disait-on, causer la décadence de la chimie en France ; il a eu, tout au moins, la satisfaction d'assister au triomphe des idées de son maître et de les voir, enfin, accepter dans l'enseignement officiel.
L'industrie gardera longtemps le nom de ce savant qui, loin de dédaigner la science pratique, créa le laboraloire de chimie appliquée de la rue Michelet. On ne peut encore apprécier les résultats de ce nouvel enseignement, les cours de cette Ecole, fondée en 1896, durant trois ans, mais on est en droit d'espérer qu'il contribuera au renouvellement de notre industrie chimique.
M. Friedel était officier de la Légion d'honneur. Il avait été désigné comme président du jury de la classe 87 à l'Exposition de 1900.