N° 108 - Octobre 2022 - Premiers enseignements de la crise sanitaire
La surveillance épidémiologique comme outil de la gouvernance des risques : le cas de la Covid-19
Par Saliha HADNA
Maître de conférences en sciences de l’information et de la communication (Laboratoire CERTOP ‒ UMR 5044 ‒ Toulouse II & III, Université Paul Sabatier, Université Jean Jaurès, CNRS)
En France, depuis deux ans, les médias ne cessent de diffuser les chiffres des contaminations et des décès liés à la Covid-19, produisant un effet paradoxal en suscitant la crainte, tout en rendant ces drames singuliers (Pujol et al., 2020). Une surveillance épidémiologique a été mise en place par Santé publique France (SPF), dès mars 2020. Les mesures gouvernementales qui se sont appuyées sur ces chiffres ont fait l’objet de nombreuses critiques (Mucchielli et al., 2020), voire d’une défiance (Idelson, 2021). L’urgence a placé au second plan un problème majeur : l’évolution des maladies chroniques (Jornayvaz et Wojtusciszyn, 2021), notamment du cancer. Or, certains cancers, comme celui du pancréas, ont eu un taux d’incidence en hausse entre 2010 et 2018, le cancer restant la première cause de mortalité en France.
Dans cet article, nous nous intéresserons d’abord au dispositif de surveillance épidémiologique de SPF. Nous analyserons ensuite la manière dont les experts ont été mobilisés lors de cette crise sanitaire. Enfin, nous montrerons que cette gestion de crise a été construite sur une approche court-termiste, dans la mesure où la déprogrammation des opérations jugées « non urgentes » pour donner la priorité aux soins Covid-19 par rapport aux soins liés au cancer n’a pas permis d’anticiper la prochaine vague de surmortalité par cancer pourtant annoncée par plusieurs études médicales.
Télécharger gratuitement l'article
Retour au sommaire
N° 108 - October 2022 - First lessons from the health crisis
Epidemiological surveillance as a risk governance tool: the case of Covid-19
Saliha Hadna,
Lecturer in Information and Communi-cation Sciences (CERTOP Laboratory ‒ UMR 5044 ‒ Toulouse II & III, Paul Sabatier University, Jean Jaurès University, CNRS)
In France, for the past two years, the media have been constantly broadcasting figures of contaminations and deaths related to Covid-19, producing a paradoxical effect by creating fear, while at the same time making these dramas singular. Epidemiological surveillance was set up by Santé publique France (SPF), starting in March 2020. The governmental measures that were based on these figures have been the subject of much criticism, and even distrust. The urgency has placed a major problem in the background: the evolution of chronic diseases, particularly cancer. Yet, some cancers, such as pancreatic cancer, have had an increasing incidence rate between 2010 and 2018, with cancer remaining the leading cause of death in France.
In this article, we will first focus on the SPF epidemiological surveillance system. We will then analyze how experts were mobilized during this health crisis. Finally, we will show that this crisis management was built on a short-termist approach, insofar as the deprogramming of operations deemed ‟non-urgent” to give priority to Covid-19 care over cancer-related care did not make it possible to anticipate the next wave of excess cancer mortality, despite the fact that several medical studies had predicted it.
Retour au sommaire
|