Ancien élève de l'Ecole polytechnique (promotion 1834), et de l'Ecole des mines de Paris. Corps des mines.
Fils de Guillaume GUILLEBOT et de Anne Adélaïde de NERVILLE. Marié à Anaïs du MERGUE.
Père de Louis François Ferdinand GUILLEBOT DE NERVILLE (1858-1931 ; X 1878) ingénieur des Postes et télégraphes qui fut en 1894 directeur de l'École d'application de l'électricité (devenue École Supérieure d'Électricité) puis professeur du cours d'applications industrielles d'électricité à l'ENPC, et de 1927 à 1929 à l'ENSAÉ ; il fut très actif dans la pose des cables sous-marins, dans la détermination de l'Ohm, dans les organismes de normalisation et les sociétés scientifiques internationales.
Beau-père de Henri Raymond BOSQUILLON DE FRESCHEVILLE (1857-1937 ; X 1875).
Vice-président du conseil général des mines.
Publié dans Annales des Mines, 8e série, vol. 6, 1884.
Le conseil général des mines et le comité d'exploitation technique des chemins de fer viennent de perdre, en la personne de M. Guillebot de Nerville, un président qui réunissait de rares aptitudes à ces délicates fonctions, par son instruction variée, son intelligence prompte, son jugement droit, sa parole claire, et une autorité que tempéraient, dans une juste mesure, des formes naturellement courtoises.
Honoré d'une amitié qui faisait partie de l'héritage paternel et qui s'est resserrée par les relations de service et de famille, j'ai accepté avec un affectueux empressement la mission de rendre un dernier hommage à un chef excellent qui laisse dans le Corps des mines d'unanimes regrets.
Jean-Ludovic Guillebot de Nerville est né à Cognac, le 30 avril 1815. Son père appartenait à l'administration des finances; il descendait, par sa mère, d'une ancienne famille du Cotentin.
Il entra très jeune au lycée Louis-le-Grand, où il fit toutes ses études, et fut admis à l'École polytechnique après une seule année de mathématiques spéciales.
A l'École des mines, il manifesta de suite un goût très vif pour l'étude des minéraux, et publia, dès sa sortie de l'Ecole, un traité de minéralogie. Pendant l'année suivante, il collabora, comme secrétaire de M. Le Play, à ses travaux statistiques sur l'organisation ouvrière.
Dijon fut sa première résidence en province. De 1840 à 1848, il y remplit les fonctions d'ingénieur ordinaire avec l'intelligente activité qui lui a mérité partout les plus grands éloges. Les Annales des Mines, de 1841 à 1845, conservent la trace de ses travaux de laboratoire ; elles comprennent en outre une note sur un accident au haut-fourneau de Vanvey, un rapport sur l'explosion d'une chaudière calorifère en cuivre, et une notice sur le terrain houiller de Sincey. Il prépara, pour l'étude du chemin de fer de Paris à Dijon par la vallée de l'Oze, une notice géognostique qui figura parmi les éléments de discussion à la Chambre des Députés et qui contribua, dans une large mesure, à déterminer le remarquable tracé du souterrain de Blaisy.
Dès ce moment, il s'occupait activement des études qui aboutirent en 1853 à sa publication de la carte géologique de la Côte-d'Or. Dufrénoy, qui eut à l'examiner, déclarait, avec sa haute compétence, que c'était une oeuvre remarquable. Elie de Beaumont, frappé du tracé des failles, y trouvait le point de départ d'idées nouvelles. L'inspecteur général Le Chatelier disait de la légende explicative qu'elle constituait un guide excellent pour les ingénieurs, les constructeurs, les maîtres de forges, les agriculteurs et les fontainiers.
Le conseil général de la Côte-d'Or lui témoignait, au nom du département, sa vive reconnaissance pour les soins persévérants et désintéressés qu'il avait donnés à la Publication de la carte géologique : il signalait à l'attention particulière du Ministre des Travaux publics l'habile et consciencieux ingénieur auquel le département devait un si beau et si utile travail.
Au mois d'août de la même année, la décoration de la Légion d'honneur venait récompenser les travaux du géologue et les services de l'ingénieur.
Avant cette époque, au mois d'août 1848, M. de Nerville était nommé à la résidence de Lyon, où il joignait au service du sous-arrondissement minéralogique le contrôle technique et commercial du chemin de fer de Lyon à Saint-Étienne. Il y trouvait immédiatement l'occasion de manifester de nouvelles aptitudes qui le faisaient appeler, en février 1852, au contrôle du chemin de fer du Nord.
Vingt mois après, il était attaché comme secrétaire à une section de la commission instituée pour examiner les innovations et moyens de sûreté proposés pour les chemins de fer. Il s'y distingua de suite par la sûreté du coup d'oeil avec lequel il savait discerner, au milieu d'élucubrations sans valeur, les rares propositions qui contenaient le germe d'une invention vraiment féconde.
Nommé en 1856 ingénieur en chef à Rodez, il se remit activement aux visites souterraines. La fatigue qu'il en ressentit, jointe à la rigueur du climat, contribua sans doute à déterminer une crise de rhumatismes articulaires qui lui firent demander, au bout de trois ans, son changement de résidence. Il obtint alors d'être envoyé à Périgueux, non loin de son pays natal. Il y est resté jusqu'en 1861, puis s'est transporté à Bordeaux, avec le même arrondissement.
Son dossier ne contient que des éloges. Un de ses inspecteurs généraux, plus sévère, le blâme pourtant de faire parfois la besogne de ses ingénieurs. Ce reproche, le seul qu'il ait mérité, ne nuira pas beaucoup à sa mémoire.
Il me souvient que mon père, au retour d'une de ses inspections dans l'arrondissement de Périgueux, se plaisait à décrire l'intérieur de l'ingénieur en chef, qui lui paraissait réunir, autant qu'il se peut faire ici-bas, les plus parfaites conditions du bonheur domestique : un père de famille excellent, justement considéré, une femme aimable et dévouée, associé par le coeur aux travaux de son mari deux enfants doués des plus heureux dons, et, comme centre, les verts ombrages et les belles fleurs de Basseau, cette propriété que M. de Nerville a tant aimée, et où il est allé mourir.
En 1872, il était promu au grade d'inspecteur général chargé de la division minéralogique du sud-ouest. Ses rapports, inscrits au registre du conseil, font foi de la méthode consciencieuse avec laquelle il traitait les affaires; on y retrouve ses qualités maîtresses : l'ordre, la précision et la clarté.
Elevé à la première classe en 1879, il était presque immédiatement désigné pour remplacer M. Couche à la présidence du comité d'exploitation technique des chemins de fer. Comme tous ses collègues, nous avons admiré bien des fois le tact et la présence d'esprit avec lesquels il savait diriger les délibérations et dégager, du conflit des opinions diverses, un avis fortement motivé.
Les mêmes qualités l'ont distingué à la présidence du conseil général des mines, où il a été appelé au mois de mai 1882. Presque aussitôt, il ajoutait à ses fonctions déjà multiples celles de président de la commission de la Carte géologique détaillée de la France. Il présidait en outre la commission des Annales des mines, et, suivant les besoins, diverses commissions temporaires. Partout, il apportait le précieux concours d'un esprit éminemment ouvert, net et conciliant.
Parmi les travaux qui ont signalé la fin de sa carrière, nous devons mentionner son excellent rapport sur la situation des chemins de fer, au point de vue des efforts accomplis pour assurer leur sécurité, et une étude très complète sur les moyens de prévenir les dangers de explosifs. Au commencement de l'année actuelle, il s'était transporté à Anzin pour une enquête sur la grève des ouvriers mineurs, puis à Bordeaux, où il a étudié avec le plus grand soin la question difficile du déplacement de l'une des gares principales.
Officier de la Légion d'honneur depuis 1869, il avait été promu en 1882 au grade de commandeur.
Il avait épousé, en 1857, la fille d'un honorable industriel, dont le père, avec l'un de ses neveux, a créé la plus importante papeterie d'Angoulême.
Fortement constitué, il formait volontiers des projets pour ses années de retraite ; il comptait en profiter pour mettre en ordre ses nombreuses notes géologiques. Cependant, au mois de juillet dernier, contrairement à ses habitudes, il sentit le besoin de quelques jours de repos. Il subissait, sans s'en douter, les premières atteintes de la maladie de coeur à laquelle il a succombé. Il est mort le 6 août, entouré des soins de la plus tendre affection et soutenu par le ferme espoir des éternelles récompenses.
Son fils, ingénieur des télégraphes, ancien élève de l'Ecole polytechnique, continue dignement les traditions paternelles. Il s'est signalé récemment par une collaboration active à la détermination de l'unité dynamique de résistance électrique.
A défaut de représentant du Corps des mines, qui n'avait pu être informé à temps, l'un des maîtres du barreau d'Angoulême, lui-même adepte en géologie, a rappelé sur sa tombe, en quelques paroles éloquentes, les éminents services de l'homme public et les qualités attachantes de l'homme privé, qui perpétueront parmi nous son respecté et sympathique souvenir.
6 octobre 1884.