Né le 18 mars 1948 à Paris (15ème)
Ancien élève de l'Ecole polytechnique (promotion 1966, sorti classé 2ème) et de l'Ecole des Mines de Paris (entré en 1969).
Yannick d'ESCATHA entre Corps des Mines et commence sa carrière par la Recherche et l'Enseignement.
A 24 ans : il est Maître de Conférences à l'Ecole Polytechnique, à l'Ecole des Mines de Paris et à l'ENSTA. Ses travaux de recherche au Laboratoire de Mécanique de l'Ecole Polytechnique portent sur la Mécanique des Sols et la Mécanique des Structures, et font de lui un spécialiste reconnu de la Mécanique de la Rupture. Ses travaux et ses nombreuses publications, dont un livre publié en collaboration, lui valent d'être primé par l'Académie des Sciences en 1982.
En 1973 : il participe à l'élaboration de la réglementation technique française en matière de chaudières nucléaires à eau, puis à son application en tant qu'Expert auprès du Ministère de l'Industrie.
En 1978 : il est nommé Chef de bureau du Contrôle de la Construction Nucléaire, où il assume la responsabilité du Contrôle Technique de l'Etat dans l'application de cette réglementation au programme électronucléaire français.
En 1982 : il est détaché auprès de la Société Technicatome, filiale du CEA dont la mission principale est la maîtrise d'oeuvre industrielle de la propulsion nucléaire des bâtiments de la Marine Nationale.
Le 1er janvier 1987 : après avoir été directeur des Etablissements de Cadarache et d'Aix en Provence, Yannick d'ESCATHA est nommé Directeur Général Adjoint de Technicatome.
Le 1er mars 1990 : il est appelé par l'Administrateur Général du Commissariat à l'Energie Atomique, pour occuper les fonctions de Directeur de la Direction des Technologies Avancées, nouvellement créée, et devient Administrateur Général Adjoint du CEA le 14 septembre 1992.
Le 1er juillet 1995 : il est nommé Administrateur Général du CEA
Le 28 juin 1999 : il est nommé Président du CEA-Industrie.
Le 1er janvier 2000 : il est nommé Directeur Général Délégué Industrie d'EDF. Responsable du pôle industrie d'EDF, il est chargé de la politique industrielle de l'entreprise.
De janvier 2002 jusqu'à début 2003 : il est Directeur Général Délégué d'EDF.
Le 19 février 2003 : il est nommé Président du Cnes (où il succède à Alain Bensoussan, J.-L. Lions, Hubert Curien). Il devient président du C.A. de l'Université de technologie de Troyes en 2008.
En outre :
depuis 2004 : membre du CA d'EDF ;
depuis 2009 : membre du CA de Thales
Le 11 mars 1997 : il a été élu Membre du Conseil pour les Applications de l'Académie des Sciences. Depuis le 12 décembre 2000 : il est membre de l'Académie des Technologies.
1996-2000 : il préside le conseil d'administration de l'ENSTIM d'Albi-Carmaux.
2000-2001 : il préside le conseil d'administration de l'Ecole des Mines de Paris.
Le 2 mai 2001 : il a été nommé en Conseil des ministres Président du Conseil d'Administration de l'Ecole Polytechnique en remplacement de Pierre Faurre. Il a été renouvelé dans ces fonctions en février 2005, et il les abandonne en 2008.
Il est commandeur de l'Ordre National du Mérite et officier de la Légion d'Honneur.
La Jaune et le Rouge, décembre 2001
C'est un grand honneur d'avoir été choisi par le gouvernement. Et c'est un grand bonheur de retrouver l'École et ses élèves, et ses enseignants et ses chercheurs. Mais c'est aussi une grande tristesse que ce soit dans de telles circonstances : la disparition subite de Pierre Faurre a bouleversé tous ceux qui le connaissaient et qui l'aimaient. Je veux rendre hommage à ses exceptionnelles qualités : c'était un grand scientifique et un grand chef d'entreprise, de large culture et ouvert sur le monde, un homme de coeur aux inestimables qualités humaines. Pierre Faurre a conçu, avec les forces vives de l'École et le soutien constant du ministre de la défense, Alain Richard, la réforme X 2000 qui projette l'École dans le XXIème siècle : c'est cette profonde réforme qui permettra à l'École de rester au premier rang en acquérant une renommée internationale beaucoup plus large, en s'appuyant sur la qualité de son enseignement (et donc de ses enseignants et de ses élèves) et sur la qualité de sa recherche (et donc de ses chercheurs).
Vous avez connu l'X comme élève (de la promotion 66), comme enseignant (en mécanique), comme chercheur (au LMS, le laboratoire de mécanique des solides). En quoi votre nouvelle fonction représente-t-elle quelque chose d'inédit dans votre carrière ?
C'est vrai que je n'ai jamais complètement quitté l'École. En plus des fonctions que vous citez, j'ai présidé, à la demande du CNRS, le conseil scientifique d'évaluation du LMS. Et quand je travaillais au CEA, je suivais de près les partenariats réalisés avec l'École. Il se trouve, en plus, que j'ai débuté ma carrière dans la recherche, que je l'ai poursuivie dans l'administration, puis dans l'industrie : ce sont les trois domaines qui constituent la vocation de l'École et reflètent les différents métiers offerts aux polytechniciens.
Il existe une proximité affective entre l'X et moi, et je suis particulièrement motivé pour relever le challenge du moment : la mise en oeuvre de la réforme X 2000. Cette réforme passe par trois axes fondamentaux. D'abord le développement de l'enseignement et tout particulièrement la création de la quatrième année. Ensuite l'ouverture internationale de l'École, aussi bien au niveau des élèves qu'au niveau des enseignants et des chercheurs : aller à l'étranger, y acquérir une expérience professionnelle dans le monde de la recherche et de l'entreprise (nous sommes une école d'ingénieurs), accueillir des élèves et des collègues étrangers. Enfin, la réforme passe par le développement de la recherche, tout particulièrement en obtenant le soutien des entreprises.
Quel a été le contenu de l'entretien que vous avez eu récemment avec M.Richard?
Les grandes lignes de la réforme sont tracées. Maintenant nous avons devant nous le Grand Oeuvre : sa mise en application et surtout sa réussite. Il y a beaucoup à faire et ce sera difficile. Il faudra la mobilisation de tous les personnels de l'École et des élèves, ainsi que le plein soutien de la tutelle. C'est pourquoi j'ai demandé au ministre d'inscrire la réforme X 2000 dans un contrat pluriannuel qui précise bien les objectifs à atteindre, le calendrier et les moyens nécessaires. Le ministre a bien voulu me donner son accord, et nous devrions pouvoir signer un tel contrat dans les prochains mois.
Quelle est la position de l'École à propos des rapports que les élèves doivent entretenir avec la défense ? Pourquoi la réforme actuelle conserve-t-elle un statut militaire aux X ?
L'École a une triple vocation. D'abord, former des cadres, des innovateurs, des entrepreneurs, pour les entreprises, dans un contexte de mondialisation. Ensuite, former des hauts fonctionnaires pour l'État, dont les missions évoluent, dans le contexte d'intégration européenne et d'internationalisation. Enfin former des scientifiques, comme toujours dans un contexte d'excellence au niveau mondial. Finalement, cette triple vocation concerne l'ensemble des forces vives du pays, en liaison extrêmement étroite avec le reste du monde. Qui mieux que la défense peut porter une ambition aussi large, aussi multiforme, concernant l'avenir de notre pays comme membre de l'Union européenne et comme acteur engagé au sein de la communauté internationale ?
Quels sont les atouts de l'École en matière d'ouverture internationale?
De nombreux échanges existent déjà au niveau des enseignements et des laboratoires. Par ailleurs, un travail important a été accompli pour accueillir des étudiants étrangers et pour envoyer nos élèves en stage ou en formation en dehors de nos frontières. Pour poursuivre cet effort, je crois qu'il faut s'appuyer sur les réseaux de relations qu'ont construits les enseignants et les chercheurs de l'École avec leurs collègues de nombreux pays. En faisant masse de toutes ces relations, on peut en faire une véritable politique d'ouverture internationale de l'École. Il faut choisir une cible de pays développés et de pays émergents prioritaires, et sélectionner, dans chaque pays ciblé, des partenaires privilégiés afin de réaliser avec eux (avec leurs enseignants, leurs chercheurs et leurs étudiants) des échanges dans les deux sens. Nous aurons aussi besoin de l'appui de nos partenaires industriels : en effet, ils sont implantés à l'étranger et ils sont demandeurs d'étudiants ayant une expérience internationale. Ils sont donc tout disposés à nous aider, par exemple pour définir les pays prioritaires, ou pour proposer des stages à nos élèves ; ils peuvent aussi nous aider à faire vivre notre politique internationale sur place.
Ont-ils également un rôle à jouer dans la recherche ? Le développement des ressources propres de l'École passe-t-il par eux ?
Bien sûr. Notre recherche est au meilleur niveau mondial. Donc elle intéresse nos partenaires industriels. Nous sommes l'une des meilleures écoles d'ingénieurs du monde. Nous sommes donc par nature très proches du monde de l'entreprise (industrie ou service) qui recrute nos élèves et qui a besoin de nos recherches. L'enseignement et la recherche sont tous les deux concernés par cette proximité. Pour nous développer, c'est une opportunité formidable que de pouvoir intéresser les entreprises. A nous de savoir faire ce qu'il faut pour répondre à leurs besoins et leur apporter ce qui les intéresse. Avec leur soutien nous pourrons développer la recherche et l'enseignement, puisqu'on sait bien que les finances publiques seules ne nous le permettront pas.
Comment le centre de recherche doit-il évoluer ? Quels sont les avantages et les inconvénients d'une structure de 23 laboratoires dont les domaines de recherche sont aussi différents les uns des autres ?
La recherche vise l'excellence mondiale. Pour rester compétitifs, il est nécessaire que les laboratoires d'une discipline donnée soient maillés avec leurs homologues du monde entier. De plus, l'École polytechnique, grâce à sa pluridisciplinante, a la possibilité de se positionner aux interfaces, extrêmement fécondes, entre différentes sciences et disciplines. Cela fait sa force.
L'entreprise à laquelle vous appartenez, EDF, axe actuellement sa communication sur l'écologie et le développement durable. Est-ce que vous serez, sensible, dans les limites permises par votre fonction à l'X mais avec peut-être plus d'acuité que d'autres chefs d'entreprise (moins habitués par leurs secteurs d'activité à ces préoccupations), à faire en sort que les polytechniciens qui sortent de l'École gardent le souci de l'environnement, de la cohésion sociale, de l'intérêt général ?
Ce n'est pas la communication d'EDF qui est axée sur le développement durable : c'est sa stratégie ! (la communication ne fait que suivre). À EDF, nous misons sur le développement durable parce que nous maîtrisons la totalité des sources d'énergie (de l'hydraulique aux piles à combustible, du nucléaire à l'énergie éolienne...) et que toute cette variété, ce mix énergétique, est nécessaire pour faire face à la croissance de la demande dans le monde, tout en préservant l'environnement dans la durée. C'est pour nous, dans la concurrence, un atout qui nous permet de mieux servir nos clients dans le monde entier, et de satisfaire toutes leurs demandes en leur faisant des offres adaptées à n'importe quelle situation locale.
A priori, je préfère ne pas mélanger mes casquettes de président du conseil d'administration de l'École et de directeur général délégué industrie d'EDF. Mais peut-être y a-t-il, en effet, une idée à creuser, car le développement durable consiste à répondre de façon équilibrée aux besoins de développement économique, de développement social et de protection de l'environnement. Or, ces valeurs sont justement celles de l'École : par les différentes facettes de sa formation, elle prépare les élèves à être pleinement acteurs de ce défi majeur pour l'avenir qu'est le développement durable.
Septembre 2009 :
Yannick d’Escatha (66), ancien président du CA de l’École polytechnique (2001-2008) et président du CNES, a été honoré du 25e prix annuel "International von Kármán Wings Award" avec Abdul Kalam, président de l’Inde de 2002 à 2007.
C’est la 25e année que ce prix est donné par l’Aerospace Historical Society (AHS). Outre leurs accomplissements extraordinaires en aérospatiale, les personnalités honorées cette année sont à la pointe des collaborations internationales, de la surveillance du climat et de l’energy harvesting.
LES ECHOS, 4/3/2010
Une soif de comprendre
Jeune homme, le futur grand commis de l'Etat rêvait de faire de la recherche en… médecine ! « Le cadeau que je prisais le plus, c'était un microscope », se souvient-il. Il se laisse toutefois convaincre de faire sup-spé et se présente pour le sport à Polytechnique, persuadé de ne pas être reçu. L'X, qu'il intègre finalement avec deux ans d'avance et dont il sort vice-major, le détourne du secteur médical mais pas de sa vocation de chercheur. Les travaux qu'il effectuera au laboratoire de mécanique des solides de l'école lui permettront de couvrir tout le spectre de la recherche, de la physique la plus fondamentale aux applications les plus industrielles, puisque ses avancées aboutiront très directement à l'élaboration des règles de conception et de construction mécaniques des centrales nucléaires dont la France des années 1970 décidera alors de se doter.
Technicatome, la filiale du CEA spécialisée dans la propulsion nucléaire des sous-marins qu'il rejoint au début des années 1980, le voit vite gravir les échelons avant qu'il ne soit appelé par la maison mère pour y créer en 1990 une direction des technologies avancées. Un changement de cap qui répondait au besoin de se frotter lui-même à l'industrie, comme, quelques années plus tôt, il avait appris à souder pour mieux appréhender ces « fissures » si longtemps étudiées sous l'angle mathématique. C'est dans cette « grosse PME » d'un millier de salariés que Yannick d'Escatha s'est plongé dans les manuels de management, avec la même avidité intellectuelle qui l'avait poussé à dévorer tout Freud et tout Jung sur les conseils de sa femme psy. Cette soif de comprendre les ressorts de l'homme ou de la nature est chez lui quasi maladive. Même aux commandes de son avion, tandis qu'il chantonne, il ne peut s'empêcher de songer aux phénomènes physiques qui permettent à son appareil de voler.
YANN VERDO, Les Echos