Ancien élève de l'Ecole des mines de Paris. Ingénieur civil des mines.
Publiée dans Bulletin de la Société Géologique de France, 4eme série 19 (1919).
Alphonse Bioche naquit à Paris le 16 décembre 1841, d'une vieille famille parisienne ; il fit ses études au lycée Saint-Louis et, tout en préparant son droit, il entra comme élève externe à l'École des Mines où il débuta dans l'étude de la géologie à laquelle ses excursions autour de Paris l'avaient déjà familiarisé.
Il se fit présenter de bonne heure à la Société géologique (18 décembre 1865) par ses maîtres Bayle et Deshayes, paléontologues éminents qui ont exercé sur la science et autour d'eux une influence si puissante et si durable. En 1866, avec son ami Fabre, il rédigeait une note à la fois stratigraphique et paléontologique sur les Couches à coquilles marines situées entre la 3e et la 4e masse du gypse à Argenteuil ; travail qui a beaucoup contribué à ramener les géologues parisiens à l'étude de leurs environs et qui est resté un document toujours consulté avec fruit.
Son activité, son entrain, le désignaient bientôt pour occuper les fonctions de vice-secrétaire dans notre Société géologique pour 1868-1869, puis celles de secrétaire pendant les années 1870-1873. Il passait alors ses examens de droit et s'inscrivait avocat à la Cour d'appel, il allait bientôt succéder à son père dans la direction d'un journal judiciaire, le Journal des justices de paix qu'il a gardé jusqu'en 1912. Sortant du secrétariat, il acceptait les fonctions d'archiviste de 1874 à 1876, puis celles de trésorier qu'il devait longuement occuper de 1877 à 1889, avec une courte interruption imposée par notre règlement. Membre de la commission du Bulletin (1880-1883), de celle des Comptes (1890-1894), des archives, du conseil, il ne quittait une fonction utile que pour en exercer une autre où son dévouement et ses connaissances pouvaient nous rendre de nouveaux services. Avec son vieil ami Danglure. il rédigeait la table de notre Bulletin pour les années 1864 à 1872.
On voit la part de travail, l'importance des services dans notre organisation, l'intérêt désintéressé qu'Alphonse Bioche a témoigné à notre vieille Société géologique. Il ne publiait plus, mais il aidait tous ses confrères dans leurs recherches, il stimulait leur zèle, et si j'ai accepté de retracer devant vous, mes chers confrères, quelques-uns des traits de la vie de mon vieil ami, c'est que je puis porter hautement témoignage des services qu'il nous a rendus pendant plus de trente années et dont la déclaration faite ici n'est qu'un faible remerciement.
Ce qui domine dans toute la vie de Bioche, c'est sa bonté, son obligeance, sa vive intelligence, sa mémoire étonnante sur tous les livres, sur tous les faits, sur tous les hommes, qui avaient tenu de loin ou de près à la géologie.
Bioche fréquentait avec sa femme, avec laquelle il était en communion complète d'esprit, nos réunions extraordinaires, il était à Montpellier, à Genève, à Nice, dans le Morvan, etc., et il apportait dans nos relations scientifiques cet esprit d'aimable confraternité qui en fait le charme et l'agréable souvenir.
Il avait eu le chagrin de ne pas avoir d'enfant et il avait gardé une piété forte et sérieuse dépourvue d'ailleurs d'intolérance ; il fut un temps obligé de s'absorber dans son journal, il fréquentait moins notre local ; il y revint peu avant les années terribles que nous venons de traverser, rentrait au conseil en 1916, pour nous apporter dans la rédaction de notre nouveau règlement la connaissance ancienne et parfaite qu'il avait des affaires de la Société et sa longue expérience juridique.
Durement frappé dans sa famille, mais toujours vaillant, sa mort, survenue le 22 avril 1918, fut pour nous une surprise, car il avait supporté jusqu'alors, ne s'en apercevant guère, le poids des ans, nous apportant peu à peu les livres de sa bibliothèque qui pouvaient manquer dans la nôtre et nous témoignant ainsi sans relâche son attachement.
Dans ces derniers temps il déterminait les fossiles de sa collection, faisant des vérifications dans nos livres, dans la collection de l'Ecole des Mines, voulant laisser à l'Université catholique, où il avait de nombreux amis, une série en bon état. Sa famille a offert à l'Université de Louvain sa collection complète de notre Bulletin et de nos Mémoires, nous laissant prendre dans sa bibliothèque tous les livres qui peuvent nous être utiles. Les amitiés de Bioche étaient nombreuses, la mort de son ami Fabre, l'avait beaucoup affecté, comme celle de Jules Michel son beau-frère, ingénieur des Ponts et Chaussées, puis c'était Gaudry très affectueux pour lui, Munier avec lequel il rompait souvent des lances, enfin de Loriol, Pellat, Reynès, Renevier, Forel, etc., avec lesquels il correspondait.
Il est fâcheux que les nécessités sociales aient obligé Bioche à laisser la géologie active de recherches pour laquelle il était particulièrement doué; il aurait trouvé des choses nouvelles qu'il nous eût exposées avec la lucidité critique qui était le côté le plus attrayant de son caractère. Hélas! il est parti à soixante-quatorze ans, jouissant de l'universelle sympathie et emportant nos plus pénibles regrets.