Auguste GUERREAU (mort en 1926)


Guerreau, élève de l'Ecole des Mines de Paris
(C) Photo collections ENSMP

Ancien élève de l'Ecole des mines de Paris (promotion 1888). Ingénieur civil des mines.


Publié dans le Bulletin de l'Association des anciens élèves de l'Ecole des mines de Paris, juin 1926

Le 11 mai dernier, un nombreux cortège d'amis, après s'être réunis dans sa paroisse de Saint-François-de-Sales, accompagnaient au cimetière du Père-Lachaise les restes mortels d'Auguste Guerreau.

La nouvelle de sa mort, survenue le 8 mai. quand il était encore en possession de toutes ses facultés et plein de vie, fut pour tous ceux qui le connaissaient une douloureuse épreuve ; tous comptaient jouir encore longtemps de son aimable présence. Ses camarades, ses collègues, ses chefs, comme ses subordonnés, tous appréciaient la rectitude et l'affabilité de son caractère, et tous savaient que rien ne l'arrêtait quand il s'agissait de remplir ce qu'il considérait comme son devoir, devoir professionnel, devoir envers sa famille, devoir envers ses camarades et ses amis. On était toujours sûr de le trouver près de soi, aussi bien dans les bons que dans les mauvais moments de l'existence, et ceux notamment qui avaient souffert cruellement à Denain, pendant l'occupation allemande, se rappelleront avec quelle promptitude il vint leur apporter aide et réconfort, à peine l'envahisseur avait-il lâché la proie qu'il tenait et dont il ne laissait que des ruines.

Resté presque seul au siège social de la Société de Denain pendant la guerre, avec son chef et ami, notre camarade L. Pralon, il s'employa avec un infatigable dévouement à aider et à réconforter tous ceux qui, appartenant au personnel des Usines de Denain ou ayant des attaches avec ce personnel, se trouvaient éloignés de leur résidence et de leur moyen d'existence et douloureusement séparés de leurs familles. On peut dire qu'il était à tout et à tous, et c'est pourquoi sa brusque disparition laisse un grand vide parmi les siens et parmi ceux qui l'ont connu.

Entré le premier de sa promotion à l'Ecole des Mines en 1886, il fit son service militaire après les cours préparatoires et sortit en 1891, pour entrer le 15 avril de la même année à la Société Franco-Belge des Mines de Somorrostro, où il fit ses premières années sous les ordres directs de notre regretté camarade Paul Benoist, avec qui il resta intimement lié. A Bilbao, tous les anciens se souviennent encore de son passage et regrettent son départ, qui eut lieu après une cruelle épreuve, qui le laissa quelque temps désemparé. Après une trop courte union, sa jeune femme avait été brusquement enlevée à sa tendresse et, privé de la fidélité de ses affections, il lui garda sa foi jusqu'à son dernier jour, restant intimement lié avec la famille de celle qu'il avait perdue.

Par la suite, chargé des fonctions de Secrétaire général de la Société Franco-Belge, il revint souvent à Bilbao, où il ne trouvait que des amis.

Quand il quitta Bilbao en 1897 ce fut pour rester au service de la même grande famille industrielle, et il alla à Nancy exploiter les mines de fer que possède dans cette région la Société des Hauts-Fourneaux de Denain et d'Anzin, et prendre part aux travaux de recherches, auxquels donnait alors lieu la reconnaissance du bassin de Briey ; appelé ensuite, en 1900, au Siège social de la Société de Denain et d'Anzin à Paris, il y fut nommé, en 1907, Ingénieur en Chef des Mines de la Société de Denain, et remplit toute une série de fonctions, auxquelles le destinaient ses qualités de droiture, de labeur et d'affabilité.

En même temps que la mise en exploitation de la concession de La Ferrière-aux-Etangs, dans l'Orne, et l'installation des fours de calcination de carbonate de fer de cette mine, il dirigea avec succès la remise en bon état de la Houillère d Azincourt, dont la situation était fort précaire lorsque la Société de Denain et d'Anzin en fit l'acquisition ; ce travail était en bonne voie d'achèvement lorsque survint la guerre ; après les destructions commises par l'ennemi, il lui fallut le recommencer. Avec la collaboration de notre camarade Catrice, dont l'affection pour son chef était sans borne, il venait d'avoir la satisfaction d'achever cette œuvre dans les meilleures conditions, lorsque la mort l'emporta.

Chargé de représenter les intérêts de la Société de Denain dans toutes les exploitations de houille et de minerais de fer dans lesquelles elle a une part (Gouy-Servins, Rieu-du-Ciœur, Murville, Godbrange, Chanveaux) il avait acquis dans ces affaires une place de premier rang par ses qualités d'ordre moral autant que d'ordre technique.

En 1925, il avait reçu la Croix de la Légion d'Honneur, récompense bien méritée de toute une vie de travail et de dévouement. Il laisse ses amis dans le chagrin et sa famille dans le deuil. Que son frère, sa sœur, sa belle-mère, ses parents veuillent bien accepter ici l'expression de nos plus sincères et affectueuses condoléances.

Il est mort en pleine activité. Dieu aura certainement accueilli auprès de lui le « bon serviteur » qui, dans sa vie trop tôt fauchée, ne connaissait que la voie droite ; que ce soit une consolation pour les siens qui le retrouveront un jour tel qu'ils l'ont connu, c'est-à-dire prêt à les accueillir et à leur tendre la main.

J. de Bellefond (1887).

Voir aussi : biographie sur site SIPPAF