Les
exigences grandissantes
de la forme organisationnelle... Qui ne s’y trouve confronté, de
plus en plus
souvent, de plus en plus insidieusement, de plus en plus
brutalement ?
Aubépine Dahan et Vincent
Mangematin les débusquent dans le monde des enseignants
chercheurs, pris dans
la double injonction contradictoire de consacrer du temps à des
tâches
administratives et d’intendance, au détriment de leurs
activités pédagogiques et de
recherche, ou de perdre
leur autonomie et, ainsi, la maîtrise de leur métier au
profit de ‘vrais’
administratifs.
Mais cette question se pose bien au-delà du seul monde
académique. Ainsi, au Cameroun, une entreprise américaine
prend le contrôle de
l’ancienne Société nationale d’électricité
et tente d’imposer ses valeurs (qu’elle
veut collectives) et sa conception des bonnes pratiques de gouvernance.
Incrédulité, railleries et défiance : telles
sont les réactions des
salariés, déçus par l’iniquité dont font
preuve les nouveaux dirigeants et par la
vacuité de leur communication. Serge Alain Godong
démontre avec finesse que la
méconnaissance des imaginaires spécifiques des acteurs,
quels qu’ils soient,
conduit bien des expériences managériales à des
déconvenues.
Tel est le cas aussi dans certaines
entreprises qui imposent le travail à distance (et les
méthodes de contrôle qui
vont avec) à une partie de leurs salariés. Cécile
Clergeau et Laetitia Pihel
nous montrent que les distorsions entre les représentations du
management et
celles des salariés génèrent chez ces derniers un
désengagement, du stress,
voire du désespoir, et qu’elles affectent leur santé.
Telle est également la
problématique dégagée par Jennifer Urasadettan
dans le monde des cliniques
mutualistes, dont le personnel a du mal à assimiler des
représentations et des
pratiques managériales que motivent des contraintes croissantes
en matière de
financement.
Des démonstrations inverses
nous sont apportées par Martine Napoleone et Edouardo Chia,
ainsi que par Eric
Huber. Les deux premiers nous parlent d’une petite coopérative
laitière pour
laquelle agriculteurs et entreprises de transformation parviennent
à s’entendre
autour d’un objectif commun : l’obtention de l’appellation
d’origine
contrôlée (AOC) pour ses produits. Les amateurs de
pélardon apprécieront, sans
aucun doute… Quant aux managers avant tout soucieux de rationalisation
et de
performance économique, ils constateront que la construction
préalable d’une
confiance organisationnelle est aussi un chemin (sans doute plus long
et plus
subtil que la proclamation de valeurs réputées
indiscutables) conduisant à une
bonne gouvernance.
De son côté, Eric Huber revisite
la fable du lièvre et de la tortue,
mais, cette fois-ci, c’est le lièvre qui gagne ! Bousculant
les usages,
court-circuitant les procédures établies et ignorant les
valeurs dogmatiques,
une équipe de francs-tireurs innove avec succès et
réussit un challenge
audacieux. Son secret ? Une appropriation des méthodes
agiles en vigueur dans
les projets informatiques, rendant l’équipe à la fois
plus réactive aux
changements de priorités et davantage complice pour atteindre un
objectif réputé
inaccessible en raison du conformisme ambiant. Nous sommes, ici, bien
loin des
méthodes de contrôle évoquées plus haut
à propos du travail à distance…
Peut-être,
le jour venu (un
jour sans doute encore lointain), retrouvera-t-on cette idée
simple que
l’entreprise ne sert pas ses objectifs lorsqu’elle ignore ceux qui, en
son
sein, contribuent à les atteindre ?
Le Père Noël arrive bientôt ; alors,
rêvons un
peu !
Et…
à l’année
prochaine !
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