n° 38 - MARS 1995
EDITORIAL |
Il est des dirigeants étonnants sur lesquels l'ennui semble
n'avoir pas de prise.
L'ennui ? Quel ennui ? La pression des marchés, la sophistication des stratégies, les aléas techniques et financiers, les responsabilités sociales, bref le stress quotidien auquel sont soumis ces hommes et ces femmes ne laisse guère, semble- t-il, de place aux états d'âme et aux langueurs ! Voire... Il m'arrive, au décours de séminaires ou de conversations, quand la garde se baisse et que le costume de scène laisse voir ses effilochures, d'entendre des patrons dire autre chose. Que, finalement, les leviers d'action ne sont pas si nombreux et que, les méthodes étant éprouvées, on en fait vite le tour. Que l'état de grâce est bref et que, le ménage étant fait et l'entreprise d'aplomb, le bon gestionnaire reprend vite le pas sur l'entrepreneur. Qu'on ne mobilise pas une génération sur le TQC. Qu'on ne construit pas une vraie vie, pas plus de patron que d'ouvrier, sur l'analyse de la valeur. La pertinence des outils n'est pas en cause, mais il y a parfois du divertissement, de celui dont parlait Pascal, dans leur mise en oeuvre par certains dirigeants, investis d'un pernicieux ennui et de la nostalgie des aventures vécues par leurs aînés. De grands excès faute de grands projets ? Il semble que cela arrive parfois... Il faut que la corde se balance, nous dit Amar Drissi évoquant Samuel Johnson, pour pouvoir s'affronter aux vraies difficultés ! Ce n'est pas là fleur de rhétorique, l'histoire de Jerada mourant d'ennui l'illustre à merveille. Et il faut que le manager insuffle de l'épique et du rêve pour que renaisse la fierté et que s'accomplisse l'impossible, en dépit des évidences. L'insoumission aux apparences, l'humilité devant le réel et la fierté devant les supposés puissants sont les armes à l'exercice desquelles Claude Riveline forme ses élèves. La surprise de l'apprenti dirigeant qui se cogne au réel, la pédagogie de l'impertinence et de la liberté, le bonheur de la connaissance partagée entre le maître et son élève ouvrent alors un espace oublié des livres de gestion, d'où l'ennui est banni. Claude Riveline, maître médiéval, Amar Drissi, patron venu d'un ailleurs mythique, d'autres, que nous avons déjà publiés ou que nous publierons dans des numéros à venir de Gérer & Comprendre, témoignent que la vie des affaires ne se résoud pas à la bonne gestion, mais qu'elle est aussi la vie, tout court. Alors, l'ennui dans les affaires...
|
SOMMAIRE DU NUMÉRO 38 |
|
Peut-on, va-t-on fermer la mine ? Jerada est au bord du gouffre. Arrive un gestionnaire venu d'ailleurs. Bien que formé à la haute finance américaine et nullement à la mine, il tient des propos d'une folle hardiesse : "La situation est désespérée, nous avons donc une chance". Le redressement opéré a de quoi faire méditer le précepte du philosophe Samuel Johnson : "La perspective de la pendaison concentre merveilleusement l'esprit". | |
|
Convaincu par ses recherches dans les organisations, de l'insuffisance des livres, C. Riveline confronte longuement ses étudiants à l'aventure et au doute, à la manière des apprentis chevaliers du Moyen-Age. | |
|
Le livre de Denis Guigo "Ethnologie des hommes, des usines et des bureaux" témoigne du parcours d'un chercheur, original et prometteur, que Gérer et Comprendre publia souvent. Un accident de voiture lui a coûté la vie. A l'occasion de la sortie de son livre à titre posthume, Colette Petonnet parle de la rencontre entre l'ingénieur et l'ethnologie à laquelle elle le forma. |
|
Superfund, le grand programme du gouvernement fédéral américain pour la dépollution des sites industriels, est à l'origine d'une industrie entièrement nouvelle dans un domaine où les États-Unis n'avaient aucune compétence historique. En agissant par la réglementation de la responsabilité, d'un côté, et par des moyens financiers, de l'autre, il fait cependant apparaître les limites de dynamiques industrielles initiées par l'Etat. | |
|
Le courrier électronique (e-mail) fascine. Sa simplicité, sa rapidité, sa fiabilité charment. D'aucuns prétendent qu'il est le prélude à une ère de communication télématique qui révolutionnera les relations entre les hommes. Certes, il est désormais intégré aux coutumes de certaines entreprises, et il y produit d'incontestables effets. Mais son influence est-elle à la hauteur des espérances, à la mesure des rêves ? Sa portée est-elle conforme aux séduisantes promesses des oracles du multimédia ? |
DE
LA DRÔLE DE NÉGOCIATION AU SYSTÈME INDULGENT
par Ehrard Friedberg |
FAUT-IL
BRÛLER LES NÉO-INSTITUTIONNALISTES ?
par Bertrand Nicolas |
OÙ
IL EST QUESTION DES FORMES ORGANISATIONNELLES ET DE LEUR ÉVOLUTION
par Jean-Philippe Neuville |
RATIONALITÉ
POLITIQUE ET RATIONALITÉ ÉCONOMIQUE DE L'ENTREPRISE
par Erhard Friedberg |
MUTATIONS
DE L'ENTREPRISE ET PERFORMANCE
par Gwenaële ROT |
|
La pré-retraite progressive satisfait la plupart des salariés qui y adhèrent, les entreprises l'apprécient et les syndicats la tolèrent. Mais pour qu'un tel dispositif ne soit pas seulement une contribution de la collectivité aux charges de restructuration des entreprises, il apparaît nécessaire que les termes de l'échange soient plus clairement explicités, sauf à n'être qu'une aubaine pour celles-ci. | |
|
Alors que la gestion par activités commence à s'implanter en France, deux approches se différencient sur la base de conceptions de l'entreprise fondamentalement divergeantes. Pourtant, la gestion par activités peut se combiner avec la gestion par processus tout en gardant ses qualités essentielles : être appropriable par ceux-là mêmes qui, en fonction de leur intelligence des situations réelles, réalisent les activités de l'entreprise. | |
QU'Y
A-T-IL DERRIÈRE LA MODERNISATION ?
Par Philippe BEZES, CSO |