Fils de David VOLTZ, cafetier-limonadier à Strasbourg, et de Elisabeth VOGT. Religion protestante.
Publié dans le LIVRE DU CENTENAIRE (Ecole Polytechnique), 1897, Gauthier-Villars et fils, TOME III, page 196
VOLTZ (promotion de 1803 de Polytechnique), né à Strasbourg, le 15 août 1785 ; mort, à Paris, Inspecteur général de 2e classe, le 6 février 1840. Il s'est occupé spécialement de Paléontologie et de Métallurgie. Comme paléontologiste, il a puissamment aidé Dufrénoy pour la réorganisation des collections de l'Ecole des Mines. Outre ses études sur le chauffage à l'air chaud, il a donné divers Mémoires sur la Métallurgie, notamment (1837) sur la distinction entre les fontes miroitantes de Siegen et les fontes blanches ordinaires. Il a laissé une réputation spéciale pour le dévouement avec lequel il a prodigué ses conseils aux exploitants de mines et d'usines de son Service.
Publié dans Annales des Mines, 1846, pages 237 et suiv. :
Né à Strasbourg, le 15 août 1785, M. Voltz (Louis-Philippe) dut à l'économie qu'apportèrent ses parents dans leur modeste et difficile existence les moyens d'acquérir l'instruction que l'on exige des jeunes gens qui se destinent à l'Ecole polytechnique. Sachant que le travail pouvait seul lui réserver un avenir assuré, il profita des soins et des conseils du savant professeur Arbogast, et entra dans cette célèbre école en 1803. Ce fut alors qu'après avoir entendu les premières leçons des Fourcroy, des Vauquelin, des Guyton, il se destina à la carrière des mines. Reconnu susceptible d'être admis à l'Ecole des mines à la fin de 1805, il se trouva néanmoins dans l'obligation de prolonger son séjour de quelques mois à l'Ecole polytechnique, l'administration des mines n'ayant pu disposer, en 1805, que des fonds nécessaires à l'admission de deux élèves. Il savait que les cours qu'on professait à l'Ecole d'application commenceraient au printemps de 1806, et il sollicita d'être reçu élève des mines, sans traitement, dès le mois de février suivant. Cette faveur, qu'il n'obtint qu'après de vives instances et qu'en s'imposant de nouvelles privations, le combla de joie, parce que sa position du moment, loin d'être pour lui un motif de découragement, le stimulait, ainsi qu'il le répétait souvent, à sacrifier à un travail quotidien et opiniâtre toute espèce de distractions et de plaisirs. Sa santé, faible et délicate, eût été, pour tout autre, un obstacle à de constantes occupations; mais tels étaient son aptitude et son courage au travail, qu'il s'inquiétait peu de son état de santé. La satisfactien qu'il éprouvait d'ailleurs d'avoir mis à profit plusieurs heures qu'il aurait dû consacrer au repos, lui rendait bien légères les premières atteintes d'affections auxquelles, dans un âge plus avancé, il n'a pu résister.
Immédiatement après avoir terminé ses études à l'Ecole des mines de Moutiers, il fut mis à la disposition de M. Schreiber, ingénieur en chef et directeur de cette école. Ce digne chef, si habile dans la pratique de l'art des mines, le chargea de se livrer à la recherche des gîtes métallifères que pouvait renfermer la partie de la Tarentaise dont les minerais devaient être traités dans la fonderie centrale de Conflans.
Ce travail d'exploration rentrait trop exelusivement dans les goûts de M. Voltz pour qu'il ne s'y adonnât pas avec ardeur. Malheureusement sa faible santé s'opposait à la réalisation du désir qui le dominait, de tout voir, de tout examiner; et les fatigues, inséparables des courses qu'il était obligé d'entreprendre, lui firent entrevoir la triste nécessité de ne pas aller au delà, dans le cours de sa vie, de ce que pouvait permettre l'exercice d'un prudent régime. Par suite des conseils de son médecin, il se résigna à solliciter de M. le comte Laumond, alors directeur général des mines, un congé de deux mois qu'il passa dans sa famille, et obtint de lui la promesse de ne point être appelé à un poste d'ingénieur dans les montagnes des Alpes, où l'air qu'on respire ne pouvait que lui être contraire. A l'expiration de son congé, il fut envoyé en mission près de M. l'ingénieur en chef Blavier pour coopérer, sous ses ordres, à la régularisation des exploitations des mines de la province de Liège. Cette mission fut, pour M. Voltz, l'occasion de suivre l'exécution de grands travaux de mines, et elle le mit à même, conjointement avec son collègue M. de Gargan, aujourd'hui copropriétaire des beaux établissements d'Hayange, de pouvoir diriger l'exécution des premiers et difficiles travaux de recherches des mines de sel gemme de Vie.
Après un séjour de deux ans en Belgique, il fut chargé, à partir du mois d'août 1814, du service des mines et usines dans une partie du neuvième arrondissement minéralogique, composé des départements du Bas-Rhin, de la Meurthe et des Vosges; puis encore, quelque temps après, de celui des départements de la Haute-Saône, du Haut-Rhin et de la Moselle. Ce service exigeait, de sa part, une grande activité; il suffit à tout, et l'administration s'est plu souvent à reconnaître son zèle et son dévouement, et à lui en témoigner sa satisfaction. M. Voltz se rendait plusieurs fois, chaque année, dans les diverses parties de son arrondissement, et ne négligeait jamais de recueillir les données qui l'ont mis plus tard à même de bien faire apprécier la constitution géologique des diverses masses minérales dont sont composées les montagnes des Vosges, ainsi que celles qui, situées à l'ouest de ces dernières, constituent une partie des terrains de la Moselle, de la Meurthe et de la Haute-Saône. Il se préparait ainsi à établir, sur des faits positifs, les rapports de ces divers terrains avec ceux qui leur sont analogues en Angleterre et en Allemagne. L'on reconnaît, à la lecture du mémoire de géologie dans lequel il a décrit, en 1813, la constitution des terrains salifères des environs de Vie, tout le fruit qu'il avait retiré de l'étude des terrains de ces deux pays. Ce mémoire offrait, au moment où il a été publié, un intérêt de circonstance tout particulier ; il se liait à la découverte toute récente des mines de sel gemme de la Meurthe, sur lesquelles on ne pouvait avoir de données positives qu'en en étudiant le gisement avec celui des terrains qui leur sont associés. Ce mémoire fut suivi de celui qui est intitulé : Topographie minéralogique de l'Alsace, et sur lequel nous reviendrons dans peu d'instants.
M. Voltz, pendant le temps qu'il fut chargé du service des huitième et neuvième arrondissements roinéralogiques, se livra à l'étude de tout ce qui a trait à l'art des forges. Familier avec la langue allemande, il eut la facilité d'accroître ses connaissances en métallurgie, en se nourrissant des ouvrages que des hommes spéciaux ont publiés en cette langue.
Toujours empressé de faire participer nos maîtres de forges à la pratique des méthodes qui étaient adoptées dans des usines situées au delà du Rhin, M. Voltz saisissait avec un empressement sans égal les moyens d'être au courant des plus minutieux détails qui pouvaient rendre facile l'application de ces méthodes. Il fit connaître, en 1833, l'application que l'on avait introduite, dans le Wurtemberg, de la belle découverte qui prit naissance en Ecosse vers 1830, de l'alimentation des hauts-fourneaux au moyen de l'air chaud. M. le directeur général des ponts et chaussées et des mines le chargea, en effet, de se rendre à l'usine royale de Wasseralfingen, en même temps qu'il donnait mission à deux autres membres du corps des mines, MM. Dufrénoy et Gueymard, d'étudier les procédés de l'application de l'air chaud, tant dans les usines d'Ecosse et d'Angleterre, que dans les fonderies et forges de Vienne, département de l'Isère.
M. Voltz n'a pas cru, sans doute à cause de la découverte encore peu connue dont il avait à constater les résultats, devoir hasarder d'opinion sur les causes auxquelles sont dus les effets de l'air chaud ; et, dans sa notice sur l'usine de Wasseralfingen , que renferme le tome IV des Annales des mines de l'année 1833, il s'en est tenu à une description détaillée du procédé et des appareils en usage dans cette usine. Elle ne laissa rien à désirer, et mit le lecteur parfaitement à même d'apprécier dans tous ses détails les procédés relatifs à l'emploi de l'air chaud. MM. de Kerner, président du conseil des mines de Stuttgard, et Favre du Faur, lui en facilitèrent les moyens avec une rare bienveillance. Par cette notice, les maîtres de forges apprirent avec l'intérêt qui s'attachait à l'application d'un procédé tout nouveau, et dont les effets étaient si inattendus, que, comme en Ecosse, on obtenait en Wurtemberg une économie dans la consommation du combustible et un accroissement dans la production de la fonte.
M. Voltz profita de la mission qui lui avait été donnée de se rendre à Wasseralfiugen pour étudier en même temps les effets des creusets puisards qui, dans plusieurs usines de l'Allemagne, sont annexés aux hauts-fourneaux, et dont les maîtres de forges de France ne connaissaient pas encore l'usage. Il publia les résultats qu'on en obtenait, dans le tome VIII de la troisième série des Annales des mines pour l'année 1835; et les propriétaires des forges du Bas-Rhin annexèrent de semblables creusets à leurs hauts-fourneaux de Niederbronn et de Zinswiller. Après quelques essais, ils constatèrent des avantages analogues à ceux que M. Voltz leur avait fait pressentir.
Les connaissances qu'il avait acquises en géologie, en minéralogie et en zoologie, le portèrent à réaliser le projet qu'il avait conçu depuis longtemps, de disposer, d'après un ordre tout nouveau, les collections d'histoire naturelle de l'Académie de Strasbourg; personne n'était plus propre que lui à leur donner l'importance qu'elles ont reçue ; et lorsque la ville fit l'acquisition du Musée, il y eut unanimité pour l'appeler à faire partie du conseil d'adminislration. Grâces à ses soins, à son zèle, à ses généreux efforts, ces collections prirent bientôt un développement remarquable; et c'est avec raison que l'un de nos collègues, M. Dufrénoy, en faisant connaître à la Société géologique de France les travaux de M. Voltz, disait que, par ses soins, l'Académie de Strasbourg était devenue « une espèce de congrès scientifique pemanent , où les minéralogistes et géologues de France et d'Allemagne venaient constamment puiser des lumières ». Il fut l'un des fondateurs de la Société d'histoire naturelle de cette ville, ainsi que du recueil scientifique qu'elle publie ; et toujours mû par le désir d'être utile à ses concitoyens, il ouvrit à l'Académie, d'après l'autorisation qu'il en reçut de M. le ministre des travaux publics, un cours de géologie et de minéralogie que continue avec succès un jeune ingénieur des mines chargé du service du Bas-Rhin, et que la Faculté des sciences de Strasbourg compte au nombre de ses membres.
Les Mémoires et Notices que M. Voltz a fait insérer dans les Annales des mines ont été précédés ou suivis d'un plus grand nombre, qui ont été l'objet de publications, tant dans les Mémoires de la Société d'histoire naturelle de Strasbourg, le Journal périodique de M. Léonhard, professeur à l'Université de Heidelberg, que dans les journaux l'Institut et le Jahrbuch. Plusieurs des mémoires ont reçu l'approbation des naturalistes, et sont une preuve de la laborieuse conscience qu'apportait M. Voltz à se livrer à des recherches qu'il pensait être utiles à la science. Son mémoire sur la structure des bélemmites, et qui, nonobstant les travaux de plusieurs naturalistes, était alors encore peu connue, n'a été publié qu'en 1830, après qu'il eut eu procédé à l'examen de plus de mille échantillons fossiles de cette espèce.
Dans une de ses plus importantes publications, dans celle qui a paru à Strasbourg en 1828, sous le titre que j'ai énoncé, Topographie minéralogique de l'Alsace, il a reconnu qu'il était nécessaire, pour échapper à toute confusion dans la classification des roches, d'en faire deux grandes divisions: l'une, comprenant les roches stratifiées; l'autre, celles qui ne le sont pas. Au nombre de ces dernières, il a compris, et les roches cristallines et les roches fragmentaires. Cette division devait être la base de son cours de géologie à la faculté des sciences de Strasbourg. Le mémoire que nous signalons ici est remarquable par l'exactitude de la description des terrains de l'Alsace, et par le soin qu'il a apporté à préciser, autant que la science géologique le permettait, les rapports de liaison et d'âge qui paraissent exister entre eux.
La stratification des roches et leur inclinaison plus ou moins prononcée dans les pays de montagnes ont été souvent l'objet de ses méditations, et il a émis, sur ce grand phénomène, des considérations intéressantes dans une notice qui fait partie du tome 1er des Mémoires de la Société d'histoire naturelle de Strasbourg. Le redressement des roches lui paraissait un fait intimement lié à l'histoire de leur soulèvement, et c'est en recherchant les conséquences d'un redressement qu'il suppose s'être opéré dans un sol plat, composé de strates horizontales de lias recouvrant, à stratification concordante, un terrain houiller, qu'il fait voir comment les terrains à strates redressées sont souvent susceptibles de présenter des apparences illusoires d'alternances de stratification.
Toutes les parties de l'Alsace ont été, à différentes époques, l'objet des recherches de M.Voltz; celles qu'il a entreprises sur le grès bigarré de Soultz-les-Bains, ont mis à même MM. Ad. Brongniard et Hermann de Meyer de nous faire connaître des plantes fossiles et des animaux vertébrés qui nous étaient inconnus. Ces deux naturalistes ont joint, au nom de ces anciens êtres organisés , le nom du savant qui le premier les a livrés à leurs études. C'est ainsi qu'une espèce de Saurien du grès bigarré de cette localité, et un genre de plantes que l'on y rencontre fréquemment, ont passé, dans la science, sous les noms de Ondontosaurus Voltzii et de Voltzia brevifolia. De telles dénominations sont une douce et bienveillante marque de souvenir qu'ont voulu perpétuer, en faveur de M. Voltz, des hommes qui, comme lui, ont constamment cherché leur jouissance exclusive dans les sciences, qu'il cultivait avec tant d'ardeur et de succès.
Les notices qu'il a rédigées sur les sources d'eaux minérales de Soultz-les-Bains, ses observations sur les végétaux fossiles, et celles qui sont relatives au bradford-clay, seront constamment consultées avec tout l'intérêt que commandent les autres travaux que notre collègue a livrés à la publicité.
En minéralogie, il a aussi fait insérer plusieurs mémoires dans des recueils allemands principalement sur la cristallographie, et il s'occupait, à ses derniers moments , d'un travail important sur la classification minéralogique qui reposait, en grande partie, sur les caractères extérieurs des minéraux. Les nombreuses notes, dans lesquelles étaient consignées ses idées sur cette classification méthodique, n'ont pu être retrouvées à sa mort ; et l'on n'a, de cette méthode, que le souvenir qu'en a conservé notre collègue, M. Dufrénoy, par suite des communications que lui en avait faites, de vive voix, M. Voltz. C'est un sujet de regrets que la perte de tous les éléments d'un tel travail. La publication qu'il se proposait d'en faire eût été sans doute pour lui un nouveau titre à l'estime et à l'amitié de ses camarades. La carte géologique du département du Bas-Rhin, à la confection de laquelle il avait consacré tant de veilles et qu'il était sur le point de terminer , n'a pu de même être retrouvée.
M. Voltz fut nommé membre de la Légion d'honneur, le 3 mai 1831, et ingénieur en chef des mines de première classe, le 1er novembre 1833. Satisfait de sa position, il partageait son temps entre les travaux administratifs et l'étude des sciences naturelles qui sont du domaine de l'art des mines. Ses heures de loisir s'écoulaient auprès de quelques amis de sa jeunesse. Il vivait avec ses vieux parents , et rien n'était plus touchant que le culte d'amour filial que cet excellent homme leur avait voué. La mort de sa mère, arrivée en 1828, l'accabla de chagrin et porta une nouvelle atteinte à sa faible santé. Resté seul avec son père, il l'entretenait, pour consoler ses derniers jours, de son désir de conserver la résidence de Strasbourg; mais, en 1832 , sa vie fut douloureusement troublée : il avait embrassé, avec énergie, les principes de la révolution de 1830, et l'expression de ses pensées, sur les mesures qui lui paraissaient devoir être prises par le nouveau gouvernement sous lequel les journées de juillet avaient placé la France, le rendit l'objet d'injustes dénonciations. Elles eurent pour conséquences de lui faire assigner, le 11 janvier 1832, la résidence de Clermont en Auvergne. Le grand âge de son père, l'existence de ce vieillard, à laquelle son fils pouvait seul subvenir, la presque impossibilité de supporter, à quatre-vingt-huit ans,les fatigues d'un long voyage, déterminèrent notre camarade à se résigner sans hésitation à tous les sacrifices plutôt que de l'abandonner. Le ministre des travaux publics entendit ses justifications et il considéra, peu de temps après l'avoir prononcé, son changement de résidence comme non avenu.
M. Voltz dut, en grande partie, sa réintégration dans les huitième et neuvième arrondissements minéralogiques, à de pressantes sollicitations de personnes des départements de l'Est haut placées dans les sciences et l'industrie. Il ne peut qu'être honorable à sa mémoire de citer les paroles que M. Champy, au nom des exploitants des mines et des maîtres de forges du département des Vosges, a adressées, en sa faveur, à M. Bérard, alors directeur général des ponts et chaussées et des mines.
« Propriétaire des forges et mines de Framont et de Rothau, je désire le maintien, dans sa résidence actuelle, de M. Voltz. La majeure partie des travaux considérables de recherches entrepris dans mes mines l'ont été sur son indication et, pour ainsi dire , sous sa direction continuelle. Cette considération, jointe aux sentiments d'estime personnelle que nous professons tous pour M. Voltz, m'a déterminé, monsieur le directeur général, à vous transmettre le voeu de nos confrères du département; nous nous plaisons à croire que vous y aurez égard, et que vous contribuerez à nous conserver, comme ingénieur en chef des mines, M. Voltz que nous estimons et chérissons à juste titre. Il peut seul rendre à son administration, comme à l'industrie manufacturière dont tous les jours on exige davantage, des services qui la mettent à même de suffire à ce qu'on lui demande. »
Les représentants à la Chambre des députés des départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin s'empressèrent aussi de porter, à la connaissance du ministre, les motifs qui leur faisaient désirer que M. Voltz ne fût pas déplacé. « Nous nous affligeons de ce déplacement, disaient-ils, encore beaucoup moins pour lui que pour nos commettants. »
Un tel ensemble d'éloges et de sollicitations, en faveur de M. Voltz, est un hommage que lui ont valu, pendant sa vie, un noble caractère et un dévouement plein d'abnégation à provoquer, comme membre du conseil municipal de la ville de Strasbourg et des commissions des hospices et des établissements de bienfaisance qu'elle renferme, toutes les mesures qui pouvaient tendre à améliorer la position des classes pauvres et malheureuses de cette importante cité.
M. le sous-secrétaire d'Etat des travaux publics, juste appréciateur de sa haute capacité et de ses services, sollicita et obtint, pour M. Voltz, en décembre 1836, le grade d'inspecteur général adjoint au corps royal des mines et, en mai 1837, la croix d'officier de la Légion d'honneur. Le nouveau grade auquel il venait d'être promu, quelque honorable qu'il lui parût, n'aurait pu néanmoins le tenter, s'il avait fallu qu'il en exerçât les fonctions pendant que ses soins étaient encore utiles à son vieux père; mais la mort le lui ayant ravi peu de temps avant qu'il n'obtînt le nouvel avancement que plus de trente années de services lui avaient mérité, il quitta Strasbourg et vint prendre part, en se fixant à Paris, aux travaux du conseil général des mines. Il s'y fit particulièrement connaître par cet esprit de justesse qui, sous de simples paroles, apparaissait toujours en lui lorsqu'il était appelé à émettre un avis motivé sur les affaires dont le conseil avait à s'occuper.
Dans les courts intervalles de temps que lui laissaient de libres ses travaux habituels, il revenait à ses études de prédilection, à la géologie, à la minéralogie et à la paléontologie. Il a fait une application utile de ces diverses branches de l'histoire naturelle, principalement en ce qui concerne les coquilles, à la classification des collections que possède l'Ecole royale des mines de Paris, et à laquelle il a pris une grande part. Cette application révèle la sagacité toute spéciale dont il était doué pour parvenir à la détermination des caractères d'après lesquels doivent être classés en genres et en espèces ces animaux fossiles. M. Voltz, tout en s'adonnant de préférence à l'étude de ces sciences, se tenait néanmoins toujours au courant des autres parties de l'art des mines. L'un de ses derniers et plus importants rapports à l'administration fournit, en effet, la preuve de ses profondes connaissances en ce qui concerne l'art des forges. Ce rapport, qui lui a été demandé en 1837, est relatif à des modifications que devaient subir des droits d'entrée, qui alors étaient établis sur les fontes blanches miroitantes du pays de Siegen, grand duché du Rhin, et dont sont presque exclusivement alimentées les aciéries de Sarralbe et de Baerenthal situées dans la Moselle. Cette modification de droits, dans l'opinion de la chambre de commerce de Strasbourg, et de l'administration des douanes, ne pouvait être accordée, sous le prétexte qu'il n'existait pas de moyens certains de distinguer les fontes blanches des bords du Rhin de celles qui ne sont employées que pour fer. M. Voltz fit voir que cette opinion ne pouvait être soutenue. Il envisagea la question sous toutes ses faces, s'occupa de la nature physique et chimique des fontes miroitantes, des circonstances sous lesquelles elles se produisent, et déduisit de cet examen des conséquences opposées à celles qui avaient été émises. Tout, dans l'opinion de M. Voltz, était précis, et il fut chargé de rédiger une instruction pour les directeurs des bureaux de douanes de Strasbourg et de Forbach, qui pût les mettre à même de distinguer, parmi les fontes étrangères, celles qui, provenant du grand duché du Rhin, jouissent, sous le nom de fontes blanches miroitantes, de propriétés qui les rendent particulièrement propres à la fabrication de l'acier.
Les idées de M. Voltz sur la constitution intime des diverses natures de fonte de cette partie de l'Allemagne provenaient d'une étude toute spéciale qu'il avait faite, sur les lieux mêmes de production, du travail de la fonte et du fer provenant des minerais spathiques des environs de Siegen, et de la lecture d'un mémoire fort intéressant sur ces fontes et minerais, que l'on doit à M. de Karsten. Ce mémoire a été traduit de l'allemand par M. Voltz, et a été inséré par extrait dans les Annales des mines pour l'année 1838.
Depuis cette époque, sa santé s'est de plus en plus affaiblie; cependant, bien qu'il eût été obligé de s'abstenir de prendre part aux travaux du Conseil des mines pendant les étés de 1838 et de 1839, pour se rendre en Suisse, aux eaux de Louëche, ses collègues avaient l'espérance qu'il pourrait longtemps encore les éclairer de ses conseils et de son expérience. Vain espoir ! le 6 février 1840, il éprouva, au milieu d'une séance du Conseil général des mines, une légère indisposition, qui parut d'abord de nature à céder aux premiers soins de son médecin ; mais quelques jours s'étaient à peine écoulés que les effets en devinrent de plus en plus alarmants ; et, six semaines après, nous avions la douleur de le conduire à sa dernière demeure.
La vie de notre bon et estimable camarade a été tout entière consacrée à l'étude de l'art de l'ingénieur; et l'on peut dire que les distractions du monde n'ont point existé pour lui. Son caractère s'était, par suite, soustrait à l'exigence de ces formes d'usages qui, trop souvent peut-être, portent des personnes, douées d'ailleurs de nobles sentiments, à n'émettre leur opinion , lorsqu'elle peut ne pas être partagée de tous, qu'avec de certains ménagements qu'on ne saurait néanmoins taxer de faiblesse. M. Voltz, plein d'une profonde conviction de la vérité des pensées qui le dominait, les exprimait, sans hésiter, en un langage simple, franc, sans détour, mais qui parfois pouvait paraître empreint d'un mécontentement que provoquaient des moeurs et des usages qu'il jugeait peu en rapport avec la pratique d'une sévère probité. Cette disposition d'esprit n'était, au reste, qu'une nouvelle preuve de la délicatesse et de la loyauté de son caractère; et jamais elle n'a mis d'obstacle à ce que des relations intimes s'établissent entre lui et ceux qui connaissaient la pureté des sentiments dont son coeur était rempli. Aussi est-ce pour nous un besoin de rappeler, en terminant cette notice, combien il a été digne de la sympathie dont ses amis et ses camarades l'ont constamment honoré.