Henry TONNÉRIEUX (mort en 1916)

Ancien élève de l'Ecole des mines de Paris (promotion 1911). Ingénieur civil des mines.


Publié dans Bulletin de l'Association amicale des anciens élèves de l'Ecole des mines de Paris, Août 1916 :

Henry TONNERIEUX vient d'être glorieusement frappé devant Verdun, où il combattait depuis quelques jours. Pour atténuer un peu la douleur de tous ceux qui l'ont aimé, rappelons d'abord la belle citation méritée par le vaillant disparu : « Officier d'élite, ayant mis au service de la patrie, depuis le début de la campagne, tout ce qu'un esprit orné de la plus belle intelligence et qu'un cœur animé des plus nobles sentiments peuvent donner. Grièvement blessé à son poste de combat le 1er juin 1916. Mort pour la France le 2 juin 1916. »

Notre camarade était âgé de 26 ans. Après de brillantes études au Lycée Ampère, à Lyon, il fut reçu à la fois à l'Ecole des Mines de Saint-Etienne et à notre Ecole pour laquelle il opta sans hésitation. Il y fut à la fois aimé de tous ses camarades et estimé de ses professeurs. Son travail et son intelligence, très souple et très vive, lui permirent de sortir le deuxième, sans qu'il en conçût le moindre orgueil et sans qu'il cessât très simplement d'être pour tous le meilleur des camarades, toujours prêt à rendre service, à donner des renseignements à ceux d'entre nous à qui manquaient les éléments nécessaires pour mener à bien un projet. Il était un des membres les plus assidus du Cercle des Elèves et nous étions heureux de le voir au milieu de nous, car sa bonté, sa bonne humeur et sa complaisance faisaient de lui le plus charmant des camarades.

Pendant ses voyages d'étude il visita, une année, surtout des installations métallurgiques et, l'année suivante, des mines. Il voulait être mineur ; le danger et la noblesse du métier l'attiraient, et ses brillantes qualités d'esprit et de cœur l'avaient fait remarquer partout où il était passé. Bien que devant, à sa sortie de l'Ecole, faire ses deux années de service militaire, il avait été accepté en principe par la Direction d'une mine, et d'une mine très recherchée. Pendant le stage qu'il y fit, ses brillantes qualités furent remarquées, et notre cher Camarade avait ainsi devant lui une belle carrière en perspective ; sa science ainsi que son énergie devaient trouver à la Grand'Combe leur plein développement.

En mai 1914, à sa sortie de l'Ecole, il avait voyagé, en attendant le mois d'octobre, époque de son appel militaire. Quand la guerre éclata, il fut dès le 2 août versé dans un régiment d'artillerie ; après avoir suivi avec succès le peloton d'élève-officier, il s'impatientait, trouvant que son tour de départ pour le front tardait trop et craignant de n'avoir plus assez d'occasions de combattre et de montrer son courage.

Son tour vint. Sa citation à l'ordre de l'armée prouve avec quel héroïsme il sut faire tout son devoir et en quelle estime le tenaient ses chefs. Le colonel Réghis notamment, dont notre camarade était le bras droit, appréciait à l'extrême son courage et sa valeur ; les qualités de cœur de notre ami lui avaient valu toute la confiance de son chef direct, qui le traitait presque comme un fils.

J'ai eu la joie, en avril, de passer une journée entière avec Henry, qui se trouvait alors dans un secteur voisin du mien.

Son entrain et son courage étaient admirables ; il ne doutait jamais de la victoire et aspirait à la guerre de mouvement. Hélas ! il ne devait pas participer à la grande offensive ; il n'aura pas eu la joie suprême de voir fuir l'ennemi et de courir sus aux Allemands. La récompense de la Croix de la Légion d'honneur devait honorer sa vaillance ; mais, en même temps que sa proposition arrivait à l'Etat-Major, le décès y était officiellement annoncé ; la nomination n'était plus possible, aux termes des règlements.

Notre ami était profondément croyant et il trouvait dans sa foi en Dieu et en la Patrie la source de son courage. C'est un grand apaisement pour nous de songer qu'il a trouvé là-haut la digne récompense de sa vie, noble jusqu'au bout.

Aux Armées.

Charles Couprie