Ancien élève de l'Ecole des mines de Paris (promotion 1905). Ingénieur Civil des Mines
Publié dans Bulletin de l'Association amicale des anciens élèves de l'Ecole des mines de Paris, Janvier 1917 :
La promotion de 1905, qui fut la dernière promotion de l'Ecole incorporée dans l'infanterie, a déjà payé à la Patrie un glorieux, mais lourd tribut de morts et de blessés. Au tableau d'honneur de l'Ecole, elle vient d'inscrire un nouveau nom : celui d'Henri Serrault, tué à l'ennemi le 10 juin 1916.
Né à Nantes, le 24 février 1882, Henri Serrault avait terminé au lycée Hoche, à Versailles, des études particulièrement brillantes dans le domaine des mathématiques. Il devait conserver pendant toute sa carrière le goût profond des sciences exactes et, en dehors des avantages directs qu'il en tirait dans son rôle d'ingénieur, il consacrait souvent le meilleur de ses loisirs à la solution des questions d'analyse les plus abstraites. Ce penchant spéculatif ne nuisait d'ailleurs en rien à l'harmonie de son caractère qui, plein de vivacité, d'entrain spirituel et de saine gaîté, rendait son commerce des plus agréables.
A la sortie de l'Ecole, en 1908, Henri Serrault entrait comme sous-régisseur suppléant à la Société du Gaz de Paris et s'y faisait bientôt remarquer par la maturité de son jugement et la netteté de ses idées. Nommé sous-régisseur à l'usine de Passy, au début de 1911, il était appelé, quinze mois plus tard, au Service central des Usines de la Société, en qualité d'ingénieur-adjoint à la fabrication. Assuré d'une brillante carrière, environné de l'estime et de la sympathie de ses chefs et de ses collaborateurs, il songeait à se fonder un foyer, lorsqu'est donné l'ordre de mobilisation.
Dès septembre 1914, il rejoint le front comme sous-officier au 123e d'infanterie et se voit attribuer les fonctions de vaguemestre : fonctions sans gloire, mais non pas sans péril, lorsqu'on les remplit avec la conscience que Serraut savait mettre en toutes choses. Pendant vingt et un mois, il suit la fortune de son corps, de secteur en secteur. Le 10 juin 1916, vers 19 heures, aux environs du Four de Paris, comme il se rendait en première ligne pour y assurer son service, il tombe avec son fourgon postal dans le champ de tir d'une mitrailleuse ennemie. Le corps traversé d'une balle, il meurt, dans la nuit même, à l'ambulance divisionnaire.
Henri Serraut était, dans toute l'acception du mot, un brave cœur. Sa mort sur le champ de bataille reste, à l'image de sa vie, un modèle d'accomplissement tranquille du devoir. C'est avec infiniment de peine que tous ceux d'entre nous qui l'ont connu et dont il avait su se faire des amis voient disparaître ce charmant camarade qui suivait, loin des intrigues, la route si droite et si simple qu'il s'était tracée.
F. Grivault.