Ancien élève de l'Ecole des mines de Paris (promotion 1903). Ingénieur civil des mines.
Publié dans le Bulletin de l'Association des anciens élèves de l'Ecole des mines de Paris, juin 1927
Le 30 mars 1927, la grande famille des Mines voyait brusquement disparaître un de ses membres les plus dévoués en même temps qu'un sûr camarade. Francis Schmitt, qui venait de subir une grave opération, était enlevé en quelques heures à l'affection de tous, alors que sa robuste constitution permettait d'espérer son prompt rétablissement.
Né à Lyon, de famille lyonnaise, le 10 avril 1880, Francis Schmitt possédait toutes les hautes qualités de sa race. Sa jeunesse se passa dans l'activité fiévreuse du grand centre industriel ; aussi ne faut-il pas s'étonner qu'après de brillantes études au lycée natal, il se soit naturellement orienté vers la carrière d'ingénieur. Reçu simultanément à l'Ecole Centrale et à l'Ecole des Mines de Paris, il opta pour cette dernière. Il entra aux cours préparatoires en 1901 et montra dès le début quel brillant ingénieur il était en voie de devenir.
Tous ceux qui pendant ces quatre années d'Ecole eurent la joie de pénétrer dans son intimité purent alors apprécier ses hautes qualités morales et toute la valeur qu'il fallait attacher à son amitié.
Sorti dans les premiers de sa promotion, il fait d'abord en 1906 un court séjour à la Société pyrénéenne de silico-manganèse, où il s'occupe tout particulièrement du traitement des minerais au four électrique ; puis il devient ingénieur des Mines de Soumont. Là un hasard providentiel veut qu'il ait à prospecter la concession et à réaliser l'installation du premier siège d'extraction. Il découvre alors sa vraie vocation et à partir de ce moment, nous le voyons se donner tout entier avec ardeur et enthousiasme à tout ce qui concerne les sondages et les fonçages de puits.
Il passe quelques années à la Société d'Entreprise Générale de fonçages de puits, puis devient ingénieur principal de la Compagnie « Tréfor ». C'est à ce moment que la guerre le surprend à Bruxelles. Il rentre aussitôt en France et commence la campagne comme sous-officier au 30e bataillon de Chasseurs alpins. Remarqué immédiatement de ses chefs pour ses hautes qualités de conducteur d'hommes, il est promu sous-lieutenant en novembre 1914. Blessé le 1er janvier 1915, Schmitt, qui ne consent pas à être évacué, est affecté à la Compagnie 16/63 du 2e génie. Il prend part aux opérations de l'Hartmannswillerkopf, de Metzeral, du Linge (1915), de la Somme (1916), de Craonne et du Chemin des Dames (1917). Les trois citations que lui valent ces durs combats attestent toute son énergie, son sang-froid et son esprit de décision. En janvier 1918, il est détaché à l'Etablissement Central du Matériel Spécial du Génie à Paris et, dans ce poste, remplit de nombreuses missions auprès des armées, notamment en Italie sur la Piave.
La Croix de la Légion d'honneur, bien gagnée durant ces 37 mois de présence dans des unités combattantes, lui fut décernée en juin 1920.
A peine démobilisé, Francis Schmitt, qui a tout abandonné pour la défense de son pays, ne songe plus qu'à ses travaux, qui l'ont tant passionné. Nous le retrouvons bientôt Directeur-adjoint puis Directeur technique de la Société Nouvelle des Sondages de Bonne Espérance. Les sondages n'ont plus alors de secret pour lui et nombreux sont les perfectionnements qu'il apporte chaque jour au matériel, joignant aux qualités d'une technicien celles d'un organisateur et d'un chef consommé. Il fait ensuite un court séjour comme chef du Service des Sondes aux Mines de Pechelbronn, puis, au début de 1920, prend à Paris la direction de la Société « Procédés de Cimentation François ». C'est là que la maladie vint le frapper brutalement et le terrasser, alors que les plus belles perspectives s'offraient à lui.
A vous, Madame, qui avez partagé toutes ses joies, toutes ses inquiétudes, toutes ses peines, qu'il me soit permis de dire combien ceux qui l'ont connu, à quelque titre que ce soit, ressentent douloureusement le malheur qui vous frappe et le partagent avec vous. Schmitt était pour ses amis le camarade dévoué dans toute l'étendue du mot, vers lequel on ne se tournait jamais en vain. Ses intimes garderont toujours le souvenir des amicales réunions à son foyer, de son accueil vibrant, du charme de sa conversation, car il cachait sous son habituelle simplicité une grande érudition reposant sur une forte culture classique.
Schmitt était pour ses supérieurs le collaborateur avisé auquel on se confie sans la moindre hésitation. Il était pour son personnel le vrai chef, dont a vite fait d'évaluer la valeur et auquel on obéit sans limite.
D'ailleurs vous savez mieux que tout autre quels regrets sincères partout où il est passé il a laissés derrière lui et je crois que rien ne peut mieux le dépeindre que ce mot d'un de ses collaborateurs le jour où il quittait ce poste occupé par lui pendant plus de cinq années : « Vous étiez à nos yeux le modèle de la discipline dans le travail et de la persévérance dans l'effort ».
Que ce témoignage et le souvenir ému que tous gardent de lui soit pour vous un réconfort et un soutien dans votre grande douleur.
L. Lahoussay (1904).