Ancien élève de l'Ecole des mines de Paris (promotion 1914). Ingénieur civil des mines.
Bulletin de l'Association amicale des anciens élèves de l'Ecole des mines de Paris, mars-avril 1916 :
Mignot (Jean-Hyacinthe-Marie), né à Givors (Rhône), était l'aîné d'une famille de 9 enfants, tous vivants à la mobilisation.
Il fit d'excellentes études littéraires aux Minimes de Lyon et dut se pourvoir d'une dispense de 6 mois pour passer son baccalauréat. Il se prépara, à l'Institution des Anglais, à Lyon, à la fois à l'Ecole des Mines de Paris et à celle de Saint-Êtienne.
Son esprit était plus littéraire que scientifique ; mais son ardeur au travail, sa vive intelligence le placèrent quand même à la tête de son cours, et, en 1914, c'est-à-dire à 18 ans et demi, il était reçu à la fois aux deux Écoles. Il opta pour celle de Paris.
A la mobilisation, il voulut s'engager immédiatement; ses parents l'en empêchèrent, sa santé ayant été un peu ébranlée par l'intense travail qu'il venait de fournir. Il se fit alors admettre comme brancardier dans un hôpital auxiliaire de Nantes où il resta jusqu'à son engagement (15 décembre 1914).
Pendant son séjour à l'hôpital, il fit montre du plus absolu dévouement ; aucune besogne ne le rebutait et tout le personnel de l'hôpital ne tarissait pas sur lui d'éloges.
Il s'engagea au 51e d'artillerie à Nantes, puis alla bientôt à Vannes comme élève-officier de réserve; il fut reçu second, et, aussitôt après, partit pour Fontainebleau où il suivit les cours de perfectionnement, avec le grade d'aspirant, au 50e d'artillerie.
Aussitôt sorti de Fontainebleau, il fut envoyé à Bourges pour se familiariser avec le fonctionnement des « crapouillots », arme dangereuse, qu'il tint à choisir bien que son rang de sortie lui eût permis d'être affecté à l'artillerie lourde. « Je demande les crapouillots, disait-il à un de ses camarades de Fontainebleau, car il me semble que je m'offre ainsi à Dieu plus entièrement pour le salut de notre France. » Nobles paroles qui caractérisent cette àme d'élite, aussi foncièrement religieuse que patriote.
C'est le 16 septembre que lui arriva l'ordre, à Bourges, de rejoindre le front ; il était versé à la 110e batterie de 58 de tranchées du 56e d'artillerie. Deux jours après, il passe à Valmy, d'où il écrit : « Chers parents, j'ai peur que votre moral ne soit pas à la hauteur du mien : pour moi, c'est la joie la plus pure et l'enthousiasme le plus ardent. »
Le 20 au soir, il rejoint l'ouvrage du Pruneau, à un kilomètre au nord de Ville-sur-Tourbe. Il prend son tour dans la tranchée à 6 heures du matin: à 4 heures du soir, un obus de 105, tombé à 2 mètres de lui, lui sectionne la jambe droite et lui coupe les reins ; il appelle à l'aide, mais perd aussitôt connaissance et meurt 20 minutes après sans l'avoir recouvrée.
Ces tranchées, où il avait si ardemment désiré de combattre, il ne les connut donc qu'à peine une journée; il se promettait cependant de s'y dévouer sans limites : « Mon oncle, disait il au colonel Mignot (le héros de la première attaque de Notre-Dame-de-Lorette, en mars 1915), je ne veux pas être nommé sous-lieutenant avant d'avoir mérité la médaille militaire et la croix de Guerre; si on veut ensuite me nommer officier, alors cela me permettra de gagner la Légion d'honneur ».
Un de ses camarades, aspirant comme lui à la 110e batterie, écrivait : « Durant le court espace où j'ai connu Mignot, j'ai été témoin de la rapidité avec laquelle il sut se concilier immédiatement aussi bien l'estime et la sympathie de ses chefs que l'affection profonde de ses hommes; tous lui étaient complètement attachés et dévoués; ils auraient tout fait pour lui, qui aurait pu tout leur demander ! »
Il repose maintenant dans le cimetière militaire de Ville-sur-Tourbe, laissant dans la désolation sa famille, ses amis, ses parents surtout dont il était l'orgueil.
Cette parole de son oncle, le Colonel, dépeint la valeur du Camarade que nous avons perdu : « Je porte le deuil de Jean comme une décoration ! »
Un pur héros a reçu maintenant de Dieu la récompense éternelle.
H. C.