Né le 3/3/1836 à Sorèze (Tarn). Décédé à Bougival. Fils de Robert Charles LEMONNIER, docteur en droit, et de Marie Juliette dite Elisa GRIMAILH (1805-1865), fondatrice de l'enseignement technique des jeunes filles en France. Un frère, Louis, a eu 5 enfants. Religion protestante.
Epoux de Félicie-Charlotte TOULMOUCHE, puis (après son décès) de sa soeur Marie-Louise TOULMOUCHE (1840-1924), d'une famille bretonne / vendéenne, elles-mêmes filles d'un avocat de Rennes, et cousines du peintre Auguste Toulmouche ; sans descendance connue. Paul-Hippolyte et ses deux épouses sont enterrés à Paris XVI, cimetière de Passy. Ces informations généalogiques ont été aimablement communiquées par Jean-Pierre BONNET. Des recherches ont été réalisées par le Dr Roger MOULLEC.
Ancien élève de l'Ecole polytechnique (promotion 1854, entré classé 34, non diplômé), et de l'Ecole des Mines (il est admis comme élève externe le 8/11/1856 classé 20 et reçoit le brevet le 3/6/1859, classé 4). Ingénieur civil des mines. Les prénoms sont orthographiés "Paul Hypolitte" dans le registre matricule de Polytechnique, les parents vivaient 2, rue Tronchet à Paris.
Il est employé à la Compagnie minière de la Grande Combe, puis entre dans la Maison Sautter et Harley : fabrique de phares et de matériel électrique, dont il deviendra gérant et qu'il quittera en 1890, n'y conservant plus que des intérêts. Ingénieur électricien d'une grande compétence il travaille pour les phares auxquels il apportera des ameliorations notables, le canal de Suez, la construction de cuirassés, des compagnies de chemin de fer. Chevalier de Légion d'honneur en 1882 à l'issue de l'exposition universelle d'électricité de 1881 dont il fut lauréat, il sera hors concours, membre du jury lors de l'exposition universelle de 1889 et proposé pour une promotion au grade d'officier en 1890.
A partir de 1887, les projecteurs de Sautter et Lemonnier furent loués par la Cie Worms aux bateaux qui traversaient le canal de Suez. La durée de la traversée fut considérablement accélérée par la navigation nocturne ainsi rendue possible.
A son décès, Paul-Hippolyte lègue une fortune considérable à sa seconde épouse, Marie-Louise, qui, n'ayant pas d'héritier direct, fera des dons très généreux à des oeuvres charitables, éducatives, culturelles et scientifiques.
Bulletin de l'Association amicale des anciens élèves de l'Ecole des Mines, Août 1894
29 juin 1894
Paul-Hippolyte LEMONNIER était fils de Charles Lemonnier, le fondateur de la Revue philosophique et religieuse, et de la Ligue internationale de la paix et de la liberté, qui consacra sa vie à défendre par sa plume, sa parole et sa fortune, la cause des travailleurs, des déshérités et des opprimés. Sa mère fut Élisa Lemonnier, née Grimailh, la fondatrice des Ecoles pour l'enseignement professionnel des jeunes filles, que tout le monde connaît; c'étaient deux coeurs généreux, brûlant d'un vif amour du prochain : leurs idées avaient laissé une trace profonde dans l'esprit de leur fils Paul.
Né à Sorèze, en 1836, il entra à l'École polytechnique en 1854, puis à l'École des Mines, en qualité d'élève externe. Sorti de cette dernière École en 1859, il débuta comme sous-ingénieur de la Cie des mines de la Grand'Combe et passa, à la fin de 1860, à la Cie de Decazeville, où, après avoir été chargé de divers services, il eut la direction des mines de Firmy ; vers 1863, il quitta la Cie de Decazeville pour prendre le service des mines de Lalle (Bessèges).
Dès ses débuts, Lemonnier montra les qualités maîtresses de son esprit, à savoir : une rectitude de jugement et une fermeté de caractère exceptionnelles, un sentiment très élevé du devoir et une grande loyauté.
Il entra, en 1870, en association avec Louis Sautter, chef d'une importante maison de Paris, qui s'était distinguée au premier rang dans la construction des phares, puis ensuite avec son fils, M. Gaston Sautter.
Tout en continuant cette industrie, Lemonnier coopéra activement à l'extension des travaux de cette maison, en y adjoignant la construction des appareils de levage et celle de diverses branches de l'électricité.
Pendant vingt années, il a largement dépensé son activité dans ces divers travaux et pris notamment une part importante aux développements de l'industrie électrique, alors à ses débuts ; il a poursuivi, avec la collaboration de ses habiles associés, les recherches et les études que comportait une pareille entreprise, à travers toutes les difficultés que rencontrent ceux qui frayent des voies nouvelles; le succès a récompensé leurs efforts.
Il avait été frappé des avantages exceptionnels de la machine Gramme et en avait organisé la fabrication. Mais, à mesure que se développait l'industrie électrique, la nécessité s'imposait de se spécialiser. Il s'appliqua à l'éclairage des navires et créa, en collaboration avec le colonel Mangin, les projecteurs qui portent le nom de cet officier distingué ; il établit des transmissions de force par l'électricité.
Parmi les travaux les plus intéressants de la maison, on peut citer l'étude de l'éclairage du canal de Suez : c'est à la suite d'un voyage que Lemonnier fit dans l'isthme, en 1884, et des essais qu'il dirigea, que la Cie du canal de Suez décida de permettre la navigation de nuit aux navires munis des projecteurs nécessaires pour l'éclairage de leur route ; l'importance du service rendu fut immense, car il eut pour résultat de doubler la capacité de transit du canal.
Bien qu'il apportât une fermeté inébranlable dans la direction de son personnel, il n'inspirait à tous que des sentiments de respect et d'affection, car chacun sentait qu'il était juste et qu'il n'était jamais guidé que par des mobiles élevés, ainsi que l'a fait ressortir M. Louis Sautter dans quelques paroles émues qu'il a prononcées sur la tombe de notre ami, et dans lesquelles il a constaté que, pendant leur longue collaboration, il ne s'était jamais élevé entre eux le moindre nuage.
Lemonnier a pris part aux expositions universelles de 1878 et de 1889 et à l'exposition de l'électricité de 1881, à la suite de laquelle il a été nommé chevalier de la Légion d'honneur.
Ses confrères lui avaient donné un haut témoignage d'estime en le choisissant comme président du Syndicat des industries électriques, ainsi que de la Société internationale des électriciens.
Il ne nous est pas possible de citer les traits de bienfaisance de Lemonnier, il ne l'eût pas permis; mais nous pouvons dire que sa générosité était intelligente et qu'il s'appliquait à fournir à ceux qu'il aidait des instruments de travail et des moyens de relèvement. Il n'accordait qu'à bon escient son affection et son appui ; mais, lorsque son coeur s'ouvrait, on était surpris de voir quelle délicatesse de sentiments, quelle activité bienfaisante, quelle large générosité il mettait au service de ceux qu'il aimait.
Depuis quelques années, il avait cessé de prendre une part active aux travaux de son ancienne Société et jouissait d'un repos bien mérité. Après de cruelles épreuves, il avait retrouvé le bonheur domestique par l'affection tendre et dévouée dont l'entourait Madame Lemonnier; mais il ne devait pas en jouir longtemps : atteint d'une maladie dont il suivait les progrès et dont l'issue fatale et prochaine ne lui avait pas échappé, il a conservé une sérénité extraordinaire au milieu des souffrances les plus vives, et sa belle mort a été digne de sa vie : c'était un homme de bien dans toute l'acception du terme.
E. GODFERNAUX.
Au sujet de la générosité exceptionnelle de Paul LEMONNIER, voir le témoignage de Eleuthère Mascart