Ancien élève de l'Ecole des mines de Paris (promotion 1889). Ingénieur civil des mines.
Bulletin de l'Association des Anciens élèves de l'Ecole des mines de Paris, 1935 :
Notre camarade Jules Huré, qui a succombé le 5 mai dernier à l'âge de 67 ans, était né le 6 novembre 1867 à Ferrière-en-Gâtinais (Loiret). Il fit ses premières études au collège de Montargis, d'où il passa ensuite, au lycée d'Orléans, et il en sortit en 1885 à la suite d'une fugue qu'il avait faite à Paris pour assister aux obsèques de Victor Hugo, donnant ainsi un premier témoignage de l'esprit d'indépendance, de curiosité originale et désintéressée dont il a toujours continué à s'inspirer dans la vie. En quittant le lycée d'Orléans, il vint à Paris pour continuer ses études à l'Ecole Monge et il passa l'examen de la licence des sciences physiques en 1889, ensuite de quoi il fut nommé préparateur d'astronomie à la Sorbonne. Mais il renonça bientôt à suivre cette carrière et il se fit admettre à l'Ecole supérieure des Mines, d'où il sortit en 1892. Muni de son diplôme d'ingénieur civil des Mines, il se consacra aussitôt à l'étude des questions coloniales, en s'attachant plus spécialement à la prospection des gisements minéraux, qui devaient l'occuper jusqu'à la fin de sa carrière et faire de lui, en même temps qu'un prospecteur réputé, un véritable globe-trotter, ayant parcouru de nombreux pays lointains, encore à peine explorés, où il sut faire connaître et aimer la science et la patrie françaises. C'est ainsi qu'en 1895 il publia, dans la « Revue des Etudes Dahoméennes » qu'il avait fondée, une étude géologique sur le Dahomey, qui est sans doute une des premières consacrées à cette région. Il y joignit une étude sur un projet de chemin de fer central dahoméen, qui fut réalisé dans la suite sous les auspices du ministère des Colonies avec de légères variantes de tracé, résultat d'une connaissance plus approfondie du régime du fleuve Onémé qui traverse la région desservie par ce tracé.
En 1896, à l'âge de 29 ans, lorsque l'île était encore troublée par des guerres intestines, consécutives à la conquête, il fit à Madagascar un voyage de prospection pour mines d'or; et il dut rester onze mois dans cette île, où il eut à lutter contre toutes sortes de difficultés et de dangers sérieux. Il fut fait prisonnier par les Sakalaves et porté disparu pendant trois mois. Mais il réussit à s'échapper, avec le concours de tirailleurs sénégalais envoyés à son secours par le général Galliéni, qui le fit rechercher au moyen de la télégraphie optique, et il put rentrer en France en bonne santé après s'être acquitté de sa mission.
Il accomplit ensuite de nombreux voyages d'études analogues, sur lesquels il nous est malheureusement impossible de nous étendre ici et qui le conduisirent successivement dans des régions peu explorées, en Europe, en Afrique, en Amérique du Nord et aussi en Asie, où il fit en particulier, dans des conditions fort pénibles, une exploration en Sibérie orientale, en partie pendant tout un hiver long et rigoureux durant lequel il fit ses explorations entouré complètement d'un épais et fort gênant isolant contre le froid.
A partir de 1903, il se consacra spécialement à la prospection des gisements stannifères du Portugal, où il dirigea d'importants travaux d'exploitation, qui consacrèrent définitivement l'autorité qu'il s'était acquise dans la connaissance de ces gisements filoniens chargés de matières minérales comme le wolfram et l'étain.
C'est ainsi qu'une revue particulièrement réputée, comme la Chimique-coloniale, inspirée par notre éminent camarade M. F. BLONDEL, a tenu à rendre hommage à ses travaux à l'occasion de son décès et elle a rappelé qu'on lui doit la découverte des lois de formation des gisements aurifères de la Lena en Sibérie, de même que de nombreuses études minières sur les gisements d'or et d'étain.
Notre Camarade était membre de la Société des Gens de Lettres, où ses collègues, comme ses camarades de l'Ecole des Mines, conserveront de lui un souvenir ému. Ils ne sauraient oublier l'aménité de ses relations, l'égalité d'âme avec laquelle il a supporté les épreuves et les deuils de famille que la vie ne lui a pas ménagés, notamment la perte de son fils, tué à la grande guerre. Ils uniront leurs regrets à ceux des deux vaillantes femmes, son épouse et sa fille, qui le pleurent aujourd'hui et dont l'affectueuse tendresse a été pour lui le meilleur réconfort dans ses épreuves.
L. BACLE (EMP promotion 1874).