Louis Paul HENRIOT (1855-1922)


Henriot, élève de Polytechnique
(C) Photo Collections Ecole polytechnique

Fils de Louis HENRIOT, directeur de la Cie d'assurances La Providence, et de Marie Thaïs LUCET. Epoux de Thérèse Sophie Marie MARGUET. Père de Paul Louis Émile HENRIOT (1882-1962 ; X 1902 ; Insp. matériel roulant aux chemins de fer de l'Est) ; grand-père de François Étienne HENRIOT (né en 1920 ; X 1940). Religion catholique.

Décédé le 18 juin 1922.

Ancien élève de Polytechnique (promotion 1874, entré et sorti major sur 252 élèves), et de l'Ecole des Mines de Paris. Corps des mines.

Commandeur de la Légion d'honneur (1920).


Henriot, élève de l'Ecole des Mines de Paris (photo prise en 1879)
(C) Photo collections ENSMP


PAROLES PRONONCÉES AUX OBSÈQUES DE M. HENRIOT,
INSPECTEUR GÉNÉRAL DES MINES, VICE-PRÉSIDENT DU CONSEIL GÉNÉRAL DES MINES,
le 22 juin 1922, Par M. Yves LE TROCQUER, Ministre des Travaux publics.

Publié dans Annales des Mines, 1922 (tome II).

MESSIEURS,

C'est à toute une vie de travail, une vie dont l'honneur fut la loi et le devoir la règle, que je viens aujourd'hui rendre hommage au nom du Gouvernement de la République. Et je le fais avec une émotion d'autant plus grande que j'avais pour l'homme de haute distinction qui repose ici et qu'accompagnent dans sa dernière demeure les regrets de tous, l'estime la plus déférente, et qu'en bien des circonstances j'avais été à même d'apprécier les rares qualités qui ornaient sa claire intelligence et qui embellissaient son coeur.

A peine entré et le premier, en 1874, à l'École polytechnique vers laquelle l'avaient dirigé les tendances précises de son esprit et son goût pour le labeur intellectuel, immédiatement il fit des promesses que toute sa vie il s'employa largement à tenir.

Elève particulièrement apprécié de ses maîtres pour sa droite conscience qui devait plus tard et en toutes circonstances, être une de ses forces, il sortit de l'École premier de sa promotion et entra peu après dans ce corps des Mines qui compte tant d'esprits d'élite et tant de dévouements au pays.

Dès lors, commença pour lui cette remarquable carrière dont, grâce à sa valeur et à ses efforts, il devait si brillamment franchir les échelons. Henriot occupa tout d'abord plusieurs postes en province, et là, aux prises avec les difficultés pratiques de sa tâche, il appliqua à les résoudre l'esprit le plus méthodique et le jugement le plus sûr.

Distingué de plus en plus par ses chefs, dont il se montrait toujours le collaborateur le plus loyal, le plus convaincu de la grandeur de cette discipline professionnelle qui n'est qu'une forme de l'attachement à la patrie, aimé de ses subordonnés envers lesquels il était toujours juste et bienveillant, Henriot, après avoir été désigné comme ingénieur en chef de l'arrondissement minéralogique de Nancy, fut chargé du Contrôle de l'exploitation technique des chemins de fer du Nord ; enfin, il fut appelé, par la confiance du Ministre, aux hautes fonctions de directeur des Mines, des voies ferrées d'intérêt local, et des distributions d'énergie électrique au Ministère des travaux publics. Nommé quelque temps après inspecteur général, sa large compétence, sa valeur morale, le firent désigner comme Membre du Comité de l'exploitation technique des Chemins de fer dont il devait bientôt devenir vice-président, en même temps que vice-président du Conseil général des Mines. Enfin, en mars dernier, j'avais la joie de le désigner comme vice-président de la Section technique du Comité consultatif de l'exploitation technique et commerciale des Chemins de fer. Dans les dernières et délicates fonctions qu'il occupa, Henriot avait pu donner toute la mesure de ses qualités. Sa connaissance des questions administratives, son sens pratique avisé, son tact toujours averti, la courtoisie de son abord, lui avaient acquis une situation exceptionnelle, et c'est entouré du respect de tous qu'il présidait les débats qu'il était appelé à diriger.

Si Henriot avait acquis ainsi une autorité qui s'imposait à tous; s'il reçut à plusieurs reprises les marques de confiance du Gouvernement de la République ; si à l'occasion des distinctions remises pour services exceptionnels, il fut fait Commandeur de la Légion d'Honneur, c'est parce qu'il fut toujours dirigé dans la voie du devoir par le sentiment élevé et désintéressé qu'il avait que bien servir son pays est la plus grande satisfaction à laquelle un homme puisse aspirer, le but le plus élevé qu'il puisse chercher à atteindre.

Serviteur du pays, il le fut dans la plus noble acception du terme, par son labeur, par sa pensée, par ses fils enfin, élevés dans le foyer familial objet de toute sa tendresse, et dont il sut faire des défenseurs vaillants de la patrie.

Aussi, aujourd'hui que sa tâche semble si prématurément terminée, je puis dire que son action, cette action si utile, si féconde, continue et par le souvenir qu'il laisse, qui sera précieusement conservé, et par l'exemple qu'il donne, qui sera suivi.

Que cela, qui eût été pour lui un vrai titre de gloire, adoucisse, s'il se peut, la douleur immense de sa veuve, devant laquelle je m'incline respectueusement, et de ses enfants, auxquels j'adresse l'expression de ma sympathie émue.

Au nom de l'Administration des travaux publics qu'il honora, au nom de la France, à la grandeur de laquelle il travailla toujours, qu'il reçoive ici un dernier et fraternel adieu !