Ancien élève de l'Ecole Nationale Supérieure des Mines de Paris (promotion 1939). Ingénieur civil des mines.
Né le 4 juillet 1918 à Dun-sur-Auron (Cher). Décédé le 26 janvier 2000 à Neuilly sur Seine.
Commandeur de la Légion d'honneur. Compagnon de la Libération.
H. FLESSELLE (ancien élève de l'Ecole des Mines de Paris, promotion 1948) a effectué sa carrière professionnelle dans la Société ENTREPOSE, aux côtés de Jean GUYOT qui en fut Président plus de 20 ans. Nous lui devons la biographie de Jean GUYOT qui suit.
Une volonté a traversé le siècle
. . .
Jean GUYOT (1918-2000)
"Il n'est de richesse que d'
hommes"
Jean
BODIN (1576)
Le 26 janvier 2000, le Président Jean
GUYOT s'éteignait à 81 ans, au terme d'une vie particulièrement riche, dont un
quart de siècle à la tête d'ENTREPOSE.
Il n'est pas facile de résumer ce que
fit, ce que fut ce PDG atypique, ce Français exemplaire, cette personnalité
extraordinaire . . .
Disons d'abord, avant d'évoquer ses
qualités principales , que Jean GUYOT était doué d'une mémoire et de facultés
intellectuelles exceptionnelles. C'est
ainsi que, lycéen (plutôt décontracté, voire turbulent), il fut présenté par la
Direction du Lycée Carnot au Concours Général, à peu près dans toutes les
matières, et que, bien qu'orienté plutôt vers les sciences, il remporta un
accessit en thème latin.
Il entra ensuite dans les classes
préparatoires aux Grandes Ecoles scientifiques, mais fut rapidement arrêté par
une pleurésie, qui le tint 15 mois éloigné de ses études. Il ne sortit de
convalescence que pour passer les concours, et fut reçu aux Mines de Paris, où
il entra en 1939.
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1939, c'est la guerre, puis la défaite
et l'Etat français. Si certains mettront plusieurs années à voir clair, le
jeune étudiant GUYOT comprit rapidement que le nouveau régime, la mise à
l'écart des juifs et des francs-maçons, la main tendue aux nazis n'étaient pas
convenables . . . et qu'il fallait faire
quelque chose pour que cela change ! Il
entre dans la Résistance.
En janvier 1942, il est devenu agent
du B.C.R.A. (le Service de Renseignements de la France Libre). Utilisant
diverses relations (dont Pierre BROSSOLETTE dont il sera l'adjoint), il mène
plusieurs missions avec efficacité.
Les deux années suivantes virent Jean
GUYOT recevoir de plus en plus de responsabilités : le réseau de renseignements qu'il avait monté
en zone Nord devint bientôt, malgré les périls et les arrestations, une fédération
de réseaux et joua un rôle capital dans l'information de l'Etat-major
interallié.
Pendant l'un de ses trois voyages en
Angleterre, la Gestapo découvrit la Centrale et en arrêta tous les membres le 5
octobre 1943. Bien qu'il fut probablement alors le Résistant le plus recherché,
Jean GUYOT obtint de ses chefs de revenir remonter l'Organisation, ce qui fut
fait en deux mois, et celle-ci "contribua de façon éminente au succès des
Armées alliées".
On trouvera ci-dessous la citation qui
fut décernée par les Autorités militaires à Jean GUYOT, et qui, dans sa
concision, est assez éloquente. J. GUYOT
fut déclaré Compagnon de la Libération, et reçut diverses décorations
françaises, britannique et belge.
Démobilisé en décembre 1945, il
n'avait pas l'intention, à 28 ans, de n'être qu'un "ancien combattant": il entra comme
ingénieur dans une modeste entreprise de travaux, filiale de sociétés
métallurgiques spécialisées dans la fabrication de tubes d'acier, dont la
taille et la structure souple pouvaient faciliter le développement de ses
initiatives : c'était ENTREPOSE.
On n'imaginait pas encore le champ
d'action que le développement du pétrole et du gaz allait amener dans les
décennies suivantes. Mais dès 1951, la construction de pipe-lines pour des
bases américaines au Maroc permet à Jean GUYOT de s'affirmer (il est le
représentant de toutes les entreprises impliquées), et de saisir l'avance
technologique des Etats-Unis dans ce domaine, et le parti à en tirer.
Ce fut fait en France (pour l'OTAN et
GdF), et bientôt en Iran, où Jean GUYOT conscient que le champ d'action de
l'entreprise devait être international, avait personnellement négocié un marché
considérable pour l'époque (1955). Cette première affaire d'Iran fut l'acte
fondateur d'une activité que J. GUYOT allait développer, comme Directeur
Général puis Président, pendant plusieurs décennies, sur tous les continents.
La seule énumération de quelques
théâtres d'opérations rappellera des moments d'exaltation aux lecteurs qui y
participèrent. Leur diversité montra à la fois l'avantage des réalisations
antérieures (les entreprises françaises auraient-elles sorti le pétrole du
Sahara de 1957 à 1961, si Entrepose n'avait pas acquis en Iran, l'expérience
des travaux mobiles en milieu désertique ?), mais également qu'il faut
s'adapter sans cesse à un environnement climatique, social, économique, différent,
peut-être comme "remonter un réseau", après des arrestations
collectives, est une ouvre nouvelle . . .
Et la Société ENTREPOSE alla donc en
Hollande, en Finlande, en Espagne, à Abu Dhabi, en Syrie, en Irak, en Autriche,
en Grande Bretagne, puis au Canada, en URSS, Guatemala, USA, Brésil, Venezuela
. . .
Ce parcours fut facilité évidemment
par l'environnement économique (particulièrement dans les industries de
l'énergie), mais dû surtout à la présence du Président GUYOT : il avait une volonté farouche de mener l'entreprise
au premier rang (et on retrouvait là le sportif de compétition et l'alpiniste
qu'il avait été, comme le combattant acharné des années sombres).
Il fut souvent un précurseur avisé
: les bouleversements apportés dans les
méthodes de pose de canalisations souterraines, dans l'entreprise comme dans la
profession, lui doivent beaucoup. Dans le premier marché d'Iran, la logistique
qu'il imagina (radio, avion, magasins) et que tout le monde copia ensuite,
n'avait pas de précédents.
S'il savait exploiter opportunément ce
qu'il trouvait bon chez les autres, il se sentait très peu lié par les usages
conventionnels, les hiérarchies traditionnelles (dont il avait souvent mesuré
la vanité pendant la Résistance), et usa particulièrement de cette liberté dans
la promotion du personnel et le choix de ses collaborateurs.
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Ceci nous amène à souligner le trait
peut-être le plus caractéristique de la personnalité de Jean GUYOT : son excellence dans les rapports humains . Il savait parfaitement déceler les forces
et faiblesses de quelqu'un (et amener ainsi un ouvrier à devenir un chef de
chantier respecté), le convaincre, et même lui donner un épanouissement professionnel. Lorsqu'il jouait aux échecs avec un
fonctionnaire iranien, défiait au ping-pong les membres du Comité d'Entreprise,
ou évoquait longuement leurs luttes passées contre le fascisme avec un
syndicaliste stalinien, c'était plus par goût d'une récréation que par calcul
démagogique.
En 1968, ne disait-il pas, avec
l'humour et le sens de la formule qui lui étaient propres, en paraphrasant
Dubcek, : "Je suis pour un
capitalisme à visage humain !".
C'est en raison de relations
confiantes profondes avec des hommes, qu'Entrepose fut une rare Société
internationale à accepter une situation minoritaire dans des filiales
étrangères, ou à en confier la direction à des nationaux.
C'est certainement la qualité des
liens personnels entre les dirigeants qui a provoqué et rendu féconde
l'association progressive avec le groupe GTM.
En 1965, les dirigeants des deux entreprises décident de réunir leurs
compétences respectives pour se lancer dans un domaine inconnu, aussi risqué
que prometteur, celui des travaux pétroliers maritimes. C'est la naissance
d'ETPM dont on connaît le développement, par où sont passés tant de cadres des
deux Sociétés d'alors, et qui fut l'occasion d'une étroite collaboration entre
leurs Directions. C'est donc tout naturellement que la même association fut
reconduite quelques années plus tard pour couvrir les travaux d'électricité et
créer ce qu'est aujourd'hui GTMH.
Un pas de plus fut franchi par une
participation significative de l'une des Sociétés au capital de l'autre,
opération stratégique traduisant le climat de confiance entre le Président
GUYOT et les dirigeants d'alors de GTM.
Enfin, en 1982, le rapprochement venait à son terme par la fusion des
deux holdings en une entité nouvelle qui se nomma pendant quinze ans
GTM-ENTREPOSE.
1982, c'est aussi le temps où Jean
GUYOT atteignait l'age habituel de la retraite. Lui qui, depuis 40 ans confiait
à ses intimes : "C'est déjà
magnifique de revoir le soleil se lever le matin !", pouvait être fier
du chemin qu'il avait aussi fait parcourir à la "P.M.E." qui l'avait
accueilli en 1948, de la puissance financière atteinte par celle-ci, mais plus
encore peut-être de la qualité que le nom d' ENTREPOSE impliquait, de l'estime
que lui témoignaient clients, banquiers, confrères, pouvoirs publics . . .
Mais, revers de la médaille, Jean
GUYOT avait peut-être un peu de nostalgie pour l'époque où il connaissait
personnellement presque tous les agents de l'entreprise, où l'environnement
était plus sensible aux performances des pionniers, voire des francs-tireurs,
qu'à l'examen à court terme des ratios financiers . . .
Abandonnant progressivement ses
fonctions exécutives à des collaborateurs plus jeunes, choisis de longue date,
le Président GUYOT transmit quelques années encore son expérience dans des
Conseils d'Administration du Groupe, puis se retira complètement. Sa santé
s'était altérée, et ses quinze dernières années le virent souvent handicapé
par la maladie, mais il gardait la même lucidité, la même sagesse . . . N'avait-il pas dit souvent à ses proches : "On ne voit plus la Vie de la même façon
quand on s'est promené quelques mois avec une pastille de cyanure dans sa poche
!" . . .
Ne souligne-t-on pas l'unité que Jean
GUYOT avait mise dans sa vie, en ajoutant que, selon sa volonté, il a été
incinéré au Mont Valérien . . .
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Citation de Jean GUYOT
"Ayant abandonné ses études pour
se donner corps et âme à la Résistance au début de 1942, cet officier n'a cessé
durant toute la douloureuse période de l'occupation de donner, malgré son jeune
âge, les preuves les plus extraordinaires de ce que peuvent faire l'intelligence
et le courage, l'enthousiasme et la ténacité. Se riant des embûches et des
dangers, jouant avec les plus grandes difficultés, réussissant avec une joyeuse
simplicité des missions capitales où ses chefs le considéraient comme sacrifié,
venant à bout d'insurmontables problèmes au milieu de traquenards les plus
sévères que lui tendait une Gestapo exaspérée, il représente dans la
Résistance, la jeunesse française avec son pur idéal et sa gaieté
intrépide" . . .
Voir aussi :