Ancien élève de l'Ecole des mines de Saint-Etienne (promotion 1951). Ingénieur civil des mines.
Publié dans MINES Revue des Ingénieurs, Novembre/Décembre 2008 N° 437.
C'est avec une profonde tristesse que ses camarades de l'École des Mines ont appris le décès de Jean Chanfreau. Dès la première réunion de la promotion 51, nous l'avions remarqué pour son accent chantant qu'il nous apportait de Toulouse. Nous avons pu, par la suite, apprécier son entrain, sa vitalité, sa gentillesse et sa disponibilité pour rendre service. Si Jean a choisi de se spécialiser dans l'exploitation des mines, c'est qu'il y a trouvé ce qui lui convenait le mieux : la réalité de chantiers difficiles, le plaisir d'être au plus près de ces rudes travailleurs que sont les mineurs du fond. C'était le plus actif et le plus joyeux des compagnons, toujours prêt à participer à nos activités d'étudiant. L'essentiel pour lui, c'était déjà les relations humaines.
En 1954, Jean s'est retrouvé officier du génie en Tunisie. Sa mission était l'ouverture des pistes pour permettre la circulation des convois militaires dans les zones tenues par les rebelles. C'était une tâche dangereuse, peu glorieuse, mais essentielle, qu'il accomplissait avec courage et détermination. Il ne parlait jamais de cette période douloureuse. Nous savons seulement comment il a gagné ses médailles et sa plus belle citation. Apprenant que des soldats du régiment voisin étaient pris dans une embuscade et en grand danger, il a spontanément lancé avec sa section une opération risquée qui a permis de les dégager sans perte. Pour lui, ce n'était pas un coup d'éclat, simplement la réaction naturelle d'un chef responsable, dans la grande tradition de solidarité, face au danger, des combattants et des mineurs. Il a
bien mérité sa croix de la valeur militaire. Après sa démobilisation en 1957, il ne reste pas longtemps en France. Appel des horizons lointains, désir de rencontrer des peuples différents, recherche de responsabilités à la mesure de ses talents, il part en Nouvelle-Calédonie pour être l'adjoint du directeur des exploitations de nickel. C'est lui qui conçoit, réalise, puis lance la nouvelle mine de Kouaoua dont il devient le premier directeur.
Il est heureux là-bas. Il rencontre et épouse Monique, qui restera à ses cotés jusqu'à la fin. Il a la joie immense d'y voir naître ses deux enfants, Alain et Catherine, dont il est si fier.
En 1964, il quitte la Nouvelle-Calédonie pour le Gabon, où il devient l'adjoint du Directeur Général de la COMILOG, une société vouée à l'exploitation du minerai de manganèse. Il découvre l'Afrique profonde et authentique, bien loin des villes côtières où la vie est plus facile. Dans les chantiers qu'il doit gérer et développer en pleine brousse, il s'attache à ses collaborateurs africains dont il se fait rapidement des amis.
Mais l'éducation de ses enfants, dont il ne veut pas se séparer, impose un retour en France. Il rentre en 1971, est engagé par SOFREMINES, la grande société de conseil et d'engineering de l'époque. Il se spécialise dans les deux domaines où il est le plus efficace. D'abord la création et le lancement de nouvelles installations industrielles, notamment minières, ensuite et surtout la formation du personnel local chargé de faire tourner ces matériels nouveaux. Il intervient notamment dans les mines d'uranium du Niger.
En 1986, il rejoint les Charbonnages de France, et part pour une nouvelle mission au Niger. Il s'agit, cette fois, de gérer et de préparer l'africanisation d'une mine de charbon par la formation des cadres locaux avant de leur confier la responsabilité des affaires. Là encore, il donne la preuve de sa compétence et de ses qualités de chef. C'est donc dans le charbon, qu'il a commencé et fini sa belle carrière.
À la retraite en 1990, il ne reste pas inactif et recherche des missions bénévoles. Mais il est lourdement frappé, en 1991, par la mort de son fils, blessure dont il ne se remettra jamais. La maladie réduit ses capacités physiques, mais non son dynamisme et sa volonté. Chaise roulante ou pas, il se déplace. Il voyage aux États-Unis, en Iran, pour aller voir ses petits-enfants qu'il adore. Il participe à toutes nos réunions d'anciens élèves, dont il reste l'animateur, le boute-en-train. Mais la maladie a finalement été la plus forte, et Jean nous a quittés.
À son épouse, à sa fille, à ses petits-enfants, nous présentons nos sincères condoléances. Nous partageons leur douleur. Jean était notre ami. Nous ne l'oublierons pas.
Pierre TISON