La biographie suivante a été rédigée par Hubert LÉVY-LAMBERT (X 1953, corps des mines) et est extraite de l'article Quelques X dans l'affaire Dreyfus publié dans La Jaune et la Rouge, décembre 2006, pp. 60-65.
Claude Maurice Bernard naquit le 24 septembre 1864 à Paris de Jules Edouard Bernard, comptable et Léonide Geneviève Genet, sans profession. Il entra à l'École polytechnique à 18 ans dans la promotion 1882. Sa fiche signalétique établie par l'École indique qu'il était châtain, yeux gris, visage large, qu'il mesurait 1,67 m et qu'il n'avait pas de signes particuliers.
Entré à l'X 8e sur 247, il en sortit 4e en 1884 et choisit le corps des Mines. Il fut d'abord affecté au service des Mines de Béziers puis « pantoufla » à la Société des mines et fonderies de la Canette (Aude) et devint ingénieur-conseil de la Société des mines et fonderies de Pontgibaud. Il fit des missions d'exploration en 1896 en Guyane puis en 1897 au service des Mines de l'Imerina à Madagascar où on le retrouve en 1907 comme ingénieur-conseil de la société Le graphite français 1.
L'attitude de Bernard dans l'Affaire Dreyfus
Bernard fut un des signataires des deux premières pétitions des « intellectuels » de janvier 1898 demandant la révision du procès de 1894 (resp. 13e et 12e listes) ainsi que de la protestation en faveur de Picquart (7e liste).
Bernard fut cité comme témoin de la défense au procès de Rennes en août 1899, pour réfuter les thèses abracadabrantes et pseudo-scientifiques d'Alphonse Bertillon tendant à prouver que Dreyfus était le scripteur du « bordereau ».
Bernard écrivit le 2 septembre au courrier des lecteurs du journal La Paix pour rectifier une affirmation parue dans La Libre Parole qui le présentait comme Juif : « Par simple respect de la verité, j'ai écrit à M. Drumont pour m'excuser de ne pas l'être (juif) et je concluais ainsi : Je n'appartiens donc pas à la race ni à la religion qu'honore un Mathieu Dreyfus. »
Les calculs de Bernard furent utilisés par Henri Poincaré (X 1873) dans son avis sur le travail de Bertillon, lu devant le Conseil de guerre par Paul Painlevé, professeur de mécanique à l'X. L'avis de Poincaré se terminait ainsi : «... En résumé, les calculs de M. Bernard sont exacts ; ceux de M. Bertillon ne le sont pas... »
Bernard intervint à nouveau dans le cadre de la révision du procès de Rennes. Il publia dans Le Siècle en avril 1904 une série d'articles qui furent ensuite réunis en une brochure intitulée Le bordereau, explications et réfutations du système de M. A. Bertillon et de ses commentateurs. Une réplique fut publiée en juin par L'Action française puis diffusée sous forme d'une brochure verte intitulée La théorie de M. Bertillon, réponse à MM. Bernard, Molinier et Painlevé, par un polytechnicien. Ce polytechnicien, encore inconnu aujourd'hui, a tenu à garder l'anonymat, preuve que le vent commençait enfin à tourner !
Bernard mourut en mars 1923.