Décédé le 20 août 2015.
Ancien élève de l'Ecole des mines de Paris (promotion 1958). Ingénieur civil des mines.
Mines Revue des Ingénieurs, #481, Septembre/Octobre 2015
Lorsque son épouse Michèle a annoncé en mai 2015 que Robert Avezou était en chimiothérapie, la promo 58 a pris un coup de massue. Rien ne laissait supposer une telle situation alors qu'en février il nous faisait encore part, avec conviction et humour, de ses réflexions acérées sur les raisons de l'écart de compétitivité entre l'Allemagne et la France. Pourtant Robert s'est éteint le 20 août.
Sa carrière a été consacrée à l'ingéniérie dans de nombreux secteurs, pétrole, pétrochimie, chimie, gaz industriels, nucléaire. Il a fait ses classes chez Sud-Aviation et a ensuite tout appris ou presque des majors américains de l'ingéniérie, Lummus et Kellogg. Il a ainsi été un expert ayant acquis une remarquable acuité des bonnes pratiques. À ce titre il considérait que l'ingéniérie anglo-saxonne championne de la «méthode» et des checks-lists de toutes sortes qui vont avec était la plus aboutie, la plus efficace et la plus sûre. Ce parcours l'a amené à travailler à l'étranger, en particulier au Brésil et aux États-Unis. Robert était habité par son expérience professionnelle et considérait que sa mission n'était jamais terminée. Les questions de sécurité lors des grands projets d'infrastructures lui tenaient à cour. Il a voulu être actif dans l'association «Environnement 92» et a ainsi porté le point de vue des habitants et des usagers sur les risques encourus. L'un de ses longs combats pour les limiter a concerné le tunnel de Rueil mais aussi la chaufferie de Courbevoie. J'ai le souvenir d'un mail d'invitation à une de ses conférences à Vaucresson sur «La maîtrise des risques dans les grands projets publics et privés, le pourquoi des échecs». Il avait intitulé son mail «Du babil dans la tour de Babel». Avec cette formule, l'essentiel était dit. Il classait les pays en deux groupes, les poètes où on ne fait pas grand chose au début et où on répare au prix fort à la fin, et les sérieux, Allemagne, Suède, Suisse où l'on fait l'inverse ; on travaille beaucoup d'abord, on répare peu ensuite.
N'ayant jamais réellement décroché, il a été également bénévole chez Syntec Ingéniérie pour s'occuper des relations internationales, recevoir des délégations étrangères et réunir directeurs généraux et commerciaux des sociétés adhérentes autour de sujets communs à l'export. Il est même allé en Chine porter la bonne parole. Jusqu'à la fin il a été actif et a participé à la formation au «management de grands projets internationaux» dans plusieurs mastères et aussi d'élèves du Cesi.
Il était passionné par l'avenir de la France dans la mondialisation et souffrait de voir le déclin de notre pays, en particulier sa désindustrialisation, surtout quand elle provoque des pertes de compétences. C'était un homme de conviction, d'engagement, passionné, écorché vif, intelligent, aux réparties fulgurantes et dur à l'effort. Une anecdote à ce sujet : pour fêter son admission aux Mines il est parti seul à vélo pour sillonner les routes des Pyrénées, 500 kms.
J'ai pu suivre Robert dans son parcours privé et souhaite témoigner de notre amitié et de sa fidélité. Bien sûr dans l'École des Mines, à la MDM, dans la pratique ensemble de plusieurs sports où Robert se révélait un battant, brillant et endurant, à l'École des Mines du Colorado à Golden auprès du Professeur John S. Rinehart dont l'un des axes de recherche tournait autour de la perforation du permafrost en Alaska, au ski dans les Rocheuses, devant les grands espaces du Far West, pendant le service militaire dans l'armée de l'air à Caen et en Forêt Noire en Allemagne lors du terrible hiver 62-63.
Tout au long nous avons échangé les nouvelles concernant nos familles et nous nous retrouvions lors des rassemblements et voyages organisés par notre délégué de promotion. Notre dernière rencontre à Agon en juillet 2014 avec Maurice Blazy et nos épouses, dans leur magnifique propriété, fut un grand moment de bonheur. Nous avons touché du doigt les réalisations de Michèle et Robert qui n'était pas seulement un intellectuel. L'extension de la maison, plutôt la construction d'une seconde, en est l'illustration ainsi que la beauté du jardin avec ses bordures de buis à l'infini à qui Robert prodiguait tant de soins. Notre séjour à six de juillet 2015, organisé par Maurice et Nicole à Villers sur Mer, n'aura pu avoir lieu.
La cérémonie religieuse célébrée dans la moderne et chaleureuse église Saint Denys de Vaucresson a été à la fois triste et bon enfant, pleine d'émotion. Nombreuse assistance et promo 58 bien représentée. Nous avons eu l'occasion de faire part de notre profonde estime pour Michèle, leurs trois enfants et quatre petits-fils qui ont apporté à Robert un soutien constant dans cette dernière épreuve qu'il a affrontée et supportée sans se plaindre. Ils peuvent être fiers d'avoir partagé leur vie avec quelqu'un de sa trempe. Au cimetière, Jean-Marc Avezou a déposé une brique rouge, (en souvenir d'un stage de Vinçotte et de Robert dans les Mines de Carmaux) identique à celles de la cathédrale d'Albi que Robert admirait tant et qui est proche de son pays. Jean-Marc a alors invité chacun à déposer un brin de buis du jardin d'Agon, ce buis qui lui était si cher. Robert, merci d'avoir été notre ami. Repose en paix.
Georges Venturini (P58)