COMITÉ FRANÇAIS D'HISTOIRE DE LA GÉOLOGIE (COFRHIGEO) (Séance du 26 novembre 1986)
Notre propos n'est pas ici de commenter sur le fond l'ensemble du livre d'un auteur, connu du grand public notamment grâce à ses talents de vulgarisateur, mais seulement la vingtaine de pages qui en forment l'introduction, dans la mesure où il parle d'histoire de la géologie. Ce texte d'introduction se lit agréablement, et ce n'est pas de gaieté de coeur que nous sommes contraint de juger avec quelque sévérité les erreurs et distorsions qui l'entachent. D'emblée (p.11) on est fort surpris de lire que : "depuis cent cinquante ans, cette science (la géologie) "refuse de s'occuper de la naissance de la Terre et de son histoire archaïque". Claude Allègre entend, dans son livre, "enfreindre le tabou qui a déterminé la manière de faire de la géologie pendant cent cinquante ans", et tout d'abord, "s'interroger sur sa nature et son origine" (de ce tabou). "Cette curiosité (continue-t-il) va nous obliger à parcourir l'histoire même de la géologie" (p.12).
Avant d'aller plus loin, examinons le bien-fondé de cette allégation : depuis 150 ans (donc depuis 1835), le "problème de l'origine de la Terre" aurait été comme un domaine "interdit", objet d'un "silence prolongé", d'une "répulsion avouée". Vérifions par quelques coups de sonde, un peu au hasard dans l'énorme littérature géologique, si tel a bien été le cas.
En 1885, paraît la 2è édition du Traité de géologie d'Albert de Lapparent, qui fit longtemps autorité. En conclusion de l'ouvrage, on lit, p.1470-1475 un "Résumé cosmogonique" qui essaie "de définir, dans une synthèse finale, les grandes lignes de l'histoire de notre terre", depuis la "phase stellaire" initiale. - Contrairement à la thèse de Cl. Allègre, on pourrait retrouver et dénombrer une pléthore de tels essais géogoniques. - Ainsi parmi d'autres exemples, en 1912, écrivant pour le grand public, A. Berget publie La Vie et la Mort du Globe où lui aussi tente de remonter à "La naissance de la Terre" (chap.I), avant de faire longuement le point sur le savoir géophysique alors acquis (paléomagnétisme compris). - Pour rester en France, voir aussi, de L. de Launay, La science géologique, 1905, le chap. XVII, "Conclusions cosmogoniques". - Mais surtout, se reporter au livre capital de Mott. T. Greene, paru en 1982 : Geology in the nineteenth century - Changing views of a changing world, Cornell University Press (analysé en détail dans Travaux du COFRHIGEO, 2ème sér., t.II, 1984, p.63-88). Cet auteur mentionne ou résume de nombreuses théories génétiques, notamment américaines, mais il s'arrête à 1912. (On trouvera, par exemple dans l'Encyclopaedia Universalis, article Terre, quelques références aux synthèses géogoniques plus récentes jusqu'à H. C. UREY, 1952).
Cela dit, si nous comprenons bien la stratégie de Cl. Allègre, il juge bon de remonter aux origines de la géologie moderne pour nous montrer tout d'abord que l'on est parti d'une vision unidirectionnelle, irréversible, de la formation géologique de la Terre (à savoir la "synthèse neptunienne" de Werner) qui se réduisait à cinq grandes étapes de dépôts étagés successifs de nature différente dans une mer d'abord chaude et universelle, peu à peu abaissée et refroidie. Puis que cette théorie a été supplantée par celle de James Hutton, qui admettait des cycles successifs indéfiniment répétés où l'eau détruit les reliefs, que le feu souterrain régénère en soulevant les sédiments transformés en roches et injectés de roches ignées. D'où un conflit vif d'idées clos par le triomphe du plutonisme de Hutton. - Sous forme de catastrophes périodiques, la théorie cyclique est ensuite rénovée notamment par Elie de Beaumont, mais avec Charles Lyell, c'est la Géologie cyclique uniformitariste qui s'impose définitivement à partir du milieu du XIXè siècle. Du même coup, on a accepté aussi le fameux "No vestige of a beginning..." de Hutton, et le refus par Lyell de la cosmogonie, renvoyée à la métaphysique. Encore récemment (selon Allègre), la géologie continuait (p.24) à se développer "en revenant au concept huttonien de cycle géologique. L'évolution du Globe était gouvernée par le "cycle de l'éternel retour". Il s'agit donc, conclut l'auteur, pour la nouvelle géologie, de sortir de cette étude limitée à la surface et au passé récent du globe.
Ce n'est pas ici notre but de discuter de la validité d'une telle stratégie, mais de critiquer objectivement les éléments mis en oeuvre d'histoire proprement dite de la géologie naissante.
On ne chicanera pas trop Cl. Allègre sur son choix, forcément restrictif, de personnages et épisodes. Ce sont les erreurs historiographiques que nous avons pour devoir de dénoncer.
Passons sur "Bertrand" (pour Benoît) de Maillet (p.12). Même page, ce sont évidemment des pèlerins revenant (ironise Voltaire) de Saint-Jacques de Compostelle (et non "se rendant") qui auraient pu abandonner des coquilles dans les Alpes (cf. Arch, des Sc., Genève, 36, 1, 1983, p.72). Ce sont en somme des détails. - De même (p.19), Johann Gottlob Lehmann (1719-1767) et Georg Christian Füchsel (1722-1773) pouvaient difficilement être des "wernériens convaincus", sinon d'outre-tombe ! : Gottlob Werner (1749-1817) ne commence son enseignement à Freiberg qu'en 1775 ; - Alexandre Brongniart est déclaré "assistant" de Cuvier : mettons collègue (en science).
Moins pardonnable : p.21, Murchison, Conybeare et Phillips sont qualifiés de "artisans de la première carte géologique d'Angleterre". Tout le monde sait que c'est à William Smith que revient l'honneur de cette réalisation remarquable (1815), suivie en 1819 par la carte de Greenough (cf. le meilleur précis actuel sur l'histoire de la géologie britannique naissante : The Making of Geology - Earth Science in Britain 1660-1815, par Roy Porter, Cambridge, 1977). - p. 17, où l'auteur a-t-il vu le nom de Robert Jameson orthographié Jamieson ?
Sur le couple Gottlob Werner - James Hutton, Cl. Allègre perpétue une vision gravement déformée des choses, qui remonte à l'ouvrage classique de Geikie, The Founders of Geology, 2è edit. 1905 (réimpr. 1962). Sur ce sujet, outre le livre précité de Porter et de multiples articles récents, il importe de lire les deux premiers chapitres du livre cité plus haut de Mott Greene. (Voir aussi, de Bernard Balan, L'ordre et le temps (Paris, Vrin, 1979), à partir de la p.341). - Le Hutton que l'on nous présente ici est, une fois de plus, peu fidèle au Hutton réel. On sourit de le voir qualifié de "gentleman farmer" (sa ferme était fort modeste ; durant la majeure partie de sa vie scientifiquement active, il vivait à Edimbourg, notamment de ses rentes et des revenus d'une petite entreprise de chimie industrielle). Mais nous tenons surtout à relever une confusion de quelque importance. Le système originel de Hutton ne mérite pas encore vraiment en fait le nom de "plutonic". C'est John Playfair qui en 1802, dans ses Illustrations of the Huttonian Theory of the Earth (donc après le décès de Hutton en 1797) relie à la "central heat" de la Terre, la montée de la chaleur et des produits fondus (§§ 88-89). Dans sa Theory of the Earth, with Proofs... de 1795 (vol.1, p.240-244), Hutton est embarrassé par le problème du renouvellement perpétuel de son "subterraneous fire", clé de tout son système (voir dans ce Feu interne créateur "le Diable", p.17, est une plaisanterie fort étrangère à notre sujet !). La solution qu'adopte le "plutonien" Hutton est (paradoxalement) typiquement neptunienne : rebelle à la chimie de Lavoisier, il ne voit pas d'inconvénient à donner comme aliment à son feu souterrain, les "combustible strata" issus de végétaux jadis nourris par la lumière solaire (donc par une source inépuisable), avant d'être enfouis en profondeur au sein des couches sédimentaires empilées. (Cf. R. Porter, loc. cit., p.195).
Devrions-nous irriter les anglolâtres, nous sommes désolé de préciser que le véritable introducteur du concept de foyers volcaniques situés "sous l'écorce consolidée du globe", à une grande profondeur, n'est autre qu'un Français, Déodat de Dolomieu (Journ. des Mines, n°XLI, an VI = 1798). - De même, les petites causes produisant, "avec l'aide du temps" (p.15), de grands effets, sont une idée formulée dès avant Hutton avec une grande clarté, encore une fois, hélas ! principalement en France (cf. notre article au Bull. Soc, géol. Fr. (8), III, 1987, p.204-205). Du reste Hutton cite abondamment des auteurs français à l'appui de ses thèses.
Après le Hutton réécrit, simplifié, modernisé, érigé en symbole, passons au pseudo-Werner de Cl. Allègre, encore plus éloigné de ce que les sources historiques primaires nous en présentent dans leur réalité objective. C'est un cas exemplaire de fiction historique profondément injuste, presque indéracinable en dépit de toutes les rectifications sérieuses récentes. Il est absurde de faire de Werner un adepte étroit des Ecritures (p.18), faisant se dérouler "en un temps très court, de l'ordre de quelques dizaines de milliers d'années au plus" (confusion avec Buffon ?) ses cinq étapes de la formation du sous-sol terrestre, "un temps quasiment biblique" (p.14). Tout au contraire, Werner était franc-maçon (cf. Que Sais-je ? n°1064, 1971, p.52), très mal vu du clergé luthérien orthodoxe local (F. Leutwein, in litt.) ; voir en lui un adepte borné de la chronologie biblique et du Déluge est une contre-vérité flagrante (encore faite sienne de façon extravagante par M. K. Hubbert en 1967, in Uniformity and simplicity, Geol. Soc. Amer. Spec. Paper n°89, p.8-9 : la notoriété, fut-elle méritée dans un domaine, ne confère nulle compétence dans tous les autres). - Tout au contraire, le vrai Werner a lui-même écrit de sa plume (Kurze Klassification..., 1787, p.5) que le processus de formation des roches primitives s'était déroulé "in dem ungeheuren Zeitraume der Existens unserer Erde" ("durant l'énorme laps de temps de l'existence de notre Terre"). Car Werner a bel et bien publié quelques écrits !
A la page 17, il nous est dit que les thèses neptuniennes étaient "liées au concept de déluges successifs", alors que, p.13, il n'est question que d'une mer se retirant progressivement des continents. Il faudrait s'entendre ! - Pour en avoir le coeur net, lisons le résumé de la vraie vision de Werner, tel que l'expose en 1801 l'un de ses proches, H. Steffens (citation in H. Holder, Geologie und Palaontologie in Texten und ihrer Geschichte, 1960, p.433-434 : sans doute à l'heure actuelle, le meilleur livre sur l'Histoire de la Géologie dans son ensemble). Pour expliquer les données lithostratigraphiques, il y est fait appel à une vaste masse fluide en retrait graduel, mais non sans "contractions" et "expansions" parfois violentes au cours des âges. Vers la fin, l'auteur admet une dernière extension générale puissante, encore suivie de submersions partielles (ceci pour rendre compte des dépôts quaternaires), mais nulle part nous ne trouvons le mot de "Sintflut" (c.à.d. le Déluge proprement biblique). Les nombreux et très actifs "géognostes" allemands étaient pour la plupart impliqués dans des activités minières : hommes pragmatiques, les pieds sur terre, accordant beaucoup moins d'importance aux théories qu'aux données concrètes, tant locales que globales, du terrain. Philosopher sur le Déluge n'était pas leur affaire.
Mais les historiens anglais de naguère, avec leurs oeillères insulaires et leur britannico-centrisme irrépressible, ont systématiquement ignoré toute la fécondité de l'apport germanique dans la naissance de la Géologie. Surtout intéressés par les théories, ils se sont fabriqué une fausse image de Werner, uniquement d'après les représentants anglophones de son école (surtout Jameson), très concernés, eux, par l'orthodoxie biblique.
Or, pour qui tâche d'étudier l'ensemble des publications européennes des années décisives 1800-1840, il n'apparaît pas que le conflit des doctrines théoriques (Neptunisme contre Vulcanisme/ Plutonisme, Catastrophisme contre Actualisme) ait joué un rôle notable dans la marche du progrès scientifique. Ce qui importait aux yeux de cette génération, c'était avant tout la "Géologie positive", c'était la mise en évidence objective des faits et de leurs relations mutuelles (lire à ce sujet R. Porter, p.205-214). - A distance, il est certes plus agréable de bavarder sur les doctrines supposées de jadis que d'analyser les faits !
L'école germanique de la fin du XVIIIè siècle, dont Werner n'est que le plus éminent animateur, a, sous le nom de Géognosie, élaboré avant tout un système concret d'analyse des bâtis du sous-sol (délimitation horizontale et verticale des unités lithologiques, détermination minéralogique précise de leurs constituants). Dans les années 1810, elle s'est tout simplement épanouie en Géologie tout court, grâce à l'immense découverte indépendante du fait de la succession chronologique des faunes. Mais la démonstration de cette succession n'était elle-même rendue possible que grâce à la lente découverte préalable de la constance régionale (relative) des séquences lithostratigraphiques. Et l'un des moteurs de cette dernière prise de conscience n'était autre que le credo Neptunien : à chaque période de la durée devait correspondre une formation sédimentaire particulière. Prétendre donc (p.12) froidement que la géologie "est née en Angleterre à la fin du XVIIIè siècle", c'est prendre à son compte une vision mutilée et tendancieuse des faits. On lira dans l'ouvrage précité de l'historien anglais Roy Porter, p.166 et 170, une appréciation bien différente : "Britain's palaeontologists and mineralogists were markedly inferior to those in France and Germany..." ; "As with fossils, the fundamental systematic study of minerals and crystals at this time came from Continental Europe...". Porter souligne aussi que le modèle wernérien de l'histoire de la Terre "had considerable heuristic value for geologists" (p.172), en accord avec ce que nous avons dit un peu plus haut. (Lire les p.186-187 quant aux raisons réelles de l'accueil fort mitigé fait en Grande-Bretagne à la théorie de Hutton). - On rappellera pour mémoire qu'Edimbourg n'est pas "en Angleterre", mais en Ecosse (les Ecossais sont chatouilleux sur ce point).
Bien d'autres remarques pourraient être faites. Contentons-nous de deux. La première porte sur l'incompréhension profonde de trop d'historiens de la géologie quant au caractère à leur avis anti-scientifique de la doctrine neptunienne. Durant le dernier quart du XVIIIè siècle, l'école germano-suédoise (où cette vision des choses était largement prédominante) était en pointe, tant en pétrographie qu'en minéralogie. C'est appuyés sur des arguments physiques et géochimiques tenus pour irréfutables que l'origine "ignée" des granites et des basaltes était rejetée. Pour cette dernière roche, les descriptions des coulées basaltiques d'Auvergne et du Vivarais, faites en France par des simples naturalistes de terrain, ne "faisaient pas le poids" vis-à-vis de la science "savante" de laboratoire (ajouterons-nous : "Déjà !" ?). Lire à ce sujet le mémoire du grand minéralogiste et chimiste suédois Torbern Bergmann, paru en traduction française dans Observ. sur la Phys., t.XVI, 1780 : Des Volcans, considérés chimiquement. (Ce Bergmann avait été, en 1769, le véritable promoteur du système de Werner). De minutieuses observations de terrain fortifiaient la conviction de Werner que les basaltes d'Allemagne étaient des dépôts aqueux : ainsi la colline de Meissner en Hesse, où un chapeau basaltique repose sur des lignites bitumineux : Werner se moque sarcastiquement (1788) des vulcanistes qui ne voient pas combien il est absurde d'imaginer que ce basalte ait été fondu et incandescent tout en laissant intact le lit combustible sous-jacent (lire la controverse dans le Bergmannisches Journal, 1788, Bd.2, p.845-865). - De même, l'attribution du granite à un précipité aqueux polycristallin paraissait démontré par un faisceau de preuves scientifiques convergentes (citons l'une d'elle : au laboratoire, le granite n'arrive jamais à être fondu entièrement ; en se refroidissant, on n'obtient qu'un mélange semi-vitreux où le quartz initial subsiste tel quel : cf. Horace-Bénédict de Saussure, Voyages..., t.I, 1779, §§171-177).
Il est donc inadmissible de perpétuer des jugements simplistes et apitoyés (voire injurieux) sur le système neptunien et sur Werner lui-même. C'est faire preuve d'une ignorance abyssale de la littérature géologique passée. En science comme en histoire, le mépris est mauvais conseiller et, tôt ou tard, se retourne contre ceux qui en usent. Que ces visions erronées aient été reprises d'auteurs antérieurs déjà de seconde main, n'est pas une excuse, bien au contraire. Tout, en science comme en histoire, exige d'être contrôlé et vérifié, avant d'être affirmé. Lorsque ce n'est pas matériellement possible, le conditionnel, ou mieux, le silence s'impose.
Nous dirons en deux mots que le Neptunisme, théorie globale cohérente et réfléchie, s'est éteint de lui-même, sa mission pédagogique une fois terminée. Le Huttonisme, de deuxième génération, n'a réellement assumé sa fécondité qu'à terme, de façon empirique, largement grâce à des hommes de terrain éduqués par Werner, dépassant leur maître, mais rompus à sa méthode d'analyse objective et synthétique, à trois dimensions, du terrain.
Notre seconde remarque porte sur le fond. L'auteur avance (p.23) que "la géologie s'est concentrée sur l'étude des périodes récentes" : état de fait qui se serait perpétué "jusqu'à, disons, 1970". Laissons de côté tout vain débat sur cette date miraculeuse, an I de la Révélation. Rappelons seulement qu'un effort peut-être au départ marginal, mais obstiné et continu, a porté sur l'exploration fort difficile et le décryptement des vieux boucliers précambriens, entreprise débutant avec Logan et Dawson au Canada dès les années 1850. On a longtemps caressé l'espoir d'y retrouver des restes de la croûte de consolidation primitive du globe, espoir périodiquement déçu par suite des progrès mêmes de l'analyse des structures à toutes les échelles .
Et pour en revenir à la fiction historiographique d'une conception cyclique indéfinie de l'histoire de la Terre, on rappellera que la théorie des grands cycles orogéniques récurrents et synchrones à l'échelle mondiale, prudemment proposée à la fin du siècle dernier par Marcel Bertrand et Edouard Suess, a fait l'objet en ce siècle, malgré les efforts de Hans Stille, de critiques de plus en plus âpres. Il a bien fallu accepter l'échec de tout réductionnisme simplificateur. Les choses ne peuvent de tout évidence se ramener ni à une cyclicité "anhistorique", ni à une évolution linéaire simple.
En conclusion, on peut raisonnablement se demander si l'auteur n'a pas fait preuve, au minimum, de quelque légèreté dans son évocation à couleur historique. Le respect dû au lecteur exige que toute référence aux réalités passées ait été vérifiée (sauf dans ce genre parfaitement respectable en soi qu'est le Roman historique). Il n'est pas agréable de jouer au censeur. Mais comme toute autre discipline, l'Histoire des sciences a ses exigences. Elle doit se défendre, sans égard aux personnes, contre toute intrusion inconsidérée qui risque de la discréditer et d'égarer le public. - "Sutor, ne ultra crepidam !, grondait (dit-on) un peintre antique dont l'oeuvre était critiquée par un cordonnier. Certes ! - Mais il est également conseillé aux Artistes de ne pas se mêler de techniques de cordonnerie, sous peine de voir les artisans cordonniers rire sous cape, entre eux.