COMITÉ FRANÇAIS D'HISTOIRE DE LA GÉOLOGIE (COFRHIGEO) (séance du 12 juin 1996) Réunion commune COFRHIGEO/SGF
La théorie de l'Evolution est née au début du dix-neuvième siècle. Elle a été le produit naturel et l'aboutissement du long effort entrepris par les naturalistes du dix-septième et surtout du dix-huitième siècle pour maîtriser la connaissance du monde organique, les animaux et les plantes. Les noms de John Ray (1627-1705), Tournefort (1756-1708), et Linné (1707-1778) sont bien connus. Leurs efforts de classification ont cependant porté surtout, sinon exclusivement, sur le monde végétal. Les animaux, paradoxalement, étaient demeurés beaucoup moins bien connus. Les grands noms qui dominent leur mise en ordre à cette époque décisive sont ceux de Cuvier pour les Vertébrés, déjà assez bien connus, et de Lamarck pour les Invertébrés, qui l'étaient beaucoup moins. Ils constituaient en effet un vaste territoire mal exploré, qui représentait les 9/10 des animaux connus. Lamarck, qui avait été nommé en 1793 Professeur au Muséum d'Histoire naturelle de Paris, pour enseigner les "Insectes et les Vers", entreprit le travail immense de classification naturelle de ce monde animal.
Il commença par définir, dès 1794, le domaine qui lui avait été attribué en créant, pour le désigner, le terme d'Invertébré. "Les animaux ... sont nettement distingués, écrit-il en 1797, en deux séries principales, sçavoir : 1° les animaux vertébrés, 2° les animaux invertébrés" (1)
"Je crois être le premier; précise-t-il, qui ait établi cette distinction importante, à laquelle il paroît qu'aucun Naturaliste n'avoit pensé. Elle est maintenant adoptée par plusieurs qui l'introduisent dans leurs ouvrages, ainsi que quelques autres de mes observations, sans en indiquer la source.
Tous les animaux connus peuvent donc être distingués d'une manière remarquable 1° En animaux à vertèbres. 2° En animaux sans vertèbres" (2).
Ayant délimité son champ d'études, Lamarck se met au travail pour y mettre de l'ordre. A la fin du dix-huitième siècle s'était déjà imposée chez les classificateurs une problématique nouvelle et exigeante. En effet, une des grandes avancées systématiques qui précède historiquement la "découverte" de la théorie de l'Evolution fut celle de la mise en place de la classification naturelle, opposée à la classification artificielle. Cette nouvelle problématique visait à classer les êtres vivants selon leurs ressemblances morphologiques, ou, comme on l'exprima bientôt, selon leurs "affinités" réelles, ou encore leur "parenté". "Maintenant, assure Lamarck, l'on sent plus que jamais l'importance de la considération des rapports pour fixer définitivement dans toutes les parties la distribution des animaux, et que c'est l'organisation intérieure qui doit fournir ceux qui décident le rang des masses principales dans la distribution..."
"Profitant, ajoute-t-il, des lumières que l'anatomie comparée répandoit sur l'organisation des animaux ... j'ai successivement porté jusqu'à dix, le nombre des classes qui divisent les animaux sans vertèbres ; et je n'oserois assurer qu'on ne sera pas obligé d'y en ajouter un jour de nouvelles, tant ces animaux sont diversifiés et nombreux dans la nature, et tant il est probable que ceux de ces animaux qui n'ont jamais été observés sont plus nombreux encore que ceux que l'on connoît" (3).
Il réussit si bien dans sa mise en ordre que son système qui, au jugement du conchyliologiste anglais Thomas Webster, était le seul à donner le nom "scientifique" des objets étudiés (4), fut bientôt adopté par la majorité des invertébristes. Avec sa classification de ce sous-règne s'achève la mise en ordre raisonnée du monde vivant.
C'est au cours de ce travail de classification naturelle des Invertébrés, et au fur et à mesure qu'il le perfectionnait, que Lamarck a inventé la théorie de l'évolution. Il nous dit expressément et à plusieurs reprises comment il est passé de la classification à l'idée de filiation :
"On voit donc qu'en ajoutant aux 10 classes qui partagent ma division des animaux sans vertèbres, les 4 qui embrassent les animaux vertébrés, on aura pour diviser la série de tous les animaux connus, 14 classes distinctes, dont il ne s'agit plus que de déterminer la disposition générale de cette série afin de la rendre conforme le plus possible à la marche des opérations de la nature".
"Ici en effet se présente une question importante ; la voici. Toutes les classes qui partagent le règne animal, formant nécessairement une série de masses d'après la composition croissante ou décroissante de l'organisation, doit-on, dans la disposition de cette série, procéder du plus composé vers le plus simple, ou du plus simple vers le plus composé ?
Ce n'est pas là, certainement, une question oisive ou indifférente ; car de sa solution et du parti que l'on prendra relativement à la disposition générale de la série, dépendront nécessairement la facilité ou la difficulté la plus grande pour nous dans l'étude de la nature, c'est à dire pour saisir ses opérations, et les lois auxquelles elles sont assujetties" (5).
"Il importe donc extrêmement, précise-t-il, pour l'avantage de nos connoissances ultérieures, que nous opérions dans la distribution générale des animaux un renversement tel que les animaux les plus imparfaits et les plus simples en organisation soient en tête de la distribution, tandis que les plus parfaits et dont l'organisation est la plus compliquée, la termineront" (6).
Cette disposition est en effet très importante, car elle entraîne une nouvelle vision du monde animé. "La distribution générale des animaux étant disposée de manière que les animaux les plus imparfaits et les plus simples en organisation commencent la série, tandis que les plus parfaits la terminent, il en résulte que les animaux sans vertèbres occupent la première et la plus grande partie de cette série, et que c'est par eux qu'il faut commencer l'étude des animaux ainsi que celle de leur organisation.
Notre marche dans l'examen que nous allons faire, sera conforme à celle qu'a suivie la nature dans ses opérations ; elle nous montrera comment en partant des corps organisés les plus frêles, les plus foibles en consistance, la nature en commençant ses opérations sur l'organisation, a peu à peu, dans l'un et l'autre règne, augmenté le volume et la consistance des corps qui possèdent la vie" (7).
La découverte de la transformation des espèces est donc liée historiquement - et logiquement - à leur classification. C'est ce qu'affirme Lamarck. Ayant basé fondamentalement sa classification des animaux sur l'étude de leurs "rapports", il en déduit leur "ordre de formation", qui, assure-t-il, "n'est pas illusoire", car "il est clairement indiqué par les rapports, conséquemment par la nature elle-même" (8). Et il ajoute : "Jusqu'à ce jour, il me semble que les naturalistes n'ont vu dans les rapports entre les objets, que des moyens de rapprocher ces objets à raison de la grandeur de ces rapports, et de former avec ces mêmes objets rapprochés, diverses portions de série qu'ensuite ils disposèrent entre elles, d'après les rapports plus ou moins grands qu'ils aperçurent entre ces portions ou ces masses particulières". Mais il fallait aller plus loin, ce que les naturalistes d'avant Lamarck n'avaient pas su faire, car ils ne virent pas que leur distribution "leur présentait en outre, un ordre de formation de la plus grande évidence". "Un pas de plus à restait donc faire", annonce Lamarck ; "c'était le plus important, celui même qui pouvait le plus nous éclairer sur les opérations de la nature. Il s'agissait seulement de reconnaître que les portions de la série générale que forment les objets convenablement rapprochés par leurs rapports, ne sont elles-mêmes que des portions de l'ordre de formation à l'égard de ces objets. Ce pas est franchi ; l'ordre de la formation successive des différens animaux ne saurait être maintenant contesté ; il faudra bien qu'on le reconnaisse" (9).
Cette reconnaissance allait cependant prendre quelque temps, ce qui est naturel, étant donné la lenteur de l'esprit humain à reconnaître les nouveautés, surtout scientifiques. Lamarck pouvait se féliciter néanmoins d'avoir fait faire des "progrès ... aux sciences naturelles, ... particulièrement en instituant l'ordre le plus naturel que l'on puisse établir parmi les animaux sans vertèbres, et en montrant que cet ordre prend sa source dans la production successive de ces animaux ..." (10).
C'est aussi ce que réaffirmera Darwin, presque dans les mêmes termes, cinquante ans plus tard. "Toutes les règles, toutes les difficultés, tous les moyens de classification ... s'expliquent, à moins que je ne me trompe étrangement, en admettant que le système naturel a pour base la descendance avec modification, et que les caractères regardés par les naturalistes comme indiquant des affinités réelles entre deux ou plusieurs espèces sont ceux qu'elles doivent par hérédité à un parent commun. Toute classification vraie est donc généalogique ; la communauté de descendance est le lien caché que les naturalistes ont, sans en avoir conscience, toujours recherché, sous le prétexte de découvrir, soit quelque plan inconnu de création, soit d'énoncer des propositions générales, ou de réunir des choses semblables et de séparer des choses différentes". "Ne possédant point de généalogies écrites, ajoute-t-il, il nous faut déduire la communauté d'origine de ressemblances de tous genres"(11).
Lamarck propose d'ailleurs du même coup, non seulement l'explication de l'histoire des êtres vivants, mais aussi celle de leur origine. "Je trouve dans ces importantes considérations des moyens très-suffisans pour soulever le voile épais qui nous cachoit le plus grand des secrets de la nature, celui qui est relatif à l'origine de tous les corps naturels" (12).
Mais une autre discipline, encore à ses débuts à cette époque, va entrer dans le débat, et consolider les bases de la théorie naissante de l'évolution. Il s'agit de la science des fossiles, qui va bientôt être nommée paléontologie par Henri de Blainville (13). Lamarck ne se contente pas en effet d'étudier les Invertébrés actuels. Il entreprend en même temps d'étudier les Invertébrés fossiles que lui fournissent en abondance les terrains tertiaires du Bassin de Paris. Cuvier, qui, comme on le sait, ne l'aimait pas particulièrement, justement à cause de sa théorie de l'évolution, le crédite cependant sur ce point d'être celui qui connaît le mieux ces fossiles qu'il décrit à longueur d'articles dans les Annales du Muséum d'Histoire naturelle de Paris. "Monsieur Delamarck, affirme-t-il, est, dans l'époque actuelle, celui qui s'est occupé des coquilles fossiles avec le plus de suite et de fruit : il en a fait connaître plusieurs centaines d'espèces nouvelles, seulement dans les environs de Paris" (14).
Dans ses Mémoires sur les fossiles (15), Lamarck décrit plusieurs centaines d'espèces fossiles. En même temps qu'il les décrit, il les classe, et les fait entrer dans les catégories qu'il a déjà établies pour les Invertébrés vivants, en les intégrant ainsi à leur classification.
Lamarck a en effet été un des plus grands paléontologistes de son temps (et de tous les temps). Il a défini plus d'un millier d'espèces fossiles, ce qui fait de lui le fondateur de la Paléontologie des Invertébrés, comme Georges Cuvier est le fondateur de la Paléontologie des Vertébrés. Lamarck, comme son éminent collègue du Muséum, a toujours attaché beaucoup d'importance à l'étude des fossiles : "Autrefois, observe-t-il, on mettoit fort peu d'empressement à recueillir et à étudier les dépouilles des corps vivans qu'on rencontroit dans l'état fossile ... Mais depuis qu'on a fait attention que ces fossiles étoient des monumens extrêmement précieux pour l'étude des révolutions qu'ont subi [sic] les différens points de la surface du globe, et des changemens que les êtres vivans y ont eux-mêmes successivement éprouvés (dans mes leçons j'ai toujours insisté sur ces considérations), alors la recherche et l'étude des fossiles ont pris une faveur particulière, et sont maintenant pour les Naturalistes des objets du plus haut intérêt" (16).
Comme l'on sait, c'est d'ailleurs lui qui a fixé le sens actuel de ce mot : "Tous les naturalistes connaissent ces débris très-anciens d'animaux et de végétaux qu'on trouve dans le sein de la terre et à sa surface, et qui conservent encore leur véritable forme. C'est à ces dépouilles encore reconnaissables de corps organisés, que j'ai donné particulièrement le nom de fossiles ; nom que l'on ne doit pas étendre indistinctement, comme le font quelques naturalistes, à toutes les substances brutes et minérales qui composent la masse et, d'une manière plus particulière, la croûte extérieure du globe" (17).
Lamarck a donc utilisé la paléontologie des Invertébrés comme la seconde base fondamentale de sa théorie de l'évolution. Il ne lui suffit pas en effet de définir le sens des mots, il veut encore en faire un instrument au service de la démonstration de la théorie qu'il veut introduire dans le monde scientifique. Dans ce but, Lamarck définit, et rend opératoire - il est le premier à le faire - le concept de "fossile analogue", qui devient lui aussi fondamental, à partir de ce moment, dans la paléontologie évolutive. Un fossile analogue est un fossile qui présente des ressemblances avec un être vivant actuel, ou, le cas échéant, avec un fossile d'un âge différent.
Pour établir ces ressemblances, et les utiliser dans la théorie de l'évolution, et par conséquent tirer le maximum de renseignements des "coquilles" qui sont l'objet de ses travaux, il est extrêmement important de décrire exactement les fossiles rencontrés, et de bien définir leur gisement géologique. A cet effet, Lamarck recommande aux naturalistes de noter consciencieusement dans leur étude "non-seulement tous les faits qui tiennent à leur formation, ce qui étend nécessairement ses connoissances sur l'organisation et la conformation des animaux d'où elles proviennent", mais d'observer en outre "que ces enveloppes solides semblent participer aux influences des climats, des milieux habités, des profondeurs grandes ou petites dans les eaux, etc., parce que les animaux qui subissent réellement ces influences, laissent, dans ces mêmes enveloppes, des traces qui les indiquent" (16).
Grâce à ces conditions rigoureuses d'étude, "l'examen des coquilles fossiles, des madrépores et autres polypiers pierreux pareillement fossiles", de tous les "anciens témoins des changements lents que la surface de notre globe a éprouvés", d'une part, et, d'autre part Sa comparaison "avec les coquilles et les polypiers pierreux dont les animaux vivent actuellement dans différentes mers et à des profondeurs diverses, continueront de nous apprendre bien des choses à cet égard" (19) La description précise des caractères zoologiques des fossiles, et leur détermination exacte, sont en effet des documents essentiels à utiliser pour "l'avancement de nos études géologiques" (20).
Tout se tient, en effet, car, dans la vision lamarckienne, tous les événements qui se passent ou se sont passés à la surface du globe, sont de même nature. Aussi les habitats actuels des êtres analogues à ceux que l'on rencontre à l'état fossile, comme ceux des polypiers actuels par exemple, sont très importants à considérer "dans l'étude des faits géologiques dont nous cherchons à connoître les causes" (21) Il en est de même pour les habitats des coquilles marines, dont on trouve une telle quantité dans les couches géologiques en France, et dont "déjà un grand nombre d'entre elles sont reconnues pour les analogues des coquilles qui vivent actuellement dans les pays chauds, et qu'on ne peut rencontrer que là, parce que ces coquillages vivans ne sauroient plus habiter dans nos mers" (22). Tous ces faits bien solidement établis, et qui sont si nombreux, permettent une conclusion définitive sur les changements de climat, facteurs de modifications dans les êtres. Ou bien alors, "si ces faits ne sont pas décisifs sur la question relative à l'instabilité des climats ; si les observations qui prouvent que les animaux dont je viens de parler ne peuvent subsister que dans des mers plus chaudes que ne le sont actuellement les nôtres, et que cependant ils ont long-temps vécu dans une mer qui couvroit autrefois le pays que nous habitons aujourd'hui : si ces observations ne mettent pas en évidence les changemens qu'a subis notre climat, j'oserai assurer qu'il n'y a rien de prouvé dans les sciences physiques" (23). Les lois du passé de la terre et de la vie sont les mêmes que celles d'aujourd'hui, ou il n'y a plus de science possible.
Parmi le millier d'espèces fossiles qu'il a étudiées, Lamarck découvre une centaine qui présentent de telles ressemblances, de telles "affinités", avec les espèces actuelles, qu'il peut véritablement leur attribuer l'épithète d'espèces analogues. L'utilité de leur emploi pour l'établissement de la descendance des espèces actuelles à partir des espèces fossiles qui leur ressemblent, c'est-à-dire pour la démonstration de la théorie de l'évolution, est rendue évidente par le rapprochement qu'en fait Lamarck.
Pour une bonne partie d'entre elles, la qualification d'analogues convient parfaitement, dans la mesure où elles présentent, à côté de grandes ressemblances, un certain nombre de caractères différents. Ainsi, en ce qui concerne YOliva canalifera : "ses rapports avec l'Oliva hiatula de Gmelin sont tels qu'elle semble en être l'analogue fossile, à quelques différences près" (24). Il en est de même du Murex pyraster, qui "se rapproche beaucoup, par ses rapports, du murex pyrum de Linné ; mais outre qu'il est plus petit, il en paroît assez distinct" (25). C'est à des espèces de ce genre que Lamarck attribue volontiers l'épithète d'analogues. Ainsi, d'une manière explicite, en ce qui concerne le Cerithium petricolum : "Elle a de si grands rapports avec le cérite cordonné Brug. Dict. N°14 (murex torulosa L.) qu'on pourroit soupçonner qu'elle en est un analogue très-ancien" (26). Mais différents caractères l'en distinguent ; aussi Lamarck juge-t-il nécessaire de l'en séparer, et de lui attribuer un autre nom spécifique. Il en est de même dans le cas de la Turritella imbricataria : "il y a beaucoup d'apparence que c'est l'analogue fossile du turbo imbricatus de Linné (la vis marbrée) qui vit maintenant dans les mers des Antilles. Cependant j'ai changé la terminaison de son nom spécifique, parce que comme ses stries sont plus marquées que celle du turbo imbricatus, je n'ose assurer que ce soit parfaitement la même espèce" (27).
Il y a d'autres espèces que Lamarck considère, non comme des espèces "analogues" proprement dites, mais comme des "variétés" des espèces actuelles, voulant marquer ainsi un autre degré de relation. Ainsi, par exemple, le Trochus crenularis : "Il a de si grands rapports avec le trochus mauritianus de Gmelin, ... que je crois qu'il n'en est qu'une variété de l'analogue dans l'état fossile" (28), ou encore le Turbo helicinoïdes, qui "ressemble tellement au trochus vestiarius de Linné par son aspect, qu'on pourroit soupçonner qu'elle n'en est qu'une variété de son analogue dans l'état fossile" (29).
Il n'y a pas de doute d'ailleurs, pour Lamarck, que ces espèces "analogues" ne soient les mêmes que les espèces actuelles, rendues différentes par l'action du temps et celle du milieu, c'est-à-dire qu'elles ne soient liées par les liens de la descendance. "J'ai plusieurs fois soupçonné", assure-t-il, en parlant de la voluta musicalis qu'il vient d'étudier, "que cette coquille fossile étoit l'analogue du voluta musica de Linné, un peu changé par la suite du temps" (30). L'arca barbatula est définie de la même façon : cette "arche fossile, fort commune à Grignon, semble être le type de l'arca barbata de Linné, que le temps et les circonstances d'habitation auroient un peu changée" (31).
Lamarck nous avertit d'ailleurs que, dans ses cours, il utilise constamment cette problématique. Les conséquences qu'il en tire sont en effet évidentes et immédiates. En tout premier lieu, les fossiles lui servent à démontrer la fausseté du catastrophisme de Cuvier, et nous verrons que son argumentation, étudiée et reproduite par la foule de ses disciples invertébristes, ruinera très rapidement la doctrine cuviérienne. "Les premiers résultats de l'étude des fossiles ont fourni à plusieurs Naturalistes l'idée de la proposition suivante comme très-fondée, savoir :
Que tous les fossiles appartiennent à des dépouilles d'animaux ou de végétaux dont les analogues vivans n'existent plus dans la nature.
Ils en ont conclu, pour la couche extérieure du globe qui nous montre de ces fossiles dans toutes ses parties sèches et dans ses différens climats, que ce globe a subi un bouleversement universel, une catastrophe générale, et qu'il en est résulté qu'une multitude d'espèces d'animaux et de végétaux divers se trouvent absolument perdues ou détruites" (32).
Tout le monde a reconnu là le catastrophisme de Cuvier. Voici la réfutation de cette thèse par Lamarck : "Il est très-vrai que sur la grande quantité de coquilles fossiles recueillies dans les diverses contrées de la terre, il n'y a encore qu'un fort petit nombre d'espèces dont les analogues vivans ou marins soient connus. Néanmoins, quoique ce nombre soit fort petit, dès qu'on ne sauroit le contester, il suffit pour que l'on soit forcé de supprimer l'universalité énoncée dans la proposition citée ci-dessus" (33).
La première cible de Lamarck est en effet le catastrophisme de Cuvier, et c'est ce qui explique l'animosité de ce dernier contre son collègue du Muséum. "Au lieu de ces catastrophes générales, insiste Lamarck, qui sont si commodes, parce qu'elles dispensent d'étudier, dans le sujet dont il s'agit, la marche constante de la nature, et qu'on a supposées pour tâcher d'expliquer l'importante considération des débris de corps marins entassés et si abondans dans toutes les parties sèches de notre globe ; quel est le naturaliste observateur qui n'aperçoit pas au contraire les changemens, très-lents sans doute, mais continuels, qu'éprouve la surface du globe que nous habitons ? ... Ces prétendues catastrophes générales du globe, sur quelles bases les appuie-t-on ? Si nous observons, par places, des bancs considérables de coquilles fossiles amassées, les courans qui existent dans les mers n'ont-ils pu donner lieu à ces amas locaux et à d'autres semblables, et se trouve-t-on forcé d'avoir recours à des suppositions que rien ne prouve, pas même les mélanges dans les amas cités ?" (34)
Cette première étape de la réfutation du catastrophisme était évidemment absolument nécessaire pour assurer le passage à la théorie de l'évolution. Si les partisans du catastrophisme avaient triomphé, il est clair que le transformisme n'aurait pu émerger en aucune manière.
Mais l'argument des espèces fossiles analogues, qui sert à établir la continuité de la vie contre le catastrophisme, sert en même temps à fonder la transformation des êtres vivants. Et Lamarck utilise cet argument à plusieurs reprises.
Dans ses études sur les centaines d'espèces fossiles qu'il a étudiées, Lamarck n'a pas manqué de les comparer entre elles d'une part, et avec les espèces actuelles d'autre part, et il montre ainsi comment elles ont pu se transformer les unes dans les autres.
Les centaines d'espèces fossiles qui ont passé entre les mains de Lamarck lui ont servi ainsi à illustrer, et à renforcer la rectitude, de ce qu'il appelait "ma conclusion particulière" (35), c'est-à-dire l'affirmation de la transformation des espèces. "Quoique beaucoup de coquilles fossiles, assurait-il, soient différentes de toutes les coquilles marines connues, cela ne prouve nullement que les espèces de ces coquilles soient anéanties, mais seulement que ces espèces ont changé à la suite des temps, et qu'actuellement elles ont des formes différentes de celles qu'avoient les individus dont nous retrouvons les dépouilles fossiles" (36). Ce sont là les principes de la paléontologie évolutive. Même si l'on sait aujourd'hui qu'il y a beaucoup d'espèces anciennes qui n'ont pas laissé de descendants, le premier souci du paléontologiste est d'abord de rechercher des lignées éventuelles ; et ce n'est que lorsqu'il n'en trouve pas, qu'il déclare (provisoirement ?) que telle ou telle espèce est une espèce disparue.
Lamarck ayant ouvert une voie nouvelle d'étude du monde animal, en proposant une classification "scientifique" des Invertébrés, il n'est pas étonnant qu'une fraction importante des naturalistes se soit portée vers cette étude. La classification de Lamarck étant considérée par eux avec une sorte de "vénération", comme nous l'apprend Gérard-Paul Deshayes (37), les invertébristes ont suivi aussi sa problématique, et nous voyons ainsi ses idées anticatastrophistes faire rapidement leur chemin au cours de la première moitié du dix-neuvième siècle.
Ainsi, Lamouroux (1779-1825), suivant fidèlement les travaux de Lamarck, dont il fait un éloge marqué (38), affirme aussi l'importance de la détermination de l'analogie des espèces fossiles pour connaître la véritable histoire de la terre. "Ce n'est pas une vaine curiosité, assure-t-il, qui doit porter le naturaliste à s'occuper de l'étude de tant de débris" ; "est-il un but plus philosophique, insiste-t-il, que de déterminer quels sont, parmi ces témoins d'une organisation primitive par rapport à notre âge, ceux des polypiers, maintenant frappés de mort, dont les analogues n'existent plus, ou ceux dont les pareils travaillent encore à combler le lit de l'océan actuel". Pour lui aussi, il y a eu une continuité de la vie, et il considère comme important "de constater quels sont, parmi les polypiers fossiles de nos contrées, ceux qui cessèrent et ceux qui sont nos contemporains". Tous n'ont pas disparu en effet : "peut-être, assure-t-il, après les avoir déterminés, devinera-t-on les causes qui amenèrent la fin de certaines races" (39).
Girod de Chantrans (1750-1841) était surtout un botaniste, et c'est dans le domaine des plantes actuelles qu'il fait ses premiers pas vers la conception d'une transformation possible des espèces. Mais, comme Lamarck, il élargit le champ de ses considérations, et il en appelle aussi aux fossiles pour la confirmation de ses idées : "indépendamment, écrit-il en 1822, de ce qui se passe à présent sous nos yeux, cette conjecture semble fortifiée par les empreintes de plantes et les coquilles diluviennes dont les types se sont soustraits jusqu'ici aux recherches des naturalistes, comme aussi par les différens ossemens extraits de nos carrières, qui ne se rapportent à aucun animal connu". Et il précise sa pensée : "les faits s'accumulent donc de toutes parts pour nous apprendre que les mêmes espèces, au lieu de se maintenir dans un état d'uniformité, sont sujettes à des changemens plus ou moins considérables, selon les lieux où elles vivent" (40).
André de Férussac (1786-1836) abondait aussi dans le sens de Lamarck. S'il s'est spécialisé dans l'étude des Invertébrés, et spécialement dans celle des Mollusques, c'est qu'il est convaincu que c'est par eux que passe l'établissement de la véritable histoire de la terre et de la vie : "Par la nature de leur organisation, assure-t-il, ils peuvent mieux que ceux des autres classes nous éclairer sur les lois qui ont présidé à l'établissement de la vie sur le globe" (41). Ils présentent en effet, d'une part, cet avantage qu'ils "offrent une série non interrompue de termes comparatifs, depuis la naissance de la vie jusqu'à nous", et que "leurs dépouilles se présentent à notre observation pendant tout le cours de cette longue période, le plus souvent dans toute la rigueur des formes primitives". D'autre part, "ces médailles précieuses abondent dans toutes les couches ; elles se succèdent presque sans interruption ; leur multiplicité éloigne, dans la plupart des cas, les chances de causes accidentelles ; enfin tous les noeuds de cette vaste chaîne des monumens irrécusables qui remontent aux premiers âges de la terre, peuvent se comparer, s'étudier dans leurs rapports réciproques de formes, de localités et de dépendance, soit des phénomènes qui les ont ensevelis, soit des circonstances d'organisation et d'habitudes, des Animaux auxquels ils appartenaient" (42).
L'oeuvre de Defrance (1758-1850) s'articule aussi essentiellement sur les espèces analogues. C'est véritablement autour et à partir de ce concept qu'il a rassemblé son immense collection de fossiles. Il nous raconte lui-même comment il y a été conduit. Habitant dans la région de Caen, il avait déjà été attiré par l'étude des coquilles qu'il avait l'occasion de rencontrer dans les environs de cette ville. Ayant quitté ce pays, il avait ensuite complètement abandonné cette occupation qui lui servait, nous dit-il, de "distraction", jusqu'au jour où, en 1798 ou 1799, à la lecture des oeuvres de Buffon, il s'étonne "d'y voir que ce savant annonçoit que les coquilles fossiles que l'on trouvoit dans nos couches étoient à peu près les mêmes que celles de-nos côtes, ou avoient de très-grands rapports avec elles" (43). Très sceptique à l'égard de cette affirmation, d'après ce qu'il savait des fossiles des environs de Caen, il se mit à rassembler des coquilles fossiles à Grignon, cette fois, dans le but, avoue-t-il, "de me prouver à moi-même que Buffon s'étoit trompé" (44). Il réussit au-delà de toute attente dans cette nouvelle quête de fossiles, puisqu'il allait bientôt être connu dans le monde entier pour son soutien résolu ... aux idées de Buffon !
L'examen des nombreux fossiles qu'il a récoltés lui fait voir, rapidement et nettement, que beaucoup d'espèces anciennes ont encore effectivement aujourd'hui leurs analogues vivantes. Il en existe même dans les couches anciennes ; mais c'est surtout dans les couches les plus récentes que des analogies et même des identités peuvent être remarquées entre les espèces. Dans le tableau qu'il en dresse à la fin de son ouvrage, Defrance en relève plus de 340 (45), sur un ensemble d'environ 3600, ce qui fait la proportion de un sur dix.
De Basterot (mort en 1887) s'est aussi beaucoup intéressé aux Mollusques, dont il étudie "la distribution géographique des familles, des genres et des espèces vivantes, comparée avec la distribution actuelle des espèces fossiles", car il a la conviction que cette comparaison pourrait "nous éclairer sur plusieurs phénomènes géologiques des plus importans. On trouverait, en est-il persuadé, des rapports curieux entre ces deux distributions" (45). Les variations des espèces sont en effet comparables dans l'espace et dans le temps ; or, comme il n'y a pas, dans l'espace, de rupture de continuité pour des espèces qui varient insensiblement de proche en proche, de même on peut en conclure qu'il n'y en a pas non plus dans le temps pour des espèces analogues successives.
Et c'est bien ainsi que l'entendait de Basterot. Après avoir fait remarquer que "dans l'examen d'une longue série d'espèces prises dans diverses localités, on croit voir une sorte de série d'ondulations autour de certaines formes déterminées, mais arrangées de manière à ce que les dernières ondulations d'une forme se confondent avec les dernières ondulations d'une autre, tandis que les centres restent très-distincts" (47), il souligne aussitôt qu'il en est ainsi, par exemple, pour le genre Pleurotoma, car "toutes les prétendues espèces vivantes ne sont peut-être que des modifications d'une seule espèce réelle produites par les circonstances où les Animaux de ces coquilles se sont trouvés placés". Il illustre cette observation par un tableau où il compare une espèce vivant actuellement dans la Méditerranée (le Pleurotoma oblonga), avec des espèces fossiles trouvées en Italie, en France et en Angleterre (48). Ces espèces fossiles et actuelle ne sont, à ses yeux, que "des modifications d'une seule espèce réelle produites par les circonstances", comme il vient de le dire. Lamarck n'avait pas dit autre chose.
Il n'y avait pas que les botanistes ou les zoologistes à s'ouvrir aux idées transformistes dans le sillage de Lamarck. Un géologue comme Pierre Louis Cordier (1777-1861) - il est vrai que la géologie intégrait la paléontologie à l'époque - n'hésite pas, lui non plus, à envisager pour l'histoire des êtres vivants un déroulement transformiste, liant ainsi les deux histoires, celle de la Terre et celle de la Vie, comme l'avait fait Lamarck : "tout est en mouvement et en travail à l'extérieur", assure-t-il, et il voit là la "preuve la plus puissante de l'existence du grand principe d'instabilité universelle", principe "qui paraît dominer l'univers jusque dans ses moindres parties, qui modifie incessamment toutes choses, qui les altère ou les déplace insensiblement et sans retour, et les entraîne, à travers l'Immensité des siècles, à des fins nouvelles que l'intelligence humaine ne saurait assurément pénétrer, mais dont elle pourrait du moins s'enorgueillir d'avoir pressenti la nécessité" (49). On voit bien que l'idée de changement, et non d'immutabilité, est, à l'époque, la grande idée répandue parmi les naturalistes de toutes disciplines.
Marcel de Serres (1780-1862) se trouvait lui aussi en accord avec Lamarck et par conséquent en désaccord avec Cuvier. Pour lui aussi la marche de la nature a été continue, "le fil de ses opérations n'est pas brisé" (50), affirme-t-il, rappelant la formule célèbre de Cuvier en la niant.
Ami Boué (1794-1881), "le géologue de notre temps", selon de Blainville, "qui a le plus vu et le plus comparé dans l'étude de la géologie positive de l'Europe" (51) refusait aussi le catastrophisme de Cuvier. "Rien, absolument rien, proclame-t-il en 1830 - du vivant de Cuvier par conséquent - ne s'est présenté à nous, dans les diverses parties de l'Europe, pour justifier un cataclysme général dans la période alluviale" (52). C'est assurément le déluge biblique qu'il visait dans cette dénégation, dont on sait qu'il constituait le point de référence du catastrophisme de Cuvier. "Malgré les talens zoologiques de M. Cuvier, écrit-il encore en 1831, la pluralité des géologues sont d'accord pour regarder le déluge mosaïque, pris à la lettre, comme un des événemens géologiques les moins prouvés, et dût-il avoir eu lieu, sa date si récente ne concorderait pas avec les soi-disant traces qu'il a laissées" (53). Il se déclarait tout aussi opposé à "d'autres opinions de M. Cuvier, en particulier à son hypothèse qui admet, contradictoirement à l'ordre naturel et aux faits, des cataclysmes universels à plusieurs époques antérieures à son déluge de Noë [sic]" (54). A Cuvier et à ses disciples, on est en droit, assure-t-il, de "demander d'abord de prouver géologiquement ce principe fondamental qui n'est point encore devenu un axiome de la science" (55). Lui non plus ne craint pas de dénoncer, en ironisant comme le faisait Lamarck, "cet attirail de cataclysmes, et de fééries de créations détruites et reproduites, héritage inconsidérément accepté par des zoologistes paléontographes" (56). Ami Boué ne croyait pas davantage à l'idée "ancienne" (57) de la fixité des espèces qu'il ne croyait aux catastrophes. Dans cette question, il préférait lui aussi suivre "les Lamarck, les Geoffroy et autres grands naturalistes" (58), et s'opposer avec eux à ceux qui voulaient "circonscrire l'espèce dans un cercle duquel on dirait que nous voulons obliger la nature à ne pas sortir" (59). Par conséquent, "si des modifications du milieu ambiant, et des conditions d'action du fluide vital peuvent changer assez les parties des êtres pour établir des variétés dans nos espèces, personne ne peut assurer que ces mêmes causes n'ont pas la puissance de diviser une espèce en plusieurs", d'autant plus facilement que la nature "a des millions de siècles à sa disposition" (60).
Ce qui fit, lentement mais sûrement, évoluer la situation en faveur des thèses transformistes de Lamarck, ce fut le rapide développement quantitatif que connut la paléontologie, en particulier celle des Invertébrés dont Lamarck avait ouvert la voie. Le nombre de fossiles découverts, et donc d'espèces nouvelles enregistrées, allait en effet grandissant à un tel rythme que les savants, et même le public cultivé, ne pouvaient pas ne pas être frappés par la profusion et l'antiquité de la vie sur la terre. "Les progrès de la zoologie fossile, écrivait Boblaye en 1834, ont été si rapides dans ces dernières années que, pour ne citer qu'un seul fait, Deshayes a déterminé plus de 3000 espèces de mollusques dans les seuls dépôts tertiaires" (61). A ses yeux, c'est bien ce développement de la paléontologie qui amène progressivement le point de vue transformiste à l'emporter sur les thèses fixistes : l'hypothèse que "l'espèce a pu et a dû varier indéfiniment avec les changemens survenus dans l'état physique du globe" est, assure-t-il, un "point de vue fécond", de nature à jeter "enfin quelques lumières sur la grande question soulevée par la découverte des animaux fossiles" (62).
L'idée de la continuité de la vie, infusée par ce développement qui semblait régulier dans sa progression, renforçait ainsi la crédibilité de la doctrine de Lamarck. "Aujourd'hui", écrit encore Boblaye cette même année 1834 - rappelons que Cuvier n'est mort que deux ans plus tôt -, "Aujourd'hui que les découvertes de la géognosie ont démontré des modifications successives dans l'état physique du globe, et que de savans observateurs, tels que Deshayes, Agassiz, Ad. Brongniart, etc., ont établi des changemens correspondans et progressifs dans tous les êtres organisés ; aujourd'hui que l'étude des animaux fossiles a beaucoup étendu les limites des variations attribuées aux espèces, et fait découvrir chaque jour dans la chaîne des êtres des transitions qu'on ne soupçonnait pas, l'hypothèse hardie de Lamarck, modifiée par Geoffroy Saint-Hilaire, acquiert une probabilité qu'elle n'avait pas à l'époque où Cuvier la combattait" (63).
Le même sens du changement concomitant du monde physique et du monde organique se trouve exprimé chez un autre géologue, Amédée Burat (1809-1883), le continuateur de d'Aubuisson dans le Traité de Géognosie (64). Partisan, comme son prédécesseur, du progressionnisme dans le développement de la vie sur la terre (65), Burat considère aussi que l'explication transformiste rend bien compte de cette progression dans la perfection des êtres vivants successifs. En effet, si "la connexion entre la série intermittente des révolutions partielles et locales et la série continue de l'organisation est bien difficile à établir dans l'état actuel de la science", car il y a des lacunes nombreuses qui font qu'elle ne peut être bien constatée que dans les terrains tertiaires (68), cependant il est indéniable que les changements organiques sont corrélatifs aux grands événements survenus à la surface de la terre. Il n'est pas étonnant, du reste, "que les grandes révolutions qui peuvent avoir changé du tout au tout les conditions de température, de végétation, etc., du globe, aient amené de grandes modifications dans les individus" (ibid.). C'est progressivement, par conséquent, que l'organisation actuelle s'est mise en place : Burat souligne l'existence de cette progressivité spécialement pour la dernière période, celle du prétendu déluge, de ce qu'il appelle "la fable du déluge universel des traditions hébraïques" (67). Si Amédée Burat continue à envisager des cataclysmes, comme nous l'avons vu, il demande cependant aussi que l'on considère d'abord la possibilité d'une autre solution plus conforme à l'esprit scientifique : "Avant de chercher ainsi une cause tout-à-fait anomale à l'état actuel, il faut toujours examiner si l'action très-prolongée des causes existantes ne suffit pas, et lorsque la puissance du dépôt, et surtout la nature et la dimension des blocs, amènent l'idée d'une catastrophe, il faut regarder autour de soi et suivre le dépôt aussi loin que possible, pour voir s'il n'est pas dû à une débâcle locale" (68). Nous sommes là en pleine tradition lamarckienne.
D'autres géologues moins connus témoignaient que les mêmes idées étaient prises en considération par de nombreux naturalistes. Angelot, membre de la Société géologique de France, faisait constater à ses collègues, à une séance de janvier 1841 : "Les règnes végétal et animal, par le nombre, la variété et la succession des espèces qu'ils présentent dans les diverses couches du globe, ont donné lieu aux trois hypothèses suivantes, entre lesquelles on semble forcé de choisir, et qui partagent en effet tous ceux qui ont quelque intérêt à ce genre de questions : 1° ou il n'y a au qu'une seule époque de création et persistance des espèces primitivement créées dans leurs formes premières ; 2° ou une seule époque de création avec transmutation graduelle des espèces les unes dans les autres ; 3° ou enfin des créations successives à différentes époques" (69). Que chaque hypothèse eût ses défenseurs convaincus ou inquiets au sein de la Société, que la discussion restât donc ouverte, manifeste que la théorie transformiste était aussi soutenue que les deux autres, et recevait autant de considération qu'elles.
Jean-Charles Chenu (1808-1879) a été l'un des invertébristes Ees plus consultés de la seconde moitié du dix-neuviènne siècle, grâce à sa publication des coquilles vivantes et fossiles alors connues (70). Il rappelle la supériorité scientifique du fondateur du transformisme dans la manière dont il a su distribuer et classer l'immense sous-règne des Invertébrés. Il considère que c'est Lamarck qui a vraiment posé "les bases de la conchyliologie" (71), celui qui a fait de ce domaine de la zoologie "un corps de science" (ibid.), et qui est par conséquent "le vrai fondateur de la conchyliologie comme science" (72). Chenu n'est pas le seul, ni le premier à le penser, comme nous l'avons déjà vu, et comme il en témoigne : en 1859, constate-t-il, l'Histoire naturelle des Animaux sans vertèbres de Lamarck "est encore le guide le plus sûr et le plus universellement adopté" (73) dans l'étude des Mollusques, si bien qu'on ne peut sans danger pour le bien de la science, renoncer à son langage "avec lequel on est familiarisé depuis un demi-siècle" (74).
Les Mollusques possédaient en effet, aux yeux des naturalistes, une place primordiale dans l'étude du passé. Edouard Piette (1827-1906) observait aussi l'importance de leur développement dans les terrains géologiques successifs. "Parfois, écrit-il, ceux que nous retrouvons dans les sédiments anciens paraissent, par leur aspect et par leurs caractères, s'éloigner beaucoup des espèces que nous voyons maintenant dans les eaux". Mais, s'empresse-t-il de faire remarquer, "si l'on suit leurs transformations à travers les âges, on s'aperçoit qu'ils appartiennent à un type unique qui s'est modifié successivement, et dont chaque forme correspond ordinairement à une époque particulière" (75). Ainsi, "dans deux étages superposés, restes de deux époques qui se sont succédé, les espèces les plus voisines se relient en quelque sorte par des variétés dans les assises qui se touchent" (76). C'est dans ce fait qu'il fonde son transformisme, en invoquant expressément l'exemple du fondateur de la doctrine : "c'est sans doute, affirme-t-il, cette observation qui a conduit Lamarck à sa théorie de la transformation des espèces". Nous avons vu effectivement l'importance que Lamarck avait attachée à des faits paléontologiques de ce genre. Et, ajoute Piette, même si cette théorie "n'est pas encore prouvée", il faut cependant se garder de la rejeter, "car elle porte la marque du génie et elle s'accorde parfaitement avec les procédés de la nature qui ne fait rien de rien, et qui a pu transformer une espèce en une autre, comme elle transforme l'embryon en le faisant passer par divers états avant d'en faire un être parfait" (ibid.). On voit que tous les arguments "classiques" sont déjà en place : ceux de la zoologie, ceux de la paléontologie, et ceux de l'embryologie. Edouard Piette n'était pas sans doute un paléontologiste "professionnel" - peu l'étaient à l'époque, car les chaires étaient peu nombreuses - mais il était l'un des naturalistes les plus éminents de son temps, et l'un des collaborateurs de la célèbre Paléontologie Française, d'Alcide d'Orbigny !...
La discussion continuait toujours bien entendu, et nous voyons le parti des paléontologistes transformistes se faire entendre avec de plus en plus d'assurance, au fur et à mesure que le poids et la valeur de leurs travaux occupent le champ de la science au détriment de ceux de leurs adversaires. Pour un paléontologiste comme Théophile Ebray (1823-1879), qui a beaucoup étudié les terrains de l'Ouest de la France, les séries de fossiles qu'il établit d'une manière de plus en plus rigoureuse, apportent une évidence irréfutable de la transformation de leurs types primitifs. Il y a eu sans doute des destructions d'espèces, et même de genres, les naturalistes en deviennent de plus en plus conscients ; mais ils considèrent que l'élément le plus important fourni par les fossiles est la continuité de la vie : "si la transformation du milieu vital peut être supposée assez brusque pour détruire des espèces et des genres, on peut la concevoir aussi assez insensible pour faire varier à la longue leur organisation intérieure et leur forme extérieure", car la similitude des espèces de deux étages successifs montre "qu'il y a eu souvent plutôt modification que destruction" (77).
On voit ainsi combien, dans les années 1855, du moins en France, à la suite de Lamarck, les travaux des paléontologistes ont fait pénétrer et admettre les idées continuistes anticatastrophistes et la doctrine transformiste qui la couronne. "J'ai déjà indiqué, souligne Ebray, que le naturaliste se mettait plus en harmonie avec les grandes lois de la nature, en admettant que les êtres ne succombent pas périodiquement de manière absolue..." (Ibid.). Dans cette perspective, la similitude des formes successives entraîne la nécessité de concevoir une filiation entre elles, car "les espèces les plus semblables sont presque toujours celles qui, géologiquement, sont les plus rapprochées" (78). En comparant, par exempte, des formes successives d'un même type, comme l'Ammonites anceps et l'Ammonites pustulatus, il est possible d'établir un passage entre elles (79), c'est-à-dire la transformation d'une des espèces dans l'autre. D'autres espèces présentent encore les mêmes caractères de ressemblance et de succession. Par exemple "quoi de plus semblable, en effet, que l'Ammonites Humphresianus de l'oolite inférieure et l'Ammonites linguiferus de la grande oolite ? l'Hecticus de la grande oolite et le Lunula de l'oxfordien inférieur ? le Discus de l'oolite inférieure et le Subdiscus de la grande oolite ?" (80). A partir des nombreux faits fournis par les fossiles, Ebray se trouve lus aussi fondé à généraliser ses conclusions, et à affirmer que les êtres se transforment les uns dans les autres au cours des temps et sous l'action des milieux.
Comme Lamarck l'avait affirmé autrefois, il considère lui aussi en effet que les modifications du milieu sont les responsables des changements des espèces. Les "affinités paléontologiques" des milieux géologiques successifs en sont une preuve visible : "la similitude des espèces voisines sous le rapport du gisement, me conduira, comme toujours, à des lois modificatrices d'espèces que je considère comme primitives, et que je vois se transformer, par suite probablement des changements qui s'opèrent dans le milieu vital" (81). Ainsi s'explique que "l'Ammonites militianus peut en effet être considéré comme le dérivé de l'A. angulicostatus et crassicostatus, tandis que l'A. splendens des couches supérieures se rapproche sensiblement, parla position de ses tubercules et par tous ses autres caractères, de l'A. varians, surtout de la variété lisse et aplatie" (ibid.).
Il n'est pas étonnant que grâce à ces travaux sur les fossiles, continuateurs de ceux de Lamarck, l'histoire du dix-neuvième siècle ne soit jalonnée, dès le temps même de Lamarck, et continuellement après lui, de proclamations transformistes.
"Nous pensons, avec vraisemblance, assurait Virey dès 1817, que la nature a jeté sur la terre un germe simple et unique des végétaux et un germe des animaux, s'il est vrai, toutefois, que l'un ne soit pas une modification de l'autre. Ainsi, un seul germe, en se développant successivement, en créant un grand nombre d'individus semblables, les aura vus se modifier et se compliquer peu à peu dans le long espace des siècles, et par l'influence des climats, des températures, etc., en espèces plus ou moins voisines ; celles-ci se seront encore modifiées par la suite des âges, à mesure qu'elles auront éprouvé les longues et profondes influences de tout ce qui les entoure, et qu'elles se seront mélangées entre elles" (82).
"Il n'y a point d'espèces et de genres absolument invariables dans la nature, affirme-t-il encore ; ce que nous regardons aujourd'hui comme tel, ne peut être constant pour tous les âges du monde ; il n'existe partout que des modifications plus ou moins constantes" (83)
Etienne Geoffroy Saint-Hilaire assurait à son tour, en 1828, que "les animaux perdus sont, par voie ininterrompue de générations et de modifications successives, les ancêtres des animaux du monde actuel" (84).
Frédéric Gérard préconise, dans les années 1840, qu'au lieu de "supposer autant de créations nouvelles qu'il y a eu d'apparitions de systèmes différents d'êtres organisés, il serait plus exact d'admettre que les formes animales dont le plan primitif de structure paraît évidemment unique, tel que l'a si heureusement démontré M. Geoffroy Saint-Hilaire, ont subi des modifications successives par suite des changements survenus dans leurs conditions d'existence et qui mettaient sans cesse d'accord les formes organisées et les états divers par lesquelles passait notre planète ?" (85).
Aussi nous ne sommes pas étonnés de le voir parler de "la théorie de l'évolution des formes organiques" (86), du "mouvement évolutif" (87), de la "loi d'évolution de l'évolution des êtres organisés" (89), de "périodes évolutives", et même soutenir proprement, en 1847 !, "la doctrine de l'évolution !..." (90).
D'Omalius d'Halloy, le fondateur de la Géologie belge, assure, de son côté, en 1846 :"Les lois de la nature sont toujours les plus simples possibles, et... il est bien plus simple de supposer que les espèces contiennent en elles-mêmes l'aptitude à éprouver certaines modifications lorsqu'elles sont soumises à l'action de certaines causes, que de supposer que pour amener un semblable résultat, la nature a eu recours à des moyens aussi compliqués et aussi extraordinaires que des destructions complètes des organismes et de nouvelles créations" (91).
Isidore Geoffroy Saint-Hilaire enseigne à ses élèves dans les années 1850 que, à considérer les différentes hypothèses, dont celles de Cuvier et de Lamarck, "celle qui dérive de la théorie de la variabilité est incontestablement la plus simple et la moins conjecturale" (92), et leur recommande de faire la "comparaison des espèces actuelles avec celles de l'époque antérieure, ou plus généralement des espèces de deux époques consécutives, en vue d'établir leurs rapports de filiation" (93).
Camille Dareste, enfin, en 1859, à la veille de la parution de l'Origine des espèces de Darwin, constate que l'on voit "les hommes les plus éminents entrer dans la voie ouverte par Lamarck, et faire de l'idée de la variabilité limitée des espèces le point de départ de leurs théories scientifiques" (94).
La transformation des êtres vivants demeure ainsi constamment, comme on le voit, une des considérations les plus présentes dans les écrits des naturalistes français de la première moitié du dix-neuvième siècle. Elle a continué depuis à faire son chemin dans les esprits, grâce en particulier à l'apport de Darwin.
1) Discours préliminaire pour le cours de l'an six, in : Vachon et al., 1972, Inédits de Lamarck, p. 163 ; pour la date de 1797, cf. ibid., p. 153, et Mém. Phys. Hist. nat., an V (1797). Tableaux p. 314 (pages doubles) ; pour la date de 1794, cf. Philosophie zoologique, 1809,1, p. 118.
2) Discours d'ouverture du cours de l'an VIII (1800), in : Discours d'ouverture des Cours de zoologie, édit. Giard séparée, 1907, p. 23-24.
3) Quelques considérations nécessaires à l'avancement de la zoologie (1808-1810), in : Vachon et al., 1972, Inédits de Lamarck, p. 222.
4) Webster Th., On the Freshwater Formations in the Isle of Wight..., Trans. Geol. Soc., London, 2, 1814, p. 203.
5) Quelques considérations nécessaires à l'avancement de la zoologie (1808-1810), in : Vachon et al., 1972, Inédits de Lamarck, p. 222.
6) Ibid., p. 224 ; souligné par nous.
7) Ibid., p. 225.
8) Histoire naturelle des Animaux sans vertèbres, 1,1815, Introduction, p. 452.
9) Ibid., p. 452 à 454 ; "ordre de formation" souligné dans le texte.
10) Système analytique des connaissances positives de l'Homme, 1820, p. 34.
11) L'Origine des Espèces au moyen de la sélection naturelle, ou lutte pour l'existence dans la Nature, traduit sur l'édition anglaise définitive par Ed. Barbier, Paris, 1896, p. 495 et 499.
12) Discours d'ouverture du cours de 1806 in : Discours d'ouverture des Cours de zoologie, édit. Giard séparée, 1907, p. 120 (souligné dans le texte).
13) De Blainville avait proposé plusieurs noms dans le Journal de Physique : "Palaeozoologie", 86, 1818, p. 71 ; "Palaeosomiologie", 88, 1819, p. 94 et 1820, p. 80 ; et enfin "Palaeontologie", 94, 1822, p. LIV, qui est resté. Un point d'histoire à rétablir : ce n'est donc pas en 1834, comme on le rencontre encore chez certains auteurs, que le mot aurait été introduit par le naturaliste russe d'origine allemande Fischer von Waldheim, de l'Université de Moscou.
14) Rapport historique sur les progrès des sciences naturelles..., (1810, p. 193), nouvelle édition, Belin, 1989, p. 162.
15) Mémoires sur les Fossiles des environs de Paris, comprenant la détermination des espèces qui appartiennent aux animaux marins sans vertèbres dont la plupart sont figurés dans la collection des vélins du Muséum, et Suite des Mémoires..., Ann. Mus. Hist. nat., t. 1 à t. 8,1802-1806.
16) Système des Animaux sans vertèbres, 1801, p. 406.
17) Hydrogéologie, 1802, p. 55 ; cf. déjà Système des Animaux sans vertèbres, 1801, p. 403.
18) Article "Conchyliologie", Nouv. Dict. Hist. nat., 1, 1817, p. 415.
19) Ibid., p. 417.
20) Article "Coquillage", ibid., 7,1817, p. 553.
21) Considérations sur quelques faits applicables à la théorie du globe, observés par M. Péron dans son voyage aux Terres australes, et sur quelques questions géologiques qui naissent de la connoissance de ces faits, Ann. Mus. Hist. nat., 6, 1805, p. 29-30.
22) Ibid., p. 46.
23) Ibid., p. 47.
24) Suite des Mémoires sur les fossiles des environs de Paris, Ann. Mus. Hist. nat., 1, 1802, p. 391.
25) Ibid., 2, 1803, p. 225.
26) Ibid., 3, 1804, p. 351.
27) Ibid., 4, 1805, p. 216.
28) Ibid., 4, 1804, p. 48.
29) Ibid., p. 107.
30) Mémoires sur les fossiles..., Ibid., 1, 1802, p. 477.
31) Suite des Mémoires..., Ibid., S, 1805, p. 220.
32) Système des Animaux sans vertèbres, 1801, p. 407.
33) Ibid., p. 407-408.
34) Article Conchyliologie, Nouveau Dictionnaire d'Histoire naturelle, 7, 1817, p. 416-417.
35) Philosophie zoologique, 1809,1, p. 266.
36) Système des Animaux sans vertèbres, 1801, p. 408-409.
37) Gérard-Paul Deshayes, Lettres à l'éditeur du Zeitschrift fur Malakozoologie, année 1845, p. 45 : "Lorsqu'en 1835 j'entrepris la nouvelle édition des animaux sans vertèbres de Lamarck, les zoologistes en France étaient encore partagés en deux camps : les uns avaient adopté la méthode et la nomenclature de Cuvier ; les autres, et plus particulièrement les Conchyliologistes, avaient adopté sans restriction la méthode de Lamarck. Cette méthode, comme celle de Linné, inspirait une sorte de vénération, et peu de personnes osaient y apporter des modifications...".
38) Lamouroux, Histoire des Polypes coralligènes flexibles, 1816, p. VIII et XXXI.
39) "Sur les Polypiers fossiles, trouvés dans les environs de Caen", Ann. génér. Sci. phys., 1, 1819, p. 43.
40) Doutes proposés aux naturalistes sur l'instabilité des formes qui caractérisent les corps que nous distinguons en genres et en espèces, Mém. Soc. linn. Paris, 1,1822, p. 140 et 144.
41) Géographie sous les rapports de l'Histoire naturelle, section Mollusques et Conchifères, Dict. class. Hist. nat, 7,1825, p. 254.
42) Ibid., p. 255.
43) Tableau des Corps organisés fossiles, 1824, p. VII.
44) Ibid., p. VIII.
45) Ibid., p. 99 à 126.
46) Description géologique du Bassin tertiaire du Sud-Ouest de la France, Mém. Soc. Hist. nat. Paris, 2, 1825, p. 4-5.
47) Ibid., p. 7.
48) ibid., p. 7-8 ; cf. de même pour la Terebra, p. 54.
49) Cordier : Essai sur la température de l'intérieur de la Terre, Mém. Mus. Hist. nat., 15, 1827, p. 243-244 (cit. dans Ellenberger : Louis Cordier, initiateur de la pétrographie moderne, Trav. Comité fr. Hist. Géol., n°20, 1979, p. 11, avec le commentaire suivant : "ces dernières paroles inspirées ne préfigurent-elles pas la philosophie scientifique moderne tout entière ?").
50) Observations sur la Pétrification des coquilles dans la Méditerranée, Mémoire présenté à l'Académie des Sciences le 22 juin 1846, Extrait de la Revue scientifique et industrielle du Dr Quesnevitle, (2), 14, 1847, p. 395. Cuvier avait écrit : "le fil des opérations est rompu", Discours sur les Révolutions de la surface du Globe, 1825, p. 27.
51) De Blainville, Ostéographie..., 1839-1864, t. IV, Palaeotherium, p. 184.
52) Correspondance et Variétés, J. Géol., 2, 1830, p. 206.
53) Bulletin des Se. nat, et de Géol., 26,1831, p. 2-3.
54) Compte rendu de la traduction allemande, par Nöggerath, des Révolutions de la surface du Globe, de Cuvier, Bull. Sci. nat. Géol., 24,1831, p. 130.
55) Résumé des progrès de la Géologie..., Bull. Soc. géol. Fr., (1), 2, 1831-1832, p. 197.
56) Résumé des progrès des sciences géologiques pendant l'année 1833, Ibid., (1), S, 1834, p. 118.
57) Ibid., p. 113.
58) Ibid., p. 114.
59) Ibid., p. 115 ; allusion à la définition de l'espèce proposée par Deshayes.
60) Ibid., p. 117.
61) Article "Animaux fossiles", Dictionnaire pittoresque d'Histoire Naturelle et des phénomènes de la Nature, 1, 1834, p. 192.
62) Ibid., p. 192.
63) Ibid., p. 192 ; les références de Boblaye en faveur de la doctrine de Lamarck et d'Etienne Geoffroy Saint-Hilaire sont significatives : Deshayes, Agassiz et Adolphe Brongniart sont fixistes ! Mais leurs travaux paléontologiques contribuent irrésistiblement au succès du Transformisme !
64) D'Aubuisson avait écrit le tome 1 ; il avait désigné Amédée Burat pour terminer l'ouvrage : les tomes 2 et 3 sont entièrement de ce dernier.
65) A. Burat, Traité de Géognosie, 2, 1834, p. 99 : "Rien n'est plus intéressant que les recherches sur la flore des temps anciens ; que cet examen des progrès de la vie, des perfectionnements successifs des animaux", cf. encore p. 422, 525-526.
66) Traité de Géognosie, 2,1834, p. 529.
67) Ibid., p. 603.
68) Ibid., p. 603, n.1.
69) Bull. Soc. géol. Fr., (1), 12, 1840-1841, p. 110-111.
70) Illustrations conchyliologiques ou Description et Figures de toutes les coquilles connues vivantes et fossiles, classées suivant le système de Lamarck modifié d'après les progrès de la Science..., 4 vol., in 4°, Paris, 1843-1850.
71) Manuel de Conchyliologie et de Paléontologie conchyiiologique, 1, 1859, p. ÎV.
72) Ibid., p. III.
73) Ibid., p. IV.
74) Ibid., p. V.
75) Description des Cerithium, enfouis dans les dépôts bathoniens de l'Aisne et des Ardennes, Buii. Soc. géol. Fr., (2), 14, 1856-1857, p. 544.
76) Notice sur les grès d'Aiglemont et de Rimogne, ibid., (2), 13,1855-1856, p. 197.
77) Etude comparative des Ammonites anceps et pustulatus, Bull. Soc. géol., Fr., (2), 13, 1855-1856, p. 115.
78) Ibid., p. 116.
79) Ibid., p. 115.
80) Ibid., p. 115-116.
81) Renseignements sur les grès ferrugineux de la Puisaye, Bull. Soc. géol. Fr., (2), 16, 1858-1859, p. 888.
82) Article "Corps organisés", Nouv. Dict. Hist. nat, 8, 1817, p. 130-131.
83) Article "Nature", Ibid., 22,1818, p. 311.
84) "Rapport... sur un Mémoire de M. Roulin...", Mém. Mus. Hist. nat, 17,1828, p. 208.
85) Article "Dégénérescence", Dict. univ. Hist. nat., 4,1844, p. 649.
86) Article "Géographie zoologique", Ibid., 1845, p. 112 ; cf. encore p. 119.
87) Article "Espèce", Ibid., 5 1844, p. 434.
88) Ibid., p. 432
89) Article "Géographie zoologique", Ibid., S, 1845, p. 112.
90)De la finalité : inconciliabilité de cette doctrine avec la philosophie naturelle, Rev. scient, industr., (2), 13, 1847, p. 372.
91) Note sur la succession des êtres vivants, Bull. Soc. géol. Fr., (2), 3,1845-1846, p. 496.
92) Histoire Naturelle générale des Règnes organiques, 2, 1859, p. 435.
93) Ibid., p. 437
94) Biographie de Lamarck, Nouvelle Biographie générale, de Hoefer, 29, 1859, p. 62.