COMITÉ FRANÇAIS D'HISTOIRE DE LA GÉOLOGIE (COFRHIGEO) (séance du 28 novembre 1990)
Même tardivement, il est nécessaire de signaler cet ouvrage de référence, peu connu malgré ses mérites en raison d'un mode de publication qui ne le met pas en valeur. Il fut sommairement édité, à tirage réduit, par un libraire spécialisé en spéléologie, sous forme ronéotée, avec une dactylographie d'amateur et un cadrage approximatif des pages.
Il n'en reste pas moins que ce pavé de plus de 500 pages doit être considéré comme un document indispensable par l'historien des recherches karstiques.
L'auteur, diplomate me semble-t-il, a fréquenté les grandes bibliothèques anglaises et américaines, celles de Hong-Kong et de Singapour. Il a également profité de ses échanges avec plus de 30 correspondants. Sa documentation, de première main, est impressionnante.
L'ouvrage est divisé en cinq parties concernant :
II. - L'hydrologie karstique, avec la découverte des rivières souterraines, le problème de l'origine des eaux souterraines et le développement du concept de "water-table" ;
III. - La spéléogenèse, détaillant les différents facteurs mis en jeu (ils avaient tous été définis au XIXème siècle, avant que la controverse phréatique/vadose ne se développe après 1890) ;
IV. - La genèse des concrétions, problème très ancien, dont l'étude était liée au niveau des connaissances physico-chimiques de l'époque (il faut également tenir compte de l'usage médical ou magique qui en fut fait) ;
V. - L'aspect sociologique, qu'il s'agisse de la préhistoire, du développement de la spéléologie scientifique en fonction de l'évolution des sciences et techniques ou de l'organisation de la spéléologie en sociétés savantes et sur le plan international.
Ces 395 pages sont complétées par 18 annexes correspondant soit à la transcription de travaux-clefs anciens, soit à des tableaux récapitulatifs (par exemple, les campagnes de Edouard-Alfred Martel de 1888 à 1913, les collections de concrétions, les sociétés spéléologiques, la correspondance des grandes dates de la spéléologie scientifique avec les événements historiques et scientifiques majeurs), soit à de précieux organigrammes présentant les relations entre les différentes théories concernant l'origine des eaux souterraines, le concept de "water-table" ou les théories spéléogénétiques. Ce dernier tableau, particulièrement intéressant, rassemble 74 publications classées sous deux rubriques catastrophistes et uniformitaristes - regroupant respectivement 13 et 9 théories.
Ajoutons que cet historique est, de par la période considérée, limité à la spéléologie des pays calcaires. Les grandes cavités dans le grès ou en région volcanique ont été découvertes dans la deuxième moitié du XXème siècle.
Ce travail d'archiviste correspond à une vie passée dans les bibliothèques à rechercher et analyser les documents anciens. Le résultat est proche de l'exhaustivité.
Nous émettrons deux réserves. D'abord, il est plus que regrettable qu'un document de cette valeur soit victime d'une aussi mauvaise édition. Il rassemble plus de 80 figures à partir des documents d'époque qui méritaient une présentation de qualité. Certains albums récents, luxueux, sont loin de présenter cet intérêt.
Ensuite - il s'agit d'une discussion plus que d'une critique -l'auteur n'est pas un chercheur scientifique. Il présente certaines théories anciennes en se référant aux données actuelles, cela en ignorant le flou des idées émises à une époque où la complexité du phénomène karstique était mal perçue.