Ernest-Jean-Étienne HUYOT (1831-1883)

Promotion 1849 de Polytechnique (entré classé 5ème et sorti classé 2ème sur 99 elèves). Ecole des Mines de Paris. Corps des mines.

Fils de Jean Baptiste Adolphe HUYOT, architecte, et de Emilie Caroline Estelle HUYOT.


Publié dans le LIVRE DU CENTENAIRE (Ecole Polytechnique), 1897, Gauthier-Villars et fils, TOME III

Né à Brest le 5 février 1831, mort à Paris le 30 avril 1883. A sa sortie de l'École des Mines, il y était resté attaché pour le service du bureau d'essais et des cours préparatoires. Lors de la constitution, en 1855, de la Société I. R.P. autrichienne des chemins de fer de l'Etat, il fut adjoint à Dubocq dans la direction des mines, usines et domaines de cette vaste Société. En 1859, il rentra en France au service de la Compagnie des chemins de fer du Midi, où il devait rester jusqu'à sa mort, successivement adjoint au directeur (1859-1863), sous-directeur (1863-1872) et directeur depuis le 1er janvier 1872.


DISCOURS PRONONCÉ AUX FUNÉRAILLES DE M. HUYOT
INGÉNIEUR DES MINES, DIRECTEUR DE LA COMPAGNIE DES CHEMINS DE FER DU MIDI
le 2 mai 1883, par M. LÉON AUCOC, membre de l'Institut, vice-président du conseil d'administration de la compagnie du Midi.

Publié dans Annales des Mines, 8ème série, tome III, 1883

Messieurs, j'apporte sur cette tombe l'expression des profonds regrets que la mort prématurée de M. Huyot inspire au conseil d'administration de la Compagnie des chemins de fer du Midi.

Notre honorable président a craint que son émotion ne lui permît pas de remplir ce douloureux devoir. Je viens dire, à sa place, combien M. Huyot était digne de la haute situation qu'il occupait, quels services il a rendu et combien sa perte est sensible pour la Compagnie.

C'est depuis 1879 seulement que j'ai pu, dans une collaboration quotidienne et intime, apprécier tous les mérites de M. Huyot. Mais bien avant cette époque, dans les nombreuses occasions où les fonctions, que je remplissais alors au Conseil d'État et au Ministère des travaux publics, m'avaient appelé à négocier avec les directeurs des Compagnies de chemin de fer, j'avais remarqué son intelligence si pénétrante, son coup d'oeil si prompt et si sûr et sa parole si nette et si sobre, fidèle image des qualités de son esprit et de son caractère.

Il était admirablement préparé à la grande tâche dans laquelle il a passé les dix dernières années de cette vie, trop courte, hélas! sa digne compagne et pour ses enfants, trop courte aussi pour nous.

Sorti le premier, en 1853, de cette école célèbre où se recrute le corps d'élite des ingénieurs des mines, il avait, après une mission en Asie Mineure, été attaché à la Société autrichienne des chemins de fer de l'État. Là, malgré sa jeunesse, il avait été chargé d'un service important ; il avait pris une part considérable à l'organisation de l'exploitation des mines de houille, des mines de fer et des établissements métallurgiques de cette Société dans le Banat de Hongrie. Il était, en outre, mêlé à l'étude de toutes les questions relatives à l'exploitation des chemins de fer. Lorsque, après cinq années passées dans ces fonctions si multiples, il désira, en 1859, revenir en France, l'éminent directeur général de cette Compagnie, M. Maniel, qui était un excellent chef et un excellent juge, lui rendait ce témoignage qu'il avait montré de brillantes qualités d'ingénieur et d'administrateur.

Il entra au service de la Compagnie des chemins de fer du Midi, comme ingénieur adjoint au directeur. En 1867, il était nommé sous-directeur. En 1872, il remplaçait, à la direction, l'honorable M. Surell, qu'il avait secondé avec tant de zèle depuis quatorze ans.

Ce n'est pas ici le lieu de longs discours. Je ne puis que signaler, en quelques mots, l'activité incessante, l'instruction variée et toujours prête, la sûreté de jugement dont M. Huyot a fait preuve dans ses laborieuses fonctions. II avait, dès le début de sa carrière, contracté l'habitude de voir les choses de haut, sans négliger l'étude des détails. La construction des chemins de fer, la fabrication des rails et celle des machines, l'exploitation technique, l'établissement des tarifs, les conventions financières avec l'État, plusieurs fois remaniées par ses soins, tout lui était familier. Aucun des points du service n'échappait à sa vigilante attention et les réformes utiles trouvaient en lui un défenseur résolu.

Dirai-je quelle justice et quelle sollicitude il apportait dans les questions intéressant le personnel, avec quel soi il pesait les mérites pour les faire récompenser, avec quelle bienveillance il cherchait à améliorer la condition des employés et des ouvriers de la Compagnie ? C'est à son initiative que sont dues notamment plusieurs modifications importantes des règlements de la caisse des retraites et de la caisse de prévoyance.

Tel était l'éminent directeur qui nous est enlevé.

Un événement des plus douloureux , dont plusieurs d'entre nous savent par expérience toute l'amertume, la perte d'un fils en qui il était fier de voir revivre son intelligence et son ardeur au travail, avait, au commencement de l'année 1881, brisé le coeur de M. Huyot. Sa santé était, depuis cette époque, profondément altérée. En vain, il luttait contre le mal; il avait senti, l'année dernière, la nécessité de prendre un repos de quelques mois. A peine âgé de cinquante-deux ans, il n'abandonnait pas l'espoir de reprendre ses fonctions. Cet espoir, qu'il m'exprimait encore jeudi dernier, ne devait pas se réaliser. La mort est venue brusquement. Mais, si prompte qu'elle ait été, elle ne l'a pas surpris ; les consolations de la foi chrétienne avaient fortifié son âme contre la douleur; elles ont adouci sa fin.

Adieu, cher directeur; nous ne vous oublierons pas. Vous ne laissez que de bons souvenirs et de bons exemples. On égalera difficilement votre remarquable intelligence; mais tout le monde peut et doit imiter votre inaltérable dévouement au devoir.