TRAVAUX
DU
COMITÉ FRANÇAIS D'HISTOIRE DE LA GÉOLOGIE
- Troisième série -
T.XVI (2002)
Jean GAUDANT
Analyse d'ouvrage
Pierre Bordet
Volcans et autres montagnes.

COMITÉ FRANÇAIS D'HISTOIRE DE LA GÉOLOGIE (COFRHIGEO) (séance du 11 décembre 2002)

Edimontagne-IGAL, Le Bouchet, 74310 Servoz, 2001, 181 p., nombreuses illustrations. (28 Euros + port : 2 Euros).

Ingénieur géologue (Nancy, 1939), Pierre Bordet fut ordonné prêtre six ans plus tard. Il prit part avec Albert F. de Lapparent à la création en 1959 de l'Institut géologique Albert de Lapparent (IGAL). Décédé en 1996, il faisait partie de la dernière cohorte des géologues explorateurs. C'est ainsi qu'il prit part, dans les années 1950, à l'étude du volcanisme du Hoggar et aux premières missions des alpinistes français dans l'Himalaya puis, à partir de 1965, à l'étude géologique de l'Afghanistan. Volcans et autres montagnes est donc un livre de souvenirs qui relate plus particulièrement les explorations géologiques réalisées par son auteur au Hoggar (1950-1952) et ses missions dans l'Himalaya (1954-1957).

Tout d'abord, Pierre Bordet eut le privilège de séjourner au Hoggar à une époque où le mode de vie traditionnel des Touaregs n'avait pas encore été profondément perturbé par la civilisation occidentale. Et c'est à dos de chameau qu'il visita les volcans de l'Atakor et de l'Assekrem en 1950 et 1951 afin de préparer l'excursion au Hoggar organisée dans le cadre du Congrès géologique international d'Alger (1952). Pierre Bordet revint au Hoggar à la fin des années 1950. Il fut consterné de constater qu'à cette époque, « la désintégration de la culture touareg s'accentua rapidement ». Ainsi, lorsqu'il revit pour la dernière fois celui qui lui avait servi de cuisinier au début de la décennie, « il n'avait plus de cheich, parlait français, portait des lunettes noires, un chandail et des chaussures » et était devenu salarié : le progrès avait fait son oeuvre !

A partir de 1954, grâce à l'appui de Paul Fallot, Pierre Bordet eut la chance de participer aux missions des alpinistes français dans l'Himalaya. L'objectif était d'aller vérifier et compléter les observations d'Augustin Lombard qui avait accompagné, trois ans plus tôt, une expédition helvétique dans cette région. Il s'agissait d'y pratiquer une géologie véritablement sportive puisque Pierre Bordet accompagna l'alpiniste Jean Franco, qui dirigeait l'expédition au Makalu, jusqu'au camp III établi à 6 300 m d'altitude. A l'automne suivant, Pierre Bordet était de retour dans le massif du Makalu. C'est alors qu'il croisa un jour la piste du yeti dont témoignent d'éloquentes photographies en couleurs d'empreintes de pas dans la neige. Sur un thème aussi controversé, ce témoignage d'un observateur au-dessus de tout soupçon est capital, même si, au fond de nous-mêmes, nous aimerions qu'il fût conforté par la découverte de restes palpables qui permettraient de mieux cerner la personnalité de cette créature mythique. Pierre Bordet retourna encore dans l'Himalaya en 1956 et 1957 puis, plus épisodiquement jusqu'en 1972 (il avait alors 58 ans !).

En conclusion, voilà un témoignage fort documenté qui se lit comme un roman d'aventures et qui, de surcroît, est illustré de nombreuses photographies en couleurs d'excellente qualité qui restituent au lecteur à la fois les paysages et les hommes qui y vivent. Un livre qui évoque certains aspects de la vie de ces géologues dont le premier confident était encore leur marteau : une géologie qu'on qualifiera bientôt de présatellitaire !