Pierre DUHARCOURT (1941-2012)

Né le 11 juin 1941. Décédé le 6 août 2012.

Ancien élève de l'Ecole des mines de Nancy (promotion 1961). Ingénieur civil des mines.


Publié dans MINES Revue des Ingénieurs, Janvier/février 2013 N° 465.

Hommage, par Yann Houdent (N 61)

Lorsque j'ai reçu le message de son épouse «Pierre est mort cette nuit (5 août) brutalement» en Corse où ils étaient en vacances, nous avons été frappés de stupeur car je l'avais rencontré plusieurs fois au cours de la dernière année et rien ne laissait présager un départ aussi rapide.

Pierre est un ingénieur des Mines atypique puisqu'il se définissait lui-même comme un «universitaire engagé». Il a parfaitement décrit son cheminement dans le résumé qu'il avait préparé en octobre dernier pour le 50eme anniversaire de la promotion. Dès son entrée, il a cherché, en dehors du cursus de l'École, d'autres centres d'intérêts : «Intéressé par les affaires publiques, je voulais comprendre la réalité économique et sociale». Il s'est inscrit en parallèle à la faculté de Droit et a obtenu sa licence de Sciences Économiques. Sous la direction de J. Houssiaux il a ensuite travaillé à un DES, puis à une thèse en économie (1969) et réussi le concours d'Agrégation du supérieur (1970).

Ce n'est qu'après avoir accompli ce cursus, dit-il, que «J'ai pu prendre ma liberté de penser et commencer de mettre en adéquation ma réflexion économique et mes opinions citoyennes».

Nommé professeur des Universités à 29 ans (donc très jeune pour ce grade) en janvier 1970, il passe une année en Afrique comme Directeur du département d'Économie à Yaoundé.

«J'ai «profité» de cette année passée en Afrique pour travailler les oeuvres complètes de Marx, et assez rapidement à mon retour en France, j'ai mené de front des activités d'universitaire engagé (contre la «pensée unique» et pour un apprentissage de la réflexion critique) et de militant politique ou syndical. Une dimension importante de ma vie professionnelle a été ainsi mon engagement et ma prise de responsabilité syndicale : notamment comme secrétaire général du SNESUP (alors syndicat de la FEN) pendant six ans (1977-83) et plus tard comme co-secrétaire général de la FSU (2000-2001)»

Pierre a été Conseiller au Cabinet du Ministre de la Fonction Publique, Anicet Le Pors, et a siégé pendant 11 ans au Conseil Économique et Social comme représentant de la FSU.

Ses activités universitaires l'ont conduit à exercer les fonctions de Doyen de faculté et/ou de Directeur de Laboratoire à Reims d'abord puis à Marne-la-Vallée.

Il avait pris sa retraite à 65 ans mais avait continué son activité au Conseil Économique et Social jusqu'en 2010, où il a apprécié «le respect de l'opinion de l'autre et le goût du débat ouvert» et où sa propre ouverture d'esprit et ses rapports sur la conjoncture économique étaient hautement appréciés.

Une partie importante de sa vie a donc été consacrée au syndicalisme, domaine dans lequel il mit ses qualités au service de tous. Conduire une lutte syndicale est chose assez particulière: «Il faut convaincre des collègues pas toujours enclins aux actions collectives et en même temps apparaître comme un négociateur crédible auprès des responsables politiques» : donc prendre des risques. C'est ce qu'il a fait en initiant de nombreuses actions parmi lesquelles deux grèves administratives dont l'une a «permis d'obtenir de haute lutte la titularisation des assistants non titulaires».

Il n'obéissait qu'à sa propre rectitude intellectuelle, à ses convictions et à son désir d'atteindre ses objectifs. Il était capable de présenter son analyse avec conviction, mais avait la capacité rare d'être attentif aux objections des autres et de savoir les intégrer dans son propre raisonnement. Il avait, qualité peu répandue, le courage de dire ce qu'il pensait, le courage de s'opposer aux détenteurs de pouvoir mais aussi le courage de se démarquer de ses collègues s'il le jugeait nécessaire.

Ses collègues syndicalistes ont été unanimes à mettre en avant, derrière une apparente rugosité, la grande délicatesse et la sensibilité de Pierre.

Et quand on le côtoyait tant soit peu dans son milieu familial, on apercevait très vite toute la tendresse qu'il portait à ses proches et à ses amis.

Beaucoup de ses amis et collègues lui ont rendu hommage à Noisy Le Grand le 10 août 2012, en dépit de la période de vacances.

À son épouse Nicole, ses quatre filles et ses petits-enfants, nous adressons nos plus sincères condoléances.

Yann Houdent (N61)

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