Jules de BOISSIEU (1853-1924)


de Boissieu en 1878, élève de l'Ecole des Mines de Paris
(C) Photo collections ENSMP

Fils de Joseph Damase Henri de BOISSIEU, négociant (famille anoblie en 1784), et de Françoise Rosalie BOUVARD. Né à Lyon, le 25 juin 1853.

Ancien élève de l'Ecole polytechnique (promotion 1873 ; entré classé 61 et sorti classé 35 sur 226 élèves) et de l'Ecole des mines de Paris (promotion 1876 : admis comme élève externe le 23/10/1875 classé 5 sur 19 admis, il est breveté le 13/6/1878 classé 1 sur 18 élèves). Ingénieur civil des mines.


Bulletin de l'Association des anciens élèves de l'Ecole des mines de Paris, octobre-décembre 1924 :

Le Groupement du Centre vient de perdre son vice-président, M. J. de Boissieu, et sa disparition a été très vivement ressentie de tous les camarades du groupement qui avaient apprécié sa haute valeur et son extrême obligeance.

J. de Boissieu, qui occupait à Lyon une situation remarquée, descendait d'une vieille famille lyonnaise qui lui avait enseigné les qualités propres à la Cité ; le travail, l'honneur et la charité. Il s'était d'ailleurs trouvé, à l'âge où l'esprit commence à mûrir, dans une période d'épreuves pour notre pays, puisqu'il achevait ses études au Lycée de Lyon pendant la guerre de 1870. Les leçons de ces douloureux moments furent parfaitement entendues ; l'exemple de sa vie entière, consacré au travail jusqu'à ses derniers moments, en est l'illustration la plus parfaite.

Il fut lauréat au concours général des Lycées de France en 1870, entra à l'Ecole Polytechnique d'où il passa en 1876 à l'Ecole Nationale Supérieure des Mines en qualité d'élève externe. Il sortit major [des élèves externes] de l'Ecole des Mines en 1879.

Le Directeur de l'Ecole d'alors, M. Lang, qui l'avait remarqué, le fit nommer Ingénieur aux Aciéries de Baird à Alexandrowsky (Russie) où il commença sa carrière [La Notice semble incomplète dans cette phrase. On peut supposer qu'il est fait allusion non pas à l'Ecole des mines, mais à l'Ecole de la Martiniere à Lyon (créée par Tabareau, X 1808) et dont le directeur à partir de 1879 était Moïse LANG (X 1860) ; il est peut-être fait référence à Charles Romain LAN, mais celui-ci fut directeur de l'Ecole des mines en 1884-1885, donc 5 ans après les faits.]. Cinq ans après son arrivée, on lui proposa le poste de Directeur général des Aciéries, mais il déclina cette situation qui l'aurait attaché pour l'avenir à Alexandrowsky et, fort de l'expérience acquise et de la formation obtenue à une difficile école, il revint en France où il entra aux Fonderies de Terrenoire. Mais bientôt il était appelé, en raison de sa connaissance de l'industrie en Russie, à l'administration d'affaires russes qui avaient été créées et avaient leur siège a Lyon. C'est ainsi qu'il fut nommé administrateur de la Société des Forges de la Kama et de la Société des Houillères de Berestow-Krinka. Il revint à Lyon où il s'établit, tout en faisant de longs et fréquents séjours en Russie aux sièges des exploitations de ces Sociétés, sa conscience professionnelle lui ayant prouvé qu'il était indispensable pour un administrateur de garder un contact étroit avec l'exploitation par des visites régulières aux centres des entreprises. Ses qualités d'administrateur et d'ingénieur, sa personnalité qui s'imposait, le firent rapidement remarquer et sa collaboration fut précieusement recherchée. Il participa à la création des affaires de production et de distribution d'énergie électrique de la région du Sud-Est et fut un des agents de leur rapide développement ; il entra dans le Conseil d'administration de la Société des Forces motrices du Rhône, où pendant 25 ans, il assuma les fonctions de secrétaire, puis vice-président ; de la Société Générale de Force et Lumière, de la Société de Transport d'Energie électrique des Alpes, de la Société des Forces Motrices de la Haute-Isère, etc.. Enfin, appelé en 1894 au Conseil d'administration de la Société Horme et Buire, au moment où cette Société traversait une période difficile, il y employa une grande partie de son activité comme administrateur, puis comme président.

Sa haute intelligence, sa loyauté et la rectitude de son jugement le firent justement apprécier et écouter de ses pairs ; c'est ainsi qu'il prit dans toutes les affaires auxquelles il se consacra, une place prépondérante et qu'il occupa à Lyon une situation de premier plan dans le monde industriel. Toujours sur la brèche, il ne s'arrêtait devant aucun effort ; aucune difficulté ne le rebutait. S'il avait toujours devant les yeux la vision du progrès technique à accomplir et si, par suite, il travaillait à mettre ses entreprises à la tête des industries similaires, il s'attachait avant tout à leur acquérir cette réputation d'honnêteté, de loyauté qui, pour lui, était primordiale, tellement était inné en lui le sentiment de la justice et de l'équité.

Nous serions incomplet et sa mémoire serait très infidèlement honorée si nous nous attachions seulement à rapporter sa carrière d'administrateur. Il considérait, en effet, les affaires non comme un but mais un moyen; celui de servir. Il était avant tout un homme de devoir, et ce devoir il l'accomplissait naturellement dans sa profession, mais aussi dans tous les actes de sa vie et vis-à-vis de tous ; d'une bonté toujours égale, d'une extrême affabilité, il connaissait la façon discrète d'exercer toutes les charités comme les siens lui avaient enseigné. De sa personne rayonnait un charme mystérieux, signe des grands chrétiens qui ont compris le problème de la destinée humaine et qui traduisent leur foi en actes. Douloureusement frappé les derniers temps de sa vie par des deuils cruels, il accepta l'épreuve sans faiblir et quand une longue et douloureuse maladie vint le terrasser, il vit venir la mort et l'accepta avec le calme surhumain de l'homme qui, bon serviteur, ayant achevé le travail de la journée, s'endort le soir sans crainte, dans l'espérance de la récompense du lendemain.

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Henri Martin (promotion 1913 de l'Ecole des mines de Paris).